Mamoudzou, France | AFP | vendredi 21/04/2023 - Baptisée "Wuambushu", l'opération "secrète" ne l'est plus: la France s'apprête à déclencher dans les prochains jours une série d'interventions policières contre la délinquance et l'immigration illégale à Mayotte, en procédant à des expulsions massives d'étrangers en situation irrégulière et à des destructions de bidonvilles.
- Une opération pas si secrète
Révélée fin février par Le Canard enchaîné, l'opération "Wuambushu", qui peut vouloir dire en mahorais "reprise" comme "poil à gratter", n'avait jamais été officialisée par le gouvernement.
Gérald Darmanin a confirmé vendredi dans une interview au Figaro, puis sur franceinfo, la tenue d'une opération "au long cours", validée par Emmanuel Macron en Conseil de défense, selon une source proche du dossier.
Le ministre de l'Intérieur a démenti un lancement lundi et pour une durée de deux mois, avancé par la presse. "Il n’y a pas un moment où on la commence et un moment où on la termine", a-t-il ajouté, affirmant même que l'opération avait "déjà commencé".
"Il y a 1.800 policiers et gendarmes en ce moment même à Mayotte qui font des opérations de police, qui mettent fin au trafic d'armes, qui mettent fin aux bandes criminelles", dont 60 ont été dénombrées, dit-il.
Au total, plus de 2.500 personnels (forces de l'ordre, agence régionale de santé, justice, réserve sanitaire) sont mobilisés, selon une source proche du dossier.
- L'apogée d'une longue crise migratoire
Mayotte, devenu le 101e département français en 2011, attire chaque année des milliers de migrants, arrivés par la mer en "kwassa kwassa", des embarcations de fortune, de l'île comorienne voisine d'Anjouan, mais également de l'Afrique des Grands Lacs et de plus en plus de Madagascar.
Près de la moitié des 350.000 habitants estimés de Mayotte ne possède pas la nationalité française, selon l'Insee, mais un tiers des étrangers sont nés sur l'île.
Ces migrants clandestins, installés dans des quartiers particulièrement insalubres, des "bangas" en proie à la violence et aux trafics, vivent pour la plupart tranquillement sur l'île, occupant de petits emplois. Les mineurs sont scolarisés.
Mais ils sont aussi accusés par la population et les élus de déséquilibrer le peu d'infrastructures et ressources de l'île et de nourrir un taux de délinquance "hors normes".
Plusieurs opérations dites de "décasage", parfois réalisées par des habitants de l'île eux-mêmes constitués en milices, ont déjà eu lieu depuis 2016.
Gérald Darmanin a dit souhaiter la destruction de "1.000 bangas dans les deux mois". "Nous prendrons le temps nécessaire (...) toujours sur autorisation du juge, car il va de soi que nous relogeons les personnes conformément au droit", a-t-il affirmé.
- Inquiétude des défenseurs des droits humains
Plusieurs organisations, dont la Ligue des droits de l'homme, se sont inquiétées que "la France place ainsi des mineurs dans des situations de vulnérabilité et de danger intolérables".
La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) a demandé à Beauvau de renoncer à l'opération, face aux risques d'"aggravation des fractures et des tensions sociales" à Mayotte et d'"atteinte au respect des droits fondamentaux des personnes étrangères".
"Les actions annoncées (...) m'inquiètent tout particulièrement", a aussi déclaré la Défenseure des droits Claire Hédon, qui a annoncé la présence de quatre de ses délégués sur place.
"On ne peut pas respecter les droits des personnes en les considérant comme une masse informe", a fait valoir à l'AFP Flor Tercero, la responsable des Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), une délégation de robes noires mandatées par des barreaux métropolitains pour mener une mission d'observation de l'opération.
- Tensions diplomatiques avec les Comores
Les autorités des Comores, qui revendiquent toujours leur souveraineté sur Mayotte, restée française après l'indépendance des Comores en 1974, sont vent debout contre cette opération.
"Nous n'avons pas les moyens d'absorber cette violence fabriquée de Mayotte par l'Etat français. Une situation aussi complexe ne peut se régler de manière aussi déroutante", a déploré mardi Anissi Chamsidine, le gouverneur d'Anjouan, l'île comorienne la plus proche de Mayotte.
Le président comorien Azali Assoumani, qui assure depuis février la présidence de l'Union africaine, a déclaré à l'AFP espérer "que l'opération sera annulée", en reconnaissant "n'avoir pas les moyens de (la) stopper par la force".
"Les Comores n'entendent pas accueillir des expulsés issus de l'opération", a prévenu vendredi le porte-parole du gouvernement comorien, Houmed Msaidie.
D'intenses tractations ont eu lieu ces dernières semaines entre Moroni et Paris, laissant planer la possibilité d'un accord de dernière minute. Gérald Darmanin a même assuré vendredi que la France "travaille très bien" avec l'Union des comores et que tous les "délinquants" comoriens arrêtés à Mayotte "sont reconduits aux Comores".
- Une opération pas si secrète
Révélée fin février par Le Canard enchaîné, l'opération "Wuambushu", qui peut vouloir dire en mahorais "reprise" comme "poil à gratter", n'avait jamais été officialisée par le gouvernement.
Gérald Darmanin a confirmé vendredi dans une interview au Figaro, puis sur franceinfo, la tenue d'une opération "au long cours", validée par Emmanuel Macron en Conseil de défense, selon une source proche du dossier.
Le ministre de l'Intérieur a démenti un lancement lundi et pour une durée de deux mois, avancé par la presse. "Il n’y a pas un moment où on la commence et un moment où on la termine", a-t-il ajouté, affirmant même que l'opération avait "déjà commencé".
"Il y a 1.800 policiers et gendarmes en ce moment même à Mayotte qui font des opérations de police, qui mettent fin au trafic d'armes, qui mettent fin aux bandes criminelles", dont 60 ont été dénombrées, dit-il.
Au total, plus de 2.500 personnels (forces de l'ordre, agence régionale de santé, justice, réserve sanitaire) sont mobilisés, selon une source proche du dossier.
- L'apogée d'une longue crise migratoire
Mayotte, devenu le 101e département français en 2011, attire chaque année des milliers de migrants, arrivés par la mer en "kwassa kwassa", des embarcations de fortune, de l'île comorienne voisine d'Anjouan, mais également de l'Afrique des Grands Lacs et de plus en plus de Madagascar.
Près de la moitié des 350.000 habitants estimés de Mayotte ne possède pas la nationalité française, selon l'Insee, mais un tiers des étrangers sont nés sur l'île.
Ces migrants clandestins, installés dans des quartiers particulièrement insalubres, des "bangas" en proie à la violence et aux trafics, vivent pour la plupart tranquillement sur l'île, occupant de petits emplois. Les mineurs sont scolarisés.
Mais ils sont aussi accusés par la population et les élus de déséquilibrer le peu d'infrastructures et ressources de l'île et de nourrir un taux de délinquance "hors normes".
Plusieurs opérations dites de "décasage", parfois réalisées par des habitants de l'île eux-mêmes constitués en milices, ont déjà eu lieu depuis 2016.
Gérald Darmanin a dit souhaiter la destruction de "1.000 bangas dans les deux mois". "Nous prendrons le temps nécessaire (...) toujours sur autorisation du juge, car il va de soi que nous relogeons les personnes conformément au droit", a-t-il affirmé.
- Inquiétude des défenseurs des droits humains
Plusieurs organisations, dont la Ligue des droits de l'homme, se sont inquiétées que "la France place ainsi des mineurs dans des situations de vulnérabilité et de danger intolérables".
La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) a demandé à Beauvau de renoncer à l'opération, face aux risques d'"aggravation des fractures et des tensions sociales" à Mayotte et d'"atteinte au respect des droits fondamentaux des personnes étrangères".
"Les actions annoncées (...) m'inquiètent tout particulièrement", a aussi déclaré la Défenseure des droits Claire Hédon, qui a annoncé la présence de quatre de ses délégués sur place.
"On ne peut pas respecter les droits des personnes en les considérant comme une masse informe", a fait valoir à l'AFP Flor Tercero, la responsable des Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), une délégation de robes noires mandatées par des barreaux métropolitains pour mener une mission d'observation de l'opération.
- Tensions diplomatiques avec les Comores
Les autorités des Comores, qui revendiquent toujours leur souveraineté sur Mayotte, restée française après l'indépendance des Comores en 1974, sont vent debout contre cette opération.
"Nous n'avons pas les moyens d'absorber cette violence fabriquée de Mayotte par l'Etat français. Une situation aussi complexe ne peut se régler de manière aussi déroutante", a déploré mardi Anissi Chamsidine, le gouverneur d'Anjouan, l'île comorienne la plus proche de Mayotte.
Le président comorien Azali Assoumani, qui assure depuis février la présidence de l'Union africaine, a déclaré à l'AFP espérer "que l'opération sera annulée", en reconnaissant "n'avoir pas les moyens de (la) stopper par la force".
"Les Comores n'entendent pas accueillir des expulsés issus de l'opération", a prévenu vendredi le porte-parole du gouvernement comorien, Houmed Msaidie.
D'intenses tractations ont eu lieu ces dernières semaines entre Moroni et Paris, laissant planer la possibilité d'un accord de dernière minute. Gérald Darmanin a même assuré vendredi que la France "travaille très bien" avec l'Union des comores et que tous les "délinquants" comoriens arrêtés à Mayotte "sont reconduits aux Comores".