Quand les températures sont trop élevées, le corail éjecte son algue symbiotique et devient tout blanc. Si la température baisse, il peut la réabsorber et survivre. Quand la chaleur persiste, le corail peut mourir... (Photo Cécile Berthe)
PAPEETE, le 26 mars 2019 - Ces dernières semaines anormalement chaudes ont eu un effet dévastateur sur les récifs des îles de la Société. Des blanchissements très inquiétants sont observés à travers l'archipel et si le temps ne se rafraîchit pas rapidement, nos coraux risquent de mourir massivement. Les scientifiques lancent un appel au public pour les aider à déterminer l'ampleur du phénomène.
L'alerte est donnée : des blanchissements importants des coraux à Moorea et à Maupiti ont été observés par les scientifiques, un phénomène qui s'étend probablement à toutes les îles de la Société et peut-être même au-delà. Ce sont les chercheurs des laboratoires CRIOBE Moorea (Centre de Recherches Insulaires et Observatoire de l'Environnement) et de l'IRCP (Institut des Récifs Coralliens du Pacifique) qui sonnent l'alarme sur ces premiers signes très inquiétants.
"En février nous avions détecté les premiers signes de blanchissement à Moorea, mais maintenant nous voyons une accélération du phénomène", explique la responsable scientifique du suivi des coraux, Laetitia Hédouin, chargée de recherche au CRIOBE. "Il y a plusieurs colonies qui sont devenues complètement blanches et on en voit beaucoup qui sont en cours de blanchissement. Là on commence à entrer dans une phase où les scientifiques s'inquiètent. J'ai aussi des collègues à Maupiti qui m'ont envoyé des photos montrant le même phénomène."
Les scientifiques sont si inquiets parce que quand le corail blanchit, il est en sursis : "La Polynésie française et notamment les îles de la Société sont sujettes depuis plusieurs semaines à des températures plus chaudes que les normales de saison. Le corail ne peut supporter ces fortes températures pendant une longue période et au bout d’un certain temps, il expulse les algues qui vivent dans ses tissus et qui lui apportent 95% de son énergie. Il devient affamé sans apport de nourriture. Un corail blanchit n’est pas mort, il est en état de stress, il a de la 'fièvre'. Sa survie va dépendre des prochaines semaines : soit la température reste encore anormalement élevée et il pourrait mourir, soit elle redevient normale et le corail pourra récupérer sa couleur et ses zooxanthelles."
Pour l'instant, les choses s'annoncent mal pour nos coraux. Selon Météo France, les températures de l'eau devraient rester élevées jusqu'à fin avril à cause du phénomène El Niño. Mais ces températures ont déjà commencé à baisser lentement, donnant peut-être une chance de survie à nos récifs.
VOUS POUVEZ AIDER
Laetitia Hédouin lance un appel au public, qui peut aider les scientifiques grâce à un grand projet de science participative baptisé "Un Œil sur le Corail". Elle explique que les laboratoires "cherchent à savoir s'il n'y a que l'archipel de la Société qui est touché, ou si ça s'étend aux Tuamotu et aux Australes. Par exemple en 2016, il y a eu un blanchissement et une mortalité très importante aux Tuamotu, avec 50% de perte de coraux dans certaines zones. En 2017 c'était aux Australes. À chaque fois les autres archipels étaient beaucoup moins touchés. C'est pour ça que nous faisons appel au public. Les clubs de plongée, les touristes et les pêcheurs ont ces informations sur l'état du corail dans les différentes îles de Polynésie. Nous, nous ne pouvons pas être partout. Quand nous aurons ces retours, nous pourrons mettre en place des missions dans les îles où nous aurons reçu le plus d'alertes."
Pour participer, il suffit de prendre une photo du corail blanchi puis de remplir un petit questionnaire sur le site www.ircp.pf/participez afin de compléter la carte interactive.
Ce projet de science participative est actif depuis plusieurs années et a déjà été très utile aux chercheurs : "En 2016 la carte nous avait permis de dire que le phénomène était vraiment large et avait touché une grande partie des îles de l'archipel des Tuamotu, alors que tous seuls nous n'aurions pas eu le financement ou le temps pour aller dans toutes ces îles. Avoir ce relais avec les gens sur place ou ceux qui y vont en vacances est un vrai plus pour nous."
Pour l'instant, le blanchissement des coraux n'est pas irrémédiable. Mais encore quelques semaines de fortes chaleurs et l'impact sur nos lagons sera dramatique. "Si le corail meurt, ça implique une perte d'habitat et de diversité dans nos lagons, une forte diminution du nombre de poissons... Et comme à cause des changements climatiques le récif est de plus en plus stressé de manière presque annuelle, on ne sait pas s'il va conserver sa capacité de résilience. Le récif est déjà lent à se régénérer. En 2010 le récif de Moorea était pratiquement parti à cause d'un épisode de taramea de trois ans, puis le cyclone Oli qui a enlevé la complexité structurale du récif. Il a fallu 9 ans pour qu'il se régénère, sachant que pendant ces neufs ans il n'y a eu qu'un seul blanchissement, en 2016. Si ces blanchissements sont plus fréquents, on ne sait pas ce qu'il va se passer. Pour l'épisode actuel, il faudra attendre juin-juillet pour savoir s'il y a eu de la mortalité."
L'alerte est donnée : des blanchissements importants des coraux à Moorea et à Maupiti ont été observés par les scientifiques, un phénomène qui s'étend probablement à toutes les îles de la Société et peut-être même au-delà. Ce sont les chercheurs des laboratoires CRIOBE Moorea (Centre de Recherches Insulaires et Observatoire de l'Environnement) et de l'IRCP (Institut des Récifs Coralliens du Pacifique) qui sonnent l'alarme sur ces premiers signes très inquiétants.
"En février nous avions détecté les premiers signes de blanchissement à Moorea, mais maintenant nous voyons une accélération du phénomène", explique la responsable scientifique du suivi des coraux, Laetitia Hédouin, chargée de recherche au CRIOBE. "Il y a plusieurs colonies qui sont devenues complètement blanches et on en voit beaucoup qui sont en cours de blanchissement. Là on commence à entrer dans une phase où les scientifiques s'inquiètent. J'ai aussi des collègues à Maupiti qui m'ont envoyé des photos montrant le même phénomène."
Les scientifiques sont si inquiets parce que quand le corail blanchit, il est en sursis : "La Polynésie française et notamment les îles de la Société sont sujettes depuis plusieurs semaines à des températures plus chaudes que les normales de saison. Le corail ne peut supporter ces fortes températures pendant une longue période et au bout d’un certain temps, il expulse les algues qui vivent dans ses tissus et qui lui apportent 95% de son énergie. Il devient affamé sans apport de nourriture. Un corail blanchit n’est pas mort, il est en état de stress, il a de la 'fièvre'. Sa survie va dépendre des prochaines semaines : soit la température reste encore anormalement élevée et il pourrait mourir, soit elle redevient normale et le corail pourra récupérer sa couleur et ses zooxanthelles."
Pour l'instant, les choses s'annoncent mal pour nos coraux. Selon Météo France, les températures de l'eau devraient rester élevées jusqu'à fin avril à cause du phénomène El Niño. Mais ces températures ont déjà commencé à baisser lentement, donnant peut-être une chance de survie à nos récifs.
VOUS POUVEZ AIDER
Laetitia Hédouin lance un appel au public, qui peut aider les scientifiques grâce à un grand projet de science participative baptisé "Un Œil sur le Corail". Elle explique que les laboratoires "cherchent à savoir s'il n'y a que l'archipel de la Société qui est touché, ou si ça s'étend aux Tuamotu et aux Australes. Par exemple en 2016, il y a eu un blanchissement et une mortalité très importante aux Tuamotu, avec 50% de perte de coraux dans certaines zones. En 2017 c'était aux Australes. À chaque fois les autres archipels étaient beaucoup moins touchés. C'est pour ça que nous faisons appel au public. Les clubs de plongée, les touristes et les pêcheurs ont ces informations sur l'état du corail dans les différentes îles de Polynésie. Nous, nous ne pouvons pas être partout. Quand nous aurons ces retours, nous pourrons mettre en place des missions dans les îles où nous aurons reçu le plus d'alertes."
Pour participer, il suffit de prendre une photo du corail blanchi puis de remplir un petit questionnaire sur le site www.ircp.pf/participez afin de compléter la carte interactive.
Ce projet de science participative est actif depuis plusieurs années et a déjà été très utile aux chercheurs : "En 2016 la carte nous avait permis de dire que le phénomène était vraiment large et avait touché une grande partie des îles de l'archipel des Tuamotu, alors que tous seuls nous n'aurions pas eu le financement ou le temps pour aller dans toutes ces îles. Avoir ce relais avec les gens sur place ou ceux qui y vont en vacances est un vrai plus pour nous."
Pour l'instant, le blanchissement des coraux n'est pas irrémédiable. Mais encore quelques semaines de fortes chaleurs et l'impact sur nos lagons sera dramatique. "Si le corail meurt, ça implique une perte d'habitat et de diversité dans nos lagons, une forte diminution du nombre de poissons... Et comme à cause des changements climatiques le récif est de plus en plus stressé de manière presque annuelle, on ne sait pas s'il va conserver sa capacité de résilience. Le récif est déjà lent à se régénérer. En 2010 le récif de Moorea était pratiquement parti à cause d'un épisode de taramea de trois ans, puis le cyclone Oli qui a enlevé la complexité structurale du récif. Il a fallu 9 ans pour qu'il se régénère, sachant que pendant ces neufs ans il n'y a eu qu'un seul blanchissement, en 2016. Si ces blanchissements sont plus fréquents, on ne sait pas ce qu'il va se passer. Pour l'épisode actuel, il faudra attendre juin-juillet pour savoir s'il y a eu de la mortalité."
Science participative : le projet " Un Œil sur le Corail"
Le projet de science participative "Un Œil sur le Corail" permet de suivre l'état des récifs à travers toute la Polynésie.
Les scientifiques polynésiens qui surveillent l'état de nos récifs ont besoin de votre aide afin d'avoir des informations sur les coraux de l'ensemble de nos îles. Pour participer, quand vous observez un corail victime de blanchissement il suffit de prendre une photo puis de remplir un petit questionnaire sur le site www.ircp.pf/participez afin de compléter la carte interactive.
La chaleur va durer jusqu'à fin avril
La température de surface dans l'océan Pacifique Est du 26 février au 5 mars. Les zones en jaune dépassent les 30 degrés ! (Nasa Earth Observations)
Nous avons contacté Météo France, qui confirme que toute la Polynésie est touchée par une température anormalement haute : "C'est un phénomène lié à El Niño. Il se traduit par des températures de la mer anormalement chaudes au niveau de l'équateur dans le Pacifique, et donc en Polynésie. Depuis novembre les températures de la mer sont 0,5 à 1 degré au-dessus de la normale dans l'archipel de la Société. La moyenne saisonnière est normalement de 29 degrés sur la Société en saison chaude, ces derniers mois nous sommes à 29,5 ou 30 degrés."
Les Tuamotu et les Australes sont également touchés, donnant corps aux craintes des scientifiques du CRIOBE et de l'IRCP : "Sur l'ensemble de la Polynésie il y a une anomalie de 0,5 degré au-dessus de la normale. Et effectivement, à chaque El Niño il y a un phénomène de blanchissement des coraux. Il y a aussi un lien avec le réchauffement climatique. La terre se réchauffe, donc la température de l'océan aussi et les phénomènes de blanchissement des coraux vont se faire de plus en plus fréquents."
Ces hautes températures devraient durer encore au moins un mois : "L'ensemble des modèles de prévision suggèrent que l'on restera en conditions El Niño jusqu'à fin avril, avec un retour lent des températures de la mer vers la moyenne. On voit déjà l'affaiblissement du phénomène, mais avec l'inertie des températures on attend un retour à la normale d'ici mai-juin."
Nous en avons profité pour demander à Météo France un point sur la vague de chaleur qui touche nos îles : "Au niveau atmosphérique, nous sommes à 0,5 degré au-dessus des normales depuis le mois dernier. En mars la température moyenne est normalement de 27,9 degré, là on atteint les 28,4 degrés à Faa'a. Avec le faible vent, la sensation de chaud est encore accentuée sur la Société. Cette anomalie devrait perdurer jusqu'à fin avril."
Les Tuamotu et les Australes sont également touchés, donnant corps aux craintes des scientifiques du CRIOBE et de l'IRCP : "Sur l'ensemble de la Polynésie il y a une anomalie de 0,5 degré au-dessus de la normale. Et effectivement, à chaque El Niño il y a un phénomène de blanchissement des coraux. Il y a aussi un lien avec le réchauffement climatique. La terre se réchauffe, donc la température de l'océan aussi et les phénomènes de blanchissement des coraux vont se faire de plus en plus fréquents."
Ces hautes températures devraient durer encore au moins un mois : "L'ensemble des modèles de prévision suggèrent que l'on restera en conditions El Niño jusqu'à fin avril, avec un retour lent des températures de la mer vers la moyenne. On voit déjà l'affaiblissement du phénomène, mais avec l'inertie des températures on attend un retour à la normale d'ici mai-juin."
Nous en avons profité pour demander à Météo France un point sur la vague de chaleur qui touche nos îles : "Au niveau atmosphérique, nous sommes à 0,5 degré au-dessus des normales depuis le mois dernier. En mars la température moyenne est normalement de 27,9 degré, là on atteint les 28,4 degrés à Faa'a. Avec le faible vent, la sensation de chaud est encore accentuée sur la Société. Cette anomalie devrait perdurer jusqu'à fin avril."