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"Gilets jaunes": Philippe annonce plusieurs mesures pour "ramener l'apaisement"


Paris, France | AFP | mardi 04/12/2018 - Un recul pour sortir enfin de la crise des "gilets jaunes" ? Le Premier ministre a annoncé mardi la suspension de plusieurs mesures fiscales pour "ramener l'apaisement", mais sans convaincre, ni l'opposition, ni les protestataires.

Englué dans une crise qui a atteint un paroxysme samedi avec des scènes de guérilla urbaine à Paris, l'exécutif a fait des concessions, espérant qu'elles suffiront à calmer la colère qui secoue le pays et suscite la stupeur dans le reste du monde depuis trois semaines. 
Envoyé en première ligne, c'est le Premier ministre Edouard Philippe qui, dans une déclaration depuis l'hôtel Matignon, a décliné les trois mesures censées "ramener l'apaisement et la sérénité dans le pays".
Cible de toutes les critiques depuis la première journée de mobilisation contre la hausse des taxes sur les carburants, le 17 novembre, Emmanuel Macron a brièvement reçu un "gilet jaune" à l'Elysée mardi. 
Le président, dont la cote de confiance a atteint un nouveau plus bas (23%, -6), selon un sondage Ifop-Fiducial publié mardi, n'a pas prévu de s'exprimer dans l'immédiat, a indiqué la présidence.
Le plan de sortie de crise, acté lundi soir à l'Élysée lors d'une réunion interministérielle, comprend un moratoire de six mois sur la hausse de la taxe carbone, un gel des tarifs du gaz et de l'électricité cet hiver et aucun durcissement du contrôle technique automobile avant l'été.
Ces mesures devraient entraîner un manque à gagner de près de deux milliards d'euros pour les finances publiques, équivalant à 0,1 point de produit intérieur brut (PIB). Sachant que, selon Bercy, la mobilisation des "gilets jaunes" a déjà, à quelques semaines des fêtes de Noël, un impact "sévère et continu" sur l'économie.
"Le cap de la réduction de la dette sera tenu", a cependant insisté le ministre des Finances, Bruno Le Maire, depuis Bruxelles.
 

- "Unité de la Nation" -

"Aucune taxe ne mérite de mettre en danger l'unité de la Nation", a fait valoir Edouard Philippe, appelant les "gilets jaunes" qui ont prévu de manifester une nouvelle fois samedi à le faire "dans le calme.
La concertation locale qui sera engagée jusqu'au 1er mars servira, a ajouté le Premier ministre, à "améliorer" et "compléter" ces mesures "d'accompagnement justes et efficaces". "Si nous ne les trouvons pas, nous en tirerons les conséquences", a-t-il précisé, signifiant que le gel pourrait le cas échéant se transformer en abandon pur et simple.
Édouard Philippe doit s'exprimer une nouvelle fois mercredi à l'Assemblée, avant un débat suivi d'un vote qui n'engagera pas la responsabilité du gouvernement, tout comme jeudi au Sénat.
Selon les analystes, ces annonces représentent un recul pour Emmanuel Macron qui, depuis le début de son mandat, était déterminé à "garder le cap". "Depuis des mois, on se demandait qui réussirait à faire plier le gouvernement et le Président. Et comme toujours, ce sera venu d'un mouvement que nul n'avait prédit", a commenté le directeur général adjoint d'OpinionWay, Bruno Jeanbart.
Pour autant, cela risque de ne pas suffire.
Benjamin Cauchy, une des figures des "gilets jaunes", a salué une "première étape" dans le moratoire. Mais "les Français ne veulent pas des miettes, ils veulent la baguette au complet", a-t-il déclaré à l'AFP.
"Ils font ça pour qu'on lève le camp et qu'on rentre chez nous, mais on ne va pas bouger", a ajouté Lionel Rambeaux, soudeur, à un barrage à la sortie du Mans bloquant l'accès à un dépôt pétrolier.
Même insatisfaction auprès des partis d'opposition. "Trop peu et trop tard", a résumé le vice-président Les Républicains, Damien Abad.
 

- Elections dans 6 mois -

"Rien pour améliorer les fins de mois, rien sur le Smic, rien sur les pensions, rien sur l'ISF", a dénoncé Ian Brossat, chef de file du PCF pour les européennes.
La présidente du Rassemblement national Marine Le Pen a ironisé sur les six mois de moratoire, "sûrement un hasard", au bout desquels se tiendront les élections européennes.
La France insoumise et le PCF envisagent toujours une motion de censure à laquelle pourrait se joindre le Parti socialiste.
Dans ces conditions, la sortie de crise souhaitée par le gouvernement risque de mener tout droit dans une impasse. 
Partout en France, les appels pour se mobiliser un quatrième samedi de suite ont été maintenus. Deux rencontres de Ligue 1 de football, PSG - Montpellier et Toulouse-Lyon, prévues samedi, ont déjà été reportées.
Mardi, de nouveaux incidents ont éclaté devant des lycées de la région parisienne, et Marseille reste particulièrement touchée : sur 21 établissements perturbés, dix étaient en blocage total.
En attendant, la justice continue à faire son travail, alors que 412 personnes avaient été interpellées samedi rien qu'à Paris.
Treize personnes dont un mineur, soupçonnées d'avoir commis des dégradations à l'Arc de Triomphe, devaient être présentées mardi à un juge d'instruction en vue d'une éventuelle mise en examen.
A Tarbes et à Narbonne, huit "gilets jaunes" ont été condamnés à des peines allant de trois mois à un an de prison ferme avec mandat de dépôt.
La gestion de l'ordre public reste au centre du débat politique. Déjà entendus lundi soir à l'Assemblée, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner et son secrétaire d'État Laurent Nuñez s'en expliqueront mardi après-midi devant le Sénat.
 

 


le Mardi 4 Décembre 2018 à 05:14 | Lu 163 fois