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H2O se tourne vers le Conseil d'Etat après la sanction "démesurée" de l'AMF


Crédit JOEL SAGET / AFP
Crédit JOEL SAGET / AFP
Paris, France | AFP | mercredi 03/01/2023 -La société de gestion d'actifs H2O a annoncé mercredi qu'elle allait déposer un recours devant le Conseil d'Etat contre l'amende record de 93 millions d'euros infligée la veille par l'Autorité des marchés financiers (AMF), qu'elle "conteste vigoureusement".

"Les sanctions apparaissent démesurées et complètement inédites" notamment car "aucune erreur intentionnelle n'a été commise", s'est défendu dans un communiqué le gestionnaire d'actifs, à qui le gendarme boursier reproche notamment la violation des règles de protection de l'intérêt des investisseurs.

Mardi, la Commission des sanctions de l'AMF avait décidé de sanctionner H2O et ses deux fondateurs avec une amende d'un montant total record: 75 millions d'euros pour la société britannique, 15 millions d'euros pour Bruno Crastes, son directeur général, et 3 millions d'euros pour Vincent Chailley, directeur des investissements.

L'AMF avait souligné "la gravité des manquements", "l'implication des dirigeants dans la commission de ceux-ci" ainsi que le "préjudice subi par les investisseurs résultant en particulier du blocage de leur épargne": depuis août 2020, sept fonds représentant alors plus de 1,6 milliard d'euros sont encore inaccessibles pour les épargnants.  

Comme lors de l'audience publique, fin novembre, H2O met en doute "la compétence internationale de la Commission des sanctions de l'AMF à statuer sur des griefs notifiés en novembre 2021 à une société de gestion alors britannique". 

Au moment du blocage des fonds, en août 2020, la société était majoritairement détenue par la banque française Natixis, qui a depuis réduit sa participation et compte se désengager totalement d'ici cinq ans. 

H2O conteste deux des trois principaux reproches de l'AMF, notamment le "non-respect des règles d’investissement dans le cadre des achats de titres non cotés." 

Provision 

H2O assure par ailleurs que "les sanctions financières n'auront pas d'incidence" sur ses activités, car elle a constitué des réserves de "près de 200 millions d'euros".

Toutefois, elle affirme que la sanction va "réduire" cette somme destinée à l'origine aux clients investis dans des fonds bloqués. 

Mardi avant l'annonce de la sanction, H2O avait annoncé un premier remboursement aux épargnants "dans les prochains jours". Pas de quoi apaiser l'association Collectif Porteurs H2O, qui regroupe plus de 3.000 épargnants lésés et qui a estimé que ce premier versement "ne diminuera pas substantiellement les pertes subies par les investisseurs".

L'association dit vouloir porter l'affaire devant la justice "en mars 2023", estimant que la sanction de l'AMF "légitime" son action.

En attendant l'issue du recours devant le Conseil d'Etat, H2O réorganise sa tête.   

M. Crastes, qui s'est également vu interdire pendant cinq ans d'occuper des fonctions de dirigeant et de gérant de fonds en France, quitte son poste de directeur général mais "reste au sein de la société en tant que directeur de la stratégie +corporate+ et marchés", a annoncé H2O.

Loïc Guilloux, jusqu'ici codirecteur général, assumera seul ces responsabilités, précise la société dans son communiqué.

La sanction record marque une nouvelle étape dans le feuilleton de H2O, gérant d'actifs aux performances exceptionnelles avant qu'il ne chute brutalement à partir de 2019 à la suite d'un article du Financial Times mettant en doute la qualité de certains des placements proposés. 

La précédente plus lourde sanction infligée par l'AMF était jusqu'alors celle de 35 millions d'euros prononcée à l'encontre de Natixis en 2017. Elle avait été ramenée par le Conseil d'Etat à 20 millions d'euros.

le Mercredi 4 Janvier 2023 à 04:10 | Lu 313 fois