Tahiti Infos

Grant McCall dévoile “son“ Rapa Nui


Grant McCall est anthropologue social. Il a posé les pieds sur Rapa Nui en 1968 pour la première fois. Depuis il y séjourne régulièrement. Il poursuit ses recherches sur cette île et ses habitants.
Grant McCall est anthropologue social. Il a posé les pieds sur Rapa Nui en 1968 pour la première fois. Depuis il y séjourne régulièrement. Il poursuit ses recherches sur cette île et ses habitants.
TAHITI, le 11 octobre 2022 - L’anthropologue social Grant McCall, spécialiste de l’île de Pâques, est actuellement sur l’Aranui pour y donner des conférences sur la Polynésie. À son retour, il proposera à la maison James Norman Hall, le 21 octobre, une soirée sur Rapa Nui, qui a fêté cette année les 300 ans de sa “découverte“ par le Hollandais Jacob Roggeveen. Grant McCall s’intéresse aux groupes humains, quelles que soient leurs caractéristiques. Il étudie tous les phénomènes sociaux qui requièrent une explication par des facteurs culturels. Au cours de cette conférence, intitulée “Qu’est-ce que Rapa Nui ?”, il abordera l’histoire de l’île, son origine et son originalité, à la fois du point de vue des touristes, des Chiliens et des Rapa.

Comment allez-vous aborder cette conférence ?
Je vais présenter l’île et décrire le point de vue des touristes, des Chiliens et des Rapa eux-mêmes pour dire ce que chacun pense de Rapa Nui. Cette année est un anniversaire car l’île a été ‘découverte’ en 1722 par le Hollandais Jacob Roggenveen. À cette occasion, j’ai d’ailleurs assisté au mois de juillet à un événement commémoratif à Leiden (aux Pays-Bas, NDLR).”

Qu’est-ce que Leiden ?
C’est l’île à partir de laquelle l’expédition de l’amiral Jacob Roggeveen est partie. Le port d’Amsterdam à l’époque n’était pas ce qu’il est devenu, il ne permettait pas des départs de grands navires. Il y a sur place un artiste qui a une obsession pour Rapa Nui et son histoire. Il y est installé depuis les années 1970, il a fait sculpter un grand moai par un sculpteur de Rapa Nui.”

Qu’est-ce qui caractérise l’île de Pâques ?
Le mystère reste de mise, encore aujourd’hui. En particulier pour les visiteurs qui la trouvent également exotique. Certains viennent pour les Moai, pour l’histoire, d’autres veulent voir l’endroit où des extraterrestres sont prétendument venus atterrir. Par ailleurs, certains guides dispersent des os, faisant croire que ce sont des os humains, et cela plaît aussi beaucoup aux touristes.”

Et les Chiliens, comment voient-ils cette île ?
Ils considèrent Rapa Nui comme chilienne, à 150%. De temps en temps, certains officiels se mettent en colère parce que de nombreux touristes visitent l’île sans passer par le Chili, mais ils restent tout de même satisfaits de pouvoir bénéficier de ce qu’ils considèrent comme une vitrine, comme quelque chose qui donne de la grandeur au pays. Enfin, les autorités chiliennes sont suspicieuses.

De quoi ?
Elles s’imaginent que la Polynésie veut récupérer l’île. Il y a quelques années, un archevêque catholique de Tahiti est allé donner une messe sur l’île de Pâques, des journalistes chiliens ont parlé à ce propos d’invasion. Sur place, il y a des militaires chiliens censés protéger l’île, mais en réalité, ils n’ont pas de moyens, par d’armes, pas d’avion, pas de bateau.

Comment les Rapa Nui se considèrent-ils ? Quel rapport ont-ils avec leur île ?

Ils se considèrent comme Polynésiens, leur langue est d’ailleurs très proche de celle utilisée aux Marquises. Depuis le XVIIIe siècle, ils emploient aussi de nombreux mots tahitiens. Une centaine de Rapa vivent à Tahiti.

Les Rapa Nui sont restés isolés plusieurs mois en raison du Covid, comment l’ont-ils vécu ?
C’était leur choix. Il faut savoir qu’en 2015 ou 2016, ils ont enregistré le passage de 150 000 visiteurs, autant qu’à Hawaii. Ils ne sont que 7 000 résidents environ dont 2 000 Chiliens. On a cru que les Rapa vivaient exclusivement du tourisme, or ils ont réussi sans cela. Ils appréhendent le tourisme autrement désormais. Cela reste d’ailleurs toujours difficile d’y aller.”

Un incendie vient de ravager l’île, qu’en est-il exactement ?
Le site de Raraku a entièrement brûlé en effet. Des moai et des pétroglyphes ont été endommagés. C’est une catastrophe, mais il devrait être possible, avec un nettoyage adapté, de récupérer les pierres.

Depuis quand travaillez-vous sur l’île et pourquoi, vous qui êtes Australien, vous êtes-vous intéressé à Rapa Nui ?
“J’y suis allé pour la première fois en 1968. Je suis anthropologue social et je m’interroge sur l’origine de la culture, sur ce qui fait une culture. Au XIXe siècle, les habitants de Rapa Nui ont été envoyés au Pérou, la population a été décimée, il ne restait en 1877 que 110 personnes. La culture Rapa Nui, de ce fait, était sur le point de disparaître. Lorsque j’ai pris connaissance de cela, j’ai commencé des recherches, il n’y avait rien, aucune étude à l’époque, aucun texte à l’exception d’un ouvrage d’un ethnologue suisse paru en 1940. C’était donc très intéressant. Je continue encore aujourd’hui mes recherches. Je parle la langue, j’ai des amis sur place, je m’y sens chez moi.”

Pratique

La conférence de Grant McCall se tiendra à la maison de James Norman Hall le 21 octobre à 18 heures. Elle sera suivie d’un buffet léger. Une participation de 3 500 Fcfp sera demandée, la réservation est obligatoire (50 places maximum).
Une deuxième date sera ajoutée le samedi 22 octobre à 14 heures si la première fait salle comble.

Rédigé par Delphine Barrais le Mardi 11 Octobre 2022 à 21:02 | Lu 1707 fois