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La famille Tamarii sculpte un va'a de pierre grandeur nature


Les artisans de la famille Tamarii sont à l’œuvre sur leur sculpture, espérant pouvoir la terminer avant jeudi. Le tiki à droite sera posé verticalement sur le va'a.
Les artisans de la famille Tamarii sont à l’œuvre sur leur sculpture, espérant pouvoir la terminer avant jeudi. Le tiki à droite sera posé verticalement sur le va'a.
PIRAE, le 24 juillet 2018 - Une famille de six sculpteurs de Pirae réalise une œuvre imposante pour rendre hommage aux championnats du monde de va'a. Cette pirogue de pierre devrait être terminée pour la cérémonie de clôture et les artistes espèrent qu'elle restera à Aorai Tini Hau en mémoire de cette grande fête du va'a.

Ces championnats du monde de va'a ont mis l'accent sur l'artisanat polynésien, installant même une tente qui leur est consacrée à destination des délégations étrangères et des visiteurs locaux. On y trouve des robes, des pareo, du monoi ou de la nourriture locale à vendre, mais également beaucoup d'artisans travaillant le bois, la nacre ou la pierre et faisant la démonstration de leur talent aux visiteurs.

Ces génies manuels sont très impliqués dans les cérémonies culturelles qui accompagnent les courses. Ils ont ainsi accueilli les délégations au son des "pahu" et en réalisant les gestes ancestraux. Une famille d'entre eux, les Tamarii, s'est aussi lancée dans un projet bénévole très ambitieux : la sculpture d'une pirogue grandeur nature avec un tiki qui remplacera sa voile. L'un des concepteurs et réalisateurs de cette œuvre est Jérémie Tamarii. Nous l'avons rencontré dans le parking de Aorai Tini Hau, une disqueuse à la main, en train de tracer les grandes lignes du futur va'a.

Jérémie Tamarii, sculpteur

"On veut l'installer mercredi donc là on travaille tous les soirs jusqu'à épuisement"

Que sculptez-vous ?

Nous sommes en partenariat avec les artisans qui font des démonstrations d'arts traditionnels, de sculpture, massage, tatouage, sous le chapiteau de la ville de Pirae. Et nous, dans la continuité de cette grande coupe du monde que nous avons ici à Tahiti, on est en train de terminer la dernière partie d'un projet de va'a. Le tiki est déjà pratiquement fini.

Cela correspond-il à tes travaux habituels ? Laquelle de tes œuvres avons-nous déjà pu voir ?
Me concernant cela fait déjà quelques années que je travaille sur des grosses pièces. Ce que j'ai fait de plus connu est probablement l'autel de la cathédrale de Rikitea. Mais là c'est un projet de toute la famille.

Vous êtes bénévoles sur ce projet ?
Oui, tous bénévoles. Là c'est ma famille, mes frères, mes sœurs, ma maman, là vous voyez ma nièce qui travaille le tiki… On est la famille Tamarii, des sculpteurs de Pirae.

Peux-tu nous parler de votre sculpture ?
Alors c'est un va'a tauati, un double-coques, et le tiki fera la voile. Le va'a c'est de la pierre reconstituée. On a essayé de redonner un peu l'effet de la pierre en utilisant le béton… A cause du manque de temps. On a la semaine des championnats du monde pour le faire, et on s'est focalisés sur une œuvre gigantesque, presque un record du monde. Là on est six à travailler dessus, quatre ici et deux autres sous la tente qui font des démonstrations en ce moment. On veut l'installer mercredi donc là on travaille tous les soirs jusqu'à épuisement !

Depuis quand travaillez-vous sur cette œuvre ?
Oh, depuis l'année dernière j'ai commencé à travailler dessus, sur tout ce qui est la partie conception du projet. Avec mon grand frère on a pris le temps qu'il faut pour tout ce qui est calculs, parce qu'une œuvre comme ça, on ne s'y prend jamais au dernier moment. Il faut être sûr que la sécurité des gens qui vont monter dessus va être assurée, qu'il n'y aura pas de basculement, calculer le centre de gravité du va'a, il faut tout calculer au millimètre. On ne joue pas avec ça ! Artisan c'est compliqué, et souvent les gens ne comprennent pas le prix à la fin. Mais il y a beaucoup de travail sur ces œuvres avant même de commencer la sculpture !

Qu'est-ce que cette œuvre va devenir ?
On ne sait pas encore. Peut-être que quelqu'un ne va pas vouloir la laisser ici à Aorai Tini Hau et l'amener plus loin, on ne sait jamais… Mais on a demandé à la mairie de l'exposer ici au moins pour la première année après le championnat du monde, pour que après la compétition, quand il n'y aura plus rien, il reste au moins ça pour prendre des photos et nous rappeler de l'événement.

Et que penses-tu de la compétition ?
C'est vrai que c'est une compétition, on se focalise sur les courses, les sprints et tout… Mais un va'a, sa vie commence sur la terre avant d'aller sur l'eau. D'abord les arbres, ensuite tous les artisans qui sont là pour construire ces va'a. Là-bas il y a aussi toute une thématique sur la navigation traditionnelle avec le waka. Souvent on entend les speakers parler du bassin Pacifique, le bassin du va'a, c'est très bien.
Mais cette coupe du monde est le moment d'affirmer en tant que Polynésien – moi je suis d'origine marquisienne et je vis à Pirae, à Tahiti – il faut dire que le va'a vient bien d'ici. Là-bas sur le plan d'eau il y a nos athlètes qui sont en train d'envoyer depuis le premier jour pour la même raison !

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Mardi 24 Juillet 2018 à 14:28 | Lu 3358 fois