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Le CESC approuve les 3 projets de loi du pays relatifs au statut des marins pêcheurs et à l'habitat social dispersé


Le CESC approuve les 3 projets de loi du pays relatifs au statut des marins pêcheurs et à l'habitat social dispersé
Le Conseil économique, social et culturel a tenu mardi matin sa première assemblée plénière de l’année 2011. Plus d’une quarantaine de conseillers a répondu à l’invitation de leur présidente, signifiant ainsi leur intérêt particulier pour les sujets inscrits à l’ordre du jour.
Trois projets d’avis ont été examinés et soumis à l’adoption des membres présents.
De nombreuses personnalités et invités ont assisté à cette séance qui s’est prolongée jusqu’en fin de journée.


Les rapporteurs (de gauche à droite) : messieurs Makalio FOLITUU et Roland OLDHAM
Les rapporteurs (de gauche à droite) : messieurs Makalio FOLITUU et Roland OLDHAM
1-Projet d’avis relatif au projet de ‘loi du pays’ portant modification de l’article 77 de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux du droit du travail et à l’organisation du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française :
La pêche devrait constituer une activité économique et sociale de première importance en Polynésie française.
Les résultats médiocres du secteur de la pêche hauturière ont mis en évidence la désorganisation complète de la filière de pêche et la déficience du régulateur (le Pays).
Parmi les lacunes structurelles attachées à la politique publique de développement, on retrouve en particulier l’absence d’un statut propre et de formation adaptée au métier de marin pêcheur.
L’objectif principal soutenu par le gouvernement au travers du projet de « loi du pays » proposé est de prendre en compte les spécificités du travail des salariés marins pêcheurs en Polynésie française au regard du régime commun du droit du travail applicable en Polynésie française. Il vise notamment à préciser les droits des marins pêcheurs et à faire accéder ceux-ci au régime général des salariés (RGS).
A défaut, les marins pêcheurs polynésiens resteront assujettis aux règles du droit commun du travail applicables à l’ensemble des salariés, inadapté à plus d’un titre aux réalités de ce métier. Pour exemple, le mode de rémunération à la part de pêche.
Il y a lieu de noter que le projet de statut du marin pêcheur et les règles définissant les principes et conditions d’emploi ne sont applicables qu’aux seuls pêcheurs côtiers et hauturiers.
Le projet de « loi du pays » détermine et réglemente ainsi les principes et conditions d’emploi spécifiques au salarié marin pêcheur en Polynésie française, notamment en ce qui concerne le recrutement, la suspension de contrat, la durée du travail et le repos, les rémunérations et congés payés, le droit disciplinaire, la rupture du contrat à durée indéterminée, la représentation du personnel, la santé et sécurité.
Parmi les recommandations émises sur les principes et conditions précitées, on retiendra principalement que :
- Dans le cadre de la rémunération de l’équipage, un arrêté pris en conseil des ministres déterminera les éléments pris en compte dans les charges communes, les dépenses et charges imputables à l’armateur, les modalités de répartition de la recette nette et les modalités de calcul de la part équipage. Le CESC préconise de veiller à la bonne application des modalités de partage des charges et de la recette nette. Les modalités de répartition de la recette nette devront tenir compte du fait que l'armateur peut faire partie de l'équipage.
- Sur le principe d’un salaire plancher sectoriel garanti intitulé « salaire plancher pêche » mensualisé et calculé sur la base du douzième de la durée légale du travail du marin pêcheur : le CESC constate qu’aucun critère objectif n’a été défini dans le projet de texte ou même porté à sa connaissance durant ses travaux. Il recommande que ces critères soient définis dans une règlementation par les pouvoirs publics en concertation avec les professionnels du secteur et les partenaires sociaux. Il préconise que l’ancienneté soit prise en compte pour la détermination du salaire. Une réflexion à venir doit être menée sur la mise en place d'une grille salariale du secteur de la pêche, qui tienne compte du niveau de compétences et du poste occupé par les marins pêcheurs sur le navire.
- Sur le principe des congés payés, le CESC préconise que l’indemnité de congés payés ne soit pas comprise dans la part de pêche ou dans le « salaire plancher pêche », mais qu’elle vienne s’y ajouter.
- Sur le droit disciplinaire, l’indemnité minimum de licenciement prévue est fixée à 5% de la rémunération moyenne perçue au cours des 12 derniers mois de l’engagement à durée indéterminée, par année d’ancienneté. Constatant que le taux de 5% est moins avantageux que dans le droit commun applicable aux salariés (10%), le CESC propose de relever le taux à 10%.



La rapporteure : madame Lucie TIFFENAT
La rapporteure : madame Lucie TIFFENAT
En conclusion, le CESC considère que l’instauration d’un statut de marin pêcheur est un facteur indispensable dans la valorisation du métier et constitue une étape incontournable dans la structuration de la production.
Toutefois, il n’aboutira à aucun résultat s’il ne s’inscrit pas dans une démarche stratégique cohérente et s’il n’est pas associé à d’autres mesures visant à réorganiser et redresser la filière dans son ensemble, au risque de pénaliser le secteur. Cette démarche doit s’appuyer sur une volonté politique forte.
Le CESC regrette que cette stratégie pour le redressement de la filière ne soit pas évoquée (programme d’actions, priorités et calendrier) et que le statut du marin pêcheur ne s’articule pas avec d’autres mesures.
En effet, sa réussite est consubstantielle à d’autres facteurs : l’organisation de la production, de la transformation et de la commercialisation ; la régulation du prix de vente du poisson, des marges et de la concurrence ; la gestion de la trésorerie et la création d’un fonds d’aide ; la modernisation des techniques ; la production de Chanos chanos, etc.
Sur la base de ces éléments, le CESC émet un AVIS FAVORABLE au projet de « loi du pays » soumis, adopté par 32 voix pour, 5 voix contre et 4 abstentions.
2-Projet d’avis relatif au projet de ‘loi du pays’ portant modification des conditions d’affiliation des marins pêcheurs au régime des salariés de la CPS de la Polynésie française et création d’un dispositif transitoire :
L’objectif soutenu par le projet de « loi du pays » proposé est d’intégrer les marins pêcheurs hauturiers dans le régime général des salariés compte tenu des enjeux mis en évidence :
- assurer une couverture sociale professionnelle complète aux marins pêcheurs au même titre que les autres professions salariées. Aujourd’hui, l’inscription des marins pêcheurs au régime de solidarité (RSPF) les prive de droits à la retraite et des prestations en cas d’accident du travail ;
- permettre une régularisation administrative des armements actuellement susceptibles d’être condamnés pour délit de travail clandestin ;
- permettre au régime général des salariés (RGS) de bénéficier de cotisations supplémentaires ;
- transférer les charges financières indûment versées par le RSPF vers les autres régimes. L’incidence financière est estimée à environ 70 millions de F CFP en considérant la moyenne des prestations servies aux ressortissants du RSPF.


Les rapporteurs (de gauche à droite) : messieurs Félix FONG et Joseph CHAUSSOY
Les rapporteurs (de gauche à droite) : messieurs Félix FONG et Joseph CHAUSSOY
Le projet de texte prévoit également la mise en place d’un dispositif transitoire (10 ans) de prise en charge dégressive des cotisations patronales et salariales par le pays, afin de ne pas mettre en péril les armateurs exploitants du secteur et de ne pas faire peser une charge supplémentaire sur les salariés.
Au titre de ses recommandations, le CESC préconise notamment :
- qu’en cas de prise de congés par le salarié marin pêcheur, les modalités de calcul du nombre de jours de mer pour déterminer l'équivalence en nombre des jours de congés pris par le salarié, doivent être précisément définies dans le statut du marin pêcheur.
- de ne pas déroger à l’article 33 de la délibération n°91-26 AT du 18 janvier 1991 modifiée, prévoyant que les dispositions normalement applicables aux employeurs pour la formation continue des salariés, ne soient pas applicables aux employeurs du secteur de la pêche hauturière.
- que les cotisations des employeurs et des salariés du secteur de la pêche hauturière soient assises sur la totalité des salaires, au même titre que les autres secteurs professionnels et en respectant les plafonds déterminés par la règlementation en vigueur. En effet, il est prévu que durant les 10 premières années suivant l’entrée en vigueur de la « loi du pays » proposée, les cotisations des employeurs et des salariés du secteur de la pêche hauturière soient assises sur le « salaire plancher pêche » et sur le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) pour le régime de retraite de base des retraites.
- de vérifier que la prise en charge par le Pays d’un pourcentage du montant des cotisations patronales et salariales dues par l’employeur à la CPS au titre des risques maladie-invalidité, accident du travail-maladie professionnelle, et au titre de la retraite de base s’appliquant par dérogation au seul secteur de la pêche hauturière ne constitue pas, d’un point de vue juridique, un fait de rupture d’égalité à l’égard des autres secteurs.

Considérant que la création d’un statut et l’intégration des marins pêcheurs au régime général des salariés (RGS) constitue une mise en ordre des choses, le CESC émet un AVIS FAVORABLE au projet de texte transmis. Par 29 voix pour, 2 voix contre et 3 abstentions, l’avis favorable a été validé.
3-Projet d’avis sur le projet de ‘loi du pays’ portant modification de la délibération n° 99-217 du 2 décembre 1999 modifiée relative à l’habitat social en Polynésie française :
Le projet de "loi du pays" vise à cesser de maintenir durablement une situation d’infraction budgétaire, donc une irrégularité, voire une illégalité ayant des répercussions fâcheuses en matière d’habitat social dispersé.
Il tend à modifier la règlementation en vigueur en prévoyant qu’en matière d’habitat dispersé les bénéficiaires ne se verraient plus attribuer une aide en nature mais une aide financière destinée à la construction d’un logement. Ce mécanisme permettrait d'adapter la règlementation budgétaire pour permettre l'attribution d'aides financières pour la construction en habitat dispersé sans obligation d'inscrire le bien réalisé à l'inventaire du patrimoine du Pays.
Plutôt que d’inscrire ces subventions en fonctionnement, ce que l’état des finances du Pays ne permettrait qu’au prix d’une augmentation insupportable des prélèvements fiscaux ou d’une diminution drastique et peu probable de ses dépenses de fonctionnement autres, le gouvernement fait donc le choix de maintenir ces subventions en section d’investissement, section plus souple à alimenter notamment par le recours à l’emprunt, procédé impossible en fonctionnement.
Le Conseil observe notamment :
- qu’il existe environ 867 dossiers de demande d’habitat social en habitat dispersé en souffrance et estime qu’il faudrait s’atteler en priorité à l’apurement de ceux-ci.
- que la rédaction du projet de texte est trop peu claire et suscite la confusion dans l’esprit du lecteur. A titre d’exemple, l’article 64 prévoit des aides au logement et des aides financières. Il serait judicieux d’identifier clairement quel régime s’applique à quel type d’aide. De même il y a lieu de bien distinguer l’intitulé et les prérogatives des commissions : commission d’attribution administrative, commission administrative.
- que le texte impose que toute commission d’attribution soit composée de 2 représentants de l’APF et s’interroge sur le fait de savoir si cette obligation concerne également la commission administrative.
- qu’il conviendrait de retirer toutes les personnalités politiques composant la commission administrative pour éviter tout risque de clientélisme. Il serait plus judicieux de ne plus avoir recours aux commissions mais d’établir des quotients sociaux faisant intervenir des critères objectifs.
- qu’il est favorable à l’entrée sur le marché du logement social (collectif ou dispersé) d’opérateurs privés, dans la mesure où ils seraient capables de fonctionner sans uniquement des subventions publiques, tel que cela se pratique en Nouvelle-Calédonie par l’intermédiaire du Fonds Social de l’Habitat, organisme mutualiste géré par les partenaires sociaux.


Parmi les personnalités présentes : la ministre de la solidarité, madame Teura IRITI, la directrice du FDA, madame Patricia LICHON, le directeur de l’OPH, monsieur Marcel TUIHANI
Parmi les personnalités présentes : la ministre de la solidarité, madame Teura IRITI, la directrice du FDA, madame Patricia LICHON, le directeur de l’OPH, monsieur Marcel TUIHANI
En conclusion, indépendamment des réserves que les membres du CESC émettent sur l'efficacité des diverses politiques en matière de logement social et du manque de performance des structures chargées de leur mise en œuvre, le projet de "loi du pays" permet de lever les blocages budgétaires qui existent en matière de financement du logement social en habitat dispersé.
Cette mesure permettra de débloquer les dossiers demeurant en souffrance mais surtout de poursuivre le programme de construction des logements sociaux en habitat dispersé.
En conséquence, le CESC émet un AVIS FAVORABLE au projet de ‘loi du pays’ adopté par 16 voix pour, 5 voix contre, et 7 abstentions.

Parmi les personnalités présentes : la ministre de la solidarité, madame Teura IRITI, la directrice du FDA, madame Patricia LICHON, le directeur de l’OPH, monsieur Marcel TUIHANI

Rédigé par communiqué du CESC le Mercredi 19 Janvier 2011 à 15:48 | Lu 1132 fois