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Bataille du nickel aux îles Salomon : une société australienne prend la main


Bataille du nickel aux îles Salomon : une société australienne prend la main
HONIARA, jeudi 5 juillet 2012 – La société minière australienne Axiom a annoncé mardi 3 juillet 2012 avoir obtenu le permis de la part du gouvernement des îles Salomon en vue de prospecter sur un site minier contenant de l’or, du cuivre et du nickel sur l’île principale de Guadalcanal.
Ce permis concerne une superficie de 554 kilomètres carrés, au Sud de la capitale Honiara, tout près du site minier existant de Gold Ridge (détenue par Allied Gold Plc), au Sud-ouest de l’île.
Il fait suite à l’acquisition par Axiom de 93 pour cent des parts de la société de droit local Guadalcanal Resources Limited (GRL), qui détenait déjà depuis 2011 les autorisations nécessaires à la prospection, précise la société australienne.
« Axiom débutera prochainement l’exploration pour des systèmes porphyriques cuivre-or, de l’or épithermal et des minéralisations de latérites de nickel », ajoute Ryan Mount, directeur général de la compagnie, qui parle de « nouvelles frontières » en matière d’exploration minière.
Il rappelle aussi que sa société possède d’autres sites de prospection aux îles Salomon, dont certains se trouvent sur d’autres îles, situées dans les provinces de Makira et d’Isabel (îles Santa Isabel et San Jorge, latérites de nickel et cobalt, partenaire à 80 pour cent).
Le gisement de Santa Isabel et San Jorge avait été précédemment été exploré par un autre géant, le Canadien Inco, au cours des années 1950-1970, mais s’était heurté à de fortes opposition de la part de certains clans coutumiers locaux.
Aux îles Salomon, Axiom met l’accent sur une étroite collaboration avec les responsables coutumiers locaux et un souci de préservation de l’environnement.
La société mène aussi des projets au Vietnam (or et argent) et dans le Nord de l’État australien du Queensland (site de Chillagoe, argent et cuivre).
Un litige opposant Axiom au géant japonais Sumitomo se trouve toujours devant la haute Cour des îles Salomon.

Fin avril 2011, le gouvernement salomonais avait dû intervenir dans la course à laquelle se livraient déjà deux Axiom et Sumitomo afin d’obtenir le permis d’exploiter un énorme site dans la province d’Isabel, en démentant formellement les allégations de la concurrente australienne.
Les deux sociétés minières se livraient alors à une guerre par médias interposés dans le cadre de leur course à l’exploitation de ce site, sur fonds de hausse ininterrompue des cours mondiaux de ce minerai et en particulier de la part de pays émergents comme la Chine et l’Inde.
Début mars 2011, la petite société australienne Axiom Mining n’hésitait pas à clamer qu’elle avait obtenu les droits.
Elle évoquait alors la signature d’un accord avec une majorité des propriétaires coutumiers du site, situé dans la province salomonaise d’Isabel.
Mais dans les faits, aucune des deux sociétés n’avait encore atteint le stade de l’octroi du nécessaire permis de prospection.
Le géant minier nippon Sumitomo avait alors aussi, de son côté, tempéré les précédentes déclarations faite par son rival.
Mercredi 27 avril 2011, dans un communiqué de presse, le gouvernement des îles Salomon jugeait utile d’enfoncer le clou en affirmant qu’il « rejette sans équivoque toutes les allégations et la validité d’une (supposée) licence de prospection octroyée à Axiom pour les gisements de nickel et de cobalt sur l’île d’Isabel ».
Cette mise au point semblait intervenir en réponse à des annonces faites par Axiom à la bourse des valeurs australiennes, le 21 avril 2011.
Cette annonce de la part de la société, largement relayée par les médias australiens, avait alors eu pour effet immédiat de faire grimper le cours des actions de la société de pas moins de soixante dix pour cent, pour les mois de mars et avril 2011.
Le gouvernement d’Honiara pour motiver sa nouvelle position, soulignait alors le fait que les circonstances dans lesquelles « un précédent ministre des mines (…) avait émis une lettre d’intention le 12 avril (2011), puis une licence de prospection trois jours plus tard étaient désormais considérées comme hautement suspectes ».
« D’autant plus que la licence de prospection a été mise la veille de son limogeage », souligne le communiqué qui rappelle que selon la procédure « normale », le permis de prospection « est émis dans une période de trois mois .suivant la délivrance d’une lettre d’intention ».
L’affaire avait aussi suscité des « préoccupations extrêmes » de la part du Premier ministre salomonais de l’époque, Danny Philip, qui annonçait son intention d’engager une nouvelle phase de consultations sur ce dossier sensible.
« Si des irrégularités sont avérées dans la gestion de ce dossier nickel par l’ancien ministre, cela signifie que tous les accords passés avec cette personne, y compris la lettre d’intention et le permis de prospection sont suspendus jusqu’à nouvel ordre en attendant les résultats d’une enquête dans cette affaire », ajoutait alors le gouvernement salomonais, qui évoquait une éventuelle « corruption » au niveau des négociations directes avec certains coutumiers qui n’auraient pas de droits fonciers sur le site ciblé.
La déclaration émanant d’Honiara avait alors eu pour effet rapide de faire chuter le cours des actions d’Axiom dans l’autre sens et de plus d’un tiers.
La société australienne avait aussi formellement démenti toute irrégularité dans ses transactions avec les acteurs locaux sur ce dossier, tout en rappelant que sur le terrain, c’est une société à participation mixte (avec un groupe d’intérêt collectif à vingt pour cent) qui traite le dossier.
Début avril 2011, Yoritoshi Ochi, directeur général de Sumitomo, rappelait que son groupe traitait avec seize groupements de propriétaires coutumiers soutenant sa candidature.
« Donc en attendant la réponse, nous aussi, nous allons de l’avant et poursuivons nos plans, le tout avec le soutien fort de notre gouvernement », avait-il alors précisé.
Selon M. Ochi, le gouvernement japonais « apporte au moins trente pour cent en soutien aux efforts d’investissement de notre société dans la province d’Isabel ».
« Si c’est notre société qui exploite le nickel sur Isabel, cette activité va tripler l’économie des îles Salomon », avait-il affirmé tout en rappelant à propos une visite aux îles Salomon du Vice-ministre japonais des affaires étrangères, en février 2011.
Le gisement de nickel de Santa Isabel est considéré comme l’un des plus importants découvert ces dernières années.
Ryan Mount, directeur général d’Axiom, mettait en avant début mars 2011 son intention de traiter « directement » avec les coutumiers et, dans ce cadre, de former une société mixte dans laquelle Axiom détiendrait 80 pour cent des parts, le reste allant à un groupement d’intérêt économique composé de ces intérêts fonciers locaux.
M. Mount estime que l’exploitation de ce gisement par sa société pourrait signifier « une hausse potentielle du Produit Intérieur Brut des îles Salomon de l’ordre de 60 à 70 pour cent ».
Il admettait toutefois qu’un processus d’appel d’offre international avait été lancé par le gouvernement salomonais et qu’Axiom avait décidé de ne pas y participer car « à l’époque, aucun accord n’avait été confirmé avec les propriétaires fonciers ».
En faisant cette annonce, et en affirmant avoir d’ores et déjà signé un bail sur cinquante ans avec les coutumiers, la société Axiom estimait que les ressources salomonaises de nickel à Santa Isabel, situées sur un périmètre de quelque 45 kilomètres carrés, représentaient près de 160 millions de tonnes en minerai, pour une valeur estimée à près de soixante milliards de dollars US.
Plus au Sud de la Mélanésie, le territoire français de Nouvelle-Calédonie est, quant à lui, considéré comme recélant environ un quart des réserves mondiales de nickel.
Ces réserves sont actuellement exploitées par la Société Le Nickel (SLN, filiale du géant minier français Eramet) au Sud de l’île principale.
Plusieurs autres projets, notamment pilotés par le Brésilien Vale (Sud de l’île principale) et par le géant suisse Xstrata (projet sur le massif de Koniambo, Nord de la même île) sont actuellement en voie d’achèvement.

Rédigé par PAD le Jeudi 5 Juillet 2012 à 07:33 | Lu 903 fois