PAPEETE, le 24 février 2016. Ce mardi 23 février, au lendemain de la visite de François Hollande à Tahiti et de ses annonces pour améliorer les indemnisations des victimes des essais nucléaires, le dossier d'une veuve dont le mari est décédé en 2004 d'une leucémie a été rejeté. Le tribunal administratif de Papeete s'appuyant sur le fait que l’administration "a rapporté la preuve du caractère négligeable du risque attribuable".
Le cas de cet homme, Alfred, décédé en février 2004 des suites d’une leucémie aiguë, est celui d'un Polynésien qui a résidé sur le territoire durant toute la période concernée par les essais nucléaires et qui a travaillé pendant onze mois au centre d’expérimentation du Pacifique (CEP), sur les atolls de Moruroa et Fangataufa en qualité de conducteur d’engin et de maçon, à des travaux d’aménagement des pistes. C'est à ce titre, que sa veuve a pu ouvrir un dossier de demande d'indemnisation en raison "de la présomption d’imputabilité prévue par la loi du 5 janvier 2010" (loi Morin). Mais pour bénéficier d'une indemnisation, il faut apporter des preuves de cette exposition à une contamination.
Or, premier écueil dans le cas d'Alfred, présenté par sa veuve "le comité d’indemnisation des victimes d’essais nucléaires (Civen) s’est fondé sur des données dosimétriques qui ne sont pas personnelles et n’évaluent pas la contamination interne ; en l’absence de surveillance médicale la présomption de causalité ne peut être exclue". Le dossier de la veuve fait mention également des 203 retombées radioactives répertoriées en Polynésie française et souligne que la campagne des tirs de 1967 "a eu des retombées sur la Polynésie française, et notamment sur Papeete, que les mesures de sécurité prises lors des tirs ne protégeaient pas des risques de contamination interne par le déplacement imprévisible de masses d’air contaminé (…) ; les prévisions météorologiques ne portaient pas sur les vents de basses couches qui ont entraîné une partie des retombées radioactives sur l’ensemble de la Polynésie". Conclusion pour la veuve "dans ce contexte, l’Etat n’apporte pas la preuve que le risque de contamination aurait été négligeable".
Mais les arguments de la partie inverse sont d'une autre nature, et concluent que "c’est à bon droit que le risque attribuable aux essais nucléaires a été considéré comme négligeable". Dans un mémoire en défense enregistré le 11 décembre 2014, le haut-commissaire de Polynésie française indique que "aucun essai nucléaire n’a été réalisé en 1969 ; dans l’hypothèse d’une présence à Moruroa du 1er février au 31 décembre 1969, M. X n’y était exposé à aucun risque de contamination ; dans l’hypothèse d’une présence à Fangataufa, les contrôles réalisés lors des chantiers de réfection de la piste d’aviation et de la route Empereur ont permis de mesurer des doses de radioactivité très faibles. En admettant que M. X ait résidé de façon continue à Tahiti entre 1966 et 1974, période des essais atmosphériques, la dose reconstituée totale est évaluée à 2,45 millisieverts ; la radioactivité atmosphérique a fait l’objet d’une surveillance quotidienne, et les valeurs constatées n’ont aucune incidence sur la santé humaine ; la pêche et la consommation de poissons ou de crustacés étaient interdites, et la baignade dans le lagon autorisée selon des normes très stricte ; M. X, qui n’était pas affecté à des travaux sous rayonnements, n’avait pas à être soumis à des examens de contrôle ni à un suivi dosimétrique".
Dans ses considérants, le tribunal administratif rappelle "qu'il appartient à l’autorité chargée d’examiner la demande de vérifier que les mesures de surveillance de la contamination interne et externe ont, chacune, été suffisantes au regard des conditions concrètes d’exposition de l’intéressé". Dans ce cas d'Alfred, "les études réalisées par les services du ministère de la défense relèvent que les dosimètres d’ambiance placés à Moruroa durant l’année 1969, et notamment en zone aéroportuaire, n’ont décelé aucun risque d’exposition externe en lien avec la radioactivité des sols (…) ; que la dose efficace liée à l’inhalation de l’air (1,2 m3 par heure) au niveau de la piste d’aviation de Moruroa en 1969 a été évaluée à 11,1 millibécquerels par m3, soit 5 microsieverts, ce qui est inférieur à la radioactivité naturelle".
Par ailleurs, divers documents issus services du ministère de la défense -et même une déclaration d'Alfred- précisent qu'il avait travaillé "à proximité des zones signalées comme contaminées" pour la réfection de la piste d’aviation de Fangataufa et de la route Frégate-Empereur, après les détériorations provoquées par le tir Canopus du 24 août 1968, mais pas en zone contrôlée. Aussi : "eu égard à la durée d’affectation de onze mois de M. X sur les sites de Moruroa et Fangataufa en 1969, à l’absence de tir durant la période en cause, à la nature de son activité hors de la zone contrôlée, et à l’absence d’élément plus précis permettant de caractériser un risque concret d’exposition aux rayonnements ionisants, l’administration doit être regardée comme rapportant la preuve du caractère négligeable du risque attribuable aux essais nucléaires dans la survenue de la myélodysplasie diagnostiquée le 20 novembre 2000". La demande d'indemnisation de la veuve est donc rejetée.
Pour lire la décision complète rendue par le tribunal administratif de Papeete, CLIQUER ICI
Le cas de cet homme, Alfred, décédé en février 2004 des suites d’une leucémie aiguë, est celui d'un Polynésien qui a résidé sur le territoire durant toute la période concernée par les essais nucléaires et qui a travaillé pendant onze mois au centre d’expérimentation du Pacifique (CEP), sur les atolls de Moruroa et Fangataufa en qualité de conducteur d’engin et de maçon, à des travaux d’aménagement des pistes. C'est à ce titre, que sa veuve a pu ouvrir un dossier de demande d'indemnisation en raison "de la présomption d’imputabilité prévue par la loi du 5 janvier 2010" (loi Morin). Mais pour bénéficier d'une indemnisation, il faut apporter des preuves de cette exposition à une contamination.
Or, premier écueil dans le cas d'Alfred, présenté par sa veuve "le comité d’indemnisation des victimes d’essais nucléaires (Civen) s’est fondé sur des données dosimétriques qui ne sont pas personnelles et n’évaluent pas la contamination interne ; en l’absence de surveillance médicale la présomption de causalité ne peut être exclue". Le dossier de la veuve fait mention également des 203 retombées radioactives répertoriées en Polynésie française et souligne que la campagne des tirs de 1967 "a eu des retombées sur la Polynésie française, et notamment sur Papeete, que les mesures de sécurité prises lors des tirs ne protégeaient pas des risques de contamination interne par le déplacement imprévisible de masses d’air contaminé (…) ; les prévisions météorologiques ne portaient pas sur les vents de basses couches qui ont entraîné une partie des retombées radioactives sur l’ensemble de la Polynésie". Conclusion pour la veuve "dans ce contexte, l’Etat n’apporte pas la preuve que le risque de contamination aurait été négligeable".
Mais les arguments de la partie inverse sont d'une autre nature, et concluent que "c’est à bon droit que le risque attribuable aux essais nucléaires a été considéré comme négligeable". Dans un mémoire en défense enregistré le 11 décembre 2014, le haut-commissaire de Polynésie française indique que "aucun essai nucléaire n’a été réalisé en 1969 ; dans l’hypothèse d’une présence à Moruroa du 1er février au 31 décembre 1969, M. X n’y était exposé à aucun risque de contamination ; dans l’hypothèse d’une présence à Fangataufa, les contrôles réalisés lors des chantiers de réfection de la piste d’aviation et de la route Empereur ont permis de mesurer des doses de radioactivité très faibles. En admettant que M. X ait résidé de façon continue à Tahiti entre 1966 et 1974, période des essais atmosphériques, la dose reconstituée totale est évaluée à 2,45 millisieverts ; la radioactivité atmosphérique a fait l’objet d’une surveillance quotidienne, et les valeurs constatées n’ont aucune incidence sur la santé humaine ; la pêche et la consommation de poissons ou de crustacés étaient interdites, et la baignade dans le lagon autorisée selon des normes très stricte ; M. X, qui n’était pas affecté à des travaux sous rayonnements, n’avait pas à être soumis à des examens de contrôle ni à un suivi dosimétrique".
Dans ses considérants, le tribunal administratif rappelle "qu'il appartient à l’autorité chargée d’examiner la demande de vérifier que les mesures de surveillance de la contamination interne et externe ont, chacune, été suffisantes au regard des conditions concrètes d’exposition de l’intéressé". Dans ce cas d'Alfred, "les études réalisées par les services du ministère de la défense relèvent que les dosimètres d’ambiance placés à Moruroa durant l’année 1969, et notamment en zone aéroportuaire, n’ont décelé aucun risque d’exposition externe en lien avec la radioactivité des sols (…) ; que la dose efficace liée à l’inhalation de l’air (1,2 m3 par heure) au niveau de la piste d’aviation de Moruroa en 1969 a été évaluée à 11,1 millibécquerels par m3, soit 5 microsieverts, ce qui est inférieur à la radioactivité naturelle".
Par ailleurs, divers documents issus services du ministère de la défense -et même une déclaration d'Alfred- précisent qu'il avait travaillé "à proximité des zones signalées comme contaminées" pour la réfection de la piste d’aviation de Fangataufa et de la route Frégate-Empereur, après les détériorations provoquées par le tir Canopus du 24 août 1968, mais pas en zone contrôlée. Aussi : "eu égard à la durée d’affectation de onze mois de M. X sur les sites de Moruroa et Fangataufa en 1969, à l’absence de tir durant la période en cause, à la nature de son activité hors de la zone contrôlée, et à l’absence d’élément plus précis permettant de caractériser un risque concret d’exposition aux rayonnements ionisants, l’administration doit être regardée comme rapportant la preuve du caractère négligeable du risque attribuable aux essais nucléaires dans la survenue de la myélodysplasie diagnostiquée le 20 novembre 2000". La demande d'indemnisation de la veuve est donc rejetée.
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