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Au Fifo, David Gulpil raconté par Molly Reynolds : "On apprend des choses sur la vie, sur la mort, et bien sûr, sur soi-même"


Tahiti, le 6 février 2022 - My name is Gulpilil de Molly Reynolds est un documentaire sur la fin de la vie de David Gulpil, grand artiste aborigène. Un dernier acte pour cet homme qui a joué dans une vingtaine de films dont Crocodile Dundee, The Tracker et Ten canoes. Le vieil homme qu’il est devenu lutte contre la maladie et se souvient de sa jeunesse dans le bush, de ses premiers pas face à la caméra où "il ne joue pas mais il est". Une vie hors norme où il a mangé avec la famille royale d’Angleterre et s’est également retrouvé en prison pour des problèmes de drogue et d’alcool. Molly Reynolds, la réalisatrice du documentaire, raconte… 
 
Quels étaient les objectifs de ce documentaire ?
 
"Nous voulions permettre à David de raconter directement son histoire à son public, avec ses propres mots."
 
Comment ce film a-t-il vu le jour ?
 
"Lorsqu’on lui a diagnostiqué un cancer du poumon au stade 4, David a voulu faire un dernier film. C’est ce qu’il nous a dit quand Rolf de Heer (qui a dirigé David dans The Tracker, Dix canoës et Charlie’s Country) et moi-même sommes allés lui rendre hommage à l’époque. Nous avons estimé qu'un dernier documentaire serait le meilleur moyen de permettre à David de continuer à travailler le plus longtemps possible."
 
À-t-il vu le film avant de mourir ? Si oui, qu’en a-t-il pensé ?
 
"À l'origine, le documentaire devait se terminer avec les cérémonies de décès de David, mais comme il allait bien et que les médecins pensaient qu'il vivrait encore longtemps, nous avons décidé, David, Rolf et moi-même, de finir le film avec lui sur scène. La première a eu lieu en mars 2021, au festival des arts d'Adélaïde, où 1 600 personnes ont fait une ovation à David."
 
Avez-vous vécu ses derniers moments avec lui ?
 
"Non, il est décédé chez lui, auprès de Mary, son auxiliaire de vie. Le cœur de David a lâché. Peut-être parce qu'il était plus que prêt à partir."
 
Il doit être particulièrement émouvant de filmer la fin d'une vie, d'une personne avec tous ses souvenirs...
 
"Ça l’est, en effet. On apprend des choses sur la vie, sur la mort, et bien sûr, sur soi-même."
 
On sent une grande sincérité dans le documentaire : sa fierté d'avoir vécu une telle vie, avec ses excès, mais aussi sa douleur d'être malade et impuissant, sa tristesse de préparer son départ.
 
"David savait parler de façon directe et honnête à son public, ce qui a permis à ces nombreuses émotions de s’exprimer."
 
Vous connaissiez déjà David Gulpilil avant de réaliser ce film. Sur quoi avez-vous travaillé ensemble ?
 
"David et moi avons collaboré sur le documentaire, Another Country, qui a gagné le grand prix du FIFO en 2017."
 
Quel genre d’homme était-ce ? Comment le décririez-vous ?
 
"David était un chanteur, un danseur, un peintre et un acteur d’un exceptionnel talent. Je me rappelle de lui comme de quelqu’un de charismatique, d’imprévisible, avec un sens de l’humour incroyable, et des moments de grande perspicacité."
 
Que représente aujourd'hui David Gulpilil en Australie, et plus largement dans le Pacifique ?
 
"David a ouvert la voie aux artistes aborigènes australiens dans le domaine des arts du spectacle. Il a su dire aux peuples autochtones d'Australie et du Pacifique : « Nous pouvons le faire, nous sommes autonomes, nous avons une voix et du talent ! »."
 
Êtes-vous heureuse que ce documentaire ait été sélectionné en compétition au FIFO ?
 
"Je le suis, absolument, et je sais que David en aurait été ravi."
 

Rédigé par Fifo le Dimanche 6 Février 2022 à 21:59 | Lu 598 fois