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Handicap : "L'administration ne comprend pas qu'il faut travailler au cas par cas"


Nathalie Salmon-Hudry en septembre 2012 à la sortie de son livre "Je suis née morte" entourée de sa mère et de son éditeur, Christian Robert (Au Vent des Îles). En septembre dernier, l'auteur a reçu, devant 150 lycéens, le prix Vi Nimö, décerné par un jury d’élèves venant de tous les lycées de Nouvelle-Calédonie.
Nathalie Salmon-Hudry en septembre 2012 à la sortie de son livre "Je suis née morte" entourée de sa mère et de son éditeur, Christian Robert (Au Vent des Îles). En septembre dernier, l'auteur a reçu, devant 150 lycéens, le prix Vi Nimö, décerné par un jury d’élèves venant de tous les lycées de Nouvelle-Calédonie.
PAPEETE, le 26 octobre 2015. Nathalie Salmon-Hudry est lourdement handicapée depuis sa naissance. L'auteur du livre "Je suis née morte" paru en septembre 2012 chez l'éditeur Au Vent des Îles, se bat néanmoins avec enthousiasme pour vivre le plus normalement possible en dépit des préjugés et de ses difficultés. Elle explique aujourd'hui les difficultés qu'elle rencontre pour une véritable insertion professionnelle

En quelques années, Nathalie Salmon-Hudry est devenue une icône. Elle irradie une joie de vivre et une énergie positive malgré un lourd handicap moteur et cérébral, résultat de complications sévères à sa naissance. Clouée sur son fauteuil roulant depuis toujours, ses mains inaptes à toute activité, même les plus basiques, Nathalie a pourtant réussi à ne jamais se laisser aller à l'inaction. Puisqu'elle ne peut pas écrire avec ses mains, c'est avec une licorne placée sur sa tête qu'elle arrive à pianoter sur le clavier d'un ordinateur. C'est par ce moyen qu'elle a rédigé son livre, primé de nombreuses fois. Depuis, Nathalie n'a cessé d'écrire et son témoignage a largement dépassé les limites de la Polynésie et du Pacifique.

A 32 ans toutefois, cette battante, titulaire d'un Bac + 2 aimerait bien pouvoir travailler et gagner un vrai salaire plutôt que de compter toute sa vie durant sur son allocation d'adulte handicapé. Intelligente et pleine d'humour, elle s'en sait capable. "La vie de femme au foyer ce n'est vraiment pas mon truc" plaisante-t-elle. Mais cette volonté se heurte à certaines difficultés administratives. En tant qu'auteur elle a tenté par exemple de rédiger des chroniques pour Tahiti Infos. Mais le statut de patenté remettait en cause le versement complet de son allocation. "Si je recevais 40 000 Fcfp, je voyais disparaitre quasiment le même montant de mon allocation mensuelle alors que pour travailler il faut que j'embauche une auxiliaire de vie". Des coûts supplémentaires plutôt lourds qui ne sont pas pris en compte. Or, remarque le CESC dans le rapport présenté en fin de semaine dernière quant à un projet de loi du Pays sur l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés que la réglementation en vigueur n'encourage pas positivement ce passage à la vie professionnelle. "En l'état actuel de la réglementation sur l'allocation aux adultes handicapés (AAH), soumise à conditions de ressources, la personne en situation de handicap qui souhaite exercer une activité professionnelle perd le bénéfice de cette allocation et des avantages afférents". Un sacré frein à l'insertion !

"Travailler bien sûr que j'en ai envie, mais à quel prix ! La logique actuelle n'est pas bonne et je n'ai toujours pas compris pourquoi le montant touché pour le travail effectué venait en soustraction de l'allocation. De mon point de vue, il faudrait fixer un plafond, au moins jusqu'au Smig" explique-t-elle. "De toute façon l'administration n'a pas compris c'est que quand il s'agit du handicap, il faut travailler au cas par cas". Les handicaps ne sont en effet pas toujours les mêmes, la dépendance est plus ou moins accentuée. Bref, la loi d'intégration des travailleurs handicapés ne devrait pas s'arrêter à un simple quota dans un effectif salarié mais prendre en compte l'adaptation du poste de travail dans l'entreprise et les frais éventuellement à supporter par la personne elle-même.

Rédigé par Mireille Loubet le Lundi 26 Octobre 2015 à 00:39 | Lu 1342 fois