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Carnet de voyage - Passion orchidées à Mataiea


Trois générations d’éleveurs d’orchidées heureux et passionnés : de gauche à droite, Wilfrid, Keanu et Christian Moux.
Trois générations d’éleveurs d’orchidées heureux et passionnés : de gauche à droite, Wilfrid, Keanu et Christian Moux.
MATAIEA, le 18 octobre 2018. Dans la famille Moux, je demande le père, Christian, 74 ans, le fils, Wilfrid, 54 ans et le petit-fils, Keanu, 22 ans. Trois générations de mains vertes, qui managent avec ardeur la plus grande plantation d’orchidées de toute la Polynésie : plus de cent mille pieds, sur une surface dépassant l’hectare. Vandas, dendrobiums, cattleyas, ascocendas et hybrides de toutes les couleurs se bousculent sous les ombrières de ce jardin d’Eden, quelque part à Mataiea.


Au départ de l’aventure, un garçon entreprenant, Christian : salons de coiffures, restaurant, magasin, il ne compte pas ses heures de travail ni sa peine, mais ne tarde pas à remarquer que dans son magasin, ce qui se vend le mieux, ce sont les orchidées qu’il écoule comme des petits pains après les avoir achetées à de modestes producteurs. Christian n’y connaît rien en orchidées, mais il n’a peur ni d’apprendre ni de travailler.

Cap sur Hawaii

Dans les années soixante-dix, s’il peut acquérir les premiers rudiments de l’élevage des orchidées à Tahiti (les producteurs de cette fleur magique sont appelés « éleveurs » et non pas cultivateurs), il comprend vite que c’est ailleurs que ça se passe ; plus précisément à Hawaii où il va se former et d’où il commence à importer ses premiers jeunes plants.

Bientôt, la maison familiale de Punaauia, en bord de RT1, est cernée par les serres : des milliers, puis des dizaines de milliers d’orchidées sont en production, sachant qu’il faut deux à trois ans pour obtenir une première floraison.

Aujourd’hui, les producteurs se comptent à Tahiti sur les doigts d’une main : ils sont quatre qui vivent de cette seule activité connaissant deux pics saisonniers : la Fête des Mères et la Toussaint.

« Mes enfants à l’abri »

Bien vite, le terrain de Punaauia, saturé de milliers de pots, se révèle insuffisant pour satisfaire la demande. Christian a l’idée judicieuse d’acquérir une très belle terre en bord de rivière à Mataiea.

« Aujourd’hui, avec les prix du mètre carré, ce ne serait plus possible » nous a-t-il confié. « Heureusement, à l’époque, c’était encore faisable et je suis content d’avoir mis mes enfants à l’abri de ce besoin. Nous avons une belle parcelle, ils n’ont pas à investir tout leur argent dans un tel achat ».

Le bulbul, ennemi N° 1

Rien, de la route, ne signale l’immense plantation. Et pour cause, les voleurs sont déjà trop nombreux, voleurs qui ne sont d’ailleurs pas les pires ennemis des Moux : « les pires, ce sont les bulbuls (ndlr : Pycnonotus cafer, le bulbul à ventre rouge) ; ces oiseaux pénètrent dans les serres et viennent dévorer les bourgeons de nos orchidées, ce qui nous fait un tort considérable ». Et Wilfrid de nous montrer des tiges où s’épanouissent deux ou trois fleurs, au lieu de la grappe espérée, de petites cicatrices sur la tige montrant que les oiseaux voleurs se sont régalés.

Malgré les précautions prises pour fermer les serres, il y a toujours un de ces oiseaux qui parvient à pénétrer. « C’est pour cela que nos serres sont bien séparées entre elles. Si des oiseaux entrent dans l’une d’elles, au moins ne peuvent-ils pas aller dans d’autres. Mais c’est un combat de tous les jours. Notre chien est notre seule aide efficace, il saute très haut et les attrape aisément, sans dévaster les plantes ».

Fleurs coupées ou orchidées en pots ?

Christian sourit : à 74 ans, il est supposé être à la retraite, mais tous les matins, il se rend, avec son fils et son petit-fils à Mataiea où il continue à travailler infatigablement.

S’ils sont des grossistes livrant les fleuristes de Tahiti, mais aussi le « Paul Gauguin » et d’autres gros clients, les Moux ne sont pas hostiles à recevoir des visiteurs qui seraient intéressés par l’achat d’orchidées.

« Nous vendons essentiellement de la fleur coupée, mais nous écoulons également des orchidées en pot. Si certains de vos lecteurs sont intéressés, ils peuvent venir nous voir, nous leur montrerons notre travail et ils pourront, eux aussi, se lancer dans la culture des orchidées ». Une culture loin d’être aussi difficile qu’on le croit parfois. En tous les cas, le jeune Keanu étant lui aussi sur le terrain, ce sont donc d’ores et déjà trois générations d’orchidéistes (on nous pardonnera le néologisme !) qui s’affairent quotidiennement sous les ombrières de Mataiea où l’on ne chôme pas !

Christian, sur ce plan, a de quoi être satisfait. Son métier (sans doute l’un des plus beaux du monde) est devenu sa passion et il a su la transmettre à son fils et à son petit-fils.

Entreprenant eux aussi, ils poursuivent la tache aux côtés de Christian mais déjà ils se diversifient ; ils se sont lancés dans un autre pari, la production de pitayas, ce délicieux « cœur de dragon »…

Textes et photos : Daniel Pardon

De Thaïlande

Les Moux reçoivent régulièrement leurs jeunes plants d’orchidées directement de Thaïlande, le pays aujourd’hui leader dans la culture de ces fleurs. Les très jeunes plants arrivent par lots de quarante, enfermés dans des bouteilles en verre, reposant sur un substrat. En général, Christian réceptionne huit mille plants soigneusement rangés dans des caisses, qui font le trajet Bangkok-Auckland-Tahiti en avion, dans des soutes climatisées.

« C’est bien simple, le fret nous coûte aussi cher que les plants eux-mêmes ». Tous ces bébés orchidées, mesurant à peine deux centimètres de hauteur, sont ensuite plantés un par un dans une tourbe spécialement importée, avant d’être placés, plus tard, dans des pots sans substrat, ne contenant que des graviers. L’orchidée semble ainsi se nourrir de l’air du temps ; en réalité, elle capte l’humidité ambiante et sait fort bien tirer partie des nutriments qui lui sont fournis (savamment) dans l’eau d’arrosage, qu’elle reçoit à travers un système de brumisation.

Tous ces jeunes plants thaïlandais sont des clones de la même espèce ou du même cultivar, les deux genres dominant étant les dendrobiums et les plus rustiques vandas. Pour les couleurs, il ne s’agit plus, ensuite, que de choisir les cultivars désirés, tous identiques, clonage oblige.

Le contact :
Christian Moux : 87 77 66 67


Tous les jours, il faut soigner les orchidées, réparer les serres, veiller à la coupe des fleurs, etc.
Tous les jours, il faut soigner les orchidées, réparer les serres, veiller à la coupe des fleurs, etc.

Le mot orchidée vient du grec « orchis », signifiant « testicule », la forme que certains tubercules de ces plantes auraient.
Le mot orchidée vient du grec « orchis », signifiant « testicule », la forme que certains tubercules de ces plantes auraient.

Pour produire une tige fleurie d’orchidée, il faut compter deux années de soins et de patience.
Pour produire une tige fleurie d’orchidée, il faut compter deux années de soins et de patience.

A Tahiti, le marché est dominé par la fleur coupée, les acheteurs d’orchidées en pots étant finalement assez peu nombreux. Ici des fleurs de dendrobium.
A Tahiti, le marché est dominé par la fleur coupée, les acheteurs d’orchidées en pots étant finalement assez peu nombreux. Ici des fleurs de dendrobium.

Mi-ombre, mi-soleil, toujours sous ombrière, jamais en plein vent, les orchidées sont faciles à vivre si l’on est organisé pour répondre à leurs besoins.
Mi-ombre, mi-soleil, toujours sous ombrière, jamais en plein vent, les orchidées sont faciles à vivre si l’on est organisé pour répondre à leurs besoins.

La plupart des orchidées vendues aujourd’hui à Tahiti sont des fleurs issues de clones expédiés depuis la Thaïlande.
La plupart des orchidées vendues aujourd’hui à Tahiti sont des fleurs issues de clones expédiés depuis la Thaïlande.

Cette fleur de cattleya capricieuse a décidé de vivre à l’envers !
Cette fleur de cattleya capricieuse a décidé de vivre à l’envers !

C’est à Hawaii, voilà quelques décennies, que Chrstian Moux s’est formé à l’élevage des orchidées (car on dit « élevage », et non pas « culture » pour ces fleurs nobles).
C’est à Hawaii, voilà quelques décennies, que Chrstian Moux s’est formé à l’élevage des orchidées (car on dit « élevage », et non pas « culture » pour ces fleurs nobles).

Le genre Epidendrum fournit des grappes de petites fleurs très colorées.
Le genre Epidendrum fournit des grappes de petites fleurs très colorées.

Bel hybride d’Epidendrum aux délicates nuances roses.
Bel hybride d’Epidendrum aux délicates nuances roses.

Les orchidées se développent sur des substrats de graviers, dans des pots, ou fixées en épiphytes à des supports accrochés en hauteur.
Les orchidées se développent sur des substrats de graviers, dans des pots, ou fixées en épiphytes à des supports accrochés en hauteur.

Beau dendrobium hésitant entre le rose et le violet.
Beau dendrobium hésitant entre le rose et le violet.

Dendrobium blanc immaculé, idéal pour les bouquets de mariés.
Dendrobium blanc immaculé, idéal pour les bouquets de mariés.

Les vandas sont des fleurs très robustes, acceptant le plein soleil.
Les vandas sont des fleurs très robustes, acceptant le plein soleil.

Magnifique hybride de dendrobium aux pétales comme veinés.
Magnifique hybride de dendrobium aux pétales comme veinés.

Rédigé par Daniel PARDON le Jeudi 18 Octobre 2018 à 09:41 | Lu 1985 fois