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Faita Tehei, 19 ans au service de Turu-ma Tahiti


Faita Tehei, 19 ans au service de Turu-ma Tahiti
TAHITI, le 24 août 2022 - L’association Turu-ma Tahiti a vu le jour en 1989. Faita Tehei est arrivée en 2003. Elle est la personne qui a passé le plus d’années au sein du centre. Pour autant malgré le temps qui passe, elle ne cesse d’apprendre et de découvrir de nouvelles choses sur le monde du handicap.

"On peut visiter le centre si tu veux !" Faita Tehei est une hôte qui prend à cœur l’accueil et le bien-être des pensionnaires de Turu-ma comme des visiteurs de passage. Elle se lève et commence à faire les présentations des membres du bureau et à détailler les espaces traversés. L’endroit dans lequel Faita Tehei travaille donne sur une salle qui sert à la remise à niveau scolaire et à l’informatique.

Elle ouvre la porte et pénètre dans une très grande pièce ouverte sur l’extérieur. Ce vendredi matin, il y a un atelier broderie. Un groupe de femmes attablées est à l’œuvre. Mais la pièce sert à divers ateliers tout au long de la semaine. Dans une pièce attenante se trouve une pièce consacrée à la couture. "Les femmes qui sont là sont sourdes et ou muettes", précise Faita tehei. Pour autant, elles ne sont pas avares de communication, au contraire, elles engagent un dialogue signé. En guise de bienvenue, de "bonjour" puis de "merci", chacune porte une main ouverte à sa bouche, puis laisse celle-ci tomber en décrivant un quart de cercle. Faita Tehei admet ne pas savoir signer, "mais on se comprend, on trouve toujours le moyen de se dire les choses".

Une association dynamique

La visite continue : les cuisines, la cafeteria, un jardin, une petite pépinière, un fa’a’apu, un atelier de réparation. Il y a également un petit fare en bord de mer pour accueillir exceptionnellement et en cas d’urgence des pensionnaires, pas plus de 4 voire 5 personnes. "Nous ne faisons que de l’accueil de jour", précise Faita Tehei. Elle connaît parfaitement le centre, son histoire et ses pensionnaires ; elle fêtera en 2023 ses 20 années de présence. Elle annonce, "nous avons un projet d’extension qui abriterait une salle de sport. Nous avons lancé la construction d’un fare pote’e pour exposer les créations des pensionnaires comme les sculptures ou autres. Ils y seront mis à la vente." Il est aussi question d’ouvrir un snack, et de se rapprocher de la mairie et des prestataires touristiques pour faire venir des touristes.

33 ans d'accueil d'adultes en situation de handicap

Le centre Turu-ma a vu le jour en 1989. Il a été fondé par Hélène Helme à Mahina. "Elle accueillait les personnes à son domicile", raconte Faita Tehei. Les personnes reçues sont depuis toujours des adultes en situation de handicap, ainsi que des personnes sourdes et/ou muette. "Les pensionnaires sont atteints de déficiences intellectuelles plus ou moins sévères." Rapidement Hélène Helme s’est mise en quête d’un local non loin de chez elle. C’est Papenoo qui a fini par répondre favorablement. La commune a proposé un espace non loin du CJA. Plus tard, la fondatrice a jeté son dévolu sur une maison d’habitation côté mer, face à l’église Sainte Anne. Elle était à l’abandon, elle s’est engagée à la rénover. "Ensuite, l’association a mené dix années de combat pour pouvoir obtenir la belle structure que nous avons là. Nous y sommes depuis 2011."

L’objectif de Turu-ma, de l’association et du centre, est d’accueillir des pensionnaires, certes, mais aussi de les former quand cela est possible. Ils sont une soixantaine actuellement. Ils passent la nuit, le week-end et les jours de fermeture du centre dans leur famille biologique, ou plus souvent dans une famille d’accueil.

Atelier couture
Atelier couture
"J’ai vraiment trouvé mon domaine"

"Je suis monitrice éducatrice" explique Faita Tehei. "Quand j’ai commencé j’étais simple monitrice, je ne connaissais rien au handicap", reconnait-elle. La visite est terminée. Faita Tehei prend maintenant le temps de revenir sur son parcours. "J’ai beaucoup appris grâce à la formation et au temps passé ici. Et je continue à apprendre, tous les jours je découvre des choses. J’ai vraiment trouvé mon domaine." Pour elle, les personnes en situation de handicap ont besoin d’attention, d’accompagnement. "Elles sont en grande demande affective." Elles ont besoin également de se voir répéter en permanence les consignes. Il n’y a pas un jour où elle s’ennuie. D’autant qu’elle est passée chargée d’inclusion début 2022. "Tout un champ à explorer ! " Elle va devoir se rapprocher d’entreprises pour mettre en place des passerelles, favoriser l’insertion.

Faita Tehei est originaire de Papenoo. Elle a fait ses études en ville, à Anne-Marie Javouhey. Elle a suivi une terminale en médico-sociale. "la santé m’a toujours inspirée. Je savais que je ne voulais pas être infirmière, la vue du sang ne m’est pas supportable." Elle voulait, en revanche, prendre soin des gens. "ma maman était dans le social, et ça m’a toujours parlé."

Après son baccalauréat, elle s’est autorisée une année sabbatique. Elle dit être restée chez elle, n’ayant pas l’envie ni de continuer ses études, ni de travailler. Elle a fini par chercher un emploi, a trouvé une place dans une garderie tout en mettant un pied à Turu-ma. Sa sœur y était. Elle était monitrice. "Je l’ai accompagnée de temps en temps pour animer les ateliers chant qui existaient à l’époque." Le chant fait partie de sa vie, "je chante à l’église depuis tout le temps. Papa était responsable de la paroisse, tous les enfants ont été embarqués dans cette ambiance de chant et de prières. On peut dire que je suis tombée dans la soupe très jeune".

Broderie
Broderie
En 2003, une place s’est libérée au centre, deux moniteurs partaient pour une formation. Elle a obtenu un diplôme de moniteur d’atelier après deux années de formation puis un diplôme de moniteur éducateur après deux années supplémentaires de formation. Les formations ont été dispensées par alternance par la Das. "J’ai appris à mieux connaître le public qui fréquente le centre, à travailler avec lui."

Durant toutes ces années, Faita Tehei s’est forgé une solide expérience. Elle a pu suivre également l’évolution du centre et de ses pensionnaires. Selon elle, les cas de déficience intellectuelle moyenne à lourde étaient majoritaires au début. "Il fallait accompagner les pensionnaires jusqu’au bain." Désormais, ils sont plus autonomes. Elle n’a pas, en revanche, d’explication à cette évolution.
Un vent nouveau

Depuis l’ouverture du centre, quatre directeurs et directrices se sont succédés. Aujourd’hui et depuis 2020, la directrice de Turu-ma s’appelle Tania Pihahuna. Faita Tehei ne cache pas son contentement. Elle a apporté une nouvelle dynamique appréciable après des mois houleux au sein de l’association. "Elle a des idées sur le long terme, une stratégie, la bonne ambiance est revenue. " Tania Pihahuna encourage par ailleurs l’ensemble du personnel à se former. Ils sont 15 encadrants au total. Faita Tehei pourrait saisir une occasion de valider ses acquis de l’expérience. "Comme il n’y a plus de centre de formation adapté, on passerait par la VAE." Elle s’interroge. Consciente de toute l’implication que cela demande et du temps qu’il faudra y consacrer, elle n’a pas encore trouvé de réponse.

Les missions de Turu-ma

L’association Turu-ma et son centre organise, représente et défend les intérêts de ses adhérents. Elle facilite l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées adultes, assure l'animation et la gestion d'un ou plusieurs centres d'aide aux handicapés, favorise leur éducation, leur formation et leur insertion dans le milieu ordinaire du travail.

FB : association Turu-ma
Tel. : 40 83 58 01
[email protected]



Rédigé par Delphine Barrais le Mercredi 24 Août 2022 à 21:25 | Lu 3508 fois