Tahiti, le 21 janvier 2021 - Si l'arrivée d'une nouvelle armurerie a provoqué l'émoi en Polynésie, la réglementation qui encadre ce type de commerces est extrêmement contraignante. Tout comme l'acquisition ou la détention d'une arme de catégorie B qui exige tout un arsenal de justificatifs, dont une licence de tir sportif et la bénédiction de la fédération polynésienne de tir. Pour l'obtenir, le candidat fait l'objet d'une enquête de moralité qui peut durer un an.
"Quand tu ouvres une armurerie tu fais profil bas, tu ne le cries pas sur tous les toits en espérant avoir ton autorisation plus rapidement" s'exclame Julien (prénom d'emprunt). Comme lui, les autres armuriers du territoire ne cachent pas leur colère depuis l'arrivée très médiatisée d'un nouveau concurrent à Papeete samedi. "Il nous a mis dans la m..." fustige le professionnel. "On ne peut pas lui refuser l'agrément puisqu'il est en règle, mais il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs, ce n'est pas pour rien si ça prend autant de temps pour avoir les autorisations."
Dans le cas d'une armurerie "la personne physique ou le représentant légal de la société doit être titulaire d'un agrément délivré par l’État, d’une durée de validité de 10 ans" précise le haussariat. C'est le cas du nouveau commerce de Papeete qui fait tant de bruit. Son dirigeant doit ainsi présenter soit un diplôme d'armurier, soit un certificat de qualification professionnelle délivré par la Fédération professionnelle des métiers de l’arme et de la munition (FEPAM), soit un diplôme de niveau IV, soit tout document justifiant d’une expérience d’au moins six ans dans le métier de l’armurerie.
"Les gens ne connaissent pas la réglementation"
Malgré toutes ces précisions, le sujet embrase la toile. Sur les réseaux sociaux, on s'offusque de l'ouverture d'une armurerie "pignon sur rue", tandis que le Tavini dénonce un "non-sens", réclamant au passage des comptes à un gouvernement qui se positionne sans pour autant être compétent en la matière... Qu'importe. Très vite, une pétition voit le jour. Enregistrant déjà 1 700 signatures au compteur, elle assure que "des personnes amateurs ou professionnelles des armes ici (…) ont su faire sans magasin spécialisé", et craint surtout que "la circulation d'armes à feu augmente la délinquance et les violences."
Or, les armes à feu sont vendues depuis plus de 20 ans par sept professionnels qui répondent aux critères énoncés plus haut. S'ils n'ont pas fait l'objet d'une levée de bouclier selon Louis Provost, président de la fédération polynésienne de tir, "c'est parce qu'ils n'ont pas fait de publicité". Il évoque alors le cas de l'armurier de Raiatea qui s'était aventurer à médiatiser son affaire, avant de se résoudre à mettre la clé sous la porte face à la pression populaire.
"Tout le monde s'était dit que tout le monde allait pouvoir s'acheter une arme, alors que non, ces armes sont destinées à la chasse ou au tir sportif uniquement, déplore le président. Les gens ne connaissent pas la réglementation, c'est normal que ça leur fasse peur, ils croient voir des armes de guerre à la télé." Soit des armes de catégorie A.
Aucun risque à ce niveau-là, étant donné que "l'acquisition et la détention des matériels de guerre, armes et éléments d'armes relevant de la catégorie A sont interdites, sauf pour les besoins de la défense nationale et de la sécurité publique" précise la réglementation relative aux armes applicable en Polynésie française.
Le transport du domicile au stand de tir seulement
La catégorie B en revanche est permise, mais soumise à une autorisation pour l'acquisition et la détention uniquement. Non pour le port, réservé aux forces de l'ordre. "On a le droit de transporter mais sur un trajet bien défini, du domicile au stand de tir. Il ne s'agit pas de s'arrêter au marché et de passer voir des copains sur la route, souligne Louis Provost. Idem pour une compétition en Nouvelle-Zélande ou en Nouvelle-Calédonie. L'autorisation pour l'acquisition et la détention dans des conditions strictes chez vous, elle vaut titre de transport."
Et pour obtenir cette autorisation –valable cinq ans– auprès du haut-commissariat, c'est un vrai parcours du combattant. Déjà parce qu'il faut présenter une licence sportive de tir. Il faut également pouvoir justifier d'un "certificat médical datant de moins d'un mois attestant que l'état de santé physique et psychique du demandeur n'est pas incompatible avec la détention d'arme et de munitions". À cela s'ajoute le feu vert du président du club de tir auquel est associé celui de la fédération polynésienne de tir (FPT). C'est elle qui soumet le candidat à une enquête de moralité pouvant s'étendre sur six mois, voire un an.
Surclassées en catégories A
"Et encore, si le gars n'est pas assidu, ni sérieux et qu'il ne maîtrise pas la discipline, il ne pourra pas être titularisé" développe le président de la fédération. En parallèle, le casier judiciaire de l'acquéreur est bien sûr passé au crible. Enfin, il devra présenter un "document attestant de la possession d'un coffre-fort ou d'une armoire-forte au domicile du demandeur pour la conservation des armes". Moins contraignantes, les catégories C et D – tout ce qui est à air comprimé – sont soumises à une déclaration pour l'acquisition et la détention au haut-commissariat.
Durcie par décret en août 2018, la réglementation a surclassé en catégorie A les armes automatiques ou semi-automatiques avec des chargeurs de plus de 30 coups. Sauf dérogation réservée aux tireurs sportifs, elles sont donc interdites. De même que les dispositifs qui accélèrent la vitesse de tir, en mode "rafale".
Si la Polynésie compte plus de 400 tireurs sportifs et huit armureries, le haut-commissariat recense près de 3 400 armes sur le territoire. Preuve que le risque est maîtrisé selon la fédération, aucun trouble à l'ordre public n'est à déplorer. "Depuis le temps qu'on fait du tir, on n'a jamais eu d'incident, fait remarquer Louis Provost. Le premier club de tir a ouvert en 1979, mais il y avait déjà des clubs de balltrap dans les années 60. Ce sont les Corses qui ont amené la discipline sportive avec des fusils de chasse au départ, on tirait sur la plage Cigogne qui est aujourd'hui le parc Paofai."
"Quand tu ouvres une armurerie tu fais profil bas, tu ne le cries pas sur tous les toits en espérant avoir ton autorisation plus rapidement" s'exclame Julien (prénom d'emprunt). Comme lui, les autres armuriers du territoire ne cachent pas leur colère depuis l'arrivée très médiatisée d'un nouveau concurrent à Papeete samedi. "Il nous a mis dans la m..." fustige le professionnel. "On ne peut pas lui refuser l'agrément puisqu'il est en règle, mais il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs, ce n'est pas pour rien si ça prend autant de temps pour avoir les autorisations."
Dans le cas d'une armurerie "la personne physique ou le représentant légal de la société doit être titulaire d'un agrément délivré par l’État, d’une durée de validité de 10 ans" précise le haussariat. C'est le cas du nouveau commerce de Papeete qui fait tant de bruit. Son dirigeant doit ainsi présenter soit un diplôme d'armurier, soit un certificat de qualification professionnelle délivré par la Fédération professionnelle des métiers de l’arme et de la munition (FEPAM), soit un diplôme de niveau IV, soit tout document justifiant d’une expérience d’au moins six ans dans le métier de l’armurerie.
"Les gens ne connaissent pas la réglementation"
Malgré toutes ces précisions, le sujet embrase la toile. Sur les réseaux sociaux, on s'offusque de l'ouverture d'une armurerie "pignon sur rue", tandis que le Tavini dénonce un "non-sens", réclamant au passage des comptes à un gouvernement qui se positionne sans pour autant être compétent en la matière... Qu'importe. Très vite, une pétition voit le jour. Enregistrant déjà 1 700 signatures au compteur, elle assure que "des personnes amateurs ou professionnelles des armes ici (…) ont su faire sans magasin spécialisé", et craint surtout que "la circulation d'armes à feu augmente la délinquance et les violences."
Or, les armes à feu sont vendues depuis plus de 20 ans par sept professionnels qui répondent aux critères énoncés plus haut. S'ils n'ont pas fait l'objet d'une levée de bouclier selon Louis Provost, président de la fédération polynésienne de tir, "c'est parce qu'ils n'ont pas fait de publicité". Il évoque alors le cas de l'armurier de Raiatea qui s'était aventurer à médiatiser son affaire, avant de se résoudre à mettre la clé sous la porte face à la pression populaire.
"Tout le monde s'était dit que tout le monde allait pouvoir s'acheter une arme, alors que non, ces armes sont destinées à la chasse ou au tir sportif uniquement, déplore le président. Les gens ne connaissent pas la réglementation, c'est normal que ça leur fasse peur, ils croient voir des armes de guerre à la télé." Soit des armes de catégorie A.
Aucun risque à ce niveau-là, étant donné que "l'acquisition et la détention des matériels de guerre, armes et éléments d'armes relevant de la catégorie A sont interdites, sauf pour les besoins de la défense nationale et de la sécurité publique" précise la réglementation relative aux armes applicable en Polynésie française.
Le transport du domicile au stand de tir seulement
La catégorie B en revanche est permise, mais soumise à une autorisation pour l'acquisition et la détention uniquement. Non pour le port, réservé aux forces de l'ordre. "On a le droit de transporter mais sur un trajet bien défini, du domicile au stand de tir. Il ne s'agit pas de s'arrêter au marché et de passer voir des copains sur la route, souligne Louis Provost. Idem pour une compétition en Nouvelle-Zélande ou en Nouvelle-Calédonie. L'autorisation pour l'acquisition et la détention dans des conditions strictes chez vous, elle vaut titre de transport."
Et pour obtenir cette autorisation –valable cinq ans– auprès du haut-commissariat, c'est un vrai parcours du combattant. Déjà parce qu'il faut présenter une licence sportive de tir. Il faut également pouvoir justifier d'un "certificat médical datant de moins d'un mois attestant que l'état de santé physique et psychique du demandeur n'est pas incompatible avec la détention d'arme et de munitions". À cela s'ajoute le feu vert du président du club de tir auquel est associé celui de la fédération polynésienne de tir (FPT). C'est elle qui soumet le candidat à une enquête de moralité pouvant s'étendre sur six mois, voire un an.
Surclassées en catégories A
"Et encore, si le gars n'est pas assidu, ni sérieux et qu'il ne maîtrise pas la discipline, il ne pourra pas être titularisé" développe le président de la fédération. En parallèle, le casier judiciaire de l'acquéreur est bien sûr passé au crible. Enfin, il devra présenter un "document attestant de la possession d'un coffre-fort ou d'une armoire-forte au domicile du demandeur pour la conservation des armes". Moins contraignantes, les catégories C et D – tout ce qui est à air comprimé – sont soumises à une déclaration pour l'acquisition et la détention au haut-commissariat.
Durcie par décret en août 2018, la réglementation a surclassé en catégorie A les armes automatiques ou semi-automatiques avec des chargeurs de plus de 30 coups. Sauf dérogation réservée aux tireurs sportifs, elles sont donc interdites. De même que les dispositifs qui accélèrent la vitesse de tir, en mode "rafale".
Si la Polynésie compte plus de 400 tireurs sportifs et huit armureries, le haut-commissariat recense près de 3 400 armes sur le territoire. Preuve que le risque est maîtrisé selon la fédération, aucun trouble à l'ordre public n'est à déplorer. "Depuis le temps qu'on fait du tir, on n'a jamais eu d'incident, fait remarquer Louis Provost. Le premier club de tir a ouvert en 1979, mais il y avait déjà des clubs de balltrap dans les années 60. Ce sont les Corses qui ont amené la discipline sportive avec des fusils de chasse au départ, on tirait sur la plage Cigogne qui est aujourd'hui le parc Paofai."
Classification des armes
Catégorie A : armes de guerre, interdites ici.
Catégorie B : Armes de poing, fusils semi-automatiques d’une capacité supérieure à trois coups, armes ayant l’apparence d’une arme de guerre, fusils à pompe, armes à balles en caoutchouc, armes à impulsion électrique.
Catégorie C : Fusils semi-automatiques d’une capacité inférieure ou égale à trois coups, armes de balltrap, armes d'épaule à canon lisse tirant un coup par canon, armes neutralisées, armes d’une puissance supérieure à 20 joules.
Catégorie D : Couteaux-poignards, aérosols lacrymogènes inférieurs à 100ml, armes à impulsions électriques de contact, revolvers d’alarme, de tir de munitions à blanc ou à gaz, armes d’une puissance strictement inférieure à 20 joules, certains pistolets et carabines à air comprimé, répliques d'airsoft.
Catégorie B : Armes de poing, fusils semi-automatiques d’une capacité supérieure à trois coups, armes ayant l’apparence d’une arme de guerre, fusils à pompe, armes à balles en caoutchouc, armes à impulsion électrique.
Catégorie C : Fusils semi-automatiques d’une capacité inférieure ou égale à trois coups, armes de balltrap, armes d'épaule à canon lisse tirant un coup par canon, armes neutralisées, armes d’une puissance supérieure à 20 joules.
Catégorie D : Couteaux-poignards, aérosols lacrymogènes inférieurs à 100ml, armes à impulsions électriques de contact, revolvers d’alarme, de tir de munitions à blanc ou à gaz, armes d’une puissance strictement inférieure à 20 joules, certains pistolets et carabines à air comprimé, répliques d'airsoft.