Tahiti le 25 octobre 2022 – Deux propositions de loi du Pays déposées à l'assemblée par l'élu Tapura Antonio Perez prévoient, pour l'une, de donner la possibilité aux communes de voter des centimes additionnels adossés à la Redevance de promotion touristique et, pour l'autre, de revaloriser jusqu'à huit fois les plafonds de la taxe de séjour. Les professionnels de l'hôtellerie et des pensions de famille grincent des dents.
L’élu Tapura et président de la commission de l'économie à l'assemblée, Antonio Perez, a déposé deux propositions de loi du Pays permettant aux communes polynésiennes de percevoir davantage de recettes fiscales émanant du tourisme. Le premier texte donnera la possibilité aux communes de voter des “centimes additionnels” adossés à Redevance de promotion touristique perçue par le Pays. Ceci dans la limite de 50% du montant total de l'actuelle redevance. Seuls les hôtels de tourisme internationaux, résidences de tourisme internationales et villas de luxe sont concernés par ce texte. Cette redevance devrait, selon l'argumentaire de l'élu Tapura, participer à “une répartition plus juste des retombées économiques liées aux activités touristiques”.
En effet, les recettes de fonctionnement des communes proviennent essentiellement des concessions de cimetières, des actes administratifs et des actes de l'état civil, du fonds intercommunal de péréquation (FIP), de la taxe sur les propriétés bâties, des patentes ou encore des centimes additionnels. La proposition de l'élu Antonio Perez consiste donc à donner la possibilité aux communes de percevoir de nouveaux centimes additionnels. Concernant le montant de cette nouvelle recette fiscale, il faut savoir que depuis le 1er septembre de cette année, la redevance de promotion touristique s’élève à 4% du prix de vente réel des chambres et doit passer à 5% au 1er avril 2023. Ces dernières années, cette redevance de promotion touristique oscillait entre 1 et 1,5 milliards de Fcfp de recettes, exception faite des années Covid en 2020 (573 millions) et 2021 (771 millions). Cette nouvelle recette fiscale représentera donc plus de 500 millions de Fcfp par an à répartir entre les communes…
La taxe de séjour multipliée par 5
La seconde proposition de loi du Pays d'Antonio Perez concerne la revalorisation des plafonds des tarifs de la “taxe de séjour” et de la “taxe de séjour forfaitaire”. Depuis 1997, les communes ont le choix de prélever l'une ou l'autre, calculées sur le nombre réel de nuitées pour la taxe de séjour et sur les capacités d'accueil et la fréquentation habituelle pour la taxe de séjour forfaitaire. Elle concerne les hôtels classés, villas de luxe, navires de croisière, pensions de famille, meublés de tourisme, terrains de camping… Les navires de charter nautique et les navires de plaisance seront également impactés, indique la proposition de loi du Pays, avec une explication spécifique qui devrait plaire à leurs propriétaires : “De nombreux navires sillonnent les îles polynésiennes et s’installent parfois pour une longue durée à un emplacement déterminé avec pour conséquence un impact important en matière de pollution et de destruction du milieu marin avec les ancres”.
Actuellement, ce sont les communes qui bénéficient de cette taxe de séjour. Elle leur permet de faire face à certaines obligations et frais, tels que la collecte et le traitement des ordures ménagères ou encore la sécurité publique, insiste la proposition de loi du Pays. Cette taxe est perçue par les logeurs, hôteliers, propriétaires ou autres intermédiaires, qui la reversent ensuite au receveur municipal. Dans cette proposition de texte, seuls les tarifs plafonds ont été revalorisés et la taxe de séjour diffère selon les établissements. Jusqu’à aujourd’hui, seuls les “hôtels classés et navires de croisière” payaient entre 80 et 200 Fcfp la taxe de séjour ou entre 120 et 300 Fcfp la taxe de séjour forfaitaire. Les établissements non classés payant entre 20 et 60 Fcfp de taxe de séjour ou entre 30 et 90 Fcfp de taxe forfaitaire.
Le texte voté, il en coûtera pour les hôtels 5 étoiles et villas de 80 à 1 000 Fcfp (taxe de séjour) et de 120 à 1 200 Fcfp (taxe forfaitaire), pour les hôtels jusqu'à 4 étoiles et navires de plus de 12 mètres de 80 à 600 Fcfp et de 120 à 800 Fcfp (forfaitaire), pour les navires de moins de 12 mètres de 20 à 150 Fcfp et de 30 à 300 Fcfp (forfaitaire), et enfin pour les hôtels non classés, les pensions et les meublés type Airbnb de 20 à 100 Fcfp et de 30 à 120 Fcfp (forfaitaire). Soit de 2 à 5 fois plus qu'auparavant…
Les “taxes de Tong Sang”
Les professionnels du tourisme consultés sur ces textes se disent fermement opposés à ces nouvelles taxes. Le co-président du Conseil des professionnels de l’hôtellerie (CPH), Christophe Guardia, considère qu'avec la conjoncture internationale, la guerre en Ukraine, le manque de matières premières et “l’inflation galopante”, ces taxes “vont impacter davantage la volonté de déplacement des touristes, du fait que l’on soit déjà une destination assez chère”. Il estime ces textes “malvenus en ces temps un peu plus difficiles” et affirme que les professionnels du secteur sont “inquiets” même avec cette année 2022 “record”. Selon lui, la collecte de ces taxes va également poser le même problème que celui de la TVA sociale, avec des tarifs des hôteliers déjà envoyés aux tours opérateurs et qu’il sera difficile de modifier. “Ce sont encore des taxes qui viennent se rajouter (…) et ces lois sont là pour taparahi encore les chefs d’entreprise”, fulmine de son côté la présidente de la Fédération générale des entrepreneurs de Polynésie et de l’Association du tourisme authentique de Polynésie française, Mélinda Bodin. “Ils passent des lois en force, mais ils auraient pu attendre que le Cesec reprenne ses séances.”
Pour Mélinda Bodin, c'est le président de l'assemblée et maire de Bora Bora qui est à l'initiative de ces taxes et qui vont bénéficier surtout à sa commune : “Ce sont les taxes de Gaston Tong Sang. Il n’a qu’à les mettre à Bora Bora, mais qu’il ne s’occupe pas des autres archipels”. Du côté des professionnels du tourisme, on estime que ces nouveaux centimes additionnels vont également créer “une disparité entre les îles et creuser encore plus les inégalités”. Selon les derniers chiffres disponibles en 2009, le montant total de la taxe de séjour s’élevait à 176 millions de Fcfp, mais répartis – pour les premières communes bénéficiaires – entre 56 millions pour Bora Bora, 41 millions pour Moorea-Maiao, 22 millions pour Punaauia, 19 millions pour Faa’a et 14 millions pour Papeete.
Christophe Guardia confirme que certaines îles sont plus touristiques que d’autres et qu’avec ces taxes, les îles de Bora Bora ou encore de Moorea auront bien davantage de moyens. Le co-président du CPH rappelle d’ailleurs que la stratégie touristique à l’horizon 2025, actuellement travaillée avec le gouvernement, prévoit à l'inverse que le développement de toutes les îles puisse être assuré de manière plus équitable. “Ces taxes vont à l’encontre des projets annoncés”, constate Christophe Guardia. Le gouvernement qui n'hésite d'ailleurs visiblement pas à prendre ses distances avec ces propositions de lois du Pays et à en rejeter la responsabilité sur les seuls élus de la majorité à l'assemblée. Plusieurs professionnels du tourisme rapportant qu'à l'occasion d'une réunion avec leur ministère de tutelle, aujourd'hui celui d'Édouard Fritch, la propre directrice de cabinet du président leur a indiqué que “le gouvernement n'était pas favorable à ces textes”. À cinq mois des territoriales, il semble être compliqué de dire non aux communes.
L’élu Tapura et président de la commission de l'économie à l'assemblée, Antonio Perez, a déposé deux propositions de loi du Pays permettant aux communes polynésiennes de percevoir davantage de recettes fiscales émanant du tourisme. Le premier texte donnera la possibilité aux communes de voter des “centimes additionnels” adossés à Redevance de promotion touristique perçue par le Pays. Ceci dans la limite de 50% du montant total de l'actuelle redevance. Seuls les hôtels de tourisme internationaux, résidences de tourisme internationales et villas de luxe sont concernés par ce texte. Cette redevance devrait, selon l'argumentaire de l'élu Tapura, participer à “une répartition plus juste des retombées économiques liées aux activités touristiques”.
En effet, les recettes de fonctionnement des communes proviennent essentiellement des concessions de cimetières, des actes administratifs et des actes de l'état civil, du fonds intercommunal de péréquation (FIP), de la taxe sur les propriétés bâties, des patentes ou encore des centimes additionnels. La proposition de l'élu Antonio Perez consiste donc à donner la possibilité aux communes de percevoir de nouveaux centimes additionnels. Concernant le montant de cette nouvelle recette fiscale, il faut savoir que depuis le 1er septembre de cette année, la redevance de promotion touristique s’élève à 4% du prix de vente réel des chambres et doit passer à 5% au 1er avril 2023. Ces dernières années, cette redevance de promotion touristique oscillait entre 1 et 1,5 milliards de Fcfp de recettes, exception faite des années Covid en 2020 (573 millions) et 2021 (771 millions). Cette nouvelle recette fiscale représentera donc plus de 500 millions de Fcfp par an à répartir entre les communes…
La taxe de séjour multipliée par 5
La seconde proposition de loi du Pays d'Antonio Perez concerne la revalorisation des plafonds des tarifs de la “taxe de séjour” et de la “taxe de séjour forfaitaire”. Depuis 1997, les communes ont le choix de prélever l'une ou l'autre, calculées sur le nombre réel de nuitées pour la taxe de séjour et sur les capacités d'accueil et la fréquentation habituelle pour la taxe de séjour forfaitaire. Elle concerne les hôtels classés, villas de luxe, navires de croisière, pensions de famille, meublés de tourisme, terrains de camping… Les navires de charter nautique et les navires de plaisance seront également impactés, indique la proposition de loi du Pays, avec une explication spécifique qui devrait plaire à leurs propriétaires : “De nombreux navires sillonnent les îles polynésiennes et s’installent parfois pour une longue durée à un emplacement déterminé avec pour conséquence un impact important en matière de pollution et de destruction du milieu marin avec les ancres”.
Actuellement, ce sont les communes qui bénéficient de cette taxe de séjour. Elle leur permet de faire face à certaines obligations et frais, tels que la collecte et le traitement des ordures ménagères ou encore la sécurité publique, insiste la proposition de loi du Pays. Cette taxe est perçue par les logeurs, hôteliers, propriétaires ou autres intermédiaires, qui la reversent ensuite au receveur municipal. Dans cette proposition de texte, seuls les tarifs plafonds ont été revalorisés et la taxe de séjour diffère selon les établissements. Jusqu’à aujourd’hui, seuls les “hôtels classés et navires de croisière” payaient entre 80 et 200 Fcfp la taxe de séjour ou entre 120 et 300 Fcfp la taxe de séjour forfaitaire. Les établissements non classés payant entre 20 et 60 Fcfp de taxe de séjour ou entre 30 et 90 Fcfp de taxe forfaitaire.
Le texte voté, il en coûtera pour les hôtels 5 étoiles et villas de 80 à 1 000 Fcfp (taxe de séjour) et de 120 à 1 200 Fcfp (taxe forfaitaire), pour les hôtels jusqu'à 4 étoiles et navires de plus de 12 mètres de 80 à 600 Fcfp et de 120 à 800 Fcfp (forfaitaire), pour les navires de moins de 12 mètres de 20 à 150 Fcfp et de 30 à 300 Fcfp (forfaitaire), et enfin pour les hôtels non classés, les pensions et les meublés type Airbnb de 20 à 100 Fcfp et de 30 à 120 Fcfp (forfaitaire). Soit de 2 à 5 fois plus qu'auparavant…
Les “taxes de Tong Sang”
Les professionnels du tourisme consultés sur ces textes se disent fermement opposés à ces nouvelles taxes. Le co-président du Conseil des professionnels de l’hôtellerie (CPH), Christophe Guardia, considère qu'avec la conjoncture internationale, la guerre en Ukraine, le manque de matières premières et “l’inflation galopante”, ces taxes “vont impacter davantage la volonté de déplacement des touristes, du fait que l’on soit déjà une destination assez chère”. Il estime ces textes “malvenus en ces temps un peu plus difficiles” et affirme que les professionnels du secteur sont “inquiets” même avec cette année 2022 “record”. Selon lui, la collecte de ces taxes va également poser le même problème que celui de la TVA sociale, avec des tarifs des hôteliers déjà envoyés aux tours opérateurs et qu’il sera difficile de modifier. “Ce sont encore des taxes qui viennent se rajouter (…) et ces lois sont là pour taparahi encore les chefs d’entreprise”, fulmine de son côté la présidente de la Fédération générale des entrepreneurs de Polynésie et de l’Association du tourisme authentique de Polynésie française, Mélinda Bodin. “Ils passent des lois en force, mais ils auraient pu attendre que le Cesec reprenne ses séances.”
Pour Mélinda Bodin, c'est le président de l'assemblée et maire de Bora Bora qui est à l'initiative de ces taxes et qui vont bénéficier surtout à sa commune : “Ce sont les taxes de Gaston Tong Sang. Il n’a qu’à les mettre à Bora Bora, mais qu’il ne s’occupe pas des autres archipels”. Du côté des professionnels du tourisme, on estime que ces nouveaux centimes additionnels vont également créer “une disparité entre les îles et creuser encore plus les inégalités”. Selon les derniers chiffres disponibles en 2009, le montant total de la taxe de séjour s’élevait à 176 millions de Fcfp, mais répartis – pour les premières communes bénéficiaires – entre 56 millions pour Bora Bora, 41 millions pour Moorea-Maiao, 22 millions pour Punaauia, 19 millions pour Faa’a et 14 millions pour Papeete.
Christophe Guardia confirme que certaines îles sont plus touristiques que d’autres et qu’avec ces taxes, les îles de Bora Bora ou encore de Moorea auront bien davantage de moyens. Le co-président du CPH rappelle d’ailleurs que la stratégie touristique à l’horizon 2025, actuellement travaillée avec le gouvernement, prévoit à l'inverse que le développement de toutes les îles puisse être assuré de manière plus équitable. “Ces taxes vont à l’encontre des projets annoncés”, constate Christophe Guardia. Le gouvernement qui n'hésite d'ailleurs visiblement pas à prendre ses distances avec ces propositions de lois du Pays et à en rejeter la responsabilité sur les seuls élus de la majorité à l'assemblée. Plusieurs professionnels du tourisme rapportant qu'à l'occasion d'une réunion avec leur ministère de tutelle, aujourd'hui celui d'Édouard Fritch, la propre directrice de cabinet du président leur a indiqué que “le gouvernement n'était pas favorable à ces textes”. À cinq mois des territoriales, il semble être compliqué de dire non aux communes.