La journaliste et coordinatrice éditoriale, Dominique Morvan, a choisi de se pencher sur ce sujet suite à une anecdote. "Quand j'étais journaliste, il m'est arrivé de faire du judiciaire et j'étais impressionnée car j'ai remarqué qu'il y avait essentiellement des hommes. Très récemment, je me suis rendue au Palais de justice et je n'ai vu que des femmes !" C'est ce qui lui a mis la puce à l'oreille concernant la place de la femme dans le monde du travail. Elle s'est attachée à faire une étude par secteur, qui a montré qu'un cadre sur trois est une femme. En ce qui concerne l'entreprenariat, 51% des patentes ont été ouvertes par des femmes.
"Dans ce dossier, j'ai utilisé des chiffres de l'IEOM [Institut d'émission d'Outre-mer, ndlr], de l'ISPF [Institut de la statistique de Polynésiefrançaise, ndlr], des analyses d'experts, et des témoignages". Ces différents indicateurs ont montré l'investissement des femmes en Polynésie et leur "montée en puissance". Pour regrouper ces informations, Dominique Morvan a mobilisé un maximum de personnes. "J'ai contacté les chefs des grandes entreprises de la place pour obtenir des chiffres. Les directeurs des ressources humaines s'intéressaient à cette démarche car ils étaient curieux".
Une recrudescence des actes machistes
Le comportement le plus extrême est celui du harcèlement au travail, notamment le harcèlement sexuel. Une partie du dossier lui est consacré. Selon le dossier, le harcèlement constituerait un "risque psychosocial", c'est-à-dire qu'il porte atteinte à l'intégrité physique et à la santé mentale des salariés au sein de leur environnement professionnel. L'augmentation de ce type de faits est, selon la coordinatrice éditoriale, "peut-être liée au fait que les femmes s'étaient tues jusqu'ici".
Les chiffres publiés dans le dossier montrent d'ailleurs que le nombre de jugements du tribunal du travail et d'arrêts de la cour d'appel de Papeete a considérablement augmenté, passant de 8 jugements en 2010 à 24 en 2015.
La journaliste, qui travaille avec un groupe d'études composé de professionnels et de personnes s'intéressant déjà au sujet du harcèlement sexuel, insiste : "Le sujet mériterait d'être inscrit dans les programmes de formation des entreprises". Elle invite à prendre conscience du fossé qui existe entre la génération précédente et la nouvelle. Selon la coordinatrice éditoriale, "les jeunes garçons font leur éducation sexuelle sur le net". Leur rapport à la femme est donc profondément atteint.
Le sujet du harcèlement sexuel au travail est très dense. Il engendre aussi des changements dans le rapport au monde professionnel. En cela, la coordinatrice éditoriale assure : "L'année prochaine, on continue à parler de ce problème". Ce dossier n'est que le premier d'une longue série.
Dominique Morvan, Journaliste et coordinatrice éditoriale du Dixit
"Il y a des mots à ne pas dire et des gestes à ne pas faire"
Vous avez assuré que vous approfondiriez le sujet du harcèlement sexuel au travail dans le prochain numéro. Comment comptez-vous vous y prendre ?
"Je vais travailler avec des spécialistes de tous les niveaux, des psychologues, etc. Mais aussi des associations comme Vahine Orama, et des professionnels de la formation."
Comment les formations pourront-elles aider à pallier ce problème ?
"Il existe déjà des formations qui sont données en entreprise pour que chacun comprenne qu'il y a des mots à ne pas dire et des gestes à ne pas faire. Qu'il ne faut pas mélanger la sphère professionnelle et la sphère privée. Je pense qu'il faut accentuer cette formation, tout simplement. Il ne faut pas arriver à un stade où quelqu'un aurait la très mauvaise idée de faire une "Balance ton porc". Je pense que les conséquences en Polynésie seraient dramatiques."