PAPEETE, le 9 novembre 2014 - Des études archéologiques indiquent qu'il est très probable qu'à l'ère précolombienne, des Polynésiens soient allés plusieurs fois visiter une communauté d'amérindiens en Californie. Ils y ont laissé des mots et la technologie nécessaire à la construction de pirogues adaptées à la haute mer.
Le docteur Terry Jones est un archéologue et professeur d'anthropologie à la "California Polytechnic State University". En 2011, il publiait un livre intitulé "Polynesians in America", dans lequel il avançait l'hypothèse que des Polynésiens ont échangé des technologies et des mots avec les tribus Chumash et Gabrielino au 8ème siècle. Soit, tout de même, 800 ans avant que Christophe Colomb ne frôle le continent Américain…
C'est après notre article du 2 novembre [sur une découverte ethnologique récente]url:http://www.tahiti-infos.com/Deux-anciens-squelettes-du-peuple-Botocodu-etaient-Polynesiens_a113284.html (deux squelettes datant du 19ème siècle d'hommes issus du peuple Botocudo, autochtones du Brésil aux énormes anneaux de nez, appartenaient à un groupe génétiquement polynésien), que des lecteurs avertis ont signalé dans les commentaires les recherches scientifiques qui montrent les nombreux autres contacts entre le Triangle Polynésien et les Amériques. "Tutua" (pseudo) a cité celle du docteur Terry Jones, qui était passée inaperçue en Polynésie jusqu'à présent.
Elle est pourtant très intéressante, même si elle manque encore de preuves scientifiques irréfutables. Dans [une interview accordée en mars 2013 à James Blake Wiener,]url:http://etc.ancient.eu/2013/03/26/polynesians-in-california-evidence-for-an-ancient-exchange/ du site Ancient History Encyclopedia, le docteur Terry L. Jones résume les trouvailles qui l'ont conduit à émettre cette hypothèse d'un contact californien entre indiens d'Amérique et Polynésiens.
Une technologie pour la haute mer unique en Amérique
L'élément le plus probant est un bateau, le "tomolo", construit en planches cousues comme dans la technique polynésienne. Le mot lui-même pourrait provenir de la même racine que le mot hawaien "kumula‘au" (voir encadré). Mais surtout, pour construire un tel navire capable d'affronter la haute mer il faut énormément de talents très spécialisés et un design éprouvé. Or, de toute l'Amérique du Nord, seules les tribus Chumash et leurs voisins proches les Gabrielino (toutes deux d'ethnie Tongva) construisaient de telles embarcations très avancées. Les autres peuplades utilisaient des roseaux séchés attachés ensembles ou des troncs évidés.
Les Chumash se sont servis de leurs bateaux et de leurs talents de navigateurs pour établir un réseau de commerce sophistiqué qui a surpris même les colonisateurs espagnols aux 17ème et 18ème siècles.
Un autre indice intéressant : il n'existe qu'une seule autre tribu de toute l'Amérique qui utilisait cette technologie. Elle était située au Chili, et il semble selon d'autres recherches que ces canoés en planches cousues y aient été introduits au 14ème siècle… par des Polynésiens. Ils y auraient d'ailleurs aussi introduit les poules.
Deux vagues de contacts
La théorie de Terry Jones table pour l'instant sur deux vagues de contact. La première aurait eu lieu dans les années 700 après J-C, et originerait de Polynésie centrale (avant même la colonisation de Hawaii). Elle aurait apporté la technologie des canoés en planches cousues et celle des harpons composites. Puis vers les années 1300, un nouveau contact aurait eu lieu avec la transmission de différentes techniques de fabrication d'hameçons. Celui-là serait parti de Hawaii.
Il y a cependant des résistances à ces idées. En réponse, le professeur explique qu'elles restent des théories ouvertes au débat académique. Par contre, les descendants des Chumash et des Gabrielino qui perpétuent les traditions de fabrication des tomolo qu'il a contactés durant ses recherches lui ont souvent affirmé que cette origine Polynésienne de leurs bateaux était quelque chose "qu'ils avaient toujours su". Et parfois, il suffit d'écouter pour avoir ses réponses…
Le docteur Terry Jones est un archéologue et professeur d'anthropologie à la "California Polytechnic State University". En 2011, il publiait un livre intitulé "Polynesians in America", dans lequel il avançait l'hypothèse que des Polynésiens ont échangé des technologies et des mots avec les tribus Chumash et Gabrielino au 8ème siècle. Soit, tout de même, 800 ans avant que Christophe Colomb ne frôle le continent Américain…
C'est après notre article du 2 novembre [sur une découverte ethnologique récente]url:http://www.tahiti-infos.com/Deux-anciens-squelettes-du-peuple-Botocodu-etaient-Polynesiens_a113284.html (deux squelettes datant du 19ème siècle d'hommes issus du peuple Botocudo, autochtones du Brésil aux énormes anneaux de nez, appartenaient à un groupe génétiquement polynésien), que des lecteurs avertis ont signalé dans les commentaires les recherches scientifiques qui montrent les nombreux autres contacts entre le Triangle Polynésien et les Amériques. "Tutua" (pseudo) a cité celle du docteur Terry Jones, qui était passée inaperçue en Polynésie jusqu'à présent.
Elle est pourtant très intéressante, même si elle manque encore de preuves scientifiques irréfutables. Dans [une interview accordée en mars 2013 à James Blake Wiener,]url:http://etc.ancient.eu/2013/03/26/polynesians-in-california-evidence-for-an-ancient-exchange/ du site Ancient History Encyclopedia, le docteur Terry L. Jones résume les trouvailles qui l'ont conduit à émettre cette hypothèse d'un contact californien entre indiens d'Amérique et Polynésiens.
Une technologie pour la haute mer unique en Amérique
L'élément le plus probant est un bateau, le "tomolo", construit en planches cousues comme dans la technique polynésienne. Le mot lui-même pourrait provenir de la même racine que le mot hawaien "kumula‘au" (voir encadré). Mais surtout, pour construire un tel navire capable d'affronter la haute mer il faut énormément de talents très spécialisés et un design éprouvé. Or, de toute l'Amérique du Nord, seules les tribus Chumash et leurs voisins proches les Gabrielino (toutes deux d'ethnie Tongva) construisaient de telles embarcations très avancées. Les autres peuplades utilisaient des roseaux séchés attachés ensembles ou des troncs évidés.
Les Chumash se sont servis de leurs bateaux et de leurs talents de navigateurs pour établir un réseau de commerce sophistiqué qui a surpris même les colonisateurs espagnols aux 17ème et 18ème siècles.
Un autre indice intéressant : il n'existe qu'une seule autre tribu de toute l'Amérique qui utilisait cette technologie. Elle était située au Chili, et il semble selon d'autres recherches que ces canoés en planches cousues y aient été introduits au 14ème siècle… par des Polynésiens. Ils y auraient d'ailleurs aussi introduit les poules.
Deux vagues de contacts
La théorie de Terry Jones table pour l'instant sur deux vagues de contact. La première aurait eu lieu dans les années 700 après J-C, et originerait de Polynésie centrale (avant même la colonisation de Hawaii). Elle aurait apporté la technologie des canoés en planches cousues et celle des harpons composites. Puis vers les années 1300, un nouveau contact aurait eu lieu avec la transmission de différentes techniques de fabrication d'hameçons. Celui-là serait parti de Hawaii.
Il y a cependant des résistances à ces idées. En réponse, le professeur explique qu'elles restent des théories ouvertes au débat académique. Par contre, les descendants des Chumash et des Gabrielino qui perpétuent les traditions de fabrication des tomolo qu'il a contactés durant ses recherches lui ont souvent affirmé que cette origine Polynésienne de leurs bateaux était quelque chose "qu'ils avaient toujours su". Et parfois, il suffit d'écouter pour avoir ses réponses…
Des mots très similaires entre les langues Chumash et polynésiennes
Les "tomolo" et leur processus de fabrication utilisent un champ lexical qui peut sembler être tiré de langues polynésiennes. Tomolo pourrait provenir de la langue proto-polynésienne, et du mot (reconstitué par les scientifiques) *tumura’aakau, dont dérive le mot hawaiien Kumulaa’au qui signifierait "arbre qui fournit un bois utile pour fabriquer des bateaux", et le mot tahitien tumu ra'au, qui signifie "arbre".
Dans la même idée, d'autres mots du champ lexical de la fabrication de bateaux semblent empruntés au proto-polynésien :
Ti’at : en Gabrielino/Tongva "canoé en planches cousues" ; en proto-polynésien "coudre"
Taraina/tarainxa : en Gabrielino/Tongva "n'importe quel bateau", similaire à "talai" en proto-polynésien qui signifie "tailler du bois"
Kalui : en Chumash "harpon en os", pourrait venir de la combinaison des mots polynésiens "tala" pour "un objet pointu, une épine" et de "hui" pour "os".
Les "tomolo" et leur processus de fabrication utilisent un champ lexical qui peut sembler être tiré de langues polynésiennes. Tomolo pourrait provenir de la langue proto-polynésienne, et du mot (reconstitué par les scientifiques) *tumura’aakau, dont dérive le mot hawaiien Kumulaa’au qui signifierait "arbre qui fournit un bois utile pour fabriquer des bateaux", et le mot tahitien tumu ra'au, qui signifie "arbre".
Dans la même idée, d'autres mots du champ lexical de la fabrication de bateaux semblent empruntés au proto-polynésien :
Ti’at : en Gabrielino/Tongva "canoé en planches cousues" ; en proto-polynésien "coudre"
Taraina/tarainxa : en Gabrielino/Tongva "n'importe quel bateau", similaire à "talai" en proto-polynésien qui signifie "tailler du bois"
Kalui : en Chumash "harpon en os", pourrait venir de la combinaison des mots polynésiens "tala" pour "un objet pointu, une épine" et de "hui" pour "os".