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Des chantiers et du bruit à Teahupoo avant les JO


Tahiti, le 4 avril 2022 – L’étude d’impact des travaux d’agrandissement de la marina de Teahupoo et de construction d’un ponton de 80 mètres pour le village olympique, face à la passe de Havae, prévoit d’importantes nuisances sonores. La phase de chantier devrait durer 13 mois.
 
Deux aménagements d’infrastructures maritimes sont envisagés à Teahupoo, en prévision des Jeux olympiques de 2024. L’étude d’impact qui leur est consacrée est consultable jusqu’au 2 mai prochain dans les mairies annexes de Toahotu, Vairao et Teahupoo à Taiarapu Est. Le document se penche en longueur d’une part sur le projet d’agrandissement de la marina de Teahupoo et d’autre part sur la création du ponton d’accès qui desservira le village olympique.
Sur le chantier de la marina, les travaux de terrassement tablent sur 12 917 mètres cubes de terre et de roches à déplacer : 1 100 m3 de déblais, 8 800 m3 de remblai, 1 393 m3 de retrait d’enrochement et 1 624 m3 de pose d’enrochement. Le projet vise à agrandir l’actuelle marina, à la demande de la mairie de Teahupoo. Il prévoit l’élargissement en remblai du terre-plein de la voie d’accès, la reprise du trait de côte en enrochements, la réalisation d’un vaste ponton d’accostage sur pilotis, d’un quai de protection et d’accostage également sur pilotis et l’agrandissement du parking. Si la marina de Teahupoo est aujourd’hui conçue pour accueillir 19 embarcations de moins de 12 mètres à quai, les travaux prévoient à terme de doper cette capacité à 83 postes d’amarrage avec un nouveau ponton sur pieux pouvant accueillir 64 unités. Le chantier nécessitera également le dragage de 6 852 m3, pour garantir l’accès aux bateaux. La phase de travaux devrait durer 13 mois entre août 2022 et septembre 2023 avec des perturbations prévues du trafic automobile dans le secteur et un risque “fort” de production de poussières et de turbidité accrue des eaux marines dans la zone.
A quelques kilomètres de là, le ponton d’accès du village olympique, doit être construit sur le littoral du domaine Rose. Le domaine est situé à l’entrée du Fenua Aihere, à 660 mètres du “bout de la route”. Le foncier de 16 hectares est choisi pour sa situation géographique, face à la passe de Havae, où auront lieu les épreuves de surf des Jeux olympiques, et à proximité du village de Teahupoo. Le ponton en projet fera 80 mètres et donnera sur un quai d’accostage en béton armé. Le tout sera construit sur pilotis.
 
100 dB à la ronde
 
C’est la conception sur pilotis de ces deux aménagements qui sera à l’origine de la principale nuisance pour l’environnement. Des vibrations et une nuisance sonore “forte”, perceptible jusqu’à 2,6 kilomètres du chantier de la marina. Aux abords des travaux, le son atteindra des pics à 114 décibels (dB) et une moyenne estimée à 100 dB. La zone est urbanisée dans le voisinage de la mairie et compte notamment une école primaire.
Dans le secteur du ponton du domaine Rose, moins urbanisé, même si cette nuisance sonore est prévue “modérée à forte”, avec des niveaux de bruit pouvant atteindre 82 dB à 320 mètres du chantier, “les opération de dragage mais surtout de battage des pieux, vibrofonçage et trépanage seront sources de bruits sous-marins importants et nocifs pour la faune”, observe l’étude d’impact qui estime que “le battage de pieux émet des niveaux sonores d’environ 243 à 257 dB” et rappelle que le seuil de blessure des dauphins est de 180 dB. Les relevés de la faune et de la flore faits dans la zone révèlent la présence d’un “jardin corallien en très bon état” qui abrite des juvéniles de poissons de récif, des anémones, des oursins, holothuries, etc.
Dans les environs sous-marins du chantier d’agrandissement de la marina, l’étude constate un site déjà “perturbé” avec une partie des fonds marins de proximité “à forte dominance vaseuse”. Mais les prospections menées in situ révèlent aussi des “formations coralliennes d’intérêt” dans le voisinage du projet, une zone de nurserie sur un tapis algal et la présence de raies et de requins, parmi les 17 espèces de poissons observées dans cette zone de pêche “privilégiée pour les riverains”. Des nuisances sonores qui, avec l’augmentation en phase de chantier de la turbidité des eaux et le risque de pollution du milieu marin pendant les travaux, portent risque d’impact sur la pêche à un niveau jugé “fort”, selon l’analyse.
 
Précautions anti-bruit
 
Sur les deux sites, l’étude d’impact préconise la mise en place de “toutes les mesures nécessaires pour limiter l’impact des nuisances sonores sur le milieu humain” en ne travaillant qu’aux heures ouvrables et en prévenant le voisinage avant de lancer des travaux bruyants. Pour préserver le milieu marin, l’usage de dispositif d’insonorisation de type “rideau de bulles” est préconisé, lors des travaux de mise en place des pilotis, qui devra se faire hors saison des baleines.
Sur les deux sites, l’étude d’impact estime aussi que le risque de perte de la biodiversité sous-marine liée aux travaux est “fort”. Elle préconise de procéder au déplacement de “tout organisme benthique et des colonies coralliennes dans les emprises concernées par une entité spécialisée, avant la réalisation de tout travaux”.
Une phase de travaux qui s’annonce pénible pour le voisinage sur les deux sites. Mais le chantier achevé, en phase d’exploitation l’étude ne prédit aucune “nuisance significative” : “Au contraire, l’impact sera positif pour le tourisme et la pratique des sports et loisirs”. Les riverains devront donc prendre leur mal en patience avec cet espoir jusqu’en septembre 2023. Ce sera 11 mois avant le lancement des Jeux olympiques.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Lundi 4 Avril 2022 à 18:40 | Lu 3229 fois