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Collégien interpellé pour harcèlement: le gouvernement revendique la méthode forte


Geoffroy Van der Hasselt / AFP
Geoffroy Van der Hasselt / AFP
Alfortville, France | AFP | mercredi 20/09/2023 - L'interpellation contestée, en plein cours, d'un collégien soupçonné de harcèlement à l'encontre d'une lycéenne transgenre à Alfortville (Val-de-Marne) s'est faite "en conformité", a assuré mercredi le gouvernement, qui revendique d'envoyer des "messages très forts" aux harceleurs.

L'arrestation lundi du collégien de 14 ans suscite encore la polémique mercredi aux abords de l'établissement, et au sein de la communauté éducative en général, certains soulignant la nécessité d'un "électrochoc" pour lutter contre le harcèlement, d'autres jugeant "anormal" d'interpeller un mineur devant sa classe.

"Ca a été fait en conformité avec l'accord du parquet" et de "l'équipe éducative", a déclaré le porte-parole du gouvernement. "C'est comme ça qu'on s'en sortira face au fléau du harcèlement, c'est comme ça qu'on protégera aussi nos enfants, en envoyant ces messages très forts", a insisté Olivier Véran.

Une source policière a également indiqué à l’AFP que les policiers étaient "intervenus avec l’accord du parquet et de l’équipe éducative", et que l'interpellation avait "été effectuée au regard de la nature des menaces extrêmement graves qui nécessitaient une interpellation urgente". 

Scolarisée dans un autre établissement, l'élève harcelée aurait été menacée avec des propos tels qu'"on va t'égorger" et "j'ai une haine envers ta race, casse-toi, va mourir, suicide-toi sale PD, travelo", selon cette source.

Sur place, des élèves et parents d'élèves rencontrés par l'AFP peinent à comprendre pourquoi le garçon a été arrêté ainsi, et non pas après les cours ou ailleurs.

"Ca ne fait pas très propre", réagit Lamia H., 39 ans, agente RATP et mère d'élève. "Ca reste un ado, il est mineur. Ce n'est vraiment pas normal", dit-elle, en prenant soin d'ajouter: "même si je ne suis pas d’accord avec les faits" de harcèlement.

Des élèves de 3e, disant être dans la même classe que l'adolescent interpellé, s'émeuvent. "Pour moi, c'était impossible que la police rentre en classe", confie Fatoumata (prénom d'emprunt), 14 ans. Elle assure que l'interpellation s'est produite sans violence physique mais a "choqué" la classe. 

"Les menottes" en classe 

"La directrice a toqué, nous a dit qu'il y avait une interpellation en cours. Des policiers sont arrivés, l'ont saisi par le bras" et lui ont "passé les menottes en lui expliquant les faits dont il est accusé, relate-t-elle. "Nous on était choqués, on rigolait nerveusement." 

Anonymement, un autre élève assure que le professeur lui-même "était choqué et n'arrivait pas à reprendre" son cours... 

"Ça pose question d'avoir la police qui rentre dans l'établissement alors qu'il n'y a pas de situation d'urgence",  estime Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat du second degré, tout en rappelant que "le harcèlement est un délit et ses auteurs doivent être punis".

Pour la FCPE, principale fédération de parents d'élèves, "c’est incompréhensible et choquant qu’un élève puisse être arrêté comme ça", réagit Ghislaine Morvan-Dubois, trésorière. 

"On est réceptifs au fait que ce soit choquant", a indiqué à l'AFP Laurent Zameczkowski, porte-parole de la Peep, autre fédération de parents d'élèves. "Néanmoins on ne peut pas continuer comme ça", a-t-il ajouté. "Les mentalités doivent évoluer, et peut-être qu’il fallait ce genre d’électrochoc".

Les interpellations en milieu scolaire, ont lieu "uniquement quand il y a une situation urgence, quand tu n’as pas le choix", a expliqué à l’AFP une source policière, précisant que le chef d'établissement peut s’y opposer. "Ca reste des mineurs. Je ne vois pas l'intérêt", poursuit cette source. Une autre source policière défend "l'effet pédagogique" de ce type d'interpellation devant élèves, pour ce type de situations, harcèlement et graves menaces. 

Le ministre de l'Education Gabriel Attal a dit "comprendre" que cela "puisse interroger" tout en déclarant qu'"il ne peut pas y avoir de sérénité sans autorité" et que les faits des harcèlement nécessitent "une réaction rapide. "Personne ne doit sous-estimer un phénomène qui a conduit à la mort tragique de plusieurs jeunes dans notre pays et qui pourrit celle de milliers d’autres.

"Il est fort probable que le climat ambiant autour des questions de harcèlement ait généré une forme de sur-réaction", estime Didier Georges, membre de l’exécutif du SNPDEN-Unsa, principal syndicat des chefs d’établissements,  pour qui "le bon sens imposerait que ces interventions, quand bien même totalement justifiées, ne se fassent pas dans une classe".

Le collégien, qui a exprimé des regrets, avait été déféré devant un magistrat du parquet mardi. Il devra effectuer "une activité au profit de la collectivité" dans les prochaines semaines.

le Mercredi 20 Septembre 2023 à 05:27 | Lu 537 fois