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Absence de base légale sur les contrats de crédits


Tahiti, le 15 mai 2024 - C’est à l’occasion de l’étude du dossier de prêt d’un de leurs adhérents, que l’association Te tia ara et l’université de la Polynésie française ont mis le doigt sur une incongruité bien polynésienne, née dans le flou juridique qui s’est installé entre les compétences de l’État, et celle du Pays, à la naissance du statut d’autonomie.

 
En effet, d’un point de vue bancaire, si les prêts accordés par les banques ne souffrent pas de commentaires, les contrats de crédits s’avèrent sans règlementation en Polynésie française. À l’occasion de la souscription d’un crédit dans n’importe quel organisme financier du Fenua, rien n’oblige ces dernières à vous proposer des contrats de crédits.
 
Si, en théorie, l’information a de quoi inquiéter, dans la pratique, les banques, à l’occasion de prêts immobiliers ou de prêts à la consommation informent les clients des différentes dispositions à prendre dans le cas de négociation de prêts. Mais rien ne les y oblige finalement.
 
En effet, en mars 2016, le Conseil d’État considérait dans une de ses décisions que “les règles relatives à l’offre, la formation et l’exécution des contrats de crédit relèvent du Pays en raison de ses compétences en matière de droit civil, et de droit commercial”.

Vide règlementaire depuis 2017

Selon la lecture des spécialistes alors, lesdites règles seraient celles applicables en 2004, au moment de l’entrée en vigueur de la loi organique, à savoir celles inclues dans la loi Scrivener de 1979. Oui, mais alors qu’un consommateur s’agaçait de se voir proposer un crédit supérieur à celui qui lui avait été proposé par la même banque, 8 mois plus tôt et pour le même projet, Te tia ara et l’université et l’Université de la Polynésie française se sont penchés sur la question des contrats de crédits. Et ils ont récemment découvert le pot aux roses.
 
En novembre 2023, la Cour de cassation, saisie par le tribunal de première instance de Papeete, tranchait la question, estimant que depuis mars 2017, après les entrées en vigueur des lois Lagarde puis Hamon, la loi Scrivener ne s’appliquait plus. Et les lois Lagarde et Hamon ne s’appliquant pas au Fenua depuis la séparation des pouvoirs entre l’État et le Pays, la Polynésie française est donc de facto privée de toute base règlementaire concernant les contrats de crédits.
 
Saisi par l’association, le ministre de l’Économie, Tevaiti Pomare, a saisi la Direction générale des affaires économiques en lui demandant de proposer, dans les plus brefs délais, un texte règlementaire pour sécuriser tout ça.

Rédigé par Bertrand PREVOST le Mercredi 15 Mai 2024 à 15:08 | Lu 4944 fois