Paris, France | AFP | vendredi 28/04/2017 - Faut-il renvoyer chacun à sa conscience plutôt que prendre position? La Conférence des évêques affiche, dans l'entre-deux-tours de la présidentielle, une prudence à laquelle répondent incompréhensions et tensions dans les rangs de l'Église, sur fond de raidissement d'une partie de l'électorat catholique.
Quinze ans après le second tour inattendu entre Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen, en 2002, le duel entre la fille de ce dernier et Emmanuel Macron ne suscite pas la même mobilisation ecclésiale.
Après le choc du 21 avril 2002, l'évêque de Saint-Denis d'alors, Olivier de Berranger, fustigeait une "idéologie d'intolérance et de xénophobie" du Front national, "aux antipodes de l'Évangile". Au diapason des premières condamnations épiscopales, au milieu des années 1980, d'un FN alors émergent dans les urnes.
Dimanche soir, la CEF a certes été la première à réagir par un communiqué de deux pages rappelant "ses fondamentaux pour aider au discernement", mais sans appeler "à voter pour l'un ou l'autre candidat". Avec une insistance sur "une société plus fraternelle", les migrants ou l'Europe défavorable à Marine Le Pen. Mais aussi un appel à respecter "les liens de filiation", vu comme une pierre dans le jardin d'Emmanuel Macron, favorable à une extension de la procréation médicalement assistée (PMA).
Langue de "buis" ? "Prêchi-prêcha", a accusé le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, disant préférer "l'Église de 2002, qui a eu le courage de nommer, de dénoncer l'extrême droite".
Depuis, tandis que des prêtres et de rares évêques prennent la parole à titre individuel et en ordre dispersé, la CEF affiche un mutisme embarrassé face aux prises de position d'une droite catholique conservatrice, qui opte bruyamment pour le "ni-ni" (Sens commun, Parti chrétien démocrate), voire le "tout sauf Macron" (La Manif pour tous, Frigide Barjot...).
Il y a longtemps que l'épiscopat, dans une France qui chérit la séparation des Églises et de l'État, se garde d'entrer dans la mêlée partisane.
Ce principe de précaution semble prévaloir désormais, y compris au second tour d'une présidentielle, à l'égard du FN, qui a gagné de nombreux électeurs chez les catholiques : Marine Le Pen a séduit dimanche dernier 23% des pratiquants, soit à peine moins qu'Emmanuel Macron (à 24%, contre 28% pour François Fillon), selon un sondage Harris Interactive.
Le parti n'est plus infréquentable : Marion Maréchal-Le Pen, catholique déclarée s'affichant en défenseure de la famille, a été invitée en 2015 à l'université d'été du diocèse de Fréjus-Toulon.
Le président de la CEF, Georges Pontier, qui ne s'est pas encore exprimé dans cet entre-deux-tours, l'affirmait il y a quelques mois : le temps des consignes de vote "est fini, s'il a existé". Mais la communication a minima de l'épiscopat crée des remous.
"On dirait que les évêques de France ont déserté l'espace du débat public. On les sait paralysés par le scandale de la pédophilie des prêtres, aux prises avec une crise numérique sans précédent du personnel clérical, en doute profond quant à l'originalité de leur mission dans une société hypersécularisée", a écrit sur Slate le chroniqueur religieux Henri Tincq, clamant son malaise sous un titre rageur: "Aujourd'hui j'ai honte d'être catholique".
À la base, notamment parmi les laïcs, la mobilisation s'organise. Constatant que l'institution épiscopale "n'a pas été au bout d'une démarche claire", la Conférence catholique des baptisé(e)s francophones (10.000 sympathisants) a décidé de "prendre la parole" en invitant les croyants à "ne pas se tromper de priorité": selon elle "l'accueil de l'autre", et non les sujets de bioéthique. D'où un appel à "faire clairement barrage à Marine Le Pen". "Nous sommes catholiques et nous voterons Macron", a annoncé pour sa part l'équipe de la paroisse parisienne Saint-Merry, connue pour sa tradition d'ouverture.
À front renversé, le blog Le Salon Beige, gravitant dans la cathosphère identitaire, a relayé le "communiqué" d'un mystérieux "collectif Antioche" censé réunir divers ecclésiastiques. Anonymes bien sûr, mais, assure le site, déterminés à voter Marine Le Pen le 7 mai.
Quinze ans après le second tour inattendu entre Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen, en 2002, le duel entre la fille de ce dernier et Emmanuel Macron ne suscite pas la même mobilisation ecclésiale.
Après le choc du 21 avril 2002, l'évêque de Saint-Denis d'alors, Olivier de Berranger, fustigeait une "idéologie d'intolérance et de xénophobie" du Front national, "aux antipodes de l'Évangile". Au diapason des premières condamnations épiscopales, au milieu des années 1980, d'un FN alors émergent dans les urnes.
Dimanche soir, la CEF a certes été la première à réagir par un communiqué de deux pages rappelant "ses fondamentaux pour aider au discernement", mais sans appeler "à voter pour l'un ou l'autre candidat". Avec une insistance sur "une société plus fraternelle", les migrants ou l'Europe défavorable à Marine Le Pen. Mais aussi un appel à respecter "les liens de filiation", vu comme une pierre dans le jardin d'Emmanuel Macron, favorable à une extension de la procréation médicalement assistée (PMA).
Langue de "buis" ? "Prêchi-prêcha", a accusé le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, disant préférer "l'Église de 2002, qui a eu le courage de nommer, de dénoncer l'extrême droite".
Depuis, tandis que des prêtres et de rares évêques prennent la parole à titre individuel et en ordre dispersé, la CEF affiche un mutisme embarrassé face aux prises de position d'une droite catholique conservatrice, qui opte bruyamment pour le "ni-ni" (Sens commun, Parti chrétien démocrate), voire le "tout sauf Macron" (La Manif pour tous, Frigide Barjot...).
Il y a longtemps que l'épiscopat, dans une France qui chérit la séparation des Églises et de l'État, se garde d'entrer dans la mêlée partisane.
Ce principe de précaution semble prévaloir désormais, y compris au second tour d'une présidentielle, à l'égard du FN, qui a gagné de nombreux électeurs chez les catholiques : Marine Le Pen a séduit dimanche dernier 23% des pratiquants, soit à peine moins qu'Emmanuel Macron (à 24%, contre 28% pour François Fillon), selon un sondage Harris Interactive.
Le parti n'est plus infréquentable : Marion Maréchal-Le Pen, catholique déclarée s'affichant en défenseure de la famille, a été invitée en 2015 à l'université d'été du diocèse de Fréjus-Toulon.
- Un mystérieux collectif -
Le président de la CEF, Georges Pontier, qui ne s'est pas encore exprimé dans cet entre-deux-tours, l'affirmait il y a quelques mois : le temps des consignes de vote "est fini, s'il a existé". Mais la communication a minima de l'épiscopat crée des remous.
"On dirait que les évêques de France ont déserté l'espace du débat public. On les sait paralysés par le scandale de la pédophilie des prêtres, aux prises avec une crise numérique sans précédent du personnel clérical, en doute profond quant à l'originalité de leur mission dans une société hypersécularisée", a écrit sur Slate le chroniqueur religieux Henri Tincq, clamant son malaise sous un titre rageur: "Aujourd'hui j'ai honte d'être catholique".
À la base, notamment parmi les laïcs, la mobilisation s'organise. Constatant que l'institution épiscopale "n'a pas été au bout d'une démarche claire", la Conférence catholique des baptisé(e)s francophones (10.000 sympathisants) a décidé de "prendre la parole" en invitant les croyants à "ne pas se tromper de priorité": selon elle "l'accueil de l'autre", et non les sujets de bioéthique. D'où un appel à "faire clairement barrage à Marine Le Pen". "Nous sommes catholiques et nous voterons Macron", a annoncé pour sa part l'équipe de la paroisse parisienne Saint-Merry, connue pour sa tradition d'ouverture.
À front renversé, le blog Le Salon Beige, gravitant dans la cathosphère identitaire, a relayé le "communiqué" d'un mystérieux "collectif Antioche" censé réunir divers ecclésiastiques. Anonymes bien sûr, mais, assure le site, déterminés à voter Marine Le Pen le 7 mai.