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Cathy Puchon, une vie de danse avec Temaeva


TAHITI, le 11 juin 2020 - Danseuse depuis 1975 dans la troupe Temaeva, Cathy Puchon a aujourd’hui pris le relai de Coco Hotahota. Un défi qu’elle relève avec les anciens de la troupe. Elle annonce qu'elle restera au moins jusqu’au Heiva 2021.

Elle a démarré la danse à l’âge de 17 ans avec Temaeva. Une troupe qu’elle n’a finalement jamais quittée. Aujourd’hui, elle prend la suite de Coco Hotahota pour qu’elle perdure.

"J’ai 60 balais, mais je me rappelle très bien les premières fois, quand j’ai commencé la danse, ça a été très dur ! " Cathy Puchon est née au Vanuatu d’un père wallisien. Elle a été adoptée par des Tahitiens. Elle est arrivée très jeune en Polynésie française.

"Ça a été la cata"

Sa grand-mère maternelle qui aimait la danse, la bringue, le chant lui a ouvert les portes des arts polynésiens. "Ce qui me plaisait le plus, c’était quand même la danse", précise Cathy Puchon.

"Un jour, j’ai entendu parlé de Temaeva, je suis allée à une répétition. Mais comme je ne savais pas danser, ça a été la cata." Les répétitions avaient lieu à cette époque sur les fondations de l’hôtel Taaone qui avait brûlé.

Coco Hotahota, chef de troupe, tenait Temaeva de main de fer depuis un peu plus de dix ans. "Les noms d’oiseau, ça y allait." Très sévère, le chef de troupe ne laissait rien passer. D’après Cathy Puchon, il recherchait la perfection à tous les niveaux. Il voulait aller devant le public "avec du beau".

Après sa première séance, Cathy Puchon a pris le temps de la réflexion. Elle est finalement retournée danser, se disant que "c’était peut-être un mal pour un bien".

Elle a fourni les efforts qu’il fallait pour progresser. Elle a tenu une saison en 1974/1975, jusqu’au Heiva. L’événement se tenait à Tarahoi. Elle faisait partie des jeunettes, derrière. "Mais, même si vous êtes derrière, le public et le jury vous verront en train de mal danser ! ", répétait Coco.

Cathy Puchon s’est accrochée au-delà de son premier Heiva. Elle était là, par exemple, lorsque le chef de troupe a annoncé son retrait de la scène en 1992 (voir encadré : Coco Hotahota : provoquer pour préserver). "On a tous pleuré." Lorsqu’il est revenu, Cathy Puchon était au rendez-vous. Elle est restée fidèle à Temaeva.

"Mais comment j’ai réussi à me débrouiller ?"

"Bien sûr, je n’ai pas dansé tous les ans, j’ai dû fonder mon foyer, j’ai eu trois enfants." Mais une fois les grossesses terminées, l’appel de la danse a été irrésistible. Elle assistait, parfois avec ses bébés, aux répétitions le lundi et le mardi, assurait les shows d’hôtel du mercredi au dimanche. Le public pouvait la voir au Matavai, au Tahara’a, au Tahiti Village, au Maeva Beach, à l’hôtel Tahiti. Elle allait à Moorea, à Bora Bora et à l’étranger pour "faire la promotion touristique".

Formée au secrétariat, Cathy Puchon a travaillé en parallèle. Elle a d’abord été dans le médical avant de bifurquer dans le social "où je suis restée 40 ans" ! Elle est, pour une deuxième mandature, élue à la mairie de Punaauia. Avec le recul elle s’interroge : "Mais comment j’ai réussi à me débrouiller ? "

Cathy Puchon 
mène la troupe

En 2015, Coco Hotahota, sentant le moment venu, a fait appel à Cathy Puchon pour l’épauler. Elle n’a pas pu refuser, consciente pourtant des responsabilités que cela supposait. Elle a pris son rôle à bras le corps. "En 2018, j’ai été cash, j’ai demandé à quelqu’un de venir remplacer Coco car il était encore trop dur avec les danseuses et danseurs, on ne pouvait pas continuer ainsi."

Lorsqu’il est décédé, le chef de troupe avait déjà écrit les textes pour le prochain Heiva. "Il faisait tout, il était d’ailleurs le seul ou l’un des seuls à se charger du thème, des textes, des costumes, de la chorégraphie !" Son départ a laissé un grand vide.

Temaeva va reprendre les répétitions dès que possible pour le Heiva 2021. Cette édition du concours sera comme un hommage. "En attendant, on va organiser des journées récréatives pour entretenir les liens, on avance sur les costumes et on finalise les textes."

Coco Hotahota : provoquer pour préserver

Coco Hotahota s’en est allé le 8 mars 2020. Le lendemain, une majestueuse cérémonie dite "Poro’i", rassemblant la grande famille des danseurs, musiciens, costumiers, chorégraphes a été organisée à To’ata. Les enfants de Temaeva étaient au premier plan.

Coco Hotahota est né le 1er janvier à Moorea. Il était chorégraphe et danseur, fondateur de la troupe Temaeva née en 1962. Il a été élève de Madeline Mou’a.

En 1969, Temaeva a gagné pour la première fois le grand prix de danse traditionnelle et remporté les prix du meilleur orchestre et des plus beaux costumes.

En 1980, Coco Hotahota a fait porter à ses danseurs des costumes réalisés à partir de boites de conserve pour dénoncer la dérive moderniste. En 1997, ils apparaissent vêtus de smokings noirs et de parapluies, les femmes, elles, portaient robes noires, talons aiguilles et gants blancs…

Coco Hotahota a fait ses adieux à la scène à plusieurs reprises. La première fois en 1992, mais il est revenu en 1999. Temaeva n’a finalement
jamais arrêté. Elle est la plus ancienne et la plus titrée des troupes de danse tahitienne.

 

Un festival à la place du Heiva ?

La décision d’annuler les festivités du Heiva i Tahiti 2020 est liée aux risques de propagation du coronavirus. Les chefs de groupe s'étaient réunis le 14 mars à la Maison de la culture pour débattre de la question. Une annonce officielle a suivi.

Les concours de chants et danses du Heiva i Tahiti 2020 devaient se dérouler du 2 au 18 juillet à To’ata. Quatre groupes étaient inscrits dans la catégorie Hura tau et dix en Hura ava tau. En chant, sept étaient prévus en tarava Tahiti, six en tarava Raromatai et cinq en tarava Tuhaa Pae. Il s’agissait de la 138e édition de ce concours.

Les danses ont été interdites par le roi Pōmare II en 1819. Elles ne sont réapparues qu’en 1881, lors des festivités dédiées à la cérémonie du 14 juillet. 
En 1985, les fêtes de juillet furent baptisées Heiva i Tahiti.

Une réflexion est en cours pour organiser un festival en septembre, qui permettrait tout de même de célébrer la danse.

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Rédigé par Delphine Barrais le Jeudi 11 Juin 2020 à 11:56 | Lu 2177 fois