PAPEETE, le 3 juin 2015 - Une quinzaine de bénévoles branchés high-tech se mobilise pour les enfants de Takaroa. Touchés par le sort des enfants de 10 ou 11 ans forcés à quitter leurs familles, ils veulent créer une salle de classe à distance pour leur permettre de rester dans leur île natale quelques années de plus.
Ils sont 15 professionnels de l'informatique, des réseaux ou de l'enseignement, avec un point commun : ils ont du cœur. Après avoir vu un reportage télévisé sur le sort des enfants de Takaroa, condamnés à l'exil dès la fin de l'école primaire pour aller au collège à Tahiti ou à Manihi, Karl s'est senti obligé de faire quelque chose : "Ca m'a pris au cœur, je ne pouvais pas rester les bras croisés. Je suis parent. Voir des enfants les larmes aux yeux, obligés à quitter leurs familles, ça m'a révolté", nous explique-t-il.
Il y a 10 jours maintenant, ce dirigeant d'une structure importante dans le monde du numérique polynésien envoie un mail à ses contacts, en forme d'appel à la mobilisation : "Je cherche à mener une action collective et citoyenne dans l’objectif de mettre en place un dispositif expérimental de télé-enseignement entre un collège de Tahiti et l’école de Takaroa. (…) C’est peut-être bien loin de nos préoccupations mais ces gamins souffrent véritablement." Une quinzaine de volontaires se mobilise immédiatement, et des entreprises proposent une aide financière.
"À l'arrivée rien à gagner, si ce n'est d'avoir agi"
Pour cet article, il refuse que l'on cite les noms ou les organisations partenaires, car "on n'est pas là pour ça". Il était d'ailleurs très clair dans son appel : "A l'arrivée, rien à gagner (ni reconnaissance, ni couverture médiatique, ni médaille en chocolat) si ce n'est d'avoir agi au lieu d'être un témoin."
Il cherchait des personnes avec du cœur, et il a réussi à en trouver, dans le monde des geeks, des start-up et des chefs d'entreprise. Il a aussi réussi à mobiliser des profs de collège, et un établissement déjà bien équipé pour l'éducation à distance. En dix jours, c'est une performance : dès la semaine prochaine, des lettres d'intention, des promesses de financement, et des réunions techniques pour choisir la solution à expérimenter sont prévues.
Karl nous explique que "relier une classe de sixième de Takaroa c'est une expérience, une façon de tester une solution. Si ça fait ses preuves, au bout d'une année on ne pourra plus l'arrêter. On pourra l'étendre à d'autres classes ou d'autres îles. On est prêts à aller jusqu'au bout."
Trouver des solutions aux problèmes
Les professionnels, habitués aux difficultés techniques de la Polynésie, débordent d'idées pour les résoudre : "Le problème c'est la transmission, le télé-enseignement a besoin de plus gros débit que celui disponible. On est en train de voir si on pourrait dédier quelques capacités satellite à l'expérience. Dans les logiciels que nous étudions, certains pourraient télécharger les cours du jour pendant la nuit, quand les réseaux sont moins utilisés …"
En pratique, si le projet se met en place, il faudra installer sur place une salle de cours avec au moins un ordinateur, un animateur qui pourrait être un parent ou un enseignant à Takaroa, et à Tahiti des profs pour assurer quelques enseignements quotidiens en visioconférence. "On a trouvé trois solutions logicielles possibles, il faudra choisir la plus adaptée à Takaroa en terme de débit. Il y a aussi la plateforme MOOC (Massive Open Online Course, formation en ligne ouverte à tous), et enfin l'organisation pédagogique à valider."
Quand les professionnels de l'informatique se motivent pour faire avancer les choses, il n'y a pas à dire, ça décoiffe. Pour le plus grand bien des enfants de Polynésie…
Ils sont 15 professionnels de l'informatique, des réseaux ou de l'enseignement, avec un point commun : ils ont du cœur. Après avoir vu un reportage télévisé sur le sort des enfants de Takaroa, condamnés à l'exil dès la fin de l'école primaire pour aller au collège à Tahiti ou à Manihi, Karl s'est senti obligé de faire quelque chose : "Ca m'a pris au cœur, je ne pouvais pas rester les bras croisés. Je suis parent. Voir des enfants les larmes aux yeux, obligés à quitter leurs familles, ça m'a révolté", nous explique-t-il.
Il y a 10 jours maintenant, ce dirigeant d'une structure importante dans le monde du numérique polynésien envoie un mail à ses contacts, en forme d'appel à la mobilisation : "Je cherche à mener une action collective et citoyenne dans l’objectif de mettre en place un dispositif expérimental de télé-enseignement entre un collège de Tahiti et l’école de Takaroa. (…) C’est peut-être bien loin de nos préoccupations mais ces gamins souffrent véritablement." Une quinzaine de volontaires se mobilise immédiatement, et des entreprises proposent une aide financière.
"À l'arrivée rien à gagner, si ce n'est d'avoir agi"
Pour cet article, il refuse que l'on cite les noms ou les organisations partenaires, car "on n'est pas là pour ça". Il était d'ailleurs très clair dans son appel : "A l'arrivée, rien à gagner (ni reconnaissance, ni couverture médiatique, ni médaille en chocolat) si ce n'est d'avoir agi au lieu d'être un témoin."
Il cherchait des personnes avec du cœur, et il a réussi à en trouver, dans le monde des geeks, des start-up et des chefs d'entreprise. Il a aussi réussi à mobiliser des profs de collège, et un établissement déjà bien équipé pour l'éducation à distance. En dix jours, c'est une performance : dès la semaine prochaine, des lettres d'intention, des promesses de financement, et des réunions techniques pour choisir la solution à expérimenter sont prévues.
Karl nous explique que "relier une classe de sixième de Takaroa c'est une expérience, une façon de tester une solution. Si ça fait ses preuves, au bout d'une année on ne pourra plus l'arrêter. On pourra l'étendre à d'autres classes ou d'autres îles. On est prêts à aller jusqu'au bout."
Trouver des solutions aux problèmes
Les professionnels, habitués aux difficultés techniques de la Polynésie, débordent d'idées pour les résoudre : "Le problème c'est la transmission, le télé-enseignement a besoin de plus gros débit que celui disponible. On est en train de voir si on pourrait dédier quelques capacités satellite à l'expérience. Dans les logiciels que nous étudions, certains pourraient télécharger les cours du jour pendant la nuit, quand les réseaux sont moins utilisés …"
En pratique, si le projet se met en place, il faudra installer sur place une salle de cours avec au moins un ordinateur, un animateur qui pourrait être un parent ou un enseignant à Takaroa, et à Tahiti des profs pour assurer quelques enseignements quotidiens en visioconférence. "On a trouvé trois solutions logicielles possibles, il faudra choisir la plus adaptée à Takaroa en terme de débit. Il y a aussi la plateforme MOOC (Massive Open Online Course, formation en ligne ouverte à tous), et enfin l'organisation pédagogique à valider."
Quand les professionnels de l'informatique se motivent pour faire avancer les choses, il n'y a pas à dire, ça décoiffe. Pour le plus grand bien des enfants de Polynésie…
Définir un âge où la séparation est possible
"Le retard scolaire de la Polynésie est l’équivalent d’une génération", indiquait la chambre territoriale des comptes fin 2014 après avoir examiné la politique éducative du Pays. Pour y remédier, la chambre encourageait notamment la création de classes de 6e et de 5e près du domicile des enfants.
La séparation entre les élèves et leurs familles et son caractère plus ou moins précoce a un impact sur les résultats scolaires de l'enfant. Aux Marquises, cette séparation peut avoir lieu avant que les enfants soufflent leur dixième bougie. Le plus souvient, cette séparation survient à l'entrée au collège, vers l'âge de 11-13 ans. La CTC propose donc de définir un "âge-cible, en deçà duquel la séparation sera impossible. L'âge de 14 ans (ou la fin de la 5e) pourrait servir de référence selon la CTC." A partir de cela, "un nouveau déploiement des classes pourrait dès lors être envisagé et priorisé."
Ce redéploiement des classes pourrait être complété, grâce aux progrès de l'école numérique, par le "télé-enseignement, des cours du CNED (Centre national d'enseignement à distance)" et "une organisation de classes virtuelles", notait alors la chambre"
"Le retard scolaire de la Polynésie est l’équivalent d’une génération", indiquait la chambre territoriale des comptes fin 2014 après avoir examiné la politique éducative du Pays. Pour y remédier, la chambre encourageait notamment la création de classes de 6e et de 5e près du domicile des enfants.
La séparation entre les élèves et leurs familles et son caractère plus ou moins précoce a un impact sur les résultats scolaires de l'enfant. Aux Marquises, cette séparation peut avoir lieu avant que les enfants soufflent leur dixième bougie. Le plus souvient, cette séparation survient à l'entrée au collège, vers l'âge de 11-13 ans. La CTC propose donc de définir un "âge-cible, en deçà duquel la séparation sera impossible. L'âge de 14 ans (ou la fin de la 5e) pourrait servir de référence selon la CTC." A partir de cela, "un nouveau déploiement des classes pourrait dès lors être envisagé et priorisé."
Ce redéploiement des classes pourrait être complété, grâce aux progrès de l'école numérique, par le "télé-enseignement, des cours du CNED (Centre national d'enseignement à distance)" et "une organisation de classes virtuelles", notait alors la chambre"
12% des élèves Polynésiens sont scolarisés hors du noyau familial
En juin 2012, l'assemblée de Polynésie avait mandaté une commission d'enquête composée de 13 représentants pour effectuer un travail de diagnostic et d’analyse pour évaluer l’impact de la scolarité qui s’effectue hors du noyau familial. Le rapport de 786 pages avait été rendu public en décembre 2012. Du point de vue de la réussite scolaire, la Commission d’enquête relevait 6 points d’écart à la faveur des élèves qui sont scolarisés en restant dans leur famille. Pour les élèves obligés d’aller dans un autre archipel, ceux qui sont en internat réussissent néanmoins mieux (7 points de plus) que ceux qui ne le sont pas.
Pointée du doigt particulièrement dans ce rapport, la vétusté de certains internats était mise en avant. "Nombreux sont ceux qui ne disposent pas de chambres mais de dortoirs. Le séjour de ces élèves internes n’implique pas uniquement un espace pour dormir. D’autres espaces sont nécessaires et participent aussi à la réussite des enfants, comme une salle de sports ou de détente, un espace de travail et de recherches, de rangement".
L’hébergement en internat exige une participation financière des familles : environ 59 400 Fcfp par an. "Le coût de l’hébergement et l’exigence de l’autonomie des élèves accueillis peuvent constituer des freins pour les familles" constatait le rapport de la Commission d’enquête.
En juin 2012, l'assemblée de Polynésie avait mandaté une commission d'enquête composée de 13 représentants pour effectuer un travail de diagnostic et d’analyse pour évaluer l’impact de la scolarité qui s’effectue hors du noyau familial. Le rapport de 786 pages avait été rendu public en décembre 2012. Du point de vue de la réussite scolaire, la Commission d’enquête relevait 6 points d’écart à la faveur des élèves qui sont scolarisés en restant dans leur famille. Pour les élèves obligés d’aller dans un autre archipel, ceux qui sont en internat réussissent néanmoins mieux (7 points de plus) que ceux qui ne le sont pas.
Pointée du doigt particulièrement dans ce rapport, la vétusté de certains internats était mise en avant. "Nombreux sont ceux qui ne disposent pas de chambres mais de dortoirs. Le séjour de ces élèves internes n’implique pas uniquement un espace pour dormir. D’autres espaces sont nécessaires et participent aussi à la réussite des enfants, comme une salle de sports ou de détente, un espace de travail et de recherches, de rangement".
L’hébergement en internat exige une participation financière des familles : environ 59 400 Fcfp par an. "Le coût de l’hébergement et l’exigence de l’autonomie des élèves accueillis peuvent constituer des freins pour les familles" constatait le rapport de la Commission d’enquête.