Père du très vert "Pentagone à la française", l'architecte Nicolas Michelin imagine des solutions climatiques pour les villes de demain et estime que sa profession doit être davantage présente dans la lutte contre le réchauffement.
A lui seul, le secteur du bâtiment représente 32% de la consommation énergétique mondiale et 19% des émissions de gaz à effet de serre (respectivement 40% et 36% en Europe). Comment enrayer le mouvement, dans des villes toujours plus grandes et plus peuplées?
Pour le nouveau siège du ministère français de la Défense, Nicolas Michelin a construit un complexe gigantesque avec ventilation naturelle via des cheminées d'air, récupération de la chaleur des data centers, et le plus grand toit solaire de Paris (5.000 m2!).
Dans les villes, la priorité serait de "renoncer aux +ruptures+: arrêter de démolir, car il n'y a rien de plus calamiteux en termes d'émissions de GES que de reconstruire. Et que faire des déchets?", explique cet urbaniste de 61 ans, très engagé dans les questions environnementales.
"Aux projets de s'adapter au site et non l'inverse, il faut travailler sur +le déjà là+. La manière dont les gens ont pris possession des lieux pendant des centaines d'années, ce n'était pas par hasard!, souligne l'architecte français.
"Mais cela implique une attitude plus humble : pas un urbanisme du spectaculaire, mais un ordinaire où il fait bon vivre. Voilà qui serait le départ d'+une attitude COP22+, responsable!"
Beaucoup de bâtiments pourraient se passer de climatisation : "En +attrapant le vent+. Il y a plein d'énergie autour de nous : la lumière, le vent, la fraîcheur du sol", rappelle-t-il.
Aujourd'hui l'attention se focalise excessivement sur l'isolation. "Il faut arrêter de vouloir des +bâtiments thermos+, avec des fenêtres bien fermées, et préférer aux immeubles autonomes en énergie des quartiers autonomes où s'échangerait l'énergie."
Mixons logements, bureaux, commerces dans les bâtiments, pour la récupération et le partage de chaleur, prône-t-il.
Les progrès technologiques sont constants, et peuvent en partie répondre au problème.
"Le soleil est l'énergie de demain", estime M. Michelin : "Les capteurs et les batteries ont fait énormément de progrès, avec de très bons rendements, et aujourd'hui on peut stocker l'énergie solaire, ou éolienne, et l'utiliser en direct ! C'est une révolution formidable."
Son agence vient d'achever à Paris une cité universitaire capable de faire du stockage intersaisonnier : on stocke le surplus d'énergie de l'été pour l'hiver. "La ville de demain partagera son énergie !", dit-il.
Les gratte-ciel, eux, sont un cas compliqué, car très énergivores pour les ascenseurs, la sécurité, le désenfumage, explique l'architecte. "On ne peut ouvrir les fenêtres à partir d'une certaine hauteur... Donc il y a de la climatisation. Or monter de l'eau chaude ou froide là-haut, ce n'est pas rien!"
"Il y a eu quelques tentatives de gratte-ciel verts. On a aussi étudié la possibilité de travailler par blocs autonomes. La hauteur est une solution, mais je ne sais pas si la +grande hauteur+ (plus de 50 m) est l'avenir, en Europe au moins."
Plusieurs organisations d'architectes se sont réunies à Marrakech au début de la COP22, la conférence de l'ONU sur le climat.
Nicolas Michelin - qui n'y participait pas - insiste sur le rôle que lui et ses confrères peuvent jouer dans la lutte contre le réchauffement.
Il a réalisé en Chine, sur un campus à Nanjing (Nankin), un bâtiment de bureaux à cheminée solaire et puits canadien : on passe des tuyaux à -1 m sous le sol, là où il est à 6° et on y fait descendre l'air chaud. Ses interlocuteurs ne connaissaient pas ces techniques, dit-il.
"On a notre rôle à jouer dans les COP! Mais nous sommes encore trop peu à parler, sur l'urgence du climat comme sur l'urgence sociale du logement ou sur la baisse de qualité des constructions au profit de projets spectaculaires."
"Quand l'Etat fait un bâtiment, souvent il veut une signature, un objet, l'architecte artiste", regrette-t-il. "Oui, nous avons une dimension créatrice, mais nous sommes d'abord là pour faire la synthèse des impératifs, résoudre les problèmes des villes et, au final, faire que les gens vivent bien."
avec AFP
A lui seul, le secteur du bâtiment représente 32% de la consommation énergétique mondiale et 19% des émissions de gaz à effet de serre (respectivement 40% et 36% en Europe). Comment enrayer le mouvement, dans des villes toujours plus grandes et plus peuplées?
Pour le nouveau siège du ministère français de la Défense, Nicolas Michelin a construit un complexe gigantesque avec ventilation naturelle via des cheminées d'air, récupération de la chaleur des data centers, et le plus grand toit solaire de Paris (5.000 m2!).
Dans les villes, la priorité serait de "renoncer aux +ruptures+: arrêter de démolir, car il n'y a rien de plus calamiteux en termes d'émissions de GES que de reconstruire. Et que faire des déchets?", explique cet urbaniste de 61 ans, très engagé dans les questions environnementales.
"Aux projets de s'adapter au site et non l'inverse, il faut travailler sur +le déjà là+. La manière dont les gens ont pris possession des lieux pendant des centaines d'années, ce n'était pas par hasard!, souligne l'architecte français.
"Mais cela implique une attitude plus humble : pas un urbanisme du spectaculaire, mais un ordinaire où il fait bon vivre. Voilà qui serait le départ d'+une attitude COP22+, responsable!"
Beaucoup de bâtiments pourraient se passer de climatisation : "En +attrapant le vent+. Il y a plein d'énergie autour de nous : la lumière, le vent, la fraîcheur du sol", rappelle-t-il.
Aujourd'hui l'attention se focalise excessivement sur l'isolation. "Il faut arrêter de vouloir des +bâtiments thermos+, avec des fenêtres bien fermées, et préférer aux immeubles autonomes en énergie des quartiers autonomes où s'échangerait l'énergie."
Mixons logements, bureaux, commerces dans les bâtiments, pour la récupération et le partage de chaleur, prône-t-il.
- 'Le soleil, énergie de demain' -
Les progrès technologiques sont constants, et peuvent en partie répondre au problème.
"Le soleil est l'énergie de demain", estime M. Michelin : "Les capteurs et les batteries ont fait énormément de progrès, avec de très bons rendements, et aujourd'hui on peut stocker l'énergie solaire, ou éolienne, et l'utiliser en direct ! C'est une révolution formidable."
Son agence vient d'achever à Paris une cité universitaire capable de faire du stockage intersaisonnier : on stocke le surplus d'énergie de l'été pour l'hiver. "La ville de demain partagera son énergie !", dit-il.
Les gratte-ciel, eux, sont un cas compliqué, car très énergivores pour les ascenseurs, la sécurité, le désenfumage, explique l'architecte. "On ne peut ouvrir les fenêtres à partir d'une certaine hauteur... Donc il y a de la climatisation. Or monter de l'eau chaude ou froide là-haut, ce n'est pas rien!"
"Il y a eu quelques tentatives de gratte-ciel verts. On a aussi étudié la possibilité de travailler par blocs autonomes. La hauteur est une solution, mais je ne sais pas si la +grande hauteur+ (plus de 50 m) est l'avenir, en Europe au moins."
Plusieurs organisations d'architectes se sont réunies à Marrakech au début de la COP22, la conférence de l'ONU sur le climat.
Nicolas Michelin - qui n'y participait pas - insiste sur le rôle que lui et ses confrères peuvent jouer dans la lutte contre le réchauffement.
Il a réalisé en Chine, sur un campus à Nanjing (Nankin), un bâtiment de bureaux à cheminée solaire et puits canadien : on passe des tuyaux à -1 m sous le sol, là où il est à 6° et on y fait descendre l'air chaud. Ses interlocuteurs ne connaissaient pas ces techniques, dit-il.
"On a notre rôle à jouer dans les COP! Mais nous sommes encore trop peu à parler, sur l'urgence du climat comme sur l'urgence sociale du logement ou sur la baisse de qualité des constructions au profit de projets spectaculaires."
"Quand l'Etat fait un bâtiment, souvent il veut une signature, un objet, l'architecte artiste", regrette-t-il. "Oui, nous avons une dimension créatrice, mais nous sommes d'abord là pour faire la synthèse des impératifs, résoudre les problèmes des villes et, au final, faire que les gens vivent bien."
avec AFP