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En Polynésie, l’armée aussi a son plan de redressement


Crédit photo ministère de la défense
Crédit photo ministère de la défense
Faire autant, avec moins d’effectifs et de moyens : c’est le défi auquel est confrontée l’armée en Polynésie. 2012 sera une année décisive : au mois de juillet 2012, le RIMAP-P sera dissous, la Base aérienne 190 sera fermée, et 200 militaires quitteront la Polynésie. Et ce n’est pas tout : un des deux patrouilleurs de la marine, La Tapageuse, quittera nos eaux. Les restructurations des forces armées s’échelonneront jusqu’en 2016. A cette date, les effectifs militaires présents en Polynésie auront diminué de moitié. La Polynésie fait les frais d’une politique de redistribution des forces dans la zone Pacifique, puisque c’est désormais la Nouvelle-Calédonie qui bénéficiera du gros des troupes terrestres.

Si effectifs diminuent en Polynésie, - ils seront deux fois moins nombreux en 2016 -, en revanche les missions de l’armée ne changent pas. « Ce qui m’intéresse aujourd’hui, c’est de continuer à accomplir nos missions? sachant que le contrat opérationnel fixé aux forces armées a peu évolué » explique donc le contre-amiral Jérôme Régnier, qui accepte de recevoir Tahiti Infos pour un point d'étape de cette restructuration. Il rappelle que le contrat de l'armée définit trois missions en Polynésie française : la veille opérationnelle et stratégique des forces armées ; la surveillance de la zone maritime française (ZEE) ; et last, but not least, la surveillance et le soutien des anciens sites d’expérimentation du Pacifique : Moruroa et Fangataufa, ainsi que la réhabilitation de l’atoll de Hao. « On va continuer à faire tout ça avec des moyens moindres, grâce à la rationalisation des soutiens » affirme l’amiral, qui ne minimise toutefois pas les difficultés.


Mutualisation, regroupements...

En Polynésie, l’armée aussi a son plan de redressement
C’est probablement en mer que le manque de moyen se fera le plus sentir. Il restera un seul patrouilleur, l’Arago, pour surveiller une zone maritime de 5 millions de kilomètres carrés. Le départ de la Tapageuse risque d’être donc d’être un handicap, même si l’amiral tient à en minimiser les conséquences. « Oui, un patrouilleur, c’est peu », reconnaît-il, tout en précisant que la surveillance se fait essentiellement par avion. « Les vecteurs de la surveillance maritime, ce sont les Guardians ». Il y en a deux en Polynésie. Et si les deux hélicoptères, Super Puma et Fennec, partent eux-aussi, c’est pour mieux être « remplacés par deux Dauphins de la marine nationale », mieux adaptés, paraît-il, au sauvetage en mer.

Sur terre, le mot d’ordre sera la mutualisation des moyens. Exemple ? Le personnel volant qui restera sur place malgré la dissolution de la BA bénéficiera du soutien logistique de la gendarmerie nationale, pour la restauration notamment. L’armée opère également un regroupement de ses sites. Ils seront concentrés sur le camp d’Arue. Les autres sites seront transférés à France domaine, qui se chargera ensuite d’étudier les projets de développement économique présentés par les communes où ils sont situés. Outre la corne nord du terrain d’Arue, en cours de session à la ville de Philp Schyle, les sites libérés sont ceux du GSMA à Mahina, du Fort de Taravao dans la commune de Taiarapu Est, d'une partie de la base navale, et de quelques résidences. Ils seront cédés au franc symbolique aux communes qui en feront la demande .

Avec 50% d’effectifs en moins, la restructuration de l’armée risque-t-elle d’impacter l’économie polynésienne ? Non, selon l’amiral, pour qui les conséquences économiques de ces départs « ont tendance à être exagérés ». Il rappelle que l'armée continue d'investir. La commande publique est peut-être « sans commune mesure avec l’époque du CEP », elle n’en reste pas moins importante : les restructurations entraînent plusieurs chantiers de réaménagement et de construction. L’armée se targue de faire travailler les entreprises locales, avec la construction de 16 logements face au lycée du Taaone, pour un montant de 900 millions. Ainsi que de préfabriqués d’origine australienne à Arue pour un montant de 312 millions de francs pacifique. « Nous faisons systématiquement des appels d’offres, et choisissons les entreprises les moins chères », précise tout de même l’amiral.

Il faut aussi prendre en compte le chantier de la réhabilitation de Hao : 1 milliard par an, jusqu’en 2016. 185 hectares doivent être réhabilités. Et le plus dur reste à faire : il s’agit des zones affectées par une pollution industrielle. « Industrielle, pas nucléaire », insiste l’amiral. Il s’agit d’hydrocarbures, de plomb.. .Des plans de traitement sont en cours d’élaboration. Quant aux risques nucléaires pour les personnes chargées de cette réhabilitation, ils sont nuls, affirme l’amiral. « Il n’y a pas sur Hao de déchets radioactifs : c’est un chantier non nucléaire, on l’a dit et répété. Beaucoup d’amalgames sont faits » tranche-t-il, pour clore le sujet.

Rappelons que la Polynésie française n’est pas le seul territoire concerné par les réductions d’effectifs. Ils doivent diminuer de 18% en Nouvelle-Calédonie. Rationalisation, regroupement, économie foncière, et même plan de départ volontaire des personnels civils (230 d’ici 2016) : les missions de l’amiral ne sont pas sans rappeler celles d’un certain gouvernement. Mais dans l'armée, on n'a pas peur de voir les choses en grand : le Livre Blanc de la Défense prévoit 54 000 départs entre 2009 et 2016 à l'échelle nationale.

le Mercredi 14 Septembre 2011 à 18:22 | Lu 2324 fois