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Carnet de voyage - " Ho’upo ”, le haricot géant de Rurutu


Rurutu, l’île tranquille des Australes, concentre un maximum d’attractions pour le visiteur, dont sa flore exceptionnelle.
Rurutu, l’île tranquille des Australes, concentre un maximum d’attractions pour le visiteur, dont sa flore exceptionnelle.
RURUTU, le 31 octobre 2016. C’est à une plaisante balade que nous vous emmenons aujourd’hui dans notre “grand sud”, l’archipel des Australes. Plus précisément à Rurutu, où nous sommes allés à la recherche des haricots géants qui font le bonheur des danseuses de ‘ori Tahiti. Des haricots pour danser ? Suivez-nous.

Rurutu est une île connue pour ses plages magnifiques (et très peu fréquentées), pour ses grottes extraordinaires, pour l’observation de ses baleines (la saison s’étend de juillet à octobre-novembre), pour sa gastronomie et ses traditions bien préservées. Mais c’est aussi une île où les filles, pour danser, n’utilisent pas des more faits du liber du purau (la partie qui est sous l’écorce), mais des grosses graines rondes, presque de la taille d’une paume de main.

Le “haricot géant” qui produit ces graines est l’objet de notre petit voyage d’aujourd’hui sur l’île.

Une liane énorme

Entada phaseoloides (le nom de la plante produisant ces graines) a un nom scientifique à coucher dehors, on vous l’accorde. Mais de toutes les graines que l’on trouve en Polynésie française, la plus recherchée et la plus appréciée est sans doute celle-ci, la large “ho’upo”, devenue rare aux Marquises (on en trouve encore sur les hauteurs de Fatu Hiva et de Tahuata, dans des zones peu accessibles, un peu à Nuku Hiva également) ; elle est, en revanche, très présente aux Australes, à Rurutu notamment.

Le “haricot géant” ou “haricot de St-Thomas” est une liane énorme, très envahissante, parvenant à étouffer les plus grands arbres de la forêt, qu’elle a tôt fait de recouvrir d’un mortel rets.

En fait, le genre Entada est répandu dans toute la ceinture tropicale, une majorité d’espèces étant originaires d’Afrique. À lianes gigantesques, fruits gigantesques aussi, en l’occurrence de spectaculaires gousses qui peuvent dépasser un mètre de longueur et la largeur d’une main.
C’est dans cette gousse que l’on trouve les fameuses graines à peu près rondes et plates, qui ont la particularité de pouvoir résister un temps très long dans l’eau, des rivières d’abord, des océans ensuite.

Un more brillant et sonore

C’est ainsi qu’à l’image des graines de Mucuna sloanei (l’œil de bœuf, fruit d’une autre liane), la graine d’Entata peut traverser l’Atlantique, si elle part de la Caraïbe ou de l’Amérique du sud, pour se retrouver sur les plages d’Irlande ou de Scandinavie. Évidemment, de tels cadeaux de la nature ont toujours été appréciés non seulement dans les pays où poussent ces lianes tentaculaires, mais encore plus dans des pays tempérés ou froids, où ces graines étaient considérées comme de véritables porte-bonheur, susceptibles d’écarter le mauvais œil et les mauvais esprits de celui qui en possédait au moins une.

Dans le Pacifique, la dispersion s’est faite de la même façon, sachant que l’homme a, lui aussi, largement contribué à répandre l’espèce.
En Polynésie française, la graine, qui est très facile à récolter au pied des arbres colonisés par les lianes, a donc un usage particulier à Rurutu : on en fait des more de danse, les chapelets de graines enfilées dans leur plus grande longueur remplaçant l’écorce de purau (Hibiscus tiliaceus) en guise de “jupette”.

Évidemment, non seulement les graines brillent, mais elles produisent des sons lorsque la danseuse est en mouvement. Il en faut plusieurs dizaines pour une seule “jupe”, ce qui explique qu’il n’y a, à notre connaissance, que les groupes de danse des Australes qui se produisent avec de tels costumes.

En forêt humide, à basse altitude

Entada phaseoloides, compte tenu des dégâts qu’elle provoque dans les forêts en étouffant les arbres (beaucoup la coupent ou l’arrachent), et compte tenu surtout de l’attrait de ses graines, est une espèce de liane qui devient de plus en plus rare au fil des années. Elle exige en effet un espace vital considérable, au détriment de la végétation locale déjà existante, et la récolte systématique de ses graines en limite considérablement la prolifération.
Cette rareté explique qu’en bijouterie artisanale, la grosse graine plate, si belle soit-elle, n’est en définitive que peu employée aujourd’hui ; elle est une matière première d’un prix élevé (toutes proportions gardées) et sert plutôt de pièce centrale à des colliers sophistiqués ou à des ceintures du plus bel effet (une autre variété, plus rare, avec des graines en forme de cœur, est parfois utilisée).

Baissez la tête !

Si vous vous rendez, vous aussi, à Rurutu, et si vous souhaitez récolter des graines de haricot géant, il vous faudra vous enfoncez profondément dans les petites vallées de l’île, là où la forêt de basse altitude est très humide et dense. Lorsque les arbres sont recouverts de lianes, vous êtes probablement en présence de nos fameux haricots.

Pour le savoir, rien de plus simple : ne levez pas la tête, baissez là ! Les gousses mûres se brisent en segments qui tombent au sol et libèrent ensuite les graines, ayant la faculté de résister longtemps à l’humidité et aux attaques des insectes. Dès que vous aurez devant vous une belle “pièce de monnaie” marron, vous serez sous une liane en production et il serait très étonnant que vous ne trouviez qu’une seule de ces graines ; en général, enfouies dans la végétation, elles sont plusieurs, quelques dizaines si vous avez de la chance.

En revanche, un bon conseil, en levant le nez en l’air, vous apercevrez très certainement dans la haute canopée, des longues gousses vertes ou commençant à brunir. Il est très tentant d’essayer de monter les cueillir, mais dans la mesure où ce sont des fruits de lianes, ces gousses sont rarement accessibles à partir de branches solides. N’allez donc pas risquer une chute qui pourrait être fatale pour ces “haricots”, si géants soient-ils…

Textes et photos : Daniel Pardon

La gousse du “haricot géant” ; chaque segment contient une grosse graine de la taille d’une paume de main.
La gousse du “haricot géant” ; chaque segment contient une grosse graine de la taille d’une paume de main.

Entada phaseoloides
Cœur de la mer, haricot de St. Thomas, haricot géant
Nom marquisien : ho’upo
Famille : Fabacées

Une gousse verte, une gousse sèche et des graines récoltées en forêt. Un petit trésor qui fera la fierté de randonneurs.
Une gousse verte, une gousse sèche et des graines récoltées en forêt. Un petit trésor qui fera la fierté de randonneurs.

La plupart du temps, on récolte au sol des segments de gousses contenant leur graine, mais très souvent aussi la graine toute seule, plus ou moins attaquée par des parasites.
La plupart du temps, on récolte au sol des segments de gousses contenant leur graine, mais très souvent aussi la graine toute seule, plus ou moins attaquée par des parasites.

Les graines de haricot de St. Thomas peuvent flotter à travers des océans sans rien perdre de leur pouvoir de germination. Ce qui explique la très large diffusion de cette plante dans la ceinture tropicale.
Les graines de haricot de St. Thomas peuvent flotter à travers des océans sans rien perdre de leur pouvoir de germination. Ce qui explique la très large diffusion de cette plante dans la ceinture tropicale.

Rurutu pratique

Pour y aller
Plusieurs vols par semaine avec Air Tahiti. Forfaits avec la formule Séjours dans les îles comprenant le billet et le séjour (cf. encadré).

Spécialités
En demandant, on peut déguster à Rurutu des spécialités locales inhabituelles ; langoustes certes, mais aussi oursins, poulpes, mou'a (gros coquillages ramassés sur le platier), pau'a (bénitiers) et même des algues en salade (une spécialité Rurutu)… Dé-li-cieux !

Quand y aller ?
L'hiver austral est plus marqué aux Australes qu'à Tahiti. Juillet et août sont des mois un peu frais pour la plage, mais en revanche, en cette période d’intersaison, le climat est idéal. Cela dit, Rurutu est fréquentable toute l'année.

Et les baleines ?
C’est aujourd’hui un peu tard, mais les retardaires (les baleines) seront encore là quelques jours : les amateurs pourront coupler leur séjour avec une sortie "whale watching". Les demi-journées avec les bateaux locaux autorisés à se livrer à cette activité permettent de découvrir les baleines à bosse, qui viennent dans les eaux de Rurutu à partir de juillet pour se reproduire. Expérience fabuleuse à vivre (comptez 10 000 Fcfp la sortie d'une demi-journée, matin ou après-midi).

À ramener
Ne partez pas les mains vides. Ramenez, entre autres, du café (bien meilleur que le café importé) et, bien sûr, de la vannerie de Rurutu (pandanus tressé).

À savoir
Rurutu est le paradis de la spéléologie. Les grottes facilement accessibles ont souvent été vandalisées, d'autres, plus secrètes, sont des merveilles aussi belles que fragiles. Tahiti Infos vous en fera découvrir prochainement…

Rurutu dans toute sa beauté ; le pays du taro ; à l’arrière-plan, des fragments de forêts humides. C’est là que l’on peut trouver des graines de “haricot géant”.
Rurutu dans toute sa beauté ; le pays du taro ; à l’arrière-plan, des fragments de forêts humides. C’est là que l’on peut trouver des graines de “haricot géant”.

Les bonnes adresses “Séjours dans les îles”

Pension Teautamatea

Dans le district de Vitaria, près d’un “marae” où reposent les derniers rois de l’île, la pension Teautamatea est une grande maison de 3 chambres avec salles de bains privées. Elles sont décorées de façon très originale, avec des matériaux locaux comme le bambou, le pandanus, le corail et le peue. Viriamu, le propriétaire, est un ébéniste de talent et il a lui-même confectionné presque tous les meubles de la demeure. Il descend des derniers 'arii de l’île.
Séjour Vol + 2 nuits à partir de 42 402 Fcfp/pers. avec demi-pension

Pension Temarama

La pension Temarama est une grande maison en dur d'un étage située en hauteur, à l'entrée du village de Moerai. Gérée par une famille sympathique et dynamique, elle propose 4 chambres aérées.
Séjour Vol + 2 nuits à partir de 44 452 Fcfp/pers.avec demi-pension

Forfaits
Renseignez-vous à Séjours dans les îles (Air Tahiti) pour organiser votre déplacement en minimisant les coûts (mixez Rurutu avec une autre île des Australes par exemple).
Site Internet : www.sejoursdanslesiles.pf

La pension Teautamatea se trouve implantée en bordure immédiate des grands marae royaux du district de Vitaria. C’est là que vécut la dernière dynastie des rois de Rurutu, dont Viriamu Teuruarii, qui tient la pension avec sa femme, la Galloise Elin, est l’un des héritiers.
La pension Teautamatea se trouve implantée en bordure immédiate des grands marae royaux du district de Vitaria. C’est là que vécut la dernière dynastie des rois de Rurutu, dont Viriamu Teuruarii, qui tient la pension avec sa femme, la Galloise Elin, est l’un des héritiers.

La grande île des Australes mérite d’être visitée en surface, mais aussi en sous-sol, car elle est truffée de grottes du fait d’une géologie unique en Polynésie française.
La grande île des Australes mérite d’être visitée en surface, mais aussi en sous-sol, car elle est truffée de grottes du fait d’une géologie unique en Polynésie française.

Rédigé par Daniel PARDON le Lundi 31 Octobre 2016 à 09:39 | Lu 2106 fois