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Crèches: l'exécutif promet plus d'encadrants et plus de contrôles


Crédit Thomas SAMSON / AFP
Crédit Thomas SAMSON / AFP
Paris, France | AFP | jeudi 07/09/2023 - Plus d'encadrants, plus de contrôles: c'est ce que souhaite l'exécutif après la publication d'enquêtes sur les dérives de certaines crèches privées, semblables parfois à celles observées dans des Ehpad. Mais là encore, les mesures vont se heurter à la pénurie criante de personnels.

Cinq mois après le rapport choc de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur la prévention de la maltraitance dans les crèches, deux livres-enquêtes ont jeté une lumière crue sur le mode de fonctionnement de certaines structures privées à but lucratif.

Portions de repas rationnées, soins minutés... "Le prix du berceau" (Seuil), à paraître vendredi, décrit un système "déshumanisé" basé sur la course au rendement et au remplissage. 

Sorti ce jeudi, "Babyzness" (Robert Laffont) brosse, au travers de 200 témoignages, le même tableau d'un secteur privé dominé essentiellement par quatre grands groupes : Les Petits Chaperons rouges, Babilou, La Maison Bleue, People & Baby. 

Réagissant pour la première fois jeudi à ces deux publications, la ministre des Solidarités Aurore Bergé a rappelé l'engagement pris par le gouvernement de renforcer les contrôles, après le rapport de l'Igas publié au printemps et qui concernait les crèches privées et publiques.

Ces contrôles, assurés notamment par les centres de protection maternelle et infantile (PMI), ont vocation à devenir "beaucoup plus systématiques" et "inopinés", a-t-elle déclaré sur BFMTV-RMC. 

L'exécutif entend également "changer la loi dès le mois de septembre" pour pouvoir se rendre au siège des grands groupes privés, a-t-elle annoncé.

Jusqu'à présent, l'Etat n'avait pas le droit d'aller au siège de ces entreprises privées "pour dire +maintenant je veux tous les documents, je veux les contrats de travail, avoir accès à vos comptes +", a déploré la ministre. 

Parallèlement, le taux d'encadrement devrait être revu à la hausse et passer d'un adulte pour cinq enfants, contre six actuellement, indique Aurore Bergé.

"Ce sont des voeux pieux", réagit auprès de l'AFP Julie Marty Pichon, représentante du collectif "Pas de bébés à la consigne". "On n'a pas les bras, on n'a pas les professionnels, on n'a pas les qualifications", dit-elle. La situation va être difficile "pour les trois, quatre prochaines années".

"Opprobre"

Les crèches privées totalisent 80.000 places en France, soit quelque 20% des places disponibles. Les autres établissements sont des crèches municipales, associatives ou familiales. 

Avant même cette prise de parole, plusieurs acteurs du secteur avaient mis en garde contre des mesures a minima, certains prévenant qu'un renforcement des contrôles ne "suffira(it) pas".

"La mise en œuvre d’un service public de la petite enfance nécessite d’articuler exigence de qualité pour les enfants, encadrement des prix pour les familles et bon usage des fonds publics", a estimé l'Union nationale des associations familiales (Unaf). "Cela suppose une régulation bien plus ferme de la place du secteur du privé lucratif dans le champ de la petite enfance".

De son côté, la fédération des entreprises de crèche (privées) a exhorté à ne pas "jeter l’opprobre sur tout un secteur" et ne pas tirer de "généralités" à partir d'"exceptions".

Les révélations sur les crèches privées évoquent le scandale Orpea révélé dans le livre "Les Fossoyeurs" en janvier 2022, détaillant malversations financières et mauvais traitements infligés aux résidents et aux salariés du géant des maisons de retraite. 

Tout comme dans le dossier des Ehpad, la marge de manœuvre de l'exécutif s'annonce étroite dans les crèches, tant le secteur est confronté à une pénurie de main d’œuvre, avec près de la moitié des établissements manquant de personnel.

Le gouvernement a déjà assoupli il y a un an les critères de recrutement, avec des dérogations dans "un contexte local de pénurie" permettant de recruter des salariés non diplômés. 

L'exécutif a pour objectif la création de 200.000 places d'accueil supplémentaires d'ici à 2030. Un chiffre jugé "irréalisable" par une majorité des acteurs du secteur, qui rappellent qu'il manque déjà 10.000 professionnels. 

le Jeudi 7 Septembre 2023 à 03:01 | Lu 269 fois