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2,4 milliards de francs pour rénover les canalisations à Hitiaa o te Ra


À Tiarei, les travaux devraient démarrer le mois prochain, du PK 26 au PK 31.
À Tiarei, les travaux devraient démarrer le mois prochain, du PK 26 au PK 31.
HITIAA O TE RA, le 16 janvier 2018 - Les 48 communes s'activent pour fournir de l'eau potable à leurs administrés, avant le 31 décembre 2024. À Hitiaa o te Ra, la municipalité se charge de rénover, d'abord, les canalisations. Les travaux se concentreront, dans un premier temps, sur la plaine, puis sur les hauteurs.

Répondre aux exigences du Code général des collectivités territoriales (CGCT) n'est pas de tout repos pour les tāvana des 48 communes en Polynésie française.

En effet, depuis l'instauration du statut d'autonomie en 2004, les compétences en termes d'eau potable, de traitement des déchets et de l'assainissement des eaux usées ont été transférées aux communes.

Au départ, les communes devaient se mettre aux normes avant le 31 décembre 2019. "En 2014, les maires avaient demandé à modifier et à repousser la date butoir", explique Frédérix Teriiatetoofa, vice-président du Syndicat pour la promotion des communes (SPC-PF). Un texte qui a été adopté en 2015 à l'Assemblée nationale. La date a donc été repoussée de cinq ans, et arrivera à terme le 31 décembre 2024.

Aujourd'hui, plusieurs communes sont aux normes, tandis que d'autres peinent à y arriver. Le challenge est de taille, mais les tāvana savent qu'ils n'ont pas le choix.

PRIORITÉ À HITIAA O TE RA : REFAIRE LES CANALISATIONS

La commune de Hitiaa o te Ra s'étend sur une distance de 22 km entre Papenoo et Hitiaa, avec un peu plus de 10 000 habitants.

Aujourd'hui, cette commune ne fournit pas encore de l'eau potable à ses administrés. Le conseil municipal préfère rénover, tout d'abord ces canalisations, vieilles de 60 ans. Et la facture est salée, puisque, selon le maire, Dauphin Domingo, "il faudrait 2,4 milliards de francs" pour cette opération.

Une somme importante qui est octroyée par tranches au travers du contrat de projet Etat/Pays/Communes. Et à Hitiaa o te Ra, les travaux se concentrent, tout d'abord, sur la plaine, avant de se pencher sur les hauteurs, et là, la tâche s'annonce un peu plus difficile.

Selon Dauphin Domingo, les canalisations longeant la plaine de Papenoo ont été rénovées, "il ne reste que le plateau d'Atohei, ça représente en gros 200 millions de francs". Sur Mahaena, une grande partie a également été faite. À Tiarei, les travaux devraient démarrer le mois prochain, du PK 26 au PK 31. En revanche, sur Hitiaa, les travaux ne devraient pas démarrer de sitôt. "Il faut trouver 1,4 milliard de francs".

Surtout qu'à Hitiaa o te Ra, des dépenses plombent déjà la commune. "Nous avons deux pompes sur Hitiaa o te ra, une à Papenoo et une à Tiarei… financées par la commune. Tous les mois, nous payons 2,4 millions de francs pour l'électricité, ce qui fait 24 millions par an. Il faut savoir que seuls 60 % des habitants payent leur consommation en eau, ce qui fait 30 millions de francs environ."

SENSIBILISER LES HABITANTS

Fournir de l'eau potable, signifie bien évidemment, le paiement de la quantité d'eau utilisée, au travers d'un compteur. Et c'est là que le bât blesse pour les maires. "Ils nous obligent à rendre l'eau potable et à taxer nos populations", lâche Dauphin Domingo.

Et la meilleure approche pour éviter les confrontations, c'est la sensibilisation. Des rencontres ont d'ailleurs eu lieu avec les habitants de la commune. Et le premier magistrat met aussi en avant, les factures impayées. "Il faut que nous mettions 45 millions tous les ans dans le service hydraulique, ça veut dire que c'est à la population de payer, en honorant leurs factures. Si non, comment ce service va fonctionner ? Il y a le personnel à payer, les diverses réparations à faire… On ne peut plus piocher dans le budget principal pour aider les budgets annexes. Ce n'est pas évident".

Les impayés de la commune s'élèveraient à près de 100 millions de francs, et 900 familles ne seraient pas encore inscrites sur les registres communaux.

Autre moyen qui pourrait faire avancer les projets en eau potable de Hitiaa o te Ra, la récupération des centimes additionnels. "On aimerait bien percevoir les taxes des sociétés qui travaillent dans nos vallées. Tout ce que nous percevons, ce sont les fonds que nous reversent les patentés dans notre commune, les magasins… parce que les sièges des sociétés qui travaillent dans nos vallées se trouvent ailleurs, soit à Papeete ou à Faa'a. Ce n'est pas juste. Le pays et l'Etat connaissent ce problème, mais ils ferment leurs yeux. Et nous nous ne percevons que 7 millions de francs. Nous ne demandons pas la totalité mais une partie, cet argent aidera la commune", indique le tāvana.

Malgré tout, Dauphin Domingo assure qu'il mettra tout en œuvre pour que sa commune fournisse de l'eau potable avant les prochaines élections municipales, en 2020, du moins, sur la plus grande partie du territoire.

Sur Tahiti, d'autres communes ne fournissent pas encore d'eau potable, on note par exemple, la Presqu'île ou encore les communes de Teva i Uta et de Paea. Sur Moorea, plusieurs communes associées ne sont pas aux normes également.

Certaines communes ont d'ailleurs choisi des prestataires pour se mettre aux normes, tels que la Polynésienne de l'Eau qui gère quatre communes (Papeete, Pirae, Moorea et Bora Bora).


Dauphin Domingo
Maire de Hitiaa o te ra


"L’État n'a pas à nous dicter notre conduite"


"Je pense qu'il y a bien plus important encore à nettoyer que l'eau. On prend l'exemple de Moruroa, qui a été bombardé par les essais nucléaire, où plusieurs personnes ont été intoxiquées. C'est ce qu'il faudrait nettoyer en priorité. L’État n'a pas à nous dicter notre conduite. Qu'en pensera la population ? Surtout qu'elle paie déjà l'eau aujourd'hui. Donc, demain, si l'eau est potable, il y aura d'autres choses en plus à payer. Le coût de la vie a augmenté en Polynésie, et si on rajoute l'eau, que va devenir la population qui peine à vivre, je ne parle pas de ceux qui ne font rien, mais bien de ceux qui se débrouillent dans leur vie. Que devons-nous faire pour ces familles, il faudra qu'on leur coupe leur eau ?"


31 communes travaillent avec le SPC pour l'adduction en eau potable.
31 communes travaillent avec le SPC pour l'adduction en eau potable.
Que se passe-t-il du côté du SPC-PF ?

Le Syndicat pour la promotion des communes accompagne aujourd'hui 31 communes adhérentes à la compétence "eau potable", dont 17 communes des Tuamotu, les Gambier, Teva i Uta, les Raromatai, les Australes, Fatu Hiva, Ua Huka et Ua Pou.

"Le SPC les accompagne techniquement, c'est-à-dire dans la préparation des dossiers techniques, des demandes de financement auprès des bailleurs de fonds (DDC, contrat de projet, le DETR, le FIP…). Et sur la partie financement, nous montons tous les dossiers. Il y a aussi toute la partie études, suivi des travaux, réception des travaux, et il y a aussi le projet "Pape" qui consiste à accompagner les communes dans la gestion de cette ressource. Si on devait comparer la situation à 2014, eh bien, aujourd'hui, au niveau des Tuamotu, il nous reste deux communes à finir le schéma directeur (Napuka et Nukutavake) et à faire la demande de financement. Tout le reste, ils ont leur schéma directeur, certains ont fini. D'autres sont en cours de réalisation", souligne Frédérix Teriiatetoofa, vice-président du SPC et délégataire de l'eau.
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Frédérix Teriiatetoofa
Vice-président du SPC délégataire de l'eau


Comment se débrouillent les communes des Tuamotu ?
"Aux Tuamotu, la situation est différente par rapport aux îles hautes. Nos anciens ont déjà mis en place des dispositifs qui fonctionnent parfaitement, et nous les avons améliorés, en rajoutant des systèmes de traitement d'eau.
Il y a à peu près 5 atolls qui ont un système de désalinisation par osmoseur inverse (Anaa, Tatakoto, Reao, Takapoto et Hao). Mais ce sont des systèmes de production d'eau potable qui coûtent cher à la collectivité. Après tout dépend de la capacité de production. Maintenant, nous avons mis un nouveau dispositif aux Tuamotu, il s'agit de mettre des points d'eau, où tu as un système de traitement pour potabiliser cette eau, et en même temps, il n'y a pas d'obligation à la population pour venir acheter. De plus, aux Tuamotu, les gens ne paieront l'eau potable que pour la consommation alimentaire. Alors qu'à Tahiti, 80 % de l'eau potable part dans les toilettes, dans le jardin, sur les voitures, sur la route… Alors qu'aux Tuamotu, on va acheter de l'eau potable pour la consommation alimentaire, et la citerne pour tout le reste. L'autre innovation est de procéder à la modification de la loi de pays pour permettre à l'eau de citerne et l'eau de mer d'être conformes à la loi de pays. Maintenant, nous sommes en train de régulariser la situation avec la participation du ministère de la Santé, de la Direction de la Santé, le gouvernement est favorable ainsi que l'assemblée territoriale. En plus de cela, c'est une adaptation de la loi à la situation."


Quelles sont les craintes des maires ?
"Le fait de faire payer l'eau, c'est la première angoisse d'un tāvana. Comment faire payer l'eau ? À Tahiti, on a cette culture de payer l'eau, qu'elle ait été potable ou pas, ça ne change pas du tout. Par rapport aux Tuamotu, c'est différent. Premièrement, les foyers sont dotés de citernes personnelles. Maintenant, on vient leur imposer le fait de consommer de l'eau potable et qu'elle est payante. Et c'est cette vision que les maires ont du mal à faire comprendre aux habitants."

Quel constat dressez-vous aujourd'hui ?
"Nous sommes, depuis 2014, en train de sensibiliser les communes à tendre vers cette obligation règlementaire, même si elle nous a été imposée. Nous n'avons plus le choix, puisque le statut de 2004, a transféré ces compétences aux communes, et c'est devenu une règlementation obligatoire. Il n'a pas été possible de le faire lors de la première date butoir, et je pense qu'en 2025, 80 % des communes de la Polynésie française produiront de l'eau potable. Il y a un article au niveau de la loi de pays qui oblige les communes à fournir de l'eau potable, sans quoi, il y a une pénalité qui sera mise en place, à hauteur de 100 000 francs. Le contrôle doit se faire une fois par mois par le centre d'hygiène."





le Mardi 16 Janvier 2018 à 18:06 | Lu 2077 fois