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Convention climat: l'exécutif évoque du retard, justifié par la crise


Paris, France | AFP | jeudi 08/10/2020 - Alors que montent les inquiétudes sur un "détricotage" des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, l'exécutif a pour la première fois reconnu envisager de reporter certaines mesures, le justifiant par la récession due à la crise du Covid-19.

Mercredi soir, au 20H00 de TF1 et France 2, Emmanuel Macron a estimé qu'il faudrait "peut-être prendre un peu plus de temps" pour la mise en oeuvre de certaines propositions de la CCC, qu'il avait lui-même convoquée à la suite de la crise des "gilets jaunes", citant notamment le secteur aérien. 

Mais le Président, qui s'était engagé en juin à reprendre 146 des 149 propositions de la Convention, tout en sortant trois "jokers", a nié tout "renoncement".

"Nous sommes déterminés à conduire cette transition écologique (...) mais cette transition ne peut être menée que si on arrive à réconcilier nos concitoyens, c'est-à-dire à rassurer les gens à qui on demande des changements profonds, à accompagner les secteurs à qui on demande des changements rapides," avait-il dit.

La ministre de la Transition écologique a abondé jeudi matin sur franceinfo: "Ce sont de bonnes propositions mais simplement on va essayer de les repousser un tout petit peu dans le temps, pour les appliquer au moment où le secteur aura un petit peu repris son souffle", a dit Barbara Pompili. Tout en assurant une fois de plus que "les arbitrages ne sont finis sur rien".

Après avoir tenté de rassurer les "Citoyens" sur les intentions du gouvernement en les recevant à Matignon la semaine dernière, l'exécutif officialise ainsi ce que laissait entendre la musique des petites phrases distillées par les ministres de l'Economie ou des Transports. 

Certains secteurs gros pourvoyeurs d'emplois, mais aussi de pollution, l'aérien et l'automobile en premier lieu, ont été trop déstabilisés par la crise, née de l'arrêt de l'appareil économique face au coronavirus, pour supporter de nouvelles contraintes.

"Pas naïfs"

"On a entendu les difficultés, on n'est pas naïfs, on comprend les enjeux", souligne Grégoire Fraty, coprésident de l'association "Les 150" créée par des participants à la CCC. "Mais la crise peut durer, ça ne doit pas devenir un prétexte", dit-il à l'AFP. "C'est au gouvernement de prendre ses responsabilités, nous on espère que les ambitions sont toujours là. Et quoi qu'il arrive nous défendrons nos propositions jusqu'au bout".

"La seule chose qu'on demande, c'est la transparence et la clarté. S'il doit y avoir de nouveaux +jokers+, qu'on le dise, on ne sera pas content mais on préfère un discours de franchise. C'est ce qui a commencé à être fait hier (mercredi), on préfère encore ça que les petites phrases ou les comparaisons déplacées", poursuit-il en référence aux propos ironiques du chef de l'Etat renvoyant aux "Amish" et à "la lampe à huile" les partisans d'un moratoire sur le déploiement de la 5G... Que demandait justement la Convention.

Les "Citoyens", qui disposeront d'un droit de réponse aux mesures finalement adoptées, attendent donc toujours la traduction d'une bonne partie de leurs propositions dans une loi attendue avant la fin de l'année.

Mais d'autres voient dans les derniers propos du pouvoir une nouvelle preuve de ses renoncements. "Toutes les propositions de la convention sur l'aérien sont mises à la poubelle, le gouvernement ne veut mettre aucune contrainte sur le secteur", critique Agathe Bounfour, responsable Transports au Réseau Action Climat. Qui rappelle que les compagnies aériennes ont déjà bénéficié en mars d'un moratoire sur leurs taxes spécifiques jusqu'à la fin de l'année.

"Une manoeuvre de plus de la part du gouvernement pour ne pas mettre en oeuvre les propositions" de la CCC, a dénoncé sur Twitter le patron de Greenpeace France, Jean-François Julliard. "En cherchant bien, nos ministres vont finir par trouver des prétextes pour retoquer les 149 mesures".

le Jeudi 8 Octobre 2020 à 05:47 | Lu 154 fois