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La Réunion: le surf de nouveau autorisé sur la gauche de Saint-Leu, malgré les requins


Saint-Leu, France | AFP | samedi 10/04/2021 - A la Réunion, la pratique du surf est de nouveau autorisée sur toutes les plages de Saint-Leu (ouest). Cette autorisation, sous conditions strictes, arrive après des années d'interdiction due aux attaques de requins.

Il fait beau ce matin-là à Saint-Leu. Face au spot de la gauche, une vague mondialement connue des pratiquants, une bonne quinzaine de surfeurs discutent en petits groupes. Il s'agit de savoir si on peut, ou pas, se mettre à l'eau, car une eau pas très limpide peut être synonyme de présence de requins.

"Il y a eu des averses hier soir et l'eau n'est pas très claire", remarque Bruno, la trentaine débutante et des années de surf au compteur. Il finit par jouer la prudence et décide de ne pas y aller.

La menace est réelle. Depuis 2011, La Réunion est en proie à une recrudescence des charges de squales. A ce jour, 24 attaques ont été recensées, dont 11 mortelles. Plus de la moitié des personnes tuées étaient des surfeurs ou des bodyboardeurs.

Assis non loin de Bruno, Kevin, 22 ans, estime que le risque n'est pas très important. "Il y a déjà pas mal de gens à l'eau, ça ne craint pas trop", dit-il avant d'aller rejoindre la demi-douzaine de pratiquants déjà positionnée. "Je comprends la frustration des jeunes, il y a tellement longtemps que nous sommes privés de vagues…", commente Bruno.

En 2013, un arrêté préfectoral a interdit la baignade et toutes les activités nautiques hors du lagon et des zones surveillées.

Mais "on vient d'ouvrir un petit espace de liberté sécurisé", estime Bruno, évoquant le dispositif Zonex (zone d'expérimentation opérationnelle) qui autorise depuis le 23 mars dernier la pratique sous conditions du surf sur cinq spots de Saint-Leu, dont la mythique gauche.

"C'est le résultat d'un travail de longue haleine entamé depuis cinq ans par l'association Leu Tropical Surf Team (LTST), le Centre Sécurité Requin (CSR), l'État et la commune de Saint-Leu", note Gilbert Pouzet, président du LTST.

Financée par l'État et la Région, Zonex va être expérimentée pendant 18 mois. Le dispositif combine la pêche préventive des requins assurée par le CSR, un survol du spot par un drone, une étude journalière de la turbidité de l'eau, et deux jet skis et un zodiac d'appui qui assurent une maraude sur le spot quand il est ouvert.

"Neuf personnes sur le pont"

"Neuf personnes sont sur le pont chaque jour pour une ouverture encadrée à partir de 8H00", ajoute le président du LTST, ajoutant cependant qu'il "ne garantit pas qu'un animal ne passera pas nos rideaux".

D'où la demande faite aux surfeurs de porter un équipement de protection individuelle qui diffuse des ondes électromagnétiques (EPI, aussi appelé "shark shield" pour bouclier anti-requin). Pour être autorisés à surfer dans la Zonex, les pratiquants doivent être licenciés à la fédération française de surf. Ils sont aussi tenus de signer une charte de bonne conduite.

Le spot n'est pas interdit aux non licenciés, avec ou sans EPI, "mais ils ne sont pas assurés, ils surfent à leurs risques et périls", souligne Éric Sparton, le président de la Ligue réunionnaise de surf, associée au Zonex.

La commune de Saint-Leu ne fait pas de distinction. Elle précise dans son arrêté que la pratique se fait sous la seule responsabilité des surfeurs.

Tout cela ne douche pas l'enthousiasme de Gilbert Pouzet. "Les 110 licenciés de (son) club et toute la Réunion du surf vont pouvoir glisser dans de belles conditions de sécurité face à la menace requin", se réjouit-il.

Alice Lemoigne, championne du monde de longboard, abonde en son sens. Elle parle d'un travail "remarquable fait en étroite collaboration avec les services de l'État et de la commune". 

"Je suis persuadée qu'une nouvelle génération de surfeurs va pouvoir éclore. Les clubs vont pouvoir revivre. Cela ouvre de belles perspectives pour les baigneurs aussi", résume-t-elle.

A terme Gilbert Pouzet espère le retour des compétitions sur la gauche de Saint-Leu. "Peut-être ans deux ou trois ans" dit-il. "Il faut être pragmatique et ne pas se précipiter", souligne pour sa part Éric Sparton.

le Dimanche 11 Avril 2021 à 10:31 | Lu 184 fois