PAPEETE, le 4 février 2016 - Les réquisitions dans le procès pour favoritisme lié à l'installation du câble internet sous-marin entre la Polynésie française et Hawaii sont tombées ce jeudi en fin de matinée. Le ministère public demande notamment la condamnation de la société Alcatel à 1 milliard Fcfp d’amende pour recel de favoritisme. Délibéré le 22 mars.
Dans le procès Honotua, la plus grosse part des réquisitions en amende prononcées jeudi concerne la société Alcatel Submarine Networks (ASN), filiale d'Alcatel : il est réclamé à la société qui avait remporté le marché 1 milliard de Fcfp.
Le ministère public reproche à la société Alcatel, par le biais de sa filiale Alcatel Submarine Network (ASN), d’avoir profité entre 2005 et 2008 d’un "processus d’entreprise" mis en œuvre en amont de la signature du contrat pour l’installation du câble Honotua. Processus qui aurait reposé sur la présence de "sous-marins" d’Alcatel intervenant en qualité de consultants pour le compte de l’Office polynésien des postes et télécommunications (OPT), dans le cadre de l’élaboration du dossier d’appel d’offre pour le câble.
L’accusation estime que Georges-Louis Krebs a agi par influence et servi de relais entre l’OPT et Alcatel, pour recommander l'intervention de Jean-Claude Billy et Henri-Ferdinand Savary, deux anciens employés d’Alcatel recrutés es-qualité comme consultants par l’OPT. "Tout le monde savait qui ils étaient", a noté le substitut Aurélien Buffart laissant entendre que l’information ne pouvait pas avoir échappé aux autres éventuels soumissionnaires à ce marché. Cela explique pour lui que la société Taiko s’était retirée de la consultation, ne laissant en course que l’offre d’Alcatel, en 2008. "Comment voulez-vous être sûr, dans de telles conditions, lorsque vous soumissionnez à un tel marché en donnant des informations commerciales hautement confidentielles que celles-ci ne seront pas portées à la connaissance de votre concurrent ?". La société Taiko s’était plainte de cette situation par courrier début 2007, en annonçant son retrait de la course. Pour cet opérateur, l’appel d’offre était "biaisé". La présence de Jean-Claude Billy et Henri-Ferdinand Savary, consultants de l’OPT, a agi comme un "épouvantail" qui a fait fuir la concurrence, a estimé le ministère public. Les deux consultants avaient notamment la charge de la rédaction de l'appel d'offre.
Le 10 janvier 2008, seul soumissionnaire, Alcatel-Lucent avait signé avec l’OPT un marché de 8,6 milliards Fcfp (72,2 millions d'euros) pour la pose d’un câble sous-marin à haute vitesse permettant de relier Tahiti à Hawaï, aux États-Unis : Honotua.
"Localement", la justice reproche aux différents responsables de l'OPT d'avoir couvert en toute connaissance de cause ce mélange des genres, au détriment de toute forme de déontologie dans l'attribution des marchés publics et avec la bénédiction de leur ministère de tutelle. "Les dérives peuvent venir de la paresse, de l'incompétence, de la volonté de briller pour avoir apporté l'internet au fin fond des Tuamotu". Ce que le ministère public a qualifié de "petits arrangements entre amis" a été porté à la connaissance de la justice à peine une semaine après la signature du contrat par Jean-Paul Pistolet, ancien fonctionnaire détaché à l'OPT, lors d'une audition en garde à vue au cours de l'instruction de l'affaire Sofrecom.
Pour la défense, ce dossier est non seulement vide compte tenu de l'absence d'action positive de favoritisme, mais il est aussi prescrit. Tous demandent la relaxe.
Relaxe pour Jean-Paul Barral
Pour les personnes ayant agi en sous-main, selon l’analyse du ministère public, des peines sont requises pour complicité de favoritisme : Georges-Louis Krebs pourrait se voir condamner à 18 mois de prison avec sursis et 2 millions de Fcfp d'amende. Les deux consultants sont logés à des enseignes différentes, en fonction de leur implication dans le dossier : 1 an de prison avec sursis et 1 million de Fcfp d'amende requis contre Jean-Claude Billy, six mois de prison avec sursis pour Henri-Ferdinand Savary.
Viennent ensuite les réquisitions concernant les personnes impliquées localement dans ce dossier.
Jean-Paul Barral, d’abord. Pour cet ancien président du conseil d’administration de l’Office, le ministère public ne retient aucune charge et demande la relaxe. Jean-Paul Barral était devenu PCA de l’OPT le 26 septembre 2007 : "Il a signé le contrat", reconnait le ministère public, "mais ce n’est pas le contrat qui est en cause, c’est tout ce qui s’est passé avant et il n’était pas là !".
Pour les autres, les réquisitions les plus lourdes concernent Georges Puchon, conseiller technique au sein de l'OPT pendant les négociations de ce juteux contrat : 18 mois de prison avec sursis et 2 millions de Fcfp d'amende ont été requis contre lui. "S’il y en a bien un qui ne pouvait pas ignorer l’existence du courrier de Taiko, c’est bien lui", a relevé le procureur.
En tant que ministre en charge des postes et télécommunications au moment des faits, les réquisitions à l'égard d'Emile Vernaudon sont de un an de prison avec sursis, 2 millions de Fcfp d'amende et cinq ans de privation des droits civiques. Il est accusé du délit de favoritisme. "Il était pressé de voir réalisé ce projet avec Alcatel", constate le procureur en rappelant que la signature d’un contrat de gré à gré avait d’abord été envisagée par Vernaudon, avant que l’on ne se rende compte de l’impossibilité légale d’une telle procédure au regard du code des postes et télécommunications.
Viennent ensuite deux anciens présidents du conseil d'administration de l'OPT, Jean-Alain Frébault et Alphonse Teriierooiterai contre lesquels le procureur a requis des peines identiques : 1 an de prison avec sursis, 2 millions de Fcfp d'amende et deux ans de privation des droits civiques pour le délit de favoritisme. Tous deux clament leur soumission à l’autorité politique.
Le jugement est mis en délibéré et sera rendu le 22 mars prochain.
Lire aussi : Coup d'envoi du procès pour favoritisme présumé dans l'affaire du marché du câble Honotua
Dans le procès Honotua, la plus grosse part des réquisitions en amende prononcées jeudi concerne la société Alcatel Submarine Networks (ASN), filiale d'Alcatel : il est réclamé à la société qui avait remporté le marché 1 milliard de Fcfp.
Le ministère public reproche à la société Alcatel, par le biais de sa filiale Alcatel Submarine Network (ASN), d’avoir profité entre 2005 et 2008 d’un "processus d’entreprise" mis en œuvre en amont de la signature du contrat pour l’installation du câble Honotua. Processus qui aurait reposé sur la présence de "sous-marins" d’Alcatel intervenant en qualité de consultants pour le compte de l’Office polynésien des postes et télécommunications (OPT), dans le cadre de l’élaboration du dossier d’appel d’offre pour le câble.
L’accusation estime que Georges-Louis Krebs a agi par influence et servi de relais entre l’OPT et Alcatel, pour recommander l'intervention de Jean-Claude Billy et Henri-Ferdinand Savary, deux anciens employés d’Alcatel recrutés es-qualité comme consultants par l’OPT. "Tout le monde savait qui ils étaient", a noté le substitut Aurélien Buffart laissant entendre que l’information ne pouvait pas avoir échappé aux autres éventuels soumissionnaires à ce marché. Cela explique pour lui que la société Taiko s’était retirée de la consultation, ne laissant en course que l’offre d’Alcatel, en 2008. "Comment voulez-vous être sûr, dans de telles conditions, lorsque vous soumissionnez à un tel marché en donnant des informations commerciales hautement confidentielles que celles-ci ne seront pas portées à la connaissance de votre concurrent ?". La société Taiko s’était plainte de cette situation par courrier début 2007, en annonçant son retrait de la course. Pour cet opérateur, l’appel d’offre était "biaisé". La présence de Jean-Claude Billy et Henri-Ferdinand Savary, consultants de l’OPT, a agi comme un "épouvantail" qui a fait fuir la concurrence, a estimé le ministère public. Les deux consultants avaient notamment la charge de la rédaction de l'appel d'offre.
Le 10 janvier 2008, seul soumissionnaire, Alcatel-Lucent avait signé avec l’OPT un marché de 8,6 milliards Fcfp (72,2 millions d'euros) pour la pose d’un câble sous-marin à haute vitesse permettant de relier Tahiti à Hawaï, aux États-Unis : Honotua.
"Localement", la justice reproche aux différents responsables de l'OPT d'avoir couvert en toute connaissance de cause ce mélange des genres, au détriment de toute forme de déontologie dans l'attribution des marchés publics et avec la bénédiction de leur ministère de tutelle. "Les dérives peuvent venir de la paresse, de l'incompétence, de la volonté de briller pour avoir apporté l'internet au fin fond des Tuamotu". Ce que le ministère public a qualifié de "petits arrangements entre amis" a été porté à la connaissance de la justice à peine une semaine après la signature du contrat par Jean-Paul Pistolet, ancien fonctionnaire détaché à l'OPT, lors d'une audition en garde à vue au cours de l'instruction de l'affaire Sofrecom.
Pour la défense, ce dossier est non seulement vide compte tenu de l'absence d'action positive de favoritisme, mais il est aussi prescrit. Tous demandent la relaxe.
Relaxe pour Jean-Paul Barral
Pour les personnes ayant agi en sous-main, selon l’analyse du ministère public, des peines sont requises pour complicité de favoritisme : Georges-Louis Krebs pourrait se voir condamner à 18 mois de prison avec sursis et 2 millions de Fcfp d'amende. Les deux consultants sont logés à des enseignes différentes, en fonction de leur implication dans le dossier : 1 an de prison avec sursis et 1 million de Fcfp d'amende requis contre Jean-Claude Billy, six mois de prison avec sursis pour Henri-Ferdinand Savary.
Viennent ensuite les réquisitions concernant les personnes impliquées localement dans ce dossier.
Jean-Paul Barral, d’abord. Pour cet ancien président du conseil d’administration de l’Office, le ministère public ne retient aucune charge et demande la relaxe. Jean-Paul Barral était devenu PCA de l’OPT le 26 septembre 2007 : "Il a signé le contrat", reconnait le ministère public, "mais ce n’est pas le contrat qui est en cause, c’est tout ce qui s’est passé avant et il n’était pas là !".
Pour les autres, les réquisitions les plus lourdes concernent Georges Puchon, conseiller technique au sein de l'OPT pendant les négociations de ce juteux contrat : 18 mois de prison avec sursis et 2 millions de Fcfp d'amende ont été requis contre lui. "S’il y en a bien un qui ne pouvait pas ignorer l’existence du courrier de Taiko, c’est bien lui", a relevé le procureur.
En tant que ministre en charge des postes et télécommunications au moment des faits, les réquisitions à l'égard d'Emile Vernaudon sont de un an de prison avec sursis, 2 millions de Fcfp d'amende et cinq ans de privation des droits civiques. Il est accusé du délit de favoritisme. "Il était pressé de voir réalisé ce projet avec Alcatel", constate le procureur en rappelant que la signature d’un contrat de gré à gré avait d’abord été envisagée par Vernaudon, avant que l’on ne se rende compte de l’impossibilité légale d’une telle procédure au regard du code des postes et télécommunications.
Viennent ensuite deux anciens présidents du conseil d'administration de l'OPT, Jean-Alain Frébault et Alphonse Teriierooiterai contre lesquels le procureur a requis des peines identiques : 1 an de prison avec sursis, 2 millions de Fcfp d'amende et deux ans de privation des droits civiques pour le délit de favoritisme. Tous deux clament leur soumission à l’autorité politique.
Le jugement est mis en délibéré et sera rendu le 22 mars prochain.
Lire aussi : Coup d'envoi du procès pour favoritisme présumé dans l'affaire du marché du câble Honotua