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Des passagers de French Bee "abandonnés" à Paris


Matahi (à gauche), une amie d'Emmanuel (au centre) et Emmanuel (à droite) soulagés de prendre enfin l'avion, après deux jours de stress.
Matahi (à gauche), une amie d'Emmanuel (au centre) et Emmanuel (à droite) soulagés de prendre enfin l'avion, après deux jours de stress.
PAPEETE, le 17 juin 2019 - Ils ont, fort heureusement, pu prendre l'avion pour revenir au fenua, ce lundi. Selon eux, ils ont dû acheter un autre billet d'avion parce que "les comptoirs d'enregistrement étaient fermés 1h30 avant l'embarquement, vendredi", sans qu'aucune solution alternative ne leur soit proposée.

"Ils l'ont complètement abandonné à l'aéroport", déplore Alain, père d'Emmanuel, 25 ans.

Vendredi dernier, ce jeune homme a failli se retrouver seul et sans argent à l'aéroport d'Orly, où il devait prendre un avion de la compagnie aérienne French Bee pour revenir au fenua. Une situation qui aurait pu mal finir, si Emmanuel n'avait pas rencontré Matahi, un autre Polynésien laissé sur le carreau.

En fin de semaine dernière, les deux jeunes hommes se préparent et prennent la route pour se rendre à l'aéroport d'Orly, à Paris. L'un est au Nord, et prend le bus pour Paris. L'autre est à l'Ouest de la France et vient de finir son travail. Tous deux se retrouvent à Paris, deux heures avant l'embarquement, bien trop tard pour se faire enregistrer à l'aéroport. "Ils avaient fermé les guichets pour l'enregistrement des bagages, 1h30 avant", raconte Emmanuel, 25 ans, et de rajouter : "Ils m'ont dit que c'était fermé et qu'il fallait que je paie un billet, ou que je parte. J'étais en larmes et je leur ai expliqué que je n'avais pas d'argent. On m'a demandé de me mettre aux côtés", se rappelle le jeune homme.

Une situation que vivra, quelques minutes plus tard, Matahi, un employé dans une usine de pneu à Angers. Matahi devait également prendre cet avion qui devait le ramener à Tahiti, auprès de sa fille d'un an et demi, pour la fête des pères. Mais, "elles m'ont dit : 'soit vous achetez un autre billet, soit on appelle la sécurité. C'est comme ça les Low cost, ils ferment 1h30 avant l'embarquement.' On était tous énervés", explique Matahi. Le père de famille regrette réellement le manque d'intérêt porté par la compagnie à ses passagers. "Il n'y a aucune aide qui est mise en place pour les passagers. Il a fallu que l'on se débrouille. Il y avait d'autres Polynésiens et tous sont repartis bredouille."

Pour Emmanuel, la situation était plus grave, puisqu'il s'est retrouvé sans un sou en poche et "je n'avais aucun moyen de communication avec ceux de Tahiti." Effondré et perdu, Emmanuel n'en revenait pas. Fort heureusement, le jeune homme de 25 ans est tombé sur Matahi, qui l'a pris sous son aile. "Si Matahi n'avait pas été pas là, je serais dehors en ce moment même". Une fois arrivé à l'hôtel, Emmanuel a pu contacter sa famille à Tahiti, pour qu'ils lui prennent un autre billet d'avion (lire interview du père d'Emmanuel ci-dessous).

Parmi les autres passagers, il y avait aussi une jeune fille qui est restée chez une amie à Paris, durant le week-end. "C'est sa tante qui a payé son billet de retour, parce qu'elle n'avait plus rien non plus", raconte Matahi. "Elle s'est arrêtée à San Francisco avec sa tante".

Arrivés à Tahiti, avec deux jours de retard, Emmanuel, Matahi et les autres passagers ne sont pas prêts d'oublier leur mésaventure. Emmanuel, lui, se dit soulagé de retrouver ses proches. Matahi, pour sa part, repartira pour la métropole, lundi avec French Bee, "c'est la première et la dernière fois que je prends cette compagnie".

Nous avons adressé un mail au service communication de la compagnie, afin qu'elle puisse nous éclairer sur cette situation. À l'heure, où nous mettions sous presse, nous n'avions eu aucun retour. Affaire à suivre…
 

LA PAROLE À

Alain
Père d'Emmanuel

"Il n'y a même pas le respect du passager"


"Je ressens un sentiment d'abandon complet, surtout qu'il leur avait expliqué qu'il n'avait que son billet en poche, sans argent. Ils n'ont même pas cherché un moyen. Ils auraient pu faire quelque chose une heure avant, en le laissant embarquer, alors qu'ils n'étaient que deux. S'il n'avait pas vu un copain, qu'il ne connaissait même pas et qui a eu pitié de lui, il se serait retrouvé jusqu'à dimanche soir, tout seul à l'aéroport de Paris, sans rien. En tant que papa, c'est douloureux, et il a eu la chance d'avoir rencontré un gars qui a eu pitié. Nous avons dû acheter un autre billet, et ce sont des finances en plus. Heureusement qu'il a réussi avec sa copine à nous contacter, sinon, on serait venus l'attendre pour rien, et lui, il aurait été paumé tout seul là-bas. C'est un sentiment de rejet, d'abandon, il n'y a même pas le respect du passager. Il a payé son billet et aucune solution ne lui a été proposée.
Je voudrais dire à la compagnie d'avoir un peu d'humanité, pas simplement des chiffres et des heures, quand c'est eux qui sont en retard, tout le monde doit être conciliant. Ils pourraient au moins faire quelque chose."


 

Matahi
Employé dans une usine de pneu à Angers

" C'est la première et dernière fois que je prends cette compagnie"


"J'ai beaucoup voyagé avec Air Tahiti Nui. Une fois, 45 minutes avant l'embarquement, je suis arrivé au comptoir d'enregistrement d'Air Tahiti Nui à Los Angeles, et ils m'ont laissé passer. French Bee ferme carrément. L'avion devait quitter Paris, vendredi, à 18h40, on était là-bas à 16h50. Le guichet était fermé, il fallait être là-bas à 16 heures nous-a-t-on dit. Ils n'ont même pas cherché de solutions d'accompagnement. Du coup, les autres passagers sont partis, et j'ai pris Emmanuel avec moi, et nous sommes allés à l'hôtel. Ses parents sont venus me remercier pour ce que j'ai fait, mais c'était tout à fait normal. Il faut que l'on s'entraide entre Tahitiens. C'est la première et dernière fois que je prends cette compagnie."


le Lundi 17 Juin 2019 à 15:22 | Lu 35944 fois