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La création du monde selon Heikura Nui


Tahiti le 5 juillet 2023 – Heikura Nui est attendu sur la scène de To’ata jeudi soir. Pour sa performance au Heiva i Tahiti 2023, la troupe de Iriti Hoto prévoit d’illustrer le thème de la création du monde, de la Terre, du ciel et de l’homme.      

Iriti Hoto, bien connu dans le monde de la danse et du Heiva, a choisi comme thème la création du ciel, de la Terre et de l’homme. Une approche syncrétique qui s’appuie sur le mythe de la création dans la tradition polynésienne mais pas seulement : “Je me suis également appuyé sur la Bible car ce qui a été écrit, c’est ce qui se passe”, justifie le chef de troupe, Iriti Hoto.  “Et si on ne dit pas la vérité que vont devenir nos jeunes demain ? Et surtout que va-t-on leur laisser et léguer ?”   
Lorsqu’on fait état de la création, pour Iriti Hoto “on parle également du ciel et de l’océan que Dieu a ensuite divisé en deux. C’est ce qu’on a aujourd’hui : la mer qui entoure nos îles, telle une couronne qui encercle le Te moana a Hiva”, affirme le chef de la troupe Heikura Nui.

« Notre travail à nous c’est de prendre soin de la terre »

Iriti Hoto précise que dans sa famille ils étaient tous diacres. Son père, son frère, sa sœur. “J’étais le seul qui ne l’était pas. J’étais juste batteur. Et mon papa n’était pas content que je ne les ai pas suivis dans la religion. Mais je lui ai dit : Tu es aveugle et sourd à la parole de Dieu. Il m’a répondu que j’étais méchant. Je lui ai dit que si ce que je faisais était la volonté de Dieu, j’acceptais ce don de sa part.”
Iriti Hoto se souvient également que l’avait interpelé en ces termes : “Si ces 200 personnes qui te suivent pour aller au Heiva venaient à la messe je dirais que tu es un enfant de Dieu. Mais j’ai continué quand même à faire ce que je fais encore aujourd’hui car je sais que cela vient de Lui.”

“Je veux aussi montrer à Dieu que je le porte dans mon cœur, car c’est à lui que je dois la vie”, explique aussi le chef de troupe. “Je ne l’ai jamais vu, mais lui me voit. Et si je ne l’avais pas servi peut-être bien que je ne serais pas arrivé à cet âge-là aujourd’hui, car j’ai 78 ans, alors que j’ai perdu des êtres chers comme mon fils, ou encore ceux qui m’ont aidé dans les Heiva. Il me reste donc ma femme, un de mes fils et ma fille. C’est Lui en fait qui décide et qui prend soin de nous. Notre travail à nous, c’est de prendre soin de la terre.”

Dans le respect de Dieu

Pour le spectacle présenté au Heiva cette année, Iriti Hoto souligne aussi qu’il a intégré dans son thème la langue et la terre. Deux éléments étroitement liés selon lui : “Si tu n’as pas de terre, tu n’as pas de langue, et si tu n’as pas de langue, tu n’as pas de terre”, développe-t-il.
“Lorsqu’on parle de Dieu on se demande si c’est vraiment son nom. Certains l’appellent Te Tumu Nui, Te Rahu Nui, Taaroa, ou encore te Atua. Même l’homme à un moment donné s’est pris pour dieu avec la construction de la tour de Babel. Et après sont nées les différentes langues dont la nôtre.”

Pour le chef de la troupe Heikura Nui, si on ne parle pas la langue, cette dernière va disparaitre petit à petit. “Aujourd’hui, s’afflige-t-il, quand tu dis ‘Ia ora na’ à notre peuple il te répond ‘Bonjour’. Et lorsque tu lui demandes ‘Ça va ?’ il te répond ‘Maita’i’. On ne va pas aller de l’avant comme cela…”  

Pour la participation de Heikura Nui au Heiva i Tajhiti 2023, Iriti Hoto explique que c’est en concertation avec son épouse, Béatrice, qu’ils ont décidé de relever le défi, malgré sa maladie et l’ampleur de la charge. Ils sont unis depuis 43 ans. “On a décidé à deux car sans elle je ne pourrais pas y arriver : elle participe à la réflexion du thème avec moi ; elle fait tous les costumes du ‘ōrero, du ra’atira, des danseuses et danseurs... Il faut donc qu’elle soit à mes côtés pour que le travail avance. On s’est aussi dit oui et ce jusqu’à la fin de notre vie”, explique-t-il les yeux remplis de larmes.

Il assure également pousser sa fille Heikura “qui est notre cheffe d’orchestre. Elle est aidée par deux papas, Teme et Tihoni, cette année. Elle est jeune, et amène donc une pensée nouvelle, ainsi qu’un programme et des arrangement nouveaux”“Mon papa me disais qu’il faut que j’amène mes brebis non seulement à To’ata mais aussi à l’église. Aujourd’hui avec du recul, je pense qu’il avait raison. Et je fais de mon mieux pour le faire avec la troupe Heikura Nui qui peut, elle, porter cela à To’ata” : “Il faut que les jeunes sachent qu’ils dansent, chantent pour Lui. Et tous sont au courant de cela. Mais ce n’est pas facile avec la nouvelle génération car ils ne pensent qu’à l’argent. Mais il ne faut pas oublier Dieu. Aujourd’hui je sais qu’Il est là, et que la vie est entre Ses mains et je Le respecte.

Rédigé par Vaite Urarii Pambrun le Vendredi 7 Juillet 2023 à 01:55 | Lu 1328 fois