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Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants


Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
Les représentants étudient ce jeudi matin la réinscription de la Polynésie sur la liste des pays non-autonomes de l'ONU défendue par l'UPLD et le président Oscar Temaru. Arguant du "sacrifice des valeurs traditionnelles" sur l'autel de « l'autonomie au sein de la République », la résolution qui est proposée aux représentants déplore la prédominance de "nouveaux comportements sociaux exogènes".

"Retirée de la Liste des pays à décoloniser de l'O.N.U. en 1947, en même temps que la Nouvelle Calédonie, la Polynésie française n'a toujours pas été réinscrite sur celle-ci comme elle en aurait intérêt" déplore cette résolution, qui liste les "nombreux faits coloniaux qui justifieraient pourtant sa réinscription" : " l'introduction du Code civil et la suppression des tribunaux indigènes", ' "l'implantation arbitraire du Centre d'Expérimentations du Pacifique (CEP) à Moruroa et Fangataufa à partir de 1963", la "décision arbitraire de reprise des essais nucléaires français en Polynésie française en 1995 et le procès des émeutes", "l'échec de la reconversion après-nucléaire de la Polynésie française", "l'étouffement organisé du « TAUI » de 2004 et la réforme électorale imposée par l'État en 2007".

Le débat se déroule sur la base des propositions de résolutions soumises

Intervention de Monsieur Gaston Tong Sang (To Tatou Ai'a)

Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
Intervention de M. Gaston TONG SANG - Réinscription sur la liste de l'ONU

Monsieur le Président de l’Assemblée de la Polynésie française,
Monsieur le Président de la Polynésie française,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les représentants à l’Assemblée de la Polynésie française, chers collègues,

Après le faux pas du mois de juin, la majorité et le gouvernement nous ramènent à nouveau devant ce débat sur la réinscription de la Polynésie française sur la liste des pays à décoloniser, non-autonomes.

Depuis la motion « poisson d’avril », c’est bien le seul axe clair qu’a su développer le président de l’UPLD (il s’agit d’un débat politique et non institutionnel) pour fonder et justifier sa dernière prise de pouvoir. Car, à part cela, il nous est impossible de voir où il veut nous mener, comment il compte gérer notre pays, de quelle façon il va relancer l’économie.

Sorti des grandes déclarations démagogiques voire politiciennes, la population ne voit toujours rien venir et désespère de voir la classe politique prendre enfin à bras le corps ses vrais problèmes.

Pour ce qui nous concerne, nous aurions aimé mener un débat de fonds sur des questions économiques, sociales, sur un projet de développement ; au-delà du seul plan de redressement que nous examinerons tout à l’heure ; plutôt un plan de récession d’ailleurs ! Mais soit, puisque la majorité en a décidé ainsi, nous respectons sa décision et nous ne refusons pas le débat.

Et pour entamer ma réflexion, et vous livrer la position du groupe To Tatou Ai’a sur la question, permettez-moi de démarrer par une citation. Cette citation provient d’un homme dont les idées politiques sont d’ailleurs assez proches des vôtres mesdames et messieurs de l’UPLD. Un homme qui sans aucun doute est entré dans le panthéon du parti socialiste, votre parti « grand frère » comme vous vous êtes plu à l’appeler récemment. Il s’agit de M. Léon BLUM, père du Front populaire.

Parlant de liberté, thème qui est finalement le fil rouge de notre débat, M. BLUM disait ceci : « Toute société qui prétend assurer aux hommes la liberté, doit commencer par leur garantir l’existence ».

Cette phrase prend véritablement tout son sens aujourd’hui. Car, en effet, le leader de l’UPLD n’a eu de cesse, ces derniers mois, de nous tancer à propos de la liberté de notre peuple, estimant que l’indépendance nous mènerait à la liberté et que, une fois libre, tous nos problèmes seraient résolus. Comme si, d’un coup de baguette magique, l’indépendance serait la clé de notre réussite… Quelle illusion !

Voyez, mesdames et messieurs de l’UPLD, que l’un de vos maîtres à penser vous donne tort ! Il vous donne tort pour la bonne et simple raison qu’une société qui ne peut assurer, par elle-même, l’existence de ses citoyens ne sera, en fait jamais vraiment libre. Car cette société sera constamment tenue de se soumettre au bon vouloir des plus grands pour survivre et garantir un minimum à ses citoyens.

Voilà donc la route sur laquelle vous voulez nous mener. Nous n’en ferons rien.

L’idéologie ne nourrit pas l’homme, elle n’aide pas les enfants à bien grandir, elle ne rassure pas les familles qui attendent avant tout de vivre dignement.

Nos familles attendent un emploi, un salaire pour payer l’école de leurs enfants et pouvoir, un jour, nourrir l’espoir de voir leurs descendants gravir l’échelle sociale et perpétuer, en l’améliorant, l’héritage familial.

Ceci est aujourd’hui possible dans notre autonomie. Ceci ne sera plus faisable dans votre indépendance.

Cela ne l’est déjà plus sous votre gouvernance puisque, sous vos grandes déclarations, vous dissimulez des mesures menant plus encore notre population dans la misère ! Pour preuve cette hausse des loyers des logements sociaux que vous venez de décider. Est-ce là le prix à payer pour votre liberté ?

L’homme libre, le vrai, n’a pas besoin d’une pseudo-indépendance. Indépendance qui, de toute façon, ne serait qu’à peine politique, et certainement pas économique. L’homme libre, le vrai, a pu recevoir une bonne éducation, peut récolter fièrement les fruits de son labeur et assume pleinement ses racines et sa culture.

****

Dites-nous, concrètement, ce que nous amènera cette réinscription ? Une réinscription dont la pertinence sera jugée par des représentants de Cuba, de la Syrie, de l’Iran, … de grandes démocraties !

Car, contrairement à toutes vos déclarations, réinscrire la Polynésie française sur la liste des pays à décoloniser c’est la mettre sur la voie d’une future indépendance. Vous ne pourrez nous convaincre du contraire.

Notez que l’ONU use bien du terme « décoloniser » pour expliquer sa démarche. Et si le terme non-autonome est parfois employé, vous savez le mettre en avant pour rassurer vos partenaires, pour nous de faux-autonomistes, en les berçant de la situation calédonienne, inscrite depuis 1986 et toujours pas indépendante.

Je ne sais pas si c’est le message que vous voulez adresser à vos militants : attendre 30 ans pour être indépendant. Je vous laisse responsable de vos déclarations.

Pourtant, la vraie alternative ONUSIENNE est simple : autonomie ou indépendance.

Et c’est parce que notre autonomie est jugée plus que suffisante que l’organisation s’est toujours refusée, depuis ces dernières années, à procéder à la réinscription. Car elle juge amplement suffisant les efforts produits par la Nation française pour permettre aux polynésiens de prendre en main leur destinée.

Jugez plutôt :
- La Polynésie française dispose des compétences essentielles pour le développement du pays, sous un simple contrôle juridictionnel, garantissant le respect des droits fondamentaux,
- Notre pays est dirigé par des polynésiens, élus par des polynésiens,
- Nous avons même la possibilité d’accompagner l’Etat sur la scène internationale pour les affaires nous concernant ;
- Nous n’avons pas à financer, par nos propres moyens une justice, une police, une armée et une diplomatie qui sont, par nature, coûteuses mais nous pouvons pour autant en bénéficier au quotidien.

Alors, que voulez-vous de plus ? Si ce n’est parader dans les couloirs de l’assemblée de l’ONU, qu’attendez-vous de ce processus ?

Doit-on considérer que vous plaidez pour l’indépendance pour disposer de tous les leviers et gouverner à votre guise ? Croyez-bien que cette idée n’est pas pour nous une vague chimère. Vous avez développé de telles propensions, vous et vos lieutenants, à bafouer les droits de l’opposition, qu’il nous est aisé de penser que vous n’attendez l’indépendance que pour vous arroger un pouvoir absolu et mettre de côté tous ceux qui oseraient remettre en cause votre parole !

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Mais revenons-en à des considérations plus matérielles. Car nous sommes, en ce qui nous concerne, plutôt adeptes du pragmatisme politique que des grands débats idéologiques.

Savez-vous qu’à eux seuls, les territoires français du Pacifique bénéficient de plus de la moitié de l’ensemble des aides accordées par les pays de l’OCDE à l’ensemble des Etats et territoires du Pacifique ?

Dans ce cadre, comment comptez-vous faire pour compenser la perte de l’aide financière ?

Oh, bien sûr, cet afflux de capitaux n’a pas eu que des bénéfices pour notre pays, nous en sommes bien conscients ! Mais il convient malgré tout de reconnaître les bénéfices existants : un système éducatif efficace, ouvrant la possibilité, pour nos enfants, de s’inscrire dans les meilleurs écoles et universités, un système de santé moderne et accessible à tous, des infrastructures nombreuses et un niveau de vie comparable à ceux des grands Etats de la région.

Demain, si nous sommes indépendants, comment ferez-vous ? Quel modèle économique allez-vous nous proposer ? Quel développement social ?

La Chine est-elle votre réponse à tous nos futurs problèmes ? Après nous avoir vanté les mérites de l’Amérique, qui connaît quelques difficultés actuellement, vous vous tournez vers l’autre façade du Pacifique. Et bientôt, quel sera votre nouvelle puissance de tutelle ?

Peut-être avez-vous encore d’autres sources d’inspirations ? Certains membres de votre majorité nous rabâchent régulièrement les exemples de Hawaï et de la Nouvelle-Zélande. Mais, à ma connaissance, Hawaï n’est pas indépendant et, en Nouvelle-Zélande, les maoris ne me semblent pas être à la tête du gouvernement ! Si ce sont là vos ambitions, malheur à notre population ! En quoi y voyez-vous là une liberté ?

Alors quoi sinon ? Rien ! Vous n’avez strictement rien à nous proposer qu’un vieux rêve sentant la naphtaline, un rêve qui aurait pu avoir un sens il y a 50 ans mais qui, aujourd’hui, relève d’un dangereux anachronisme.

Vous vous rêvez le destin d’un libérateur à l’image de Mandela ou Martin Luther King en nous arrosant d’expressions telles que « génocide culturel ». Mais tout ceci, vous le savez pertinemment, n’a aucun sens dans la Polynésie française d’aujourd’hui.

Et la jeunesse, notre jeunesse, est là pour vous le rappeler. Cette jeunesse qui assume pleinement sa culture polynésienne et son attachement français, cette jeunesse qui réussit admirablement à s’adapter au monde d’aujourd’hui tout en vivant, au quotidien, l’héritage de ses aïeux : Mahana pae, Heiva I Tahiti, et tous ces évènements culturels qui regorgent d’une vitalité et d’une ouverture sur le monde incomparable ! Cette jeunesse qui se désintéresse complètement de vos discours démagogiques.

Cette jeunesse est complètement décomplexée et ne s’embête plus avec de tels combats d’arrière-garde. Cette jeunesse veut vivre et vivre dignement.

Depuis le temps que vous poursuivez votre idéal, on aurait pu espérer que vous auriez bien préparé les choses, pris le temps de construire la société polynésienne indépendante : une société axée sur un plan de développement à long terme. Rien de tout cela.

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Vous l’aurez compris, pour nous la réinscription n’est pas envisageable. Elle n’apporte aucune réponse aux problèmes actuels, d’autant moins que vous ne proposez rien et que vos gouvernances successives n’ont pas pu nous apporter la preuve de votre capacité à gouverner un pays. Vous n’arrivez déjà pas à assumer l’autonomie, comment ferez-vous pour assumer l’indépendance ?

Il suffit de voir le comportement des acteurs économiques lors de vos nombreuses déclarations tonitruantes pour voir que votre démarche à plus l’effet d’un épouvantail que d’un aimant !

De plus, dans votre majorité, bien des élus ne sont pas légitimes pour voter une telle résolution. Un certain nombre d’élus de votre majorité, et même de votre groupe, ont été élus sur des listes clairement autonomistes. Ils n’ont donc pas reçu mandat des électeurs pour vous suivre dans votre démarche.

Si votre majorité est légale, elle n’est en rien légitime, puisque ne représentant même pas le tiers des électeurs !

Aussi, pour nous, cette réinscription, ce sera non.

Je vous remercie de votre attention.

Allocution de René TEMEHARO (Tahoeraa Huiraatira)

Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
Proposition de résolution appelant à la réinscription de la Polynésie française sur la liste des territoires non autonome à décoloniser

En préambule, Monsieur le Président, je tiens à rappeler que si le groupe Tahoeraa Huiraatira n’est pas opposé à ce débat, il y avait sans aucun doute matière plus urgente pour notre Pays qui chaque jour s’enfonce dans la récession sans que le gouvernement ne nous propose de solution.

Le ministre des Finances vient d’ailleurs, dans son annexe modifiée au plan de redressement tirer le constat « symptomatique d’une crise larvée, profonde qui sape les fondements mêmes de la vie économique et sociale ».

Monsieur le président de la Polynésie française, nous pensons que vous avez perdu toute conscience des réalités économiques et sociales, que vous avez totalement perdu de vue les véritables urgences. Vous en serez comptable le moment venu devant la population.

Ceci étant, et même si cela ne constitue pas une urgence et encore moins une priorité, nous n’entendons pas fuir ce débat sur la réinscription de la Polynésie française sur liste des Pays à décoloniser de l’ONU, d’autant qu’au moment où nous l’abordons, nous n’avons toujours pas eu de réponse à des questions essentielles :
- Quels faits viennent démontrer que la Polynésie est colonisée ?
- Quel est le processus qui mènera à la réinscription de la Polynésie française ?
- Quels sont les avantages et les inconvénients de cette réinscription ?
- Quel est le véritable but poursuivi par cette démarche ?

Lorsque vous avez reporté l’étude de ce texte prévue à la fin du mois de juin, vous n’aviez apporté aucune justification. Mais on a appris par la suite, de la bouche du premier vice-président de notre assemblée, qu’un expert du comité des 24 avait été convié à venir nous expliquer les tenants et les aboutissants de cette réinscription.

Au jour d’aujourd’hui, nous ne sommes pas plus avancés puisque nous n‘avons vu aucun expert et que nous devrons nous baser sur le seul exposé des motifs qui nous est présenté et qui relève d’un parti pris indépendantiste. Ironie des choses, sa rédaction émane d’un popaa qui, il faut bien le dire, s’est toujours montré extrêmement critique face aux avancées de l’autonomie sous la gouvernance de Gaston Flosse.

Pour tenter de démontrer en quoi la Polynésie française serait toujours colonisée, le rapport de présentation énonce un certain nombre de faits historiques, qualifiés de « coloniaux » et dont une partie prête à débats.
On met par exemple en avant l’illégitimité du référendum de 1958, sans en apporter la démonstration, alors que 65% de la population se sont prononcés en faveur du maintien de la Polynésie dans la République française.
Pour autant, à aucun moment, le rapport ne met en lumière les éléments qui constituent des actes de décolonisation, et notamment le cheminement de l’évolution statutaire de notre pays qui nous a conféré une large autonomie dans la gestion des affaires.

Bien sûr, le rapporteur n’avait pas intérêt à mettre ces éléments en valeur puisqu’ils viennent contredire sa thèse et ses objectifs.

Selon l’Encyclopédie Larousse, une colonie est, je cite, un « Territoire occupé et administré par une nation en dehors de ses frontières, et demeurant attaché à la métropole par des liens politiques et économiques étroits ».

Si La Polynésie française fait partie intégrante de l’ensemble national, on ne peut pas dire qu’elle soit toujours « administrée par une nation en dehors de ses frontières ». Ainsi, le législateur français, conscient que la Polynésie française a ses particularités politiques, linguistiques, identitaires, lui a conféré le statut d’autonomie au sein de la République, et ce dès 1977.

Notre identité propre est reconnue jusque dans les symboles. Nous possédons notre hymne et notre drapeau qui sont chanté et hissé aux côtés de l’hymne et du drapeau français à chaque manifestation à caractère national se déroulant en Polynésie.

L’autonomie, selon l’Encyclopédie Larousse, est la « situation d'une collectivité, d'un organisme public dotés de pouvoirs et d'institutions leur permettant de gérer les affaires qui leur sont propres sans interférence du pouvoir central ».

La définition de l’autonomie vient donc s’opposer à la définition de la colonie.

Selon l’article 1er de notre statut d’autonomie de 2004, « la Polynésie se gouverne librement et démocratiquement par ses représentants élus ».

Contrairement à une colonie, la Polynésie française s’administre seule, mieux, elle se gouverne, elle a ses emblèmes, sa culture et peut pratiquer ses langues qui sont enseignées à l’école comme le stipule l’article 57 du statut :
« La langue tahitienne est un élément fondamental de l’identité culturelle : ciment de cohésion sociale, moyen de communication quotidien, elle est reconnue et doit être préservée, de même que les autres langues polynésiennes, aux côtés de la langue de la République, afin de garantir la diversité culturelle qui fait la richesse de la Polynésie française. Le français, le tahitien, le marquisien, le paumotu et le mangarevien sont les langues de la Polynésie française ».

Notre statut d’autonomie de 2004 est tellement avancé que nous n’avons pas encore réussi à mettre en œuvre toutes les compétences dont nous disposons. Pourquoi vouloir faire un nouveau saut statutaire dans ces conditions ?

Qu’est-ce que la décolonisatation ?
La résolution 1541 du 15 décembre 1960 prévoit qu’au terme du processus d’inscription d’un territoire sur la liste des pays à décoloniser, ce territoire devient pleinement autonome.
Selon l’ONU, on peut dire qu’un territoire non autonome a atteint la pleine autonomie s’il atteint un de ces trois stades:
a) Quand il est devenu un Etat indépendant et souverain (c’est l’indépendance) ;
b) Quand il s’est librement associé à un Etat indépendant (c’est le cas de l’Etat associé) ;
c) Quand il s’est intégré à un Etat indépendant (c’est le cas actuel de la Polynésie française)

Jean-Marc Régnault, lui, a affirmé qu’une quatrième voie était possible, celle qui serait décidée par les Polynésiens. Ça ne mange pas de pain car, de toutes façons, c’est bien nous, Polynésiens, qui déciderons de notre avenir.

La Polynésie est-elle déjà décolonisée ?
Pour l’ONU, « l’intégration à un Etat indépendant soit se faire sur la base de l’égalité complète entre le peuple du territoire antérieurement non autonome et celui de l’Etat indépendant auquel il s’intègre. Les deux peuples doivent avoir, sans discrimination, un statut et des droits de citoyenneté égaux ainsi que des garanties égales pour ce qui des libertés et droits fondamentaux ; ils doivent tous deux avoir des droits égaux et des possibilités égales de représentation et de participation effective à tous les échelons, dans les organes exécutifs, législatifs et judiciaires de l’Etat ».

C’est le cas de la Polynésie française. Depuis la constitution de 1946 la notion de « sujets indigènes » a disparu et les Polynésiens ont accédé à la citoyenneté française et obtenu le droit de vote.

Aujourd’hui, les Polynésiens ont les mêmes droits et garanties que l’ensemble des Français, avec les spécificités que nous avons-nous même réclamé. Les Polynésiens sont représentés au Parlement national par deux députés (bientôt 3) et deux sénateurs. Gaston Flosse a même été membre du gouvernement de la République. Comme colonisation, on fait pire !

De ce point de vue donc, nous remplissons donc déjà les conditions préconisées par l’ONU pour la décolonisation. Cela a pu se réaliser dans un dialogue constant ave les autorités de la République. Nous avons réussi à bâtir un statut qui laisse aux Polynésiens la responsabilité de leurs décisions, sauf bien sûr dans les matières régaliennes.

Pourquoi vouloir, dans ces conditions, chercher à être réinscrit sur la liste des Pays à décoloniser alors que dans les faits nous disposons de tous les attributs de la décolonisation ?

Si nous satisfaisons déjà à la troisième hypothèse de la pleine autonomie telle que définie par l’ONU, il semble que cette demande de réinscription n’ait qu’un seul but : satisfaire l’unique revendication des indépendantistes – toujours minoritaires dans les urnes.

Satisfaire l’égo du président Temaru qui a fait de son combat pour l’indépendance le combat de toute sa vie ?

La cause est sans doute noble, mais on ne peut pas imposer aux Polynésiens ce dont ils ne veulent pas sans faire un déni de démocratie. La classe politique est déjà assez dénigrée. Faut-il en rajouter en montrant à la population que nous ne tenons pas compte de ses choix politiques profonds ?

Avons-nous été mandatés par la population pour demander cette réinscription ?

A la limite, disons que les électeurs de l’UPLD savaient parfaitement qu’en votant pour la liste menée par Oscar Temaru ils s’engageaient sur la voie d’une indépendance possible.

Mais quel élu autonomiste des Iles-du-Vent, des Iles-sous-le-vent, des Australes, des Tuamotu, quel élu des Marquises a dit à ses électeurs que si l’occasion se présentait il voterait pour la réinscription de la Polynésie sur la liste des pays à décoloniser ?

Votre majorité, monsieur Temaru, vous l’avez composée d’abord en ralliant des personnes élues sur des listes To Tatou Ai’a, puis en ralliant les élus du Te Mana o te mau motu et du te Henua Enata a Tu, et enfin une élue Tahoeraa huiraatira. Tous ces partis ont clairement affiché leur attachement à la France et les électeurs les ont suivis, alors que des candidats UPLD, partout présents, leur offraient une autre possibilité d’expression.

Alors, c’est vrai, le lien avec la France s’est trouvé modifié par la raréfaction des concours financiers. Faut-il donc rompre avec la France « si elle n’a plus les moyens » comme l’a dit le président Temaru au congrès des maires ? Au contraire, ne faut-il pas chercher la rationalisation de nos dépenses publiques, l’apurement de nos finances, le développement de nos ressources propres.

Ne faut-il pas, en résumer, assumer pleinement notre autonomie, sachant que la métropole nous accompagnera toujours si nous savons nous montrer dignes dans l’exercice des compétences qui nous ont été dévolues.

Il ne faut pas se leurrer, l’ONU ne nous apportera rien de plus que la métropole en matière d’aide financière.

Enfin, pour conclure, il faut être conscient que la décision que prendra éventuellement une majorité pour voter ce texte risque d’être sans effet. Nous entrons là dans le champ de la diplomatie internationale. Il est certain que de grands pays comme l’Australie ou la Nouvelle-Zélande, auxquels le président de la République a demandé de ne pas s’associer à votre démarche ne chercheront pas à se brouiller avec la France pour satisfaire l’ambition des indépendantistes polynésiens.

Votre demande restera de l’ordre du symbole quand nos compatriotes attendent la relance de l’économie, la relance de l’emploi. Que de temps aura été perdu.





Je vous remercie de votre attention.

Intervention de Madame Sandra Levy Agamy (non-inscrite)

Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
INTERVENTION SUR L’INSCRIPTION DE LA POLYNESIE FRANCAISE
SUR LA LISTE DES PAYS A DECOLONISER

L’inscription de la Polynésie française sur la liste des Pays à décoloniser, suppose une décolonisation à venir. La décolonisation est comme vous le savez chers collègues, le processus d'émancipation d’une colonie par rapport à une métropole. La décolonisation constitue un préalable à l'indépendance.
Vivrons-nous mieux quand ce processus sera enclenché ?
Un élément de réponse se trouve dans un article du « pacific islands monthly », mensuel fidjien, qui soulignait il y a plus de 30 ans, « l'une des principales exportations des îles du Pacifique, c'est la population. Si les images conventionnelles de la région sont souvent conçues en termes d'îles paradisiaques...; ce n'est pas la perception que l'on en a dans les îles elles-mêmes, comme le montrent les taux d'émigration ». (Pacific Islands Monthly, juillet 1986: 11).
En effet, dans le Pacifique, les pays qui sont devenus indépendants se vident de leur population. Aux Iles Cook c’est 68% de la population qui est partie vivre ailleurs, principalement en Nouvelle Zélande et en Australie, 87% de la population de Niue, 75% de Tokelau. En Polynésie française ce chiffre n’est que de 5%.
Un second élément de réponse provient d’une citation de Connell qui écrivait en 1985 qu’au fond, «aussi ironique que cela puisse paraître, ces émigrants cherchent en Occident ce que les Gauguin des temps modernes veulent laisser derrière eux – l'accès aux biens matériels, les emplois dans le secteur industriel, une meilleure éducation pour leurs enfants, et une mobilité sociale dans une société qu'ils ont crue libre des barrières traditionnelles de classe sociale et de statut familial qui rendent cette mobilité si difficile dans leur pays» (Shore, cité par Connell 1985: 23).
En clair, ces populations aspirent à améliorer leur qualité de vie en augmentant leur pouvoir d’achat dans les pays qui les accueillent. Cela peut se comprendre car le PIB par habitant de leur pays d’origine est très bas. Il est de 73 000 F par mois et par habitant aux Iles Cook, de 24 250 F CFP par mois et par habitant aux Fidji, qui sont des pays décolonisés. Contre, 169 000 F CFP par mois et par habitant en Polynésie française et 202 750 F CFP par mois et par habitant en Nouvelle-Calédonie, collectivités autonomes au sein de la République française. Notre niveau de PIB par habitant est l’équivalent de celui de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, qui sont les pays d’accueil des émigrés Rarotoa et des Fidjiens.
En votant contre cette résolution, nous votons pour le maintien durable des jeunes et des familles polynésiennes sur le territoire d’une Polynésie, française !

Une Polynésie, française, qui leur garantit l’accès à l’ascenseur social fruit d’une éducation gratuite, et l’accès à une qualité de vie, à un pouvoir d’achat, à un plateau de soins, aux antipodes de ce qui se pratique dans les pays décolonisés du Pacifique qui sont régulièrement cités en exemple par la nouvelle majorité.
Faisons preuve de responsabilité en votant contre l’inscription de la Polynésie française sur la liste des pays à décoloniser.

Intervention de Unutea HIRSHON (UPLD)

Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
Pourquoi voter pour la réinscription de notre pays, la Polynésie française, sur la liste des pays à décoloniser ? Je suis tentée de dire simplement : parce que c’est notre droit, le droit de tous les peuples autochtones qui ont été colonisés et sont maintenus dans cet état.
Un peuple autochtone se distingue par sa terre, sa culture, sa langue, son histoire. Nous sommes le peuple ma’ohi, bien distinct du peuple français, même si notre Histoire moderne se partage avec la France. Mais nous sommes un peuple ouvert, la diversité de notre société en témoigne. Ceux qui se sentent bien en Polynésie française, ceux qui croient en notre avenir ont toujours été les bienvenus.
Nous sommes Français par la force des armes et en raison des rivalités entre les pays européens qui cherchaient à étendre leur puissance par la colonisation de nouveaux territoires. Cela s’est traduit par une politique de pillage des ressources des pays conquis. C’est ce qui s’est passé chez nous. Ceux qui ont résisté ont été tués et ceux qui ont survécu ont été emprisonnés et exilés. Leurs terres ont été confisquées pour être données aux colons, jusqu’à la seconde guerre mondiale, c’est récent. Cela s’est traduit également par la mise en valeur de nouvelles ressources utiles aux intérêts du colonisateur. La colonisation fait partie de notre Histoire et ce n’est pas fini, contrairement à ce qu’on veut nous faire croire.
Notre droit à la souveraineté, à la liberté, fait partie de nos droits de peuple autochtone, un droit reconnu par la Constitution française et par la communauté internationale représentée à l’ONU. La réinscription de la Polynésie française sur la liste des pays à décoloniser fait partie de nos droits. C’est la première étape à franchir vers la liberté. Il n’existe pas de ligne rouge pour la liberté des peuples.
Les effets de la réinscription sont nombreux et importants mais ils peuvent être résumés simplement : l’Etat ne peut plus faire comme il veut, comme il a agi chez nous, parce que l’ONU s’implique dans ce processus qui conduit à un ou plusieurs référendums d'autodétermination. Le comité de décolonisation de l’ONU aura un droit de regard sur l’évolution de notre pays et l’attitude de l’Etat.
Je voudrais juste rappeler 2 exemples, 2 pas plus, des abus de l’Etat français, du déni de démocratie dont nous avons souffert, nous, les habitants de ce pays, et qui continue d’avoir des répercussions sociales, économiques et politiques aujourd’hui encore.
Que s’est il passé en 2004 ?
L’Etat avec son ministre de l’Outre Mer et le dirigeant autonomiste polynésien ont mis en place un mode de scrutin qui devait réduire au silence toute opposition. En particulier l’opposition indépendantiste du Tavini Huiraatira qui ne cessait de se renforcer alors que ce parti n’avait aucun des moyens qui étaient à la disposition de la majorité autonomiste. Ce mode de scrutin était la garantie que les autonomistes, au service des intérêts de l’Etat, resteront toujours à la tête du pays. Souvenez vous, les abus du pouvoir local et les silences de la justice qui ne se réveillait que pour les voleurs de poules. L’avenir promettait d’être pire.
Mais l’UPLD a déjoué les plans de l’Etat en décidant de faire front avec des opposants autonomistes, et c’est l’opposition qui a gagné.
Rappelez vous, 3 jours après les élections, la ministre de l’outre mer affirme que les élections ne sont pas terminées. Pourtant, aucun recours en justice n’avait été déposé. A peine 1 semaine plus tard, elle déclare que si un indépendantiste gagne les élections, les robinets seront fermés.
Les robinets, … quel terme méprisant pour nous tous, qui avons subi les essais nucléaires !
C’est ce qui s’est passé. Ce sont les « robinets » de la solidarité nationale qui ont été fermés, et ce sont les plus pauvres qui ont été privés. Peut-être une manière de leur dire : votez bien la prochaine fois…
2ème exemple. En 2007, l’UPLD et le Tahoeraa signent la paix, un évènement qui paraissait impossible. Cette nouvelle et inimaginable alliance mettait en place une majorité de 44 élus, jamais vue à l’Assemblée, qui mettait fin à l’instabilité.
Avec un cynisme incroyable, le nouveau ministre prend le prétexte de l’instabilité pour mettre en place un autre mode de scrutin qui ne pouvait qu’aggraver l’instabilité. C’est ce qui s’est passé. Aujourd’hui, on rend les élus polynésiens, tous les élus sans distinction, seuls responsables de l’instabilité. Mais c’est bien l’Etat le premier responsable.
Croyez vous qu’un ministre aurait pu se conduire ainsi en France ? Dire à des Français du Poitou par exemple, qu’ils ont mal voté et qu’ils devront retourner aux urnes avec un nouveau mode de scrutin ? Jamais cela n’aurait pu se produire en France, mais chez nous, c’est clair, on peut nous dire que nous avons mal voté. Chez nous, ce n’est pas la France, le gouvernement UMP peut défaire ce que les électeurs polynésiens ont voulu en toute liberté. C’est le plus grand des scandales que peut connaître la démocratie. L’évidence est que nous ne contrôlons pas notre destin. Si nous ne nous conduisons pas comme Paris le veut, hé bien, tant pis pour les « mauvais » électeurs.
Si nous sommes inscrits sur la liste des pays à décoloniser, ces agissements ne seront plus possibles, parce que l’ONU aura un droit de regard sur le respect des institutions et des Polynésiens. Voilà pourquoi nous insistons tant sur cette question. Elle n’est pas hors sujet comme on peut l’entendre ou le lire ici et là, bien au contraire.
Un de nos collègue autonomiste a très bien résumé notre situation : la réinscription, c’est la garantie d’avoir un arbitre. Et il ajoute que le jour du référendum, il votera pour le maintien de la Polynésie autonome dans la France. C’est on ne peut plus clair. La réinscription sur la liste des pays à décoloniser n’est pas l’indépendance. Elle ne fait qu’ouvrir le choix entre l’indépendance, l’indépendance en association avec un autre pays souverain comme la France ou le statut actuel d’autonomie dans l’ensemble français.
La réinscription, ce n’est pas l’indépendance, mais ce n’est pas non plus le maintien de ce qui existe, et c’est là où c’est important. La réinscription débouche sur un plan, concerté entre nous et l’Etat, avec des moyens accrus, pour un développement économique, social, culturel et politique. La population choisira son futur statut à travers un référendum en fonction de la réussite de ce plan dans un délai de 10 à 20 ans maximum. Nous aurons le temps de bien travailler, il n’y a pas d’aventure, le comité des 24 de l’ONU suivra notre évolution et veillera au respect de nos intérêts.
Voyez l’exemple de la Nouvelle Calédonie. Nos amis kanak ont pu choisir leur partenaire, un Canadien, pour l’exploitation de leur nickel. C’est du long terme avec une reconnaissance de leurs responsabilités. Auparavant, une seule société était admise à travailler dans ce pays, une société française. C’est un nouveau partenariat qui s’est instauré, un vrai partenariat avec des obligations de résultat et un choix à faire dans l’actuelle décennie.
En ce qui nous concerne, le temps presse. L’armée s’est défilée en douce, l’Etat refuse de reconnaître ses responsabilités après 30 années d’expérimentations nucléaires « in vivo », comme disent les scientifiques, sur le vif. Le vif, ce sont nos lagons, notre air, notre océan, nos rivières, nos îles et tout ce qui vit dessus, avec leurs terribles conséquences sanitaires, sociales et économiques. Le silence est on ne peut plus clair : Polynésiens, vous êtes autonomes. Mauruuru la Mère Patrie ! Le pollueur ne sera pas le payeur.
Et voilà qu’un autre colonialisme s’affirme : le colonialisme économique. Ses principaux acteurs sont des grandes sociétés françaises : énergies, évacuations sanitaires, grands travaux, collecte des déchets, gestion de l’eau, assurances, etc. Nous reconnaissons leurs capacités, mais notre devoir est de défendre nos intérêts, ceux des générations à venir.
Dernière en date, une filiale d’une multinationale française s’est imposée pour la gestion de notre aéroport avec l’appui du représentant de l’Etat. L’Etat a pourtant transféré ses 4 aéroports à la Polynésie française depuis le 1er mars 2007. Ce transfert découle de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
Les bureaux d’études prévoient que l’essentiel du trafic aérien se déplacera de l’Atlantique sur le Pacifique d’ici une vingtaine d’années. Situé au coeur de la région, notre aéroport international de Tahiti Faa’a est promis à un bel avenir, il devrait être l’un des grands moteurs économiques de la Polynésie française. Détourné par un grand groupe français avec l’appui de l’Etat.
Ces sociétés ne viennent pas pour se mettre au service des Polynésiens. Leur premier objectif est la satisfaction de leurs actionnaires. Tout l’argent gagné par ces sociétés géantes repart en France au lieu d’être investi sur place. C’est de l’argent polynésien. Est-ce que nous pouvons nous contenter de seulement fournir la main d’œuvre ? Est-ce que les entreprises polynésiennes seraient incapables ? Faut-il vraiment une société géante pour gérer l’eau d’une commune de 5 ou 10 mille habitants ?
Récemment, un dirigeant d’une compagnie d’assurance française a révélé que 22 milliards avaient « quitté » le pays. C’est l’argent des Polynésiens et de la Polynésie française. Ce sont les fonds du développement de notre pays qui sont captés et exportés en France au lieu de servir aux très importants besoins de nos entreprises et de la Polynésie française. Car il faut insister : en plus du redressement de nos finances, les essais nucléaires laissent une très lourde ardoise aux Polynésiens.
Enfin, nos ancêtres sont arrivés sur ces terres bénies, portés par l’océan, poussés par les vents et la courants, guidés par les étoiles. Nous sommes un peuple de l’océan. Nous voyons de plus en plus d’expéditions scientifiques parcourir les océans pour l’étudier. Chacune de ces expéditions rentre avec des moissons d’informations nouvelles, des promesses d’avenir. Notre océan, c’est la nourriture, ce sont des médicaments, des énergies nouvelles, propres, inépuisables, c’est aussi des métaux rares, des terres rares, indispensables au développement de nouvelles technologies. Avec cet océan, notre océan, nous sommes confiants dans l’avenir. La France est la 3ème puissance maritime mondiale grâce à la Polynésie française, c’est aussi comme cela qu’il faut comprendre la ligne rouge du président de la République. Si notre pays devient un état, il sera une grande puissance maritime.
Voilà, je crois que les raisons du choix sont posées. La réinscription de notre pays sur la liste des pays à décoloniser, contrairement à ce qui est dit ou pensé, n’est pas uniquement politique. Certains en font une affaire politique, ils surfent sur la vague du dénigrement, c’est hors de propos par les temps qui courent disent-ils, il y a mieux à faire : créer du boulot !
Au contraire, le moment est venu d’aborder la question de la décolonisation. Nous devons reconnaître notre part, nous avons beaucoup gaspillé, temps et argent, c’est vrai. Nous avons à affronter des moments qui promettent d’être difficiles. Ce n’est pas uniquement la majorité et son gouvernement, c’est tous ensemble. Devant l’attitude trouble de l’Etat UMP, il faut savoir être direct. Il n’y a ni hargne ni colère dans cette demande de réinscription. D’abord une attente de relations apaisées et de justice. L’Etat peut se rassurer. Les nations coloniales du Pacifique ne s’engageront pas pour aider la colonie d’un autre Etat colonial de la région, nous le savons depuis longtemps et nous n’avons pas l’intention de les solliciter. Ils sont nombreux les pays qui se sont libérés du colonialisme et qui nous écouteront. Notre intérêt est de nous unir pour défendre nos intérêts le plus vitaux. L’enjeu dépasse largement nos idéologies, autonomistes ou indépendantistes. Le pays, nos familles, nos entreprises, la sortie de l’impasse, notre futur dans la paix avec un arbitre, voilà l’enjeu, il est clair. Ce n’est pas le combat d’Oscar Temaru et des indépendantistes, c’est le nôtre, à nous tous. La famille autonomiste ne se renierait pas en adoptant ce texte, bien au contraire.
Remerciements

Intervention d'Armelle Merceron (Ia Ora Te Fenua)

Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
Selon une déclaration d’un homme politique bien connu, « la Polynésie est française par les hasards de l’histoire ». Je partage cette approche. Mais on ne refait pas l’histoire. Nous sommes, nous, notre pays, le produit de cette histoire. Cette histoire mêlée est dans notre sang, dans celui de nos familles. Avec le bon et le mauvais. Et nous devons assumer le présent et notre avenir.
Nous avons surtout à construire notre avenir. Nous avons choisi d’assumer des fonctions politiques en nous faisant élire. En cela nous avons des responsabilités : celles des conséquences des choix que nous faisons. Et aujourd’hui nous avons à nous prononcer sur une question qui si elle emportait un vote favorable d’une majorité d’entre nous, nous orienterait sur une voie pleine d’incertitude.
Monsieur le Président, je respecte vos convictions indépendantistes. Mais je ne comprends pas la manière dont vous vous y prenez.
Si j’étais vous je ferais tout mon possible pour développer en premier lieu mon pays. Pour l’engager dans la voie de l’indépendance économique : celle d’un pays qui fièrement, par le développement de ses ressources humaines, par la mise en valeur de ses potentiels naturels, trouve sa place dans le monde dans une économie et une société ouvertes sur le monde, donne à chacun le minimum de satisfaction de ses besoins.
Au lieu de prendre l’Etat pour un adversaire et de le rendre systématiquement responsable de nos échecs, je le mettrais devant ses responsabilités historiques, celles consécutives aux choix qu’il nous a imposés. Je prendrai de lui tout ce qui est possible pour devenir autonome dans le cadre d’un vrai partenariat, pour faire un travail constructif d’émancipation économique et sociale. Après la question de l’indépendance se poserait d’une façon plus naturelle.
Vous faites tout à l’envers : d’abord l’idéologie. Et le jour d’après l’indépendance comment vivrons-nous ? Dans nos îles éloignées en particulier ? Au nom des Polynésiens qui nous ont élus je veux d’abord avoir des assurances sur l’avenir au lieu de prendre le risque conduire prématurément notre pays sur une voie de garage.
A ceux à qui on a fait croire qu’un vote en faveur de votre proposition serait sans conséquences. Je dis qu’on vous leurre. Cette validation aura valeur politique aux yeux du reste du monde, elle pèsera dans les choix des investisseurs extérieurs, dans les décisions des prêteurs, dans les décisions des épargnants, dans la manière d’envisager son avenir par l’Etat. Que ferons-nous si l’Etat renonçait à prendre en charge les 60 milliards annuels pour l’éducation ?
Aujourd’hui alors que nous sommes dans une situation désastreuse, une vraie dépression, un recul du pouvoir d’achat et du niveau de vie et un accroissement de la pauvreté, une perte de confiance de l’Etat, des prêteurs, des entrepreneurs, des jeunes, alors qu’il faut redonner l’espoir, nous irions prendre une décision incohérente et dangereuse ?
La décolonisation qui reste à faire elle est dans notre tête, dans notre société, dans notre organisation administrative, dans notre façon de prélever et distribuer l’argent public, dans notre économie. C’est un travail que nous avons faire sur nous, ensemble. L’ONU ne nous apportera rien.
Ceux qui aujourd’hui voteraient en faveur de cette proposition porteraient devant l’histoire et les électeurs la responsabilité d’avoir préféré un calcul politique idéologique ou personnel à court terme.

Intervention de Jean-Christophe Bouissou (Ia Ora Te Fenua)

Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
Le gouvernement et sa majorité nous imposent aujourd’hui un débat sur la décolonisation de la Polynésie française et le vote d’un projet de résolution aux conséquences graves pour l’avenir de notre pays.

Ce projet interpelle clairement le Président de la République sur la mise en œuvre de la résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960 des Nations-Unies, laquelle reconnait la volonté légitime des peuples asservis par les Etats colonisateurs à revendiquer la mise en œuvre d’un processus de décolonisation.

Sans pour cela renier ce droit inaliénable des peuples de pouvoir disposer d’eux-mêmes et de leur propre avenir, je souhaite partager avec vous le sentiment profond qui anime le groupe que je préside et, j’en suis persuadé, la grande majorité des polynésiens.

La Polynésie, dans son histoire, a fait l’objet de conquêtes spatiales au cours du 15ème puis du 18ème et 19ème siècle comme cela fut le cas pour de nombreux pays de la zone pacifique. J’ajouterai que dans l’histoire de l’humanité, comme l’ont démontré nos éminents savants Yves Coppens, Dominique Simonet et Hubert Reeves dans leur ouvrage commun « La plus belle histoire du monde », l’Homme aura réalisé son occupation du monde par des déplacements géographiques et des constructions sociétales au fur et à mesure de la dislocation des continents.

En une phrase, l’homo sapiens (sapiens) c'est-à-dire l’homme tel que nous l’entendons aujourd’hui est issu d’une espèce de grands singes d’Afrique ayant migré depuis le désert du Ténéré au Sahara vers d’autres continents au cours de son évolution. Selon cette thèse, pour l’instant non contredite par nos scientifiques modernes, nous sommes donc tous issus de la même famille des homininés (homininae en latin) ayant conquis son territoire depuis plus de 7 millions d’années.

Plus proche de nous, c'est-à-dire au 18ème et 19ème siècle, d’autres conquêtes ont été réalisées. Les Etats-Unis d’Amérique en sont un bon exemple, de même que l’Australie. En Europe, les frontières n’ont cessé de se redessiner jusqu’à la deuxième guerre mondiale. La destruction de mur de Berlin constitue dans le monde occidental la dernière étape d’une redéfinition spatiale.

« Pour se connaître parfaitement, il faut connaître son histoire » : Partant de cette vérité, je souhaite ardemment inviter les membres de notre vénérable assemblée à parcourir le livre de M. Paul de DECKER, éminent spécialiste de l’histoire de nos peuples autochtones, intitulé « Jacques Antoine Moerenhout ». Ce livre précieux nous apprend notre histoire sans passion, sans ambages, depuis l’arrivée des premiers navigateurs à Tahiti ou aux Marquises. Il faut le reconnaitre, la « colonisation » de notre pays - comme ce fut le cas pour d’autres - est le fait, non pas d’un Etat, mais de luttes d’influences religieuses ou d’intérêts économiques initiées par des institutions religieuses ou des représentants consulaires.

La mise en place du protectorat le 8 septembre 1842 était inconnue de Louis Philippe 1er avant qu’il ne reçoive la missive du Commandant Dupetit-Thouars plus de six mois après l’opération. Par ailleurs, le sort de l’annexion de O’Tahiti et de ses dépendances était réglé entre l’Angleterre et la France selon un modus-vivendi de répartition des colonies du pacifique.



Sachant tout cela, et malgré des dispositions du traité d’annexion non appliquées depuis 1880 notamment en matière de constitution de tribunaux fonciers, les polynésiens revendiquent encore aujourd’hui leur appartenance à la République française.

Pour quelles raisons ?

· D’abord parce que la France nous garantit nos libertés et nos droits fondamentaux dans un monde où de nombreux peuples vivent encore la dictature et l’asservissement,
· Parce que la France permet aux polynésiens d’acquérir un niveau de vie largement envié par de nombreux pays du Pacifique et du monde,
· Parce que contrairement à vos assertions contenues dans votre projet de résolution, la Polynésie vit pleinement son autonomie depuis 25 ans et il nous reste encore beaucoup à apprendre avant de revendiquer le transfert des compétences régalienne restantes comme la justice, la monnaie, la police ou l’armée,
· Parce que nous nous devons de nous démontrer à nous même, hommes et femmes politiques de ce pays, notre degré de maturité dans notre conception de l’intérêt public et de l’intérêt général,
· Parce que l’héritage que nous souhaitons léguer aux futures générations, d’un pays libre et prospère, ne doit pas être altéré par des combinaisons politiciennes qui n’ont d’autres objectifs que de permettre l’installation au pouvoir d’une nouvelle caste oligarchique,
· Parce que le monde qui se construit, tel un courant puissant et constant, appelle à l’unification des peuples, comme en Europe, et non pas à la dispersion ou la vie en autarcie,
· Parce que le Polynésien moderne ne se pose aucun problème psychologique sur son identité et sa culture, puisqu’il les vit pleinement,
· Parce que le Polynésien, qu’on le veille ou non, est désormais constitué d’un brassage ethnique et culturel maohi, français et chinois intrinsèque,
· Enfin, parce que le Polynésien fait partie de cette humanité qui se construit par delà les frontières.



Alors, mes chers amis, vous comprendrez aisément que la quête idéologique que vous nous servez aujourd’hui ne peut aboutir que sur un rejet de notre part.

Les polynésiens ont décidé massivement en 2008, la préservation du pays au sein de la république française. Décider du contraire constitue non seulement un reniement de l’engagement fondamental pris vis-à-vis des électeurs mais une trahison des principes et valeurs qui animent notre vie démocratique. C’est un dévoiement de l’inspiration légitime d’un peuple qui s’est pourtant exprimé clairement et librement en février 2008.

En réalité, ce n’est pas la France qui doit être mis au banc des accusés aujourd’hui, mais bien des élus polynésiens qui auront décidé de détourner une volonté populaire forte en direction d’intérêts à courtes vues et personnels.

Aussi, le groupe IOTF appelle les républicains et autonomistes de notre assemblée au sursaut, au réveil. Ne nous engageons pas dans une voie aléatoire au prétexte que l’Etat ne répond pas à nos demandes matérielles dans un contexte de difficultés économiques, financières et sociales.

Nous l’avions bien compris lors de la tenue de nos commissions de la bouche même du vice-président du gouvernement. Tout ce théâtre politique n’est animé que par une stratégie politicienne de mise en difficulté de l’Etat au regard de nos revendications budgétaires et économiques. Ce stratagème ne masquera pas l’incapacité du gouvernement à nouer un véritable dialogue avec l’Etat et à proposer à la population un vrai plan de redressement et de relance de nos activités économiques.

La Polynésie souffre silencieusement des turpitudes de sa classe politique mais elle saura se faire entendre lorsque le moment viendra. Nous serons alors à ses côtés, soyez-en assurés.

Monsieur le Président, mesdames et messieurs, le groupe IOTF votera contre ce projet de résolution et appelle l’ensemble des membres de l’assemblée à faire de même.

Jean-Christophe BOUISSOU

Réaction de Madame Beatrice Vernaudon en marge des débats

Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
Mme Béatrice Vernaudon
Elue IA ORA TE FENUA
Maire de Pirae

Le président de l’Assemblée de la Polynésie française, M. Jacqui Drollet, n’ayant pas cru utile de donner la parole aux élus de manière équitable, pour un sujet aussi important, je me vois dans l’obligation de communiquer mon explication de vote pour les médias, en espérant que ceux-ci voudront bien le publier.

« Avec mon groupe IA ORA TE FENUA, je voterai contre cette proposition de résolution appelant à la réinscription de la Polynésie française sur la liste des territoires non autonomes à décoloniser.
En effet, je ne pense pas que cette démarche aille, aujourd’hui, dans le sens de l’intérêt de notre pays.
Une décision de cette importance doit d’abord recueillir l’assentiment d’une majorité de la population ; celle-ci a été consultée pour la dernière fois en 2008 et l’UPLD qui proposait cette demande dans son programme n’a recueilli que 35% des suffrages.
L’accession à la Souveraineté, car c’est bien l’objectif recherché, est une noble cause, un droit reconnu par la Constitution française, qui en indique la procédure. Si un jour, la majorité de la population voulait l’indépendance, elle n’aurait qu’à suivre la procédure constitutionnelle sans avoir à chercher un arbitre à l’ONU.
Je suis convaincue que l’UPLD profite hâtivement d’une opportunité de circonstance d’alliances, pour des raisons électoralistes et pour se donner bonne conscience.
Pour autant, il faut convenir que nous sommes tous à l’Assemblée à la recherche de solutions pour sortir de la spirale infernale de la dépression dans laquelle nous sommes plongés.
Ces solutions, de mon point de vue, doivent résoudre deux problèmes :
1. La difficulté à établir un dialogue constant et de confiance avec l’Etat ; les contentieux avec l’Etat ne cessent de s’accumuler : CAPES reo Ma’ohi, affectation des professeurs stagiaires, conditionnement du prêt AFD indispensable au maintien de la commande publique, non respect de l’esprit de la Loi Morin…
Avec mon groupe IA ORA TE FENUA, je regrette que le Ministre de l’Outremer n’ait pas cru bon de retenir notre proposition dans la récente modification électorale, d’institutionnaliser une conférence annuelle Etat-pays pour faire le point du partenariat et s’accorder sur la feuille de route annuelle.

2. Notre difficulté, pour des raisons claniques historiques, à nous rassembler et à réorganiser la Polynésie française pour qu’elle soit plus entreprenante, compétitive, solidaire et responsable ; pour redonner confiance à nos investisseurs et surtout à notre jeunesse, afin qu’elle s’investisse dans la formation.
Pourtant, en dehors de l’aspect institutionnel, nous partageons la même vision d’une Polynésie de paix, en harmonie avec son environnement, sa culture et ses valeurs.

C’est cette conviction qui avait amené le groupe IA ORA TE FENUA, au début de l’année 2011, à proposer un pacte politique pour mettre en place jusqu’en 2013 un gouvernement d’union rassemblant les compétences et les expériences des élus de l’Assemblée, pour redresser le pays.

Comme d’autres dans cette Assemblée, je vais de déception en déception. Heureusement, l’unité et la solidarité que nous construisons avec les maires et les élus communaux, en recherchant avec détermination une nouvelle gouvernance et un partenariat équilibré avec l’Etat et le pays, me redonne le courage et la confiance en l’avenir de notre pays.





La réaction de Noe e te Nunaa en marge de l'assemblée

Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
Ce jeudi 18 août n’aura pas été un grand jour pour notre Pays. Notre Assemblée a adopté, après seulement 3 heures de débats, avec — à peu près — 30 voix, la résolution appelant à la réinscription de la Polynésie française sur la liste des territoires non autonomes à décoloniser.
Un déni de Démocratie
« L’Union pour la ‘Démocratie’ » s’était constituée, en son temps, pour s’opposer à la dérive autocratique d’un homme et d’un système ; pour redonner la parole au peuple ; pour instaurer davantage de Démocratie dans notre quotidien.
C’est l’UPLD, aujourd’hui, qui refuse une consultation populaire par voie de référendum sur cette question ô combien importante en refusant la légitimité du corps électoral.
C’est l’UPLD, aujourd’hui, qui ne tient aucun compte de l’avis du Conseil Economique, Social et Culturel rejetant et méprisant le point de vue de la société civile.
C’est l’UPLD, aujourd’hui, qui passe en force, excluant pour les représentants élus un temps de parole et de débat suffisants afin d’exposer et mesurer les conséquences d’une telle décision.
C’est l’UPLD, aujourd’hui, qui refuse d’accepter qu’à aucun moment la population n’a donné mandat au Tavini Huiraatira et ses partis alliés, en lui apportant la majorité de ses suffrages sur le thème de la Décolonisation et de l’Indépendance.
C’est l’UPLD, aujourd’hui, qui s’appuie sur le vote mitigé d’une Assemblée, dont les quelques élus qui permettent d’établir cette pseudo majorité ont maintes fois, depuis 2004, fait la démonstration de leurs motivations et préoccupations réelles.
Et c’est Oscar Temaru, qui explique à présent qu’il doit aller au Forum des Pays du Pacifique puis à New York, pour s’exprimer à la tribune de l’Onu, pour mener jusqu’au au bout le combat de sa vie, prétendant incarner à lui seul les aspirations du peuple Ma’ohi, en libérateur, sans vouloir admettre que c’est lui, aujourd’hui, qui confisque la démocratie et qui asservit tout un Pays simplement pour réaliser ses propres rêves.
Oscar Temaru n’est pas la voix du peuple.
Et Oscar Temaru, depuis ce jeudi 18 août 2011, n’a plus rien d’un démocrate.

Le petit jeu indigne qui bafoue et malmène la Démocratie
No Oe E Te Nunaa, et son partenaire marquisien Te Ao Hou o te Fenua Enata Katahi dénoncent également la position prise par des représentants de Te Mata o te mau motu, élus en 2008 sans que les questions de « la décolonisation » ou de « l’indépendance » ne fassent partie de leurs engagements de campagne. Aucun d’eux n’a, depuis, consulté ses électeurs.
Ils usent et abusent du jeu démocratique, en étant de tous les gouvernements, de toutes les « majorités », sans vouloir admettre le tort qu’ils font finalement à leurs propres îles et leurs propres archipels à la fois en confisquant la stabilité politique de notre Pays par leurs manœuvres, et en s’abaissant à adopter des résolutions d’une telle portée, d’une telle importance, sans consultation aucune, uniquement pour garantir leurs places au(x) gouvernement(s).

L’art et la manière
Si l’on peut considérer que la question de la « décolonisation » puisse être débattue, dans un mouvement légitime de réappropriation de notre histoire et du rapport que nous voulons, collectivement, entretenir avec l’Etat français pour les années à venir, cela doit être fait dans la paix, à l’issue d’un véritable débat démocratique, où chaque composante de notre société à son mot à dire et doit être entendue.
Certainement pas dans une telle cacophonie, à la faveur d’un camp contre un autre, dans une logique de coup de force et d’affrontement, qui n’est bon ni pour la cohésion sociale de notre Pays, ni pour les conditions de la mise en place d’un tel processus, décrédibilisé ainsi dès son origine par des petits chefs pleins d’orgueil déplacé. La méthode, sur de tels sujets, est aussi importante que le fond du débat. La méthode employée ici est inacceptable, violente, et irresponsable.
Et la justification, en affirmant clairement que ce vote aura évité de « passer par un bain de sang », est à nos yeux choquante, inappropriée, surréaliste.
Une question de priorités
Par ailleurs, chacun sait bien, dans la situation de notre Pays, que les urgences qui sont les nôtres sont toutes autres : établir un nouvel équilibre et un modèle socialement soutenable pour notre économie ; stopper l’hémorragie des pertes d’emplois, veiller à soutenir les familles les plus démunies ; préparer la jeunesse à être les forces vives, les travailleurs, les chefs d’entreprises, les dirigeants de demain ; ressouder l’ensemble de nos concitoyens autour d’un projet fort et clair de développement, d’un objectif de cohésion, d’un nouveau contrat social.
Ce vote va directement entrainer une nouvelle perte de confiance, déjà fort réduite, du monde économique. La Polynésie française a besoin d’investissements privés. Après une défiscalisation moins attractive et une absence de continuité dans les politiques publiques du fait de l’instabilité, cette résolution va faire fuir encore davantage les investisseurs privés. Alors que, de plus, l’investissement public est paralysé, quel équilibre économique nos élus souhaitent-ils réellement instaurer ?
Il apparaît que le Gouvernement s’enferme chaque jour davantage dans des logiques radicales de revanche, d’avoir « raison contre tous », de mépriser avec force ses opposants et détracteurs, et souffle ainsi sur les braises de l’éclatement et de la violence qui se multiplient dans notre Pays.
La véritable priorité est de parvenir à un apaisement de notre société et des forces politiques en présence, de donner à manger, un travail et un toit pour toutes et tous les Polynésiens, de souche, de cœur ou d’adoption.
Il est stupéfiant et consternant de devoir encore une fois le rappeler.

Par le présent communiqué, le No Oe E Te Nunaa et son partenaire marquisien Te Ao Hou o te Fenua Enata Kataki s’opposent fermement à cette demande à peine voilée d’indépendance, telle que proposée par cette majorité factice, avec une démarche « démocratique » que nous dénonçons.
Nous invitons les responsables politiques, ainsi que les représentants légitimes de la société civile, qui partagent le même point de vue à le faire savoir aux différentes instances nationales et internationales que Monsieur le Président Temaru envisage de rencontrer.

Pour No Oe E Te Nunaa,
Le Bureau

Le communiqué du Tavini

Débat sur la "réinscription" : les interventions des représentants
Le dossier de la réinscription de la Polynésie française sur la liste des pays à décoloniser a pris un nouveau coup d’accélérateur après son vote par l’assemblée. Dès le lendemain, il était inscrit à l’agenda du Forum qui se tient du 6 au 9 septembre à Auckland. Depuis, une nouvelle et importante étape vient d’être franchie avec sa présentation fin septembre à la session plénière des Nations Unies.

De retour d’une mission de 2 semaines dans la région, le sénateur Richard Tuheiava en a fait l’annonce dès sa descente d’avion samedi en fin d’après midi. Un seul média, les Nouvelles l’UPLDde Tahiti, a répondu à son invitation pour une conférence de presse.

Outre ses engagements parlementaires, le sénateur tahitien est devenu le représentant du président de l’UPLD, qui compte de nombreux amis et soutiens dans la région, ainsi qu’auprès de plusieurs ambassades lors de ses déplacements à New York. Ce patient travail donne des résultats. Le cas de la Polynésie française ne sera sans doute pas réglé dès sa première présentation, mais désormais, il ne quittera plus l’agenda de l’ONU avant sa conclusion. L’UPLD pourrait se faire aider par le groupe des petits états îliens ou encore par celui des pays non alignés.

La tournée de la région a débuté à Port-Vila où M. Tuheiava a été reçu par le Premier Ministre M. Sato Kilman, président sortant du Forum. La rencontre a été très positive, d’autant que l’UPLD a été reçu en tant que tel mais également avec son statut d’observateur du Groupe du Fer de Lance Mélanésien grâce au parrainage du FLNKS. Il en a été de même à Suva où, aux côtés de la Nouvelle-Calédonie, le sénateur a participé à une réunion préparatoire au Forum.

Auprès de ses différents interlocuteurs, le sénateur a rendu compte des relations difficiles avec le président Sarkozy sur la question de la décolonisation qui, après la fameuse « ligne rouge » à ne pas franchir, a réaffirmé sa position à l’occasion du 14 juillet. Il avait déclaré que c’était « une perte de temps » ! Les responsables océaniens ne comprennent pas la position de l’état UMP, « comme si la Polynésie était le seul pays de la région à n’avoir pas été colonisé ». Tous ont réaffirmé leur soutien à Oscar Temaru, à l’exception de la Nouvelle Zélande et surtout de l’Australie qui, selon les termes du sénateur, ont exprimé une « réserve diplomatique ». Pour les responsables océaniens, la décolonisation de notre pays n’est pas un anachronisme, elle est attendue par tout le Pacifique.
Ils ont encouragé le président Temaru à ouvrir le dialogue avec l’état, en profitant de la présence du ministre des affaires étrangères à Auckland.


Rédigé par () le Jeudi 18 Août 2011 à 12:02 | Lu 1676 fois