Tahiti Infos

Le Heiva Taure’a comme support pédagogique au collège de Afareaitu


Moorea, le 7 mars 2023 - Une cinquantaine d’élèves du collège d’Afareaitu sont attendus sur la scène de To’ata vendredi pour le Heiva Taure’a 2023. Leur spectacle de chants et danses s’inspire de la légende de la pieuvre Taumata-fee-faatupu-hau et a donné lieu à un travail pédagogique axé sur la valorisation du patrimoine culturel et le renforcement de la construction identitaire des élèves.    

Le collège d’Afareaitu participe pour la troisième fois au Heiva Taure’a. Une cinquantaine d’élèves est attendue sur la scène de To’ata, vendredi soir. Un rendez-vous que prépare ce groupe de collégiens avec l’appui de l’établissement scolaire depuis le mois de novembre dernier. Le spectacle de chants et danses pour leur prestation s’inspire cette année de la légende de la pieuvre Taumata-fee-faatupu-hau. Le thème a été choisi lors d’un concours du meilleur thème organisé durant l’année scolaire 2021-2022. Pour peaufiner leur prestation, les enseignants, en reo tahiti notamment, se sont fait épauler par des intervenants culturels du collège et bien sûr par les parents pour la confection des costumes. Mais la préparation de ce spectacle a surtout été l’occasion d’un travail pédagogique transversal mis en œuvre dans les diverses matières scolaires, comme en témoigne Rahiti Buchin, enseignant de reo tahiti, de français et référent pour l’enseignement du reo tahiti : “Toutes les matières sont venues se greffer à notre préparation pour ce Heiva Taure’a. On a travaillé par exemple sur notre thème en anglais et en français. Les élèves de CPAP [Certificat polynésien d’aptitude professionnelle, NDLR] ont par exemple réalisé la maquette du fe’e (pieuvre). Quant aux parents, ils sont venus nous aider pour la réalisation des costumes. C’est un moyen de rétablir la connexion et la communication avec eux. On a aussi nos deux intervenants extérieurs avec qui on travaille depuis 4 ou 5 ans à savoir Ruupena Tere, qui enseigne les percussions traditionnelles à nos élèves, ainsi que Manina Maitia, qui s’occupe de la danse. On a une sacrée équipe.” Lors de sa dernière participation au Heiva Taure’a, le collège de Afareaitu avait gagné le concours de meilleur orchestre. “On s’est donné cette fois-ci les moyens pour essayer d’être sur la plus haute marche du podium. On y va en toute modestie pour gagner”, assure l’enseignant.

Projet pédagogique

Événement majeur pour l’établissement scolaire du second degré de Moorea, le Heiva Taure’a s’inscrit surtout dans une volonté de valoriser le patrimoine et de renforcer la construction identitaire des élèves à travers différents projets culturels au sein de l’établissement. “Le collège d’Afareiatu est situé dans un lieu hautement culturel qui est chargé d’histoires et de richesses linguistiques. En utilisant justement toute cette richesse culturelle, on a mis en place depuis plusieurs années des projets qui valorisent vraiment le volet ‘patrimoine’, le volet ‘langues’ ainsi que le volet ‘identitaire’. On a créé, par exemple, des Classes patrimoine dans lesquelles nos élèves bénéficient d’un volume de 14 à 18 heures d’enseignement de percussions traditionnelles et de la danse tahitienne. On a aussi lancé des classes bilingues dont deux en 6e, deux en 5e, deux en 4e. On en aura également deux en 3e l’année prochaine. Ce qui est intéressant, c’est que les élèves de ces classes suivent des cours d’EPS [Éducation physique et sportive, NDLR], d’histoire-géographie ou encore de mathématique en reo tahiti. Nous sommes les seuls à mettre cela en place en Polynésie”, se félicite aussi Rahiti Buchin qui considère cet enseignement culturel comme un élément essentiel à la réussite scolaire des élèves : “On ne part pas d’un postulat, mais sur des études qui ont prouvé que quand un enfant est bien dans son identité et ses racines, il est plus à même de s’ouvrir à l’extérieur. Souvent, on ouvre nos enfants à l’extérieur alors qu’ils ne sont pas ouverts à eux-mêmes d’abord. Il s’agit donc de leur montrer qui ils sont, de travailler sur leur identité et de faire en sorte qu’ils apprennent l’environnement ainsi que le nom, en reo tahiti, de tout ce qui les entoure. Ce sont des thèmes qui les intéressent.”

Parole à...

Imivai Mahuta
Élève en 3e Va’a et ra’atira des danseuses


“On m’a confié le rôle de ra’atira parce que j’ai du caractère et les filles m’écoutent plutôt bien. Mon rôle dans le groupe consiste surtout à recadrer les filles quand quelque chose ne va pas ou quand elles commencent à trop jouer. Je fais aussi en sorte qu’elles s’impliquent dans leurs gestes. Je pratique le ‘ori tahiti depuis quelques mois dans une école de danse à Ha’apiti. Dans l’ensemble, les filles n’ont pas vraiment fait de danse auparavant. Je leur donne par exemple des conseils sur les pas. Les recrutements ont été faits par nos intervenants culturels. Notre thème de cette année est Taumata-fee-faatupu-hau qui est la pieuvre d’Opunohu. Je suis très heureuse et très fière de participer à ce projet pour le Heiva Taure’a. Et j’espère vraiment que nous allons gagner au moins quelque chose et pourquoi pas le premier prix. Les répétitions sont parfois dures parce que les danseurs peuvent ressentir de la fatigue. Les musiciens aussi sont vraiment fatigués. C’est très physique.”

Lee-Hana Hoiore
Élève en 5e bilingue, ra’atira et oratrice du groupe


“Notre préparation pour le Heiva Taure’a se fait uniquement en langue tahitienne. On s’exprime exceptionnellement en français pour les élèves qui ne comprennent pas le reo. On m’a confié le rôle de ra’atira de groupe parce que les professeurs savent qu’on peut me faire confiance et me donner cette responsabilité. Les gestes et les pas de danses ont été essentiellement créés et imaginés par les élèves. Les chants ont, par contre, été composés par des élèves de 3e option Reo tahiti, l’année dernière. C’était dur au début d’endosser ce rôle de ra’atira parce que les autres disaient que je suis plus petite et plus jeune qu’eux. Ils ont compris petit à petit qu’il faut écouter la raatira. Les élèves sont aussi impliqués dans le groupe des enseignants lorsqu’il faut faire par exemple des petites réunions pour les costumes ou le déroulement de notre spectacle. J’espère qu’on va réussir à interpréter notre prestation comme il faut à To’ata et qu’on sera bien prêt. J’espère qu’on gagnera quelque chose.”

Hikomana A Opuu
Élèves de 5e, raatira rohi pehe


“Mon rôle en tant que ra’atira rohi pehe est de mener le groupe de musiciens. On m‘a confié ce rôle parce que je suis bon dans ce domaine. Je sais jouer tous les instruments comme le 'ere, le tariparau ou le fa’akete. J’ai commencé à apprendre à jouer à l’âge de 4 ans avec  Ruupena Tere et mon papa. Les autres musiciens savent aussi jouer ; mais pas depuis longtemps comme moi. C’est un peu dur de les diriger parce qu’ils manquent de concentration. Nos prestations musicales sont prêtes. J’espère qu’on va gagner tous les prix au Heiva Taure’a. On y va pour gagner. Je suis confiant parce qu’on est sérieux aux répétitions.”

Rédigé par Toatane Rurua le Mardi 7 Mars 2023 à 16:27 | Lu 1220 fois