Pointe-à-Pitre, France | AFP | mardi 27/02/2017 - Les groupes à "pô", typiques du Carnaval de Guadeloupe et nommés ainsi en raison de leurs tambours en peau de chèvre, ont choisi pour l'édition 2017 de "réveiller" les consciences autour du massacre de manifestants par les forces de l'ordre en mai 1967 à Pointe-à-Pitre, dont le nombre de morts fait encore débat.
Traditionnellement, les "gwoup a pô" (groupes à peaux) ne défilent pas : annoncés par des fouettards qui font claquer des longs fouets sur le sol, ils "déboulent" au pas de charge dans les rues, au son des tambours et des "refrains" en créole.
"Ils sont des groupes de carnaval guidés par des thèmes d’utilité publique", explique Marie-Josèphe Dalila, vice-présidente de la Fédération Guadeloupéenne de Carnaval. Les années précédentes, ils déboulaient sur les thèmes de l'accès à l'eau, la corruption des élus ou la violence des jeunes.
Cette année, quinze de ces groupes se sont rassemblés en un mouvement mémoriel autour du cinquantenaire du massacre de mai 1967 à Pointe-à-Pitre, dont le nombre de victimes fait encore débat.
Le 26 mai 1967, l'échec de négociations entre des ouvriers du bâtiment et le patronat entraîne des heurts à Pointe-à-Pitre. Les forces de l'ordre ouvrent le feu et tuent des manifestants. Le bilan officiel de "8 morts identifiés" est régulièrement contesté, et on évoque jusqu'à 87 tués.
Malgré des recherches dans les archives des mairies et des hôpitaux, une commission indépendante présidée par l'historien Benjamin Stora a indiqué dans ses conclusions en novembre dernier n'avoir pas pu prouver un nombre de morts supérieur à huit, tout en soulignant un nombre de blessés par balles "considérable".
Dimanche soir, à quelques jours de la fin du Carnaval qui a démarré le 6 janvier, les groupes à pô ont transmis, lors de la grande parade du Dimanche Gras, "la banderole de commémoration de Mai 1967 aux groupes de carnaval parisiens, ainsi qu'un livre de pétitions pour demander l'ouverture des archives", a expliqué Moïse Mayoute, président du groupe Akiyo, à l'initiative du mouvement mémoriel.
Dans un de leurs déboulés, une partie du groupe a incarné les forces de l'ordre, le visage peint en blanc, des écharpes tricolores et des képis rouges, avec un camion-char militaire. Le reste du groupe, symbolisant les Guadeloupéens, arborait un visage peint en tête de mort.
Depuis le début du Carnaval chaque groupe a organisé des actions "pour éveiller les consciences historiques": conférences, pièces de théâtre, slam, concerts, interventions de psychologues, sociologues ou historiens, témoignages de "rescapés" ou encore expositions remémorant les événements.
"Nos grands-parents, nos parents ont vécu cette période, mais nous les jeunes, nous n’avons jamais eu la vérité", souligne Gabriel Grossard, jeune président du groupe Mas BoKoKa.
Dans les rangs des autres groupes de carnaval, notamment ceux dits "à caisse claire", dont les défilés s’ornent de plumes, de paillettes, et de fanfare, ce militantisme est parfois déploré : le Carnaval est un événement festif pas politique.
Pourtant, c'est "l'événement culturel le plus suivi en Guadeloupe", rappelle Moïse Mayoute. L'occasion pour lui de se souvenir de "qui l’on est", "d’où l’on vient" et de "donner du sens" avec les "moyens du bord", à une "identité", qui reste, pour beaucoup, fortement marquée par la période esclavagiste et de domination française.
Ces actions autour de mai 1967 ont été bien accueillies par le public, souvent ému au sortir des conférences. Le besoin de regarder l'histoire en face a été renforcé par les propos d'Emmanuel Macron sur la colonisation comme "un crime contre l'humanité", des mots "tombés à pic" pour les carnavaliers.
Traditionnellement, les "gwoup a pô" (groupes à peaux) ne défilent pas : annoncés par des fouettards qui font claquer des longs fouets sur le sol, ils "déboulent" au pas de charge dans les rues, au son des tambours et des "refrains" en créole.
"Ils sont des groupes de carnaval guidés par des thèmes d’utilité publique", explique Marie-Josèphe Dalila, vice-présidente de la Fédération Guadeloupéenne de Carnaval. Les années précédentes, ils déboulaient sur les thèmes de l'accès à l'eau, la corruption des élus ou la violence des jeunes.
Cette année, quinze de ces groupes se sont rassemblés en un mouvement mémoriel autour du cinquantenaire du massacre de mai 1967 à Pointe-à-Pitre, dont le nombre de victimes fait encore débat.
Le 26 mai 1967, l'échec de négociations entre des ouvriers du bâtiment et le patronat entraîne des heurts à Pointe-à-Pitre. Les forces de l'ordre ouvrent le feu et tuent des manifestants. Le bilan officiel de "8 morts identifiés" est régulièrement contesté, et on évoque jusqu'à 87 tués.
Malgré des recherches dans les archives des mairies et des hôpitaux, une commission indépendante présidée par l'historien Benjamin Stora a indiqué dans ses conclusions en novembre dernier n'avoir pas pu prouver un nombre de morts supérieur à huit, tout en soulignant un nombre de blessés par balles "considérable".
Dimanche soir, à quelques jours de la fin du Carnaval qui a démarré le 6 janvier, les groupes à pô ont transmis, lors de la grande parade du Dimanche Gras, "la banderole de commémoration de Mai 1967 aux groupes de carnaval parisiens, ainsi qu'un livre de pétitions pour demander l'ouverture des archives", a expliqué Moïse Mayoute, président du groupe Akiyo, à l'initiative du mouvement mémoriel.
- "donner du sens" -
"Depuis septembre nous avons travaillé sur la thématique du souvenir de +Mé 67+, fait d'histoire encore trop méconnu, même en Guadeloupe", racontent Kelly Bahija et Ninette Hubert, du groupe Nasyon a Neg Mawon.Dans un de leurs déboulés, une partie du groupe a incarné les forces de l'ordre, le visage peint en blanc, des écharpes tricolores et des képis rouges, avec un camion-char militaire. Le reste du groupe, symbolisant les Guadeloupéens, arborait un visage peint en tête de mort.
Depuis le début du Carnaval chaque groupe a organisé des actions "pour éveiller les consciences historiques": conférences, pièces de théâtre, slam, concerts, interventions de psychologues, sociologues ou historiens, témoignages de "rescapés" ou encore expositions remémorant les événements.
"Nos grands-parents, nos parents ont vécu cette période, mais nous les jeunes, nous n’avons jamais eu la vérité", souligne Gabriel Grossard, jeune président du groupe Mas BoKoKa.
Dans les rangs des autres groupes de carnaval, notamment ceux dits "à caisse claire", dont les défilés s’ornent de plumes, de paillettes, et de fanfare, ce militantisme est parfois déploré : le Carnaval est un événement festif pas politique.
Pourtant, c'est "l'événement culturel le plus suivi en Guadeloupe", rappelle Moïse Mayoute. L'occasion pour lui de se souvenir de "qui l’on est", "d’où l’on vient" et de "donner du sens" avec les "moyens du bord", à une "identité", qui reste, pour beaucoup, fortement marquée par la période esclavagiste et de domination française.
Ces actions autour de mai 1967 ont été bien accueillies par le public, souvent ému au sortir des conférences. Le besoin de regarder l'histoire en face a été renforcé par les propos d'Emmanuel Macron sur la colonisation comme "un crime contre l'humanité", des mots "tombés à pic" pour les carnavaliers.