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Autopsie de la mortalité entre 1983 et 2019 au fenua


Tahiti, le 15 février 2021 - On meurt un peu plus au fenua ces dernières années selon l'ISPF. Mais rien d'alarmant pour autant puisque la population augmente et vieillit. L'étude de l'Institut porte sur les années 1983 à 2019 et précise un point essentiel : la mortalité des jeunes a nettement diminué.
 
L'Institut de la statistique de la Polynésie française (ISPF) vient de publier une étude de l’évolution de la mortalité entre 1983 et 2019, et donc avant l'arrivée du coronavirus sur le territoire. Premier fait notable à tirer de l'analyse de ces presque quatre décennies, le nombre de décès n’a jamais été aussi important que ces dernières années, remarque l'ISPF. Pas de quoi s'alarmer pour autant puisque “ce phénomène s’explique par l’augmentation de la taille de la population et par l’arrivée à des âges de mortalité élevés d’une part importante de la population.
 
1 551 personnes sont décédées au fenua en 2019, mais le taux de mortalité est sensiblement le même qu'au début des années 80. Le nombre de décès pour 10 000 habitants fluctue autour de 50 sur la période étudiée, avec un nombre de morts un peu plus faible à la fin des années 1990 et au début des années 2000. Il est alors descendu à 43/10 000. Ces dernières années, il était de l'ordre de 55 à 58 pour 10 000, comme dans les années 1980.
 
• Les jeunes plus épargnés
 
Les victimes de la grande faucheuse ne sont plus les mêmes. L'ISPF précise que sur la période étudiée, on observe une diminution de la part de la mortalité infantile et des moins de 30 ans. La plus spectaculaire est la baisse de la mortalité des moins de 10 ans, mais globalement, les moins de 29 ans meurent beaucoup moins nombreux. Ils représentaient plus de 25% des disparitions au début des années 1980 pour moins de 10% en 2019.
 
La part des décès des 30-49 ans diminue aussi, mais de manière moins spectaculaire. Les 50 à 69 ans décèdent dans les mêmes proportions au début et à la fin de l'étude. C'est donc la part des décès chez les matahiapo qui augmente logiquement avec le vieillissement de la population. L'ISPF donne les chiffres suivants : “La part de décès des personnes de plus de 70 ans a augmenté, et fortement pour les 80 ans et plus passant de 9% des décès en 1983 à 22% des décès en 2019 pour les 80-89 ans et de 1% à 6% pour les 90 ans et plus”.
 
• Pas de saison pour mourir
 
Si les pays tempérés soumis aux saisons comme la France métropolitaine connaissent une augmentation de la mortalité en hiver, rien de tel en la Polynésie française. Le climat tropical qui baigne le fenua toute l'année évite une période de congestion dans les entreprises de pompes funèbres. L'ISPF note cependant que “en moyenne depuis 1983, le nombre de décès journaliers est plus important en janvier, avril et décembre. À l’inverse, les mois de février, juin et octobre le sont moins”, mais le tout sans régularité significative. En 2019, 4,2 personnes sont mortes en moyenne chaque jour. Mais si certains jours elles ont été 11 à accéder au repos éternel, certains autres la Camarde prend du repos et n'endeuille aucune famille.
 
• Les épidémies sans réel impact
 
Le fenua a connu plusieurs épidémies pendant la période étudiée (zika d’octobre 2013 à fin mars 2014, chikungunya d’octobre 2014 à mars 2015 et dengue en 2019). L'ISPF remarque que “l’impact de ces épidémies sur la mortalité n’est pas toujours démontré. Ces trois épidémies n'ont pas fait évoluer la mortalité de manière notable. L'Institut ajoute qu'il est important de prendre en compte l’effet de moisson ou effet de récolte. Il se définit comme une mortalité importante sur une période courte des personnes les plus fragilisées qui seraient décédées dans les semaines ou les mois suivants, expliquant une mortalité plus faible par la suite. A l'image de la pandémie de Covid-19 qui cause principalement la mort des patients les plus faibles.
 
• Pirae, ville évidemment mortelle
 
Dernier point, la géographie. Quatre décès sur dix ont lieu à Pirae où se situe le CHPF. Pirae a remplacé Papeete en 2011 avec l'ouverture de l'hôpital récemment rebaptisé Jacques Chirac qui avait alors remplacé le vieil hôpital de Mamao. En 2019, 42% de ceux qui ont passé l'arme à gauche ont lâché leur dernier soupir à Pirae, mais seuls 6% en étaient résidents. 

Rédigé par Pierre Daumont le Lundi 15 Février 2021 à 18:17 | Lu 2330 fois