Tahiti, le 28 juillet 2022 – La compagnie américaine Delta Air Lines a récemment sollicité le Pays pour obtenir l'autorisation de desservir la destination Tahiti depuis les États-Unis. Mais la perspective d'accueillir une nouvelle compagnie aérienne internationale en Polynésie, l'une des plus importantes au monde de surcroit, n'est pas sans poser plusieurs difficultés pour la viabilité des autres compagnies aérienne, les capacités d'accueil de l'aéroport de Tahiti-Faa'a et celles des hôtels polynésiens…
Delta Air Lines en approche au fenua. C'est en tous cas le vœu de la compagnie “major” américaine, quatrième mondiale en nombre de vols quotidiens selon le dernier classement d'Air Journal, qui a sollicité récemment des autorités polynésiennes l'autorisation de desservir la Polynésie française. La compagnie américaine, qui ambitionnait de revenir à ses chiffres d'avant crise dès le second trimestre 2022, avait réalisé la meilleure année de son histoire en 2019. Sur son site, elle annonce 200 millions de voyageurs par an et 275 destinations dans 50 pays. Une liste à laquelle la compagnie américaine aimerait ajouter la Polynésie française, visiblement séduite par les bons résultats de son concurrent United sur la desserte locale. Surtout, le soutien massif des aides publiques américaines aux compagnies aériennes pendant la crise Covid porte aujourd'hui ces compagnies à déployer grandes leurs ailes vers de nouvelles destinations.
Delta Air Lines dispose également d'un autre atout avec une alliance forte avec Air France. Dès 2000, elle a participé avec la compagnie française à la fondation de “l'alliance Skyteam”, renforcée d'une joint-venture transatlantique –une association d'entreprise– depuis 2009, et même d'une participation au capital de la compagnie française depuis 2017. “Delta Air Lines, c'est Air France. Ils partagent tout. Pertes et bénéfices. Pour la Polynésie française, c'est d'ailleurs Delta qui vend les billets d'Air France pour la destination Tahiti aux États-Unis”, commente un connaisseur du secteur au fenua. Pour autant, si la compagnie française a obtenu en février dernier l'autorisation du Pays de passer de trois à cinq vols par semaine en Polynésie, l'arrivée de Delta Air Lines ne signifierait pas une baisse des fréquences d'Air France vers Tahiti-Faa'a.
Comme la plupart des “major company”, la stratégie de Delta semble être de diversifier toujours davantage son offre de destinations. En 2016, le vice-président de Delta Air Lines pour la région Ouest s'était déjà rendu au fenua pour rencontrer les autorités locales et constater “le potentiel de la Polynésie française”. Dès 2017, la compagnie américaine avait commencé à lorgner plus concrètement le marché polynésien. Elle a d'abord fait inscrire la Polynésie dans ses brochures “Delta Vacation”, pour proposer –via Air France notamment– de nouvelles destinations tropicales à ses passagers américains. L'opération n'avait pourtant pas été un franc succès, selon les professionnels du secteur au fenua. Le potentiel de la destination polynésienne était avéré, notamment pour le tourisme haut de gamme et les passagers en classes premium, mais l'offre en sièges restait restreinte pour les clients américains. Depuis, la crise Covid a suspendu un temps les ardeurs de la compagnie américaine à s'implanter au fenua. Jusqu'à tout récemment visiblement…
Pas une mince affaire
Reste qu'en Polynésie, le Pays fait face à un sévère dilemme avec cette demande. Certes, l'arrivée d'une nouvelle compagnie aérienne améliorerait l'offre des vols et potentiellement le nombre des touristes en provenance d'un marché américain qui compte au fenua. Mais le Pays doit bien composer avec les intérêts de sa compagnie Air Tahiti Nui, dont il est actionnaire à 85% et qu'il participe difficilement à renflouer depuis la crise Covid. Le gouvernement sait ce que représente l'arrivée d'une nouvelle compagnie internationale sur le sol polynésien, en sus des Air France, French Bee, United, Air New Zealand et Hawaiian Air Lines… Si la compagnie Air Tahiti Nui s'est refusée à tout commentaire sur cette information jeudi, son P-dg Michel Monvoisin mettait dès 2021 Delta Air Lines dans le lot des compagnies internationales potentiellement responsables d'une “distorsion de concurrence” sur le marché aérien, vu le niveau faramineux des aides publiques reçues pendant la crise.
Autre problème très concret à régler pour permettre l'arrivée de la compagnie, celui de l'infrastructure aéroportuaire de Tahiti-Faa'a. Avec l'attribution de la concession toujours au point mort administratif et les retards enregistrés dans le réaménagement d'ensemble de l'aéroport, la gestion à flux tendus des arrivées et départs ne va pas s'améliorer avec l'arrivée d'une nouvelle compagnie. Selon nos informations, Delta souhaite se positionner sur le tronçon Los Angeles-Papeete, pour bénéficier d'un “hub” desservant le maximum de destinations américaines. Mais les horaires disponibles sur cette route conduisent déjà à l'engorgement de la plateforme aéroportuaire à Tahiti. Les police aux frontières, notamment, absorbe déjà difficilement le trafic actuel lors des arrivées conjointes de deux à trois vols internationaux.
Enfin, dernière difficulté soulevée par l'arrivée d'une nouvelle compagnie internationale, l'offre hôtelière polynésienne arriverait elle aussi à saturation. C'est en tous cas ce qu'affirment plusieurs professionnels du tourisme au fenua, malgré tout divisés sur cette question. Un chiffre évoqué par l'un d'entre eux illustre les limites économiques de l'afflux de voyageurs à la fois pour les compagnies et les infrastructures hôtelières : la Polynésie dispose actuellement d'une offre d'un million de sièges par an, pour 250 000 touristes et 65 000 voyageurs internationaux polynésiens en année haute…“Dans ces conditions, une compagnie aérienne de plus, ça n'amènera pas un touriste de plus”, assure cet interlocuteur. Même si, conteste un autre, cette crainte avait déjà été exprimée lors de l'arrivée de French Bee et de United. Sans pour autant s'être réellement concrétisée depuis.
Delta Air Lines en approche au fenua. C'est en tous cas le vœu de la compagnie “major” américaine, quatrième mondiale en nombre de vols quotidiens selon le dernier classement d'Air Journal, qui a sollicité récemment des autorités polynésiennes l'autorisation de desservir la Polynésie française. La compagnie américaine, qui ambitionnait de revenir à ses chiffres d'avant crise dès le second trimestre 2022, avait réalisé la meilleure année de son histoire en 2019. Sur son site, elle annonce 200 millions de voyageurs par an et 275 destinations dans 50 pays. Une liste à laquelle la compagnie américaine aimerait ajouter la Polynésie française, visiblement séduite par les bons résultats de son concurrent United sur la desserte locale. Surtout, le soutien massif des aides publiques américaines aux compagnies aériennes pendant la crise Covid porte aujourd'hui ces compagnies à déployer grandes leurs ailes vers de nouvelles destinations.
Delta Air Lines dispose également d'un autre atout avec une alliance forte avec Air France. Dès 2000, elle a participé avec la compagnie française à la fondation de “l'alliance Skyteam”, renforcée d'une joint-venture transatlantique –une association d'entreprise– depuis 2009, et même d'une participation au capital de la compagnie française depuis 2017. “Delta Air Lines, c'est Air France. Ils partagent tout. Pertes et bénéfices. Pour la Polynésie française, c'est d'ailleurs Delta qui vend les billets d'Air France pour la destination Tahiti aux États-Unis”, commente un connaisseur du secteur au fenua. Pour autant, si la compagnie française a obtenu en février dernier l'autorisation du Pays de passer de trois à cinq vols par semaine en Polynésie, l'arrivée de Delta Air Lines ne signifierait pas une baisse des fréquences d'Air France vers Tahiti-Faa'a.
Comme la plupart des “major company”, la stratégie de Delta semble être de diversifier toujours davantage son offre de destinations. En 2016, le vice-président de Delta Air Lines pour la région Ouest s'était déjà rendu au fenua pour rencontrer les autorités locales et constater “le potentiel de la Polynésie française”. Dès 2017, la compagnie américaine avait commencé à lorgner plus concrètement le marché polynésien. Elle a d'abord fait inscrire la Polynésie dans ses brochures “Delta Vacation”, pour proposer –via Air France notamment– de nouvelles destinations tropicales à ses passagers américains. L'opération n'avait pourtant pas été un franc succès, selon les professionnels du secteur au fenua. Le potentiel de la destination polynésienne était avéré, notamment pour le tourisme haut de gamme et les passagers en classes premium, mais l'offre en sièges restait restreinte pour les clients américains. Depuis, la crise Covid a suspendu un temps les ardeurs de la compagnie américaine à s'implanter au fenua. Jusqu'à tout récemment visiblement…
Pas une mince affaire
Reste qu'en Polynésie, le Pays fait face à un sévère dilemme avec cette demande. Certes, l'arrivée d'une nouvelle compagnie aérienne améliorerait l'offre des vols et potentiellement le nombre des touristes en provenance d'un marché américain qui compte au fenua. Mais le Pays doit bien composer avec les intérêts de sa compagnie Air Tahiti Nui, dont il est actionnaire à 85% et qu'il participe difficilement à renflouer depuis la crise Covid. Le gouvernement sait ce que représente l'arrivée d'une nouvelle compagnie internationale sur le sol polynésien, en sus des Air France, French Bee, United, Air New Zealand et Hawaiian Air Lines… Si la compagnie Air Tahiti Nui s'est refusée à tout commentaire sur cette information jeudi, son P-dg Michel Monvoisin mettait dès 2021 Delta Air Lines dans le lot des compagnies internationales potentiellement responsables d'une “distorsion de concurrence” sur le marché aérien, vu le niveau faramineux des aides publiques reçues pendant la crise.
Autre problème très concret à régler pour permettre l'arrivée de la compagnie, celui de l'infrastructure aéroportuaire de Tahiti-Faa'a. Avec l'attribution de la concession toujours au point mort administratif et les retards enregistrés dans le réaménagement d'ensemble de l'aéroport, la gestion à flux tendus des arrivées et départs ne va pas s'améliorer avec l'arrivée d'une nouvelle compagnie. Selon nos informations, Delta souhaite se positionner sur le tronçon Los Angeles-Papeete, pour bénéficier d'un “hub” desservant le maximum de destinations américaines. Mais les horaires disponibles sur cette route conduisent déjà à l'engorgement de la plateforme aéroportuaire à Tahiti. Les police aux frontières, notamment, absorbe déjà difficilement le trafic actuel lors des arrivées conjointes de deux à trois vols internationaux.
Enfin, dernière difficulté soulevée par l'arrivée d'une nouvelle compagnie internationale, l'offre hôtelière polynésienne arriverait elle aussi à saturation. C'est en tous cas ce qu'affirment plusieurs professionnels du tourisme au fenua, malgré tout divisés sur cette question. Un chiffre évoqué par l'un d'entre eux illustre les limites économiques de l'afflux de voyageurs à la fois pour les compagnies et les infrastructures hôtelières : la Polynésie dispose actuellement d'une offre d'un million de sièges par an, pour 250 000 touristes et 65 000 voyageurs internationaux polynésiens en année haute…“Dans ces conditions, une compagnie aérienne de plus, ça n'amènera pas un touriste de plus”, assure cet interlocuteur. Même si, conteste un autre, cette crainte avait déjà été exprimée lors de l'arrivée de French Bee et de United. Sans pour autant s'être réellement concrétisée depuis.