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Décès du dernier des compagnons de la Libération, révoltés de la première heure


CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP
CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP
Paris, France | AFP | mardi 12/10/2021 - Une page de l'Histoire de la France libre s'est tournée mardi avec la disparition à l'âge de 101 ans du dernier compagnon de la Libération, Hubert Germain, "après avoir vécu et incarné un siècle de liberté", a salué le président Emmanuel Macron.

Ancien député gaulliste et ministre de Georges Pompidou, grand croix de la Légion d'honneur, Hubert Germain avait fêté le 6 août son 101e anniversaire. Il était pensionnaire de l’institution nationale des Invalides à Paris.

Seules 1.038 personnes, dont six femmes, ont reçu le titre de compagnon de la Libération. En tant que dernier de ses représentants, Hubert Germain sera inhumé au Mont-Valérien, principal lieu d'exécution des résistants durant la Seconde Guerre mondiale. Le chef de l'Etat présidera la cérémonie d'inhumation le 11 novembre à l'Arc de Triomphe et au Mont-Valérien.

Emmanuel Macron, qui avait commémoré au côté d'Hubert Germain le 81e anniversaire de l'appel du 18 juin 1940, lui rendra également hommage lors d'une cérémonie dans les prochains jours aux Invalides.

Le président de la République et son épouse ont adressé leurs "condoléances émues à tous les Français qui sont les héritiers des combats qu’il livra". 

"La Nation perd l'un de ses serviteurs les plus illustres dont l'honneur et le courage nous obligent", a réagi le chef d'état-major des armées, le général Thierry Burkhard.

Père des Forces françaises libres (FFL), Charles de Gaulle avait créé l'Ordre de la Libération en novembre 1940 pour "récompenser les personnes ou les collectivités militaires et civiles qui se seront signalées dans l'oeuvre de libération de la France et son empire". L'Ordre est forclos depuis 1946. 

"C'est le coeur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser le combat": le 17 juin 1940, à la radio, le maréchal Philippe Pétain annonce demander l'armistice aux Allemands. Il n'en faut pas plus à de jeunes Français pour gagner Londres ou rejoindre la clandestinité.

Entre juin et juillet 1940, quelque 7.000 Français prennent le chemin de la Grande-Bretagne. Parmi eux, des centaines de futurs compagnons de la Libération, souvent âgés d'une vingtaine d'années, révoltés par le genou plié du "vainqueur de Verdun".

Défi mémoriel

Fils d'un général des troupes coloniales, Hubert Germain est en train de passer le concours d'entrée de l'école navale à Bordeaux au moment de la débâcle. "Au bout de cinq minutes, je me suis dit: +Mais qu'est-ce que tu fais là?+", expliquait-il en 2018 à l'AFP. "Je me suis levé en disant à l'examinateur: +Je pars faire la guerre+".

Il embarque à Saint-Jean-de-Luz, à bord d'un navire transportant des soldats polonais à destination de l'Angleterre et arrive à Londres le 24 juin 1940. Il intègre la Légion étrangère et combat en Syrie, en Libye où il est engagé dans les combats de Bir Hakeim, en Egypte, en Italie, en Provence, dans les Vosges et en Alsace. Il est blessé et décoré par le général de Gaulle fin juin 1944 en Italie.

Un tiers des compagnons de la Libération sont morts au combat, et 80% des survivants sont blessés pendant le conflit. Cinq d'entre eux reposent au Panthéon -- Felix Eboué, André Malraux, René Cassin, Jean Moulin et Pierre Brossolette.

Les derniers compagnons ont disparu les uns après les autres au cours de la décennie passée, dont Daniel Cordier, décédé à 100 ans le 20 novembre 2020. Parti à Londres le 21 juin à l'âge de 19 ans avant de devenir deux ans plus tard le secrétaire de Jean Moulin, légendaire figure de la résistance intérieure qui succombera aux mains de la Gestapo.

Les acteurs de la transmission mémorielle sont aujourd'hui mis au défi de garder vivant le souvenir de ce pan d'Histoire à mesure que s'éteignent ses derniers acteurs. 

"La perte des grands témoins nous oblige à nous réinventer pour toucher le plus grand nombre, la jeunesse mais aussi leurs parents", expliquait en février à l'AFP la ministre déléguée aux Armées Geneviève Darrieussecq, en soulignant l'importance de "la transmission mémorielle, qui véhicule des valeurs républicaines d'engagement, de citoyenneté".

le Mardi 12 Octobre 2021 à 12:42 | Lu 297 fois