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La fondation Jean Jaurès présente sa vision d'une Corse autonome dans la République


Crédit Pascal POCHARD-CASABIANCA / AFP
Crédit Pascal POCHARD-CASABIANCA / AFP
Ajaccio, France | AFP | lundi 11/12/2023 - Ni "statut de résident" ni co-officialité" de la langue corse avec le français: la fondation Jean Jaurès a publié lundi un rapport sur la manière dont la Corse pourrait gagner en autonomie tout en restant dans la République française, écartant deux revendications des nationalistes.

Intitulé "un compromis pour la Corse", le rapport de 42 pages de ce cercle de réflexion proche de la gauche juge qu'"une Corse autonome dans la République française", comme l'a appelé de ses voeux le président Emmanuel Macron fin septembre à Ajaccio, "passe bien sûr par la reconnaissance de la spécificité corse dans la Constitution" mais aussi "par une loi organique (donnant) un contenu à cette reconnaissance".

Ce texte rappelle que "depuis 1982, c'est la gauche" et particulièrement Gaston Defferre, Michel Rocard, Pierre Joxe, Lionel Jospin, Manuel Valls et Jean-Michel Baylet, "qui ont consacré et fait évoluer un statut particulier pour la Corse".

Pour autant, "avec les îles grecques, la Corse est le seul territoire insulaire de Méditerranée à ne pas bénéficier d'un statut a minima d'autonomie", poursuit la fondation, selon qui cette évolution nécessitera "une capacité d'initiative législative hors du domaine régalien". Mais "ces nouvelles compétences devront être ambitieuses et en lien avec la vie quotidienne des Corses", avertit le rapport.

Cela passera "par une fiscalité propre à la Corse, corollaire de la responsabilité", qui permettrait "la reconnaissance des spécificités géographiques, économiques et sociales de la Corse". 

Pour autant, "l'autonomie ne doit pas être le prétexte d'un désengagement de l'Etat", écrivent les trois auteurs du rapport, parmi lesquels un ancien conseiller des Premiers ministres Michel Rocard, Lionel Jospin et Manuel Valls.

Ils affirment ainsi que les "enjeux nationaux, européens et mondiaux se cristallisent aussi en Corse (environnement, souveraineté énergétique, démographie, numérique, inflation, etc.)" et qu'"une région seule ne pourrait financer ces transitions".

Selon la fondation, "des dispositions spécifiques dans les domaines foncier et immobilier" doivent également être prévues "sans créer un statut de résident". La Cour de justice de l'Union européenne (UE) s'est déjà prononcée sur "l'incompatibilité d'un statut de résident avec les traités européens", rappelle-t-elle, précisant qu'"obtenir une dérogation pour la Corse impliquerait une renégociation des traités de l'UE".

"Dérive mafieuse"

Les auteurs préconisent ainsi de "doter la collectivité de Corse d'un droit de préemption afin de limiter la spéculation immobilière et de viser l'effectivité du droit au logement".

Concernant la langue corse, ils recommandent de "reconnaître la langue corse comme un élément fondamental de l'identité culturelle de l'île" et d'assurer "un développement" de son enseignement mais "sans l'impossible co-officialité" chère aux nationalistes insulaires, "source de clivages et d'exclusion de tous les non-locuteurs".

Ils rappellent que d'ores et déjà, cette langue "est enseignée dans l'Education nationale".

Reste une question non traitée dans ce rapport, "mais que nous ne pouvons passer sous silence", précisent les auteurs: "La Corse connaît depuis longtemps une dérive mafieuse qui s'est encore aggravée. Comment concilier plus d'autonomie et plus de respect de l'Etat de droit ?", s'interrogent-ils.

Pour "Corse-Matin", unique quotidien insulaire, ce rapport ne présente "aucune véritable proposition novatrice".

Le 28 septembre dernier, Emmanuel Macron était venu à Ajaccio clore 18 mois de discussions qui avaient débuté après l'explosion des violences insulaires de 2022, consécutives à la mort du militant indépendantiste Yvan Colonna, agressé en prison où il purgeait une peine à perpétuité pour l'assassinat du préfet Erignac en 1998.

Il avait alors proposé à la Corse "une autonomie dans la République", prévenant que ce "moment historique" ne se ferait pas "sans" ou "contre" l'Etat.

Les nationalistes, qui ont la majorité absolue à l'assemblée de Corse, réclament eux la "reconnaissance juridique du peuple corse", "un statut de co-officialité de la langue corse" et la reconnaissance du "lien entre le peuple corse et sa terre" via "un statut de résident".

le Lundi 11 Décembre 2023 à 04:57 | Lu 420 fois