Tahiti, le 1er août 2024 – La réforme des aides à l'emploi portée par la ministre Vannina Crolas a monopolisé la journée de jeudi à Tarahoi avec des heures de débats. Si la majorité Tavini défend un projet “audacieux” qui veut mettre un terme aux “amortisseurs sociaux” tels que les CAE, le Tapura et Ahip dénoncent une “usine à gaz”, et regrettent surtout une baisse des indemnités de stage. Comme l'opposition, l'électron libre du Tavini Hinamoeura Morgant-Cross s'est abstenue sur ce texte adopté avec les 37 voix du Tavini.
“Nous n'aurons peut-être jamais la même vision et c'est peut-être ce qui fait la richesse de nos débats.” Cette phrase du président du Pays au bout de déjà trois heures de débat – et ce n'était pas fini – résume finalement assez bien l'examen du projet de loi du Pays présenté par sa ministre de l'Emploi.
La ministre Vannina Crolas a croulé sous les questions des élus de l'opposition mais aussi de la majorité sur son texte visant à réformer les mesures d'aides à l'emploi et à l'insertion professionnelle. “Nous ne voulons plus de mesures qui servent d'amortisseur social”, a-t-elle lancé, faisant ainsi référence aux CAE tant décriés par le Tavini, notamment pendant la campagne électorale.
D'un côté, c'est un texte “audacieux” pour l'élue de la majorité Pauline Niva qui estime que le dispositif du CAE (Convention d'accès à l'emploi) est “arrivé à sa limite” et que le projet du gouvernement va au contraire permettre à “chacun de trouver un emploi CDisé”. Une vision que ne partage évidemment pas l'opposition.
De l'autre, Nicole Sanquer de Ahip a regretté un texte trop “généraliste” qui s'apparente à “une usine à gaz” et qui met trop facilement au ban ces fameux CAE. Si elle reconnaît qu'ils ont effectivement un taux d'insertion insuffisant (de 13 à 15%), elle rappelle que ce dispositif, “qu'on le veuille ou non, était malheureusement souvent le revenu unique dans une famille”.
“Il ne faut pas se tromper d'outils”
Pour Moetai Brotherson, “s'il faut des amortisseurs sociaux, ce sera d'autres dispositifs mais il ne faut pas se tromper d'outils”.
C'est là que ça se complique. Car six dispositifs viennent remplacer les cinq existants actuellement, et il faut bien avouer qu'il n'est pas évident de s'y retrouver entre les mesures “stages”, les mesures “contrat” et les mesures “tremplin” (TIAPA pour tremplin d'insertion par l'activité pour les aînés et TAIA pour tremplin d'accès à l'insertion professionnelle par l'activité).
Entre les mesures “tremplin” qui doivent répondre uniquement à un appel à projets (ce qui chagrine les élus des îles comme Tahia Brown, élue Tavini des Tumaotu qui s'inquiète car il n'y a pas d'entreprises dans ces îles) et les mesures “stage”, il y a de quoi s'y perdre.
La dignité en question
Pour l'opposition, qu'il s'agisse de l'Aide à l’insertion (AI) – qui propose une rémunération allant de 60 à 100 000 francs par mois selon que le stagiaire n'a aucun diplôme ou est bachelier –, ou du TAIA ce n'est ni plus ni moins qu'un CAE déguisé mais en moins bien. La différence est que les communes sont exclues de ce dispositif – au grand dam des tāvana d'ailleurs à l'instar de Teura Iriti qui s'en est émue ce jeudi – et qu'il est rémunéré 50 000 francs par mois au lieu de 80 000 précédemment pour un temps plein. “C'est ça la dignité ?”, s'est interrogée Tepuaraurii Teriitahi.
Elle a trouvé un soutien chez l'élue du Tavini Hinamoeura Morgant-Cross qui a demandé au gouvernement de réévaluer ce montant en conseil des ministres, car “malheureusement, ce n'est pas notre assemblée qui a la main là-dessus”. L'électron libre du Tavini est allé plus loin en s'abstenant sur chaque article et en posant de nombreuses questions au gouvernement, quitte "à agacer" sa "voisine de gauche".
Ce n'est pas nouveau, le gouvernement Tavini a toujours pointé du doigt les CAE qu'ils estimaient trop politisés et il est donc logique qu'il en vienne à le supprimer aujourd'hui. En tout cas, dans sa forme initiale. “C'est de bonne guerre” pour Cathy Puchon qui a tout de même rappelé dans son intervention que le Tapura avait justement “arrêté ces CAE en 2023 avant les élections”, ce qu'a admis Vannina Crolas qui préfère tabler sur des contrats aidés afin de permettre l'accès à un emploi plus pérenne comme le TIAMA, “le but suprême” selon elle.
C'est pourquoi, le choix a été pris d'orienter “60 à 70% des crédits” sur ce type de dispositifs plutôt que sur les mesures “stage”, a-t-elle expliqué. Des mesures qui n'auront donc que 30 à 40% des 700 millions de francs dédiés à l'emploi dans le collectif budgétaire voté la veille par les élus.
Le “pari de la confiance” face aux dérives
C'est un choix. Mais attention aux effets pervers, préviennent les élus de l'opposition. Pour Tepuaraurii Teriitahi du Tapura, cette “petite cousine” du CAE risque de provoquer des dérives chez les entreprises qui ne vont pas se priver de profiter d'une main d'œuvre à moindre coût payée 50 ou 60 000 francs par mois pour travailler 39 heures. “On ne pourra jamais éviter les dérives mais on fait le pari de la confiance”, a répondu Vannina Crolas qui insiste sur le fait que l'idée est de permettre au stagiaire d'acquérir des compétences et de gagner en employabilité.
Sauf que, pour l'opposition les dispositifs proposés ne répondent pas aux effets attendus. À l'instar des CVD (Corps de volontaires au développement) qui disparaissent au profit des AMO. Un dispositif dédié aux étudiants qui arrivent sur le marché du travail mais qui se retrouvent aujourd'hui avec 100 000 francs par mois au lieu de 170 000 avec un CVD. Et la liste est longue puisque les débats ont duré toute l'après-midi sur ce même texte qui a été voté par 37 voix du Tavini, Hinamoeura Morgant-Cross s'étant abstenue à l'instar des élus du Tapura et de Ahip.
“Nous n'aurons peut-être jamais la même vision et c'est peut-être ce qui fait la richesse de nos débats.” Cette phrase du président du Pays au bout de déjà trois heures de débat – et ce n'était pas fini – résume finalement assez bien l'examen du projet de loi du Pays présenté par sa ministre de l'Emploi.
La ministre Vannina Crolas a croulé sous les questions des élus de l'opposition mais aussi de la majorité sur son texte visant à réformer les mesures d'aides à l'emploi et à l'insertion professionnelle. “Nous ne voulons plus de mesures qui servent d'amortisseur social”, a-t-elle lancé, faisant ainsi référence aux CAE tant décriés par le Tavini, notamment pendant la campagne électorale.
D'un côté, c'est un texte “audacieux” pour l'élue de la majorité Pauline Niva qui estime que le dispositif du CAE (Convention d'accès à l'emploi) est “arrivé à sa limite” et que le projet du gouvernement va au contraire permettre à “chacun de trouver un emploi CDisé”. Une vision que ne partage évidemment pas l'opposition.
De l'autre, Nicole Sanquer de Ahip a regretté un texte trop “généraliste” qui s'apparente à “une usine à gaz” et qui met trop facilement au ban ces fameux CAE. Si elle reconnaît qu'ils ont effectivement un taux d'insertion insuffisant (de 13 à 15%), elle rappelle que ce dispositif, “qu'on le veuille ou non, était malheureusement souvent le revenu unique dans une famille”.
“Il ne faut pas se tromper d'outils”
Pour Moetai Brotherson, “s'il faut des amortisseurs sociaux, ce sera d'autres dispositifs mais il ne faut pas se tromper d'outils”.
C'est là que ça se complique. Car six dispositifs viennent remplacer les cinq existants actuellement, et il faut bien avouer qu'il n'est pas évident de s'y retrouver entre les mesures “stages”, les mesures “contrat” et les mesures “tremplin” (TIAPA pour tremplin d'insertion par l'activité pour les aînés et TAIA pour tremplin d'accès à l'insertion professionnelle par l'activité).
Entre les mesures “tremplin” qui doivent répondre uniquement à un appel à projets (ce qui chagrine les élus des îles comme Tahia Brown, élue Tavini des Tumaotu qui s'inquiète car il n'y a pas d'entreprises dans ces îles) et les mesures “stage”, il y a de quoi s'y perdre.
La dignité en question
Pour l'opposition, qu'il s'agisse de l'Aide à l’insertion (AI) – qui propose une rémunération allant de 60 à 100 000 francs par mois selon que le stagiaire n'a aucun diplôme ou est bachelier –, ou du TAIA ce n'est ni plus ni moins qu'un CAE déguisé mais en moins bien. La différence est que les communes sont exclues de ce dispositif – au grand dam des tāvana d'ailleurs à l'instar de Teura Iriti qui s'en est émue ce jeudi – et qu'il est rémunéré 50 000 francs par mois au lieu de 80 000 précédemment pour un temps plein. “C'est ça la dignité ?”, s'est interrogée Tepuaraurii Teriitahi.
Elle a trouvé un soutien chez l'élue du Tavini Hinamoeura Morgant-Cross qui a demandé au gouvernement de réévaluer ce montant en conseil des ministres, car “malheureusement, ce n'est pas notre assemblée qui a la main là-dessus”. L'électron libre du Tavini est allé plus loin en s'abstenant sur chaque article et en posant de nombreuses questions au gouvernement, quitte "à agacer" sa "voisine de gauche".
Ce n'est pas nouveau, le gouvernement Tavini a toujours pointé du doigt les CAE qu'ils estimaient trop politisés et il est donc logique qu'il en vienne à le supprimer aujourd'hui. En tout cas, dans sa forme initiale. “C'est de bonne guerre” pour Cathy Puchon qui a tout de même rappelé dans son intervention que le Tapura avait justement “arrêté ces CAE en 2023 avant les élections”, ce qu'a admis Vannina Crolas qui préfère tabler sur des contrats aidés afin de permettre l'accès à un emploi plus pérenne comme le TIAMA, “le but suprême” selon elle.
C'est pourquoi, le choix a été pris d'orienter “60 à 70% des crédits” sur ce type de dispositifs plutôt que sur les mesures “stage”, a-t-elle expliqué. Des mesures qui n'auront donc que 30 à 40% des 700 millions de francs dédiés à l'emploi dans le collectif budgétaire voté la veille par les élus.
Le “pari de la confiance” face aux dérives
C'est un choix. Mais attention aux effets pervers, préviennent les élus de l'opposition. Pour Tepuaraurii Teriitahi du Tapura, cette “petite cousine” du CAE risque de provoquer des dérives chez les entreprises qui ne vont pas se priver de profiter d'une main d'œuvre à moindre coût payée 50 ou 60 000 francs par mois pour travailler 39 heures. “On ne pourra jamais éviter les dérives mais on fait le pari de la confiance”, a répondu Vannina Crolas qui insiste sur le fait que l'idée est de permettre au stagiaire d'acquérir des compétences et de gagner en employabilité.
Sauf que, pour l'opposition les dispositifs proposés ne répondent pas aux effets attendus. À l'instar des CVD (Corps de volontaires au développement) qui disparaissent au profit des AMO. Un dispositif dédié aux étudiants qui arrivent sur le marché du travail mais qui se retrouvent aujourd'hui avec 100 000 francs par mois au lieu de 170 000 avec un CVD. Et la liste est longue puisque les débats ont duré toute l'après-midi sur ce même texte qui a été voté par 37 voix du Tavini, Hinamoeura Morgant-Cross s'étant abstenue à l'instar des élus du Tapura et de Ahip.