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En appel, l'homme poursuivi pour un coup de pied mortel à Moorea nie toujours


Tahiti, le 20 mars 2023 – L’affaire avait choqué l’opinion publique. Le procès en cour d'assises d'appel du jeune homme de 22 ans, condamné en mai dernier à 12 ans ferme pour avoir mis un coup de pied mortel à un quinquagénaire fin 2019 à Moorea, s'est ouvert lundi matin pour trois jours. L'accusé, qui a toujours nié les faits, encourt la réclusion criminelle à perpétuité. 
 
Condamné le 25 mai dernier à 12 ans de prison pour un vol avec violence ayant entraîné la mort sans intention de la donner commis à Papetoai sur l'île Sœur le 13 décembre 2019, le jeune homme de 22 ans a comparu lundi devant la cour d'assises d'appel dans le cadre d'un procès qui doit durer trois jours. 
 
Cette affaire, qui avait fortement choqué l'opinion publique du fait de sa violence, avait éclaté en début de soirée le 13 décembre 2019 lorsque les gendarmes de Moorea avaient été informés du fait que, suite à une bagarre ayant eu lieu à Papetoai, un homme gisait inconscient sur la route. Sur place, les militaires avaient en effet constaté que le corps d'un quinquagénaire inanimé était allongé sur la chaussée en position latérale de sécurité. Confrontés à une foule hostile et alcoolisée, les gendarmes avaient recueilli les premiers témoignages selon lesquels un habitant du quartier, âgé de 18 ans, s'était approché de la victime, lui avait demandé 500 Fcfp et lui avait finalement mis un coup de pied au niveau du visage. Hospitalisé, le quinquagénaire était finalement décédé le lendemain de l'agression des suites d'un traumatisme causé par des fractures crâniennes. 
 
Ice et alcool
 
Interpellé au domicile de ses parents le lendemain des faits, le jeune homme désigné par plusieurs témoins comme l'auteur du coup de pied mortel avait finalement été placé en garde à vue. S'il avait fermement nié les faits, il avait cependant expliqué aux enquêteurs qu'il avait passé la journée à Tahiti à boire et à fumer de l'ice avec des copains. En fin d'après-midi, l'accusé était rentré à Moorea où il s'était battu avec un ami et avait insulté le chauffeur du bus dans lequel il se trouvait. 
 
Reconnu coupable d'avoir involontairement causé la mort du quinquagénaire malgré de constantes dénégations, le jeune homme avait été condamné en mai dernier à 12 ans de prison ferme. Une décision dont il avait fait immédiatement appel et qui lui vaut donc un second procès d'assises qui s'est ouvert lundi matin. Après avoir évoqué les faits reprochés à l'accusé, le président de la cour d'assises d'appel a rappelé les éléments à décharge – le fait que l'accusé a toujours nié et les caractère “non conclusif” de la reconstitution – puis les éléments à charge du dossier, soit les deux “témoins oculaires de l'agression qui n'avaient aucun problème avec l'accusé” et les antécédents de violences de ce dernier qui avait notamment envoyé sa copine à l'hôpital après lui avoir mis un violent coup de pied.
 
Revirements
 
Le président de la cour ayant choisi de ne pas évoquer la personnalité de l'accusé en ce premier jour de procès, ce sont les témoins qui ont donc défilé à la barre durant toute la journée. Premiers à être entendus, les deux cousins ainsi que le petit frère de l'accusé, qui avaient passé la soirée avec ce dernier, ont expliqué à plusieurs reprises qu'ils ne “savaient plus” et sont revenus sur leurs déclarations. L'un des cousins de l'accusé, qui avait dit aux gendarmes puis devant le juge d'instruction qu'il avait vu son cousin courir vers la victime et lui voler son sac, est intégralement revenu sur ses déclarations en affirmant avec une certaine gêne qu'il n'avait rien vu. Un autre témoin, connaissance de l'accusé, a quant à lui soutenu qu'à Papetoai, “tout le monde disait” que le jeune homme était coupable mais que les gens avaient “peur” de venir à la barre. 
 
Entendue à son tour, la mère de l'accusé est revenue sur le jour des faits où d'après son propre aveu, son fils était “carrément bourré”. En pleurs, elle a ensuite demandé au président de la cour d'assises de lui “ramener son fils”. Ce à quoi l'avocat de la mère de la victime, Me Loris Peytavit, lui a opposé que l'on ne ramènerait jamais son fils à sa cliente. 
 
Le procès doit reprendre mardi matin avec l'audition cruciale des témoins oculaires de ce dossier qui avaient reconnu l'accusé le soir des faits. 

“Nous sommes convaincus de son innocence”

Lors de son premier procès, votre client avait écopé de 12 ans de prison ferme alors qu'il encourait la perpétuité. Pourquoi la défense a-t-elle décidé de faire appel ?
 
“Nous avons fait appel car nous sommes convaincus de l'innocence de notre client qui la clame depuis le début de la procédure de manière constante tel que l'a rappelé le président de la cour d'assises. C'est troublant lorsque l'on regarde les éléments recueillis dans ce dossier : un environnement alcoolisé extrêmement fort, des réputations de bagarreur de certaines personnes et notre client qui est mis en cause par – et ce sera un virage important durant ce procès –, par deux personnes qui auraient dit le voir. Or, la reconstitution n'a pas été convaincante du tout et on a de la peine à visualiser et à se mettre en situation et le reconnaître là où ces personnes disent l'avoir vu et reconnu. Au pire, on voit des ombres chinoises, des silhouettes sans pour autant reconnaître un visage. Ces éléments nous permettaient de relever appel pour soumettre à nouveau l'appréciation de ce dossier aux jurés.” 
 
Comptez-vous apporter de nouveaux éléments lors de ce procès, notamment celui de la récente reconstitution organisée à Moorea ?
 
“Nous verrons lorsque le supplément sera soumis à la cour d'assises. Nous n'y sommes pas encore. À titre personnel, j'estime que cette reconstitution n'était pas convaincante pour l'accusation.”

Rédigé par Garance Colbert le Lundi 20 Mars 2023 à 18:52 | Lu 1201 fois