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La diplomatie française obtient un "sursis" de Pékin pour la filière Cognac


ROMAIN PERROCHEAU / AFP
ROMAIN PERROCHEAU / AFP
Paris, France | AFP | vendredi 28/03/2025 - Le différend commercial avec la Chine sur le cognac français est loin d'être résolu mais Pékin a infléchi sa position en repoussant de trois mois l'application définitive des droits de douane supplémentaires, à l'issue d'une visite du chef de la diplomatie française.

Il s'agit d'un "sursis", a reconnu vendredi Jean-Noël Barrot depuis Shanghai. C'est "une première étape qui devra être suivie d'autres étapes pour (...) mettre définitivement ce différend derrière nous", a-t-il ajouté.

Le ministre français achevait vendredi une tournée en Asie qui l'a conduit à Singapour, Jakarta, Pékin et enfin Shanghai vendredi.

"Le risque auquel était confrontée la filière, jusqu'à hier, c'était l'application définitive à l'issue de la période de l'enquête, qui devait se terminer le 5 avril prochain", a expliqué M. Barrot. 

"A l'issue de cette visite, m'est confirmé que l'enquête est repoussée de trois mois. Ce qui écarte le scénario d'une application brutale de droit définitif sur cette filière", s'est-il félicité.

Les représentants de la filière française ont réagi avec prudence à cette décision.

"L'annonce faite semble repousser à juillet la fin de l'enquête et donc l'application de droits définitifs", a ainsi réagi le Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC) auprès de l'AFP. 

"Mais des droits temporaires nous sont déjà appliqués depuis octobre sous forme de caution", a-t-il déploré.

En outre, l'étau se resserre alors que c'était "la dernière fois que la prolongation de trois mois" pouvait être décidée, a expliqué à l'AFP Anthony Brun, président de l'Union générale des viticulteurs pour l'AOC Cognac (UGVC) et membre du comité permanent du BNIC.

"On le savait. Donc l'objectif reste toujours le même, s'éloigner définitivement de ces sanctions", a-t-il déclaré.

Évoquant un "sentiment partagé", ce responsable veut tout de même voir dans cette annonce un "signal positif" mais il espère surtout un "abandon définitif" des sanctions chinoises.

La filière cognac, qui compte 72.500 emplois en France, est ultra dépendante des exportations, qui représentent 98% de ses ventes, pour un montant de 3,35 milliards d'euros, avec comme premier client les États-Unis (38% des expéditions), devant la Chine (25%).

Les taxes provisoires ont fait chuter de 60% les expéditions de l'alcool charentais vers la Chine depuis quatre mois.

- Premier ministre français en Chine ? -

À l'automne, la Chine avait annoncé l'imposition de "mesures antidumping temporaires" sur les brandys importés de l'Union européenne (UE), dont le cognac, vues comme une riposte à une procédure similaire de Bruxelles sur les subventions aux voitures électriques produites en Chine.

La semaine dernière, la filière du cognac avait exhorté l'État français et l'Union européenne à agir pour la "sauver" de la "catastrophe".

"Il faut absolument que la diplomatie fasse son œuvre", a exhorté Anthony Brun.

Jean-Noël Barrot a martelé que les diplomates allaient continuer à se "mobiliser à Paris comme à Pékin grâce au travail de notre ambassadeur et avec l'ensemble des parties prenantes".

Lors d'un discours devant les ambassadeurs, le 6 janvier dernier, le président Emmanuel Macron avait lui-même souligné que les diplomates continueraient d'être aux côtés de ses producteurs "qui ont subi les mesures de rétorsion".

"Que nos producteurs de cognac et d'armagnac sachent la mobilisation de l'ensemble du gouvernement de la France", avait-il lancé. 

Il avait alors en outre évoqué un déplacement en Chine du Premier ministre de l'époque, Michel Barnier, "pour obtenir l'avancée sur ce sujet".

Celui-ci a été depuis remplacé par François Bayrou à la faveur d'un remaniement. Le voyage en Chine de son successeur n'a jamais été confirmé.

Il n'est pas impossible que le Premier ministre se rende dans les prochains mois en Chine, a indiqué une source diplomatique, précisant que le voyage de Jean-Noël Barrot ne se substituait pas à celui qui avait été proposé pour Michel Barnier.

le Vendredi 28 Mars 2025 à 07:00 | Lu 356 fois