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La collection «Littératures du Pacifique» aligne ses prix sur ceux de la métropole


La collection «Littératures du Pacifique» aligne ses prix sur ceux de la métropole
PAPEETE, jeudi 7 mars 2013. La maison d’édition Au Vent des Îles créée à Tahiti il y a 22 ans a décidé à partir de cette année 2013 de modifier sa politique tarifaire et d’aligner les prix de ses livres sur ceux pratiqués en métropole. Le but est de permettre aux 31 romans, nouvelles et récits de sa collection «Littératures du Pacifique» démarrée il y a 8 ans, d’être plus accessible aux lecteurs. Pour atteindre cet objectif, l’éditeur Christian Robert a fixé à 19 euros (2250 Fcfp) le prix maximum des livres de cette collection alors que par exemple, le roman d’Albert Wendt «Le baiser de la mangue», un magnifique roman de 800 pages, traduit de l’anglais, était vendu 39 euros (4650 Fcfp) depuis sa sortie en 2006. Bonne nouvelle également pour les lecteurs de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie (ou pour tous les acheteurs sur Internet), la maison d’édition ayant une politique tarifaire unique, cette baisse de prix sera répercutée de la même manière également dans les territoires français du Pacifique et partout où les livres sont distribués, notamment en Afrique francophone ou au Canada.

Il ne s’agit pas pour la maison d’édition tahitienne de brader ses stocks, mais bel et bien de faire une opération d’attractivité, surtout en direction des lecteurs de la métropole ou francophones du reste du monde, pour rendre plus visible et donc plus lisible la production littéraire océanienne. «Jusqu’ici il y avait clairement un blocage dans les librairies en métropole en raison du prix de nos livres» précise Christian Robert qui espère renverser la tendance en agissant précisément sur le facteur bloquant. Un livre broché tout juste édité par les maisons d’édition française se vend en moyenne dans les librairies métropolitaines entre 20 et 25 euros. Difficile par conséquent pour un roman d’un auteur océanien méconnu en métropole, souvent isolé et peu mis en valeur dans les rayonnages des librairies, de trouver grâce aux yeux des lecteurs curieux en raison du coût jugé trop important jusque-là. «Cette opération nous permettra également de proposer aux libraires un repositionnement de nos livres et de nos auteurs. L’intérêt est de faire connaître le plus largement possible ces auteurs océaniens. Nous pensons que ces auteurs ont des choses à dire et qu’il y a donc des choses à lire dans leurs œuvres» argumente encore l’éditeur.

En huit ans d’existence, cette collection «Littératures du Pacfique» des éditions Au Vent des Îles a permis à des auteurs océaniens de langue anglaise d’être traduits en français, à des auteurs polynésiens ou néo-calédoniens d’être publiés, et voit se côtoyer entre autres sur les rayonnages de la maison d’édition des auteurs maoris comme Patricia Grace, aborigène comme Anita Heiss, samoan avec Albert Wendt, kanak avec Déwé Gorodey, tahitienne ma'ohi avec Chantal Spitz. Au total les auteurs de cette collection, tous natifs d’Océanie vivent en Nouvelle-Zélande, en Australie, à Tonga, Samoa, Polynésie française, Nouvelle-Calédonie et impriment dans leurs écrits leur identité, leur culture, leur vision du monde. Avec cette nouvelle politique tarifaire, la maison d’édition Au Vent des Îles sera présente dès la semaine prochaine sur le salon du livre de Paris. Une occasion de tester sur un salon très populaire que cette décision commerciale est effectivement la bonne solution pour que la littérature océanienne trouve sa place dans les multiples propositions littéraires qui arrivent du monde entier.

La collection «Littératures du Pacifique» aligne ses prix sur ceux de la métropole
Le modèle économique du livre : un difficile équilibre

Pas facile effectivement pour une maison d’édition positionnée à Tahiti, très loin des grandes centres de diffusion du livre, de se faire une place dans les librairies de métropole ou d’ailleurs, et d’exister face aux géants que sont les grandes maisons d’édition françaises. La faiblesse des tirages par exemple rend plus cher le prix moyen du livre. Pourtant l’aventure démarrée par Christian Robert en 1991 se poursuit et perdure grâce aux choix effectués par la maison d’édition, alternant littérature, beaux livres et guides.

Si la collection «Littératures du Pacifique» n’a pas encore trouvé l’équilibre financier en huit ans d’existence, Au Vent des Îles peut compter sur les éditions des beaux livres et des différents guides sur la randonnée, la faune et la flore, sans cesse réédités, pour garder la barre. Même si la maison d’édition a réduit la voilure en termes de locaux ou de personnel pour baisser ses charges, au cours des dernières années, elle a connu également de réels succès de vente, particulièrement au cours de l’année 2012. Le savoureux livre d’Acajou a été rapidement réédité, Le Tifaifai de Michèle de Chazeaux également. En fin d’année 2012, le beau livre sur l’Australie a été vendu à plus de 1000 exemplaires en librairie en métropole dès sa première journée en rayon. Autre succès populaire, celui du récit de Nathalie Heirani Salmon-Hudry «Je suis née morte».

Son récit paru à 2000 exemplaires en septembre 2012 dans la collection «Littératures du Pacifique» a déjà nécessité une réédition à peine trois mois après sa publication. «De plus à l’inverse des grandes maisons d’édition pour lesquelles la permanence d’un livre est à court terme, un titre chassant l’autre, nos œuvres sont appelées à durer. Certains titres peu vendus à leur sortie connaissent ensuite une progression lente mais sûre, une fois qu’ils ont trouvés leur public» explique Christian Robert, patron d’Au Vent des Îles. Au cours de l’année dernière encore, la participation de la maison d’édition au festival Les Etonnants Voyageurs (salon international du livre et du film de voyage) en mai 2012 à Saint-Malo a donné un coup de projecteur à cette littérature océanienne avec pas moins de 14 auteurs invités. Un peu comme avec le Fifo, lentement mais sûrement, les auteurs de ce «continent invisible» font résonner plus loin et plus fort leurs écrits grâce au travail enthousiaste de cette maison d’édition.







Rédigé par Mireille Loubet le Jeudi 7 Mars 2013 à 17:03 | Lu 1425 fois