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Le Pacs toujours à la traîne en Polynésie


Tahiti, le 15 mai 2021 – Vingt-deux ans après sa création en métropole, le Pacs n’est toujours pas applicable en Polynésie déplore l’association Cousin Cousine, dénonçant dans un courrier au ministre de l’Outre-mer, une "situation discriminatoire". En copie de la lettre, le député de Charente Maritime, Raphaël Gérard, a lui aussi interpellé le ministre dans une question écrite.
 
"C’est en 1999 que le Pacs est né en France", rappelle Karel Luciani, président de l’association LGBTQI Cousins Cousines de Tahiti, dans un courrier au ministre de l’Outre-mer. Vingt-deux ans plus tard, le pacte civil de solidarité s’est envolé en métropole, tandis que ses dispositions se font attendre au fenua. "Il y a eu des annonces en 2015 et puis plus rien", déplore le président de l’association.

"À ce jour, il n'y a toujours pas de communication publique sur cette question ni de calendrier établi. Les représentants des groupes politiques majoritaires, des personnalités, ainsi que de l'État dans notre collectivité restent depuis trop longtemps discret sur la concrétisation de l'application de cette loi en Polynésie française", regrette le responsable. Un manque de volonté qui s’apparente presque à de "l’homophobie", selon lui, et notamment de la part des autorités locales.

Union légalement reconnue, le Pacs séduit pourtant une très grande majorité de couples… hétérosexuels, comme en témoignent les chiffres de l’Insee. Sur plus de 400 000 unions, près de la moitié se porte sur les pactes civils de solidarité (Pacs), dont à peine 4% concernent des personnes de même sexe. Et s’il a le vent en poupe, c’est bien parce qu’il est moins contraignant que le mariage. Certes il impose une obligation de vie commune, mais sans aucune sanction en cas de faute, contrairement aux couples mariés. Il permet surtout de bénéficier d’une meilleure protection mutuelle et d’importants avantages sociaux et fiscaux. Et à la différence d'un divorce, une rupture de Pacs peut aller très vite.

"Régulièrement déclaré en France ou dans un consulat français, en fonction du domicile commun des partenaires, le Pacs produirait ses effets en Polynésie, notamment en matière d’indivision ou concernant des dispositions issues de lois relatives à la fonction publique", justifie le président de l’association. 

Une situation "génératrice d’insécurité"

En copie de la lettre, le député de Charente Maritime, Raphaël Gérard, lui-même homosexuel et marié avec son compagnon, s’est saisi du sujet, relayant la demande sous forme de question écrite mardi 11 mai au ministre. "Le Conseil constitutionnel a estimé dans sa décision n° 2015-9 LOM du 21 octobre 2015 que la création d'un contrat spécifique conclu par deux personnes physiques majeures en vue d'organiser leur vie commune relevait de la compétence exclusive de la Polynésie française", a souligné le député. À cet effet, il interpelle le ministre, à savoir "s'il compte initier un dialogue avec les élus polynésiens afin d'envisager la possibilité d'étendre son application sur le territoire polynésien". D’autant que "cette situation est génératrice d’insécurité pour les couples non mariés, notamment en matière de succession", précise le député.

Paradoxalement, la loi dite "sur le mariage pour tous" s’applique de plein droit en Polynésie, "alors que les parlementaires polynésiens ont tous fait valoir leur opposition à cette loi", faisait remarquer en 2014 Marie-Noël Capogna, alors maître de conférences de Droit privé à l’UPF, dans un article intitulé La légalisation du couple de même sexe : réflexions sur les raisons d’une résistance en Polynésie française.

Une résistance que l’association a bien saisie. "Nous ne pouvons que dénoncer à nouveau cette situation ô combien discriminatoire au sein de la République française et nous en appelons à votre haute responsabilité pour une finalisation rapide", termine Karel Luciani, désormais suspendu à la réponse l’assemblée nationale.
 

Rédigé par Esther Cunéo le Dimanche 16 Mai 2021 à 18:59 | Lu 1637 fois