Paris, France | AFP | jeudi 13/02/2025 - En cinq vols, 20 tonnes d'équivalent CO2 évitées: la compagnie aérienne Amelia équipée par Thales mène une première expérimentation prometteuse en France pour limiter les traînées de condensation, même si beaucoup d'incertitudes persistent sur cette piste de la transition écologique de l'aviation.
Depuis juin 2024, la compagnie française utilise sur ses vols Paris-Valladolid (Espagne) une technologie de Thales; un calculateur pour contourner les zones atmosphériques humides et froides propices à la formation de ces lignes blanches dont l'impact est aussi néfaste pour le climat que celui de CO2.
Constituées de vapeur d'eau et de suie gelées, les traînées de condensation émises par les moteurs emprisonnent la chaleur du soleil et jouent un rôle similaire aux gaz à effet de serre.
Après des expérimentations ces dernières années aux Etats-Unis et en Allemagne, c'est une première en France où l'industrie est réticente, mettant en avant les incertitudes scientifiques persistantes.
Le transport aérien contribue pour 2% à 3% des émissions mondiales de CO2. Mais si on additionne les effets "hors CO2", auxquels les traînées de condensation contribuent grandement, on monte à "4% voire 5%", rappelle Julien Lopez, chef de projet chez Thales.
- 2,4% de fuel en plus -
3% des vols génèrent à eux seuls 80% du réchauffement lié à ces traînées, selon une étude publiée en novembre par l'ONG Transport & Environnement (T&E) qui préconise de modifier légèrement les trajectoires de certains vols pour passer "soit un peu au-dessus, soit un peu en dessous d'une masse d'air atmosphérique qui a été identifiée par des modèles météorologiques".
"Le bénéfice climatique est immédiat", estime Adrien Chabot, directeur du développement durable pour Amelia, qui vise l'évitement des trainées de condensation sur "l'intégralité des vols éligibles" en 2025.
Eviter une traînée par vol permet de ne pas générer 4 tonnes d'équivalent de CO2, mais entraîne "un surcroît de consommation de fuel de 2,4%", jugé "très raisonnable" par Thales.
"L'intérêt, c'est d'avoir un modèle de prédiction le plus fiable possible pour modifier uniquement les vols les plus pertinents, pour que le compromis entre le gain et la pénalité sur la consommation aille toujours dans le bon sens", souligne Adrien Chabot.
Pour certains chercheurs, des données manquent à ce stade pour parler du bénéfice de l'évitement des traînées qui restent quelques minutes dans l’atmosphère, tandis que le CO2 persiste des décennies.
"Un des gros enjeux de la recherche, c'est d'être capable de dire: quel est l'effet des traînées pour l'ensemble des vols par rapport au CO2?", explique à l'AFP Philippe Novelli, directeur des projets environnement d'Onera, centre français de recherche aérospatiale.
"Il faut être capable de prévoir clairement à partir des modèles de climat quand elles vont se former, quelle va être leur étendue et leur durée (...) On a un grand nombre d'incertitudes au niveau de ces modélisations", ajoute-t-il.
Aujourd'hui ces phénomènes sont représentés "de façon approximative", ajoute le scientifique tout en concédant que les expérimentations aident à avancer.
Selon lui, les données manquent pour savoir "ce qu'on gagne en évitant une traînée, si on émet plus de CO2 à la place" en consommant plus de carburant.
- Peur du "bashing" -
Pour Jérôme du Boucher, auteur de l'étude de T&E, "c'est vraiment positif qu'Amelia et Thales se saisissent du sujet" ce qui "permet d'identifier les points de blocage opérationnels dont on ne se rend pas compte quand on fait des modélisations".
"Pendant très longtemps, le sujet est resté sur la paillasse des scientifiques et l'industrie instrumentalise l'argument de l'incertitude pour ne rien faire", déclare-t-il à l'AFP, regrettant qu'en France le sujet ne soit pas "pris au sérieux".
Tous les grands acteurs de l'aéronautique mènent des recherches sur ce phénomène depuis des années, mais préfèrent ne pas trop en parler pour éviter "un regain de critiques de l'opinion publique sur l'impact climatique de l'aviation", estime-t-il.
L'expérimentation d'Amelia est "excellente" et "bienvenue", assure au contraire Baptiste Voillequin, vice-président de la commission de recherche et développement du Gifas, Groupement des industries aéronautiques.
"La vision industrielle est pragmatique" et passe par la création "des meilleures conditions pour la mise en place des mesures d'évitement", souligne-t-il, promettant de présenter les progrès lors du prochain salon Le Bourget en juin.
Depuis juin 2024, la compagnie française utilise sur ses vols Paris-Valladolid (Espagne) une technologie de Thales; un calculateur pour contourner les zones atmosphériques humides et froides propices à la formation de ces lignes blanches dont l'impact est aussi néfaste pour le climat que celui de CO2.
Constituées de vapeur d'eau et de suie gelées, les traînées de condensation émises par les moteurs emprisonnent la chaleur du soleil et jouent un rôle similaire aux gaz à effet de serre.
Après des expérimentations ces dernières années aux Etats-Unis et en Allemagne, c'est une première en France où l'industrie est réticente, mettant en avant les incertitudes scientifiques persistantes.
Le transport aérien contribue pour 2% à 3% des émissions mondiales de CO2. Mais si on additionne les effets "hors CO2", auxquels les traînées de condensation contribuent grandement, on monte à "4% voire 5%", rappelle Julien Lopez, chef de projet chez Thales.
- 2,4% de fuel en plus -
3% des vols génèrent à eux seuls 80% du réchauffement lié à ces traînées, selon une étude publiée en novembre par l'ONG Transport & Environnement (T&E) qui préconise de modifier légèrement les trajectoires de certains vols pour passer "soit un peu au-dessus, soit un peu en dessous d'une masse d'air atmosphérique qui a été identifiée par des modèles météorologiques".
"Le bénéfice climatique est immédiat", estime Adrien Chabot, directeur du développement durable pour Amelia, qui vise l'évitement des trainées de condensation sur "l'intégralité des vols éligibles" en 2025.
Eviter une traînée par vol permet de ne pas générer 4 tonnes d'équivalent de CO2, mais entraîne "un surcroît de consommation de fuel de 2,4%", jugé "très raisonnable" par Thales.
"L'intérêt, c'est d'avoir un modèle de prédiction le plus fiable possible pour modifier uniquement les vols les plus pertinents, pour que le compromis entre le gain et la pénalité sur la consommation aille toujours dans le bon sens", souligne Adrien Chabot.
Pour certains chercheurs, des données manquent à ce stade pour parler du bénéfice de l'évitement des traînées qui restent quelques minutes dans l’atmosphère, tandis que le CO2 persiste des décennies.
"Un des gros enjeux de la recherche, c'est d'être capable de dire: quel est l'effet des traînées pour l'ensemble des vols par rapport au CO2?", explique à l'AFP Philippe Novelli, directeur des projets environnement d'Onera, centre français de recherche aérospatiale.
"Il faut être capable de prévoir clairement à partir des modèles de climat quand elles vont se former, quelle va être leur étendue et leur durée (...) On a un grand nombre d'incertitudes au niveau de ces modélisations", ajoute-t-il.
Aujourd'hui ces phénomènes sont représentés "de façon approximative", ajoute le scientifique tout en concédant que les expérimentations aident à avancer.
Selon lui, les données manquent pour savoir "ce qu'on gagne en évitant une traînée, si on émet plus de CO2 à la place" en consommant plus de carburant.
- Peur du "bashing" -
Pour Jérôme du Boucher, auteur de l'étude de T&E, "c'est vraiment positif qu'Amelia et Thales se saisissent du sujet" ce qui "permet d'identifier les points de blocage opérationnels dont on ne se rend pas compte quand on fait des modélisations".
"Pendant très longtemps, le sujet est resté sur la paillasse des scientifiques et l'industrie instrumentalise l'argument de l'incertitude pour ne rien faire", déclare-t-il à l'AFP, regrettant qu'en France le sujet ne soit pas "pris au sérieux".
Tous les grands acteurs de l'aéronautique mènent des recherches sur ce phénomène depuis des années, mais préfèrent ne pas trop en parler pour éviter "un regain de critiques de l'opinion publique sur l'impact climatique de l'aviation", estime-t-il.
L'expérimentation d'Amelia est "excellente" et "bienvenue", assure au contraire Baptiste Voillequin, vice-président de la commission de recherche et développement du Gifas, Groupement des industries aéronautiques.
"La vision industrielle est pragmatique" et passe par la création "des meilleures conditions pour la mise en place des mesures d'évitement", souligne-t-il, promettant de présenter les progrès lors du prochain salon Le Bourget en juin.