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L'éloquence comme passeport


De gauche à droite: Quentin Pidoux, Hinamoe Brotherson et Hoanui Mariassouce.
De gauche à droite: Quentin Pidoux, Hinamoe Brotherson et Hoanui Mariassouce.
Tahiti, le 29 avril 2022 - Trois étudiants de l'UPF qui participent en équipe à un concours de débat regroupant une trentaine d'universités francophones viennent d'affronter une université bulgare. Ce concours est l'occasion pour eux d'exercer leur éloquence et de s'ouvrir au monde.
 
Une équipe composée de trois étudiants polynésiens participe cette année au Concours francophone interuniversitaire de Débat de La Haye (Pays-Bas). Hinamoe Brotherson, en 3e année de licence de droit-science politique ; Hoanui Mariassouce, en Master 1 de droit public et Quentin Pidoux, en Master 2 de droit public ont été sélectionnés pour la première édition de ce concours, organisé par la Fondation Corax, qui réunit 32 universités francophones.
À l'image d'une coupe du monde de football, le concours d'éloquence argumentative termine sa phase "de poule" actuellement. Il se dirige vers les 8es de finale et les "matchs à élimination directe". L'équipe de l'Université de Polynésie française (UPF) a déjà remporté son premier match contre l'Université Cheikh Anta Diop du Sénégal, le 28 mars. Ce vendredi 29 avril, l'équipe polynésienne affrontait les étudiants de l'Établissement spécialisé de la francophonie pour l'administration et le management, situé en Bulgarie. Les résultats de ce match ne seront connus que dans quelques jours.

Une compétition de rhétorique

Pas question de se précipiter pour ces matchs-là. En effet, un concours de débat en équipe demande de mettre en avant son éloquence, convaincre de la justesse de ses arguments et surpasser la rhétorique déployée par l'équipe adverse qui défend le point de vue antagoniste. Le tout, dans un temps limité et très organisé : à tour de rôle, chaque équipe a quatre minutes pour présenter ses arguments, deux minutes pour contre-argumenter la position de l'adversaire, deux minutes pour répondre à la contre-argumentation adverse et deux minutes pour synthétiser et conclure. Lors de ces phases initiales, les débats se déroulent en visio-conférence.

Trois juges impartiaux notent les prestations de chaque équipe selon une grille de critères précis, visant à évaluer leur bienveillance, leur courtoisie, leur respect du temps de parole, la diversité de leurs arguments et leur capacité à rebondir sur les arguments adverses. L'addition des notes des juges donne le score global des deux équipes : celle qui a le plus haut score gagne le match.

L'importance de la préparation

Les thèmes des débats sont imposés par l'organisateur. Pour ces phases de poule, les étudiants en prennent connaissance dix jours avant le match, ce qui demande une phase de préparation assez intense. "On vit ensemble pendant dix jours, on campe à la bibliothèque", sourit Hinamoe, tout en soulignant l'aide dont ils bénéficient de la part d'enseignants de l'université. Pour ce concours, les débats se placent sous le signe de la présidence française de l'Union européenne. Le thème du match du jour était formulé ainsi : "L’Europe doit s’impliquer encore plus dans d'autres régions du monde pour aider à la lutte contre le réchauffement climatique".

Difficulté supplémentaire, les étudiants ne connaissent la position qu'ils doivent défendre, "pour" ou "contre", que cinq minutes avant le début du match, ce qui les oblige à construire une argumentation couvrant les deux possibilités. Pour Quentin, cette contrainte cache une vraie richesse. "Parfois, à la fin de ta préparation, tu te rends compte que tu es d'accord avec les deux points de vue, à la fois pour et contre. Ça t'oblige à construire ta réflexion de manière non-partisane", justifie-t-il.

Tisser des liens
 
Après deux matchs, l'équipe est solidaire et bien rôdée. Le calme Hoanui "c'est le coach, explique Quentin, Hinamoe, c'est la logistique". Et lui-même ? "Le philosophe", rigole Hoanui, "il fait un travail de recherche incroyable". Pour Hinamoe, qui vise la profession d'avocate, comme pour Quentin, dyslexique, la participation au concours est d'abord une manière de travailler son éloquence. Mais tous soulignent la richesse des échanges occasionnés par ce concours. "Ce ne sont pas des débats agressifs, explique Hoanui, il y a beaucoup de bienveillance tant entre étudiants qu'avec le jury ou les organisateurs". Il ajoute : "Ça permet de tisser des liens avec des étudiants de partout dans le monde francophone qu'on n'aurait peut-être pas rencontrés autrement. On est invité au Sénégal, maintenant".

L'équipe de débat de l'UPF paraît prête pour les 8es de finales, qui se dérouleront les 13 et 14 mai. Avant, qui sait, une finale qui se déroulera en présentiel, à La Haye le 27 juin ? C'est en tout cas l'ambition développée par Hinamoe, qui se dit fière de représenter les étudiants de l'UPF et au-delà, le territoire et veut poursuivre le plus loin possible. "On a quand même l'héritage d'une culture de forte tradition orale. Cette éloquence polynésienne existe encore dans la vie de tous les jours. Mais, il y a des formes d'éloquence partout dans le monde, et les rencontrer, c'est ça qui est intéressant."
 


Les matchs de débats sont disponibles en replay:

Rediffusion de la première rencontre UPF contre Université Cheikh Anta Diop (SENEGAL) :
https://www.youtube.com/watch?v=nCjC9cyHf78
Rediffusion de la deuxième rencontre UPF contre ESFAM (BULGARIE) :
https://www.youtube.com/watch?v=18_1o5MH1Jg
 

Rédigé par Antoine Launey le Vendredi 29 Avril 2022 à 18:49 | Lu 3306 fois