Le P-dg d'Air Tahiti Nui, Michel Monvoisin, souligne que la ligne à destination du Japon est une "préoccupation".
PAPEETE, le 10 janvier 2019. Avec l'arrivée de ses trois derniers Boeing en 2019, la compagnie au tiare va vivre une "année de transition". Michel Monvoisin, P-dg d'Air Tahiti Nui, fait le point après une année 2018 où le paysage aérien polynésien a été bouleversé. Interview.
Le premier Dreamliner est en service depuis novembre dernier. Quel bilan faites-vous de ces premières semaines d'exploitation ?
Les retours sont extrêmement bons. On est passé d'un avion conçu il y a 30 ans à un avion dernière génération. Les retours de toutes les classes sont excellents. Nous avons ajouté une classe avec la premium. On a pris le parti de monter en gamme et d'avoir moins de sièges. Cette cabine est configurée en sept de front (2-3-2) au lieu de neuf de front (3-3-3) en classe Economy. Dans la classe Premium, il y a plus d'espace et le fauteuil est différent.
Il y a un marché concernant la classe premium. Comme on fait un ultra long courrier, il y a des gens qui cherchent du confort sans pouvoir se payer la classe affaires. Cela marche plutôt bien. L'idée était d'inciter les passagers éco à passer en classe premium. En fonction des routes, elle est 20 à 30 % plus chère que le class Economy. L'écart de prix n'est pas énorme.
C'est grâce à ce confort que vous voulez vous différencier des autres compagnies ?
Cela nous permet d'augmenter la recette unitaire. Le problème de la surcapacité en sièges c'est que cela dégrade la recette unitaire. On vend tous moins cher donc le prix au siège se dégrade. L'intérêt d'avoir des classe premium ou business est de se rattraper sur le prix moyen.
Des changements sur les lignes sont-ils prévus en 2019 ?
2019 est une année, on le savait même avant que la concurrence arrive, qui sera très difficile car c'est l'année de la transition. On change complètement d'avions. On passe d'une philosophie Airbus à une philosophie Boeing. C'est un gros travail pour tout le monde. On se concentre là-dessus. Il n'est pas question pour le moment d'ouverture de routes. Aujourd'hui, la priorité c'est la transition. 2019 est consacrée à cette transition.
Pendant un an, on aura deux secteurs : Airbus et Boeing. C'est compliqué. Un pilote ne peut pas passer de l'un à l'autre. Chaque fois qu'on qualifie un pilote sur des vols Boeing, il ne peut pas revenir sur Airbus ensuite.
Et, en 2020, des changements seront-ils au programme ? Vous travaillez déjà dessus…
Oui bien sûr. On fera les annonces le moment venu.
Vous avez déposé une demande d’agrément à la Direction générale des finances publiques (DGFIP) pour une aide en défiscalisation Lodeom sur l’acquisition de deux Boeing 787-900 Dreamliner. Cet agrément est "de droit (…) dès lors que les conditions sont remplies", indiquait en novembre le ministre de l’Action et des Comptes publics.
Nous avons transmis le dossier final le 24 décembre au bureau des agréments. Je pense qu'ils doivent être dessus. On attend la réponse pour le mois de janvier.
Êtes-vous confiant ?
Si on ne l'a pas, il faudra nous dire pourquoi. On pouvait se poser des questions mais il y a eu deux messages rassurants qui ont été envoyés. Le premier c'est qu'Air Calin l'a eue (Air Calin a choisi de renouveler sa flotte avec des A330-900 néo, NDLR). Le deuxième message vient du ministre du Budget, M. Gérald Darmanin. Il a été clair. Il a dit : "s'ils y ont droit, ils y ont droit". C'était en réponse à une question d'une députée réunionnaise.
Le contexte politique aujourd'hui n'est plus le même qu'en 2015. Pensez-vous qu'avoir privilégié un constructeur aéronautique américain et non-européen est toujours le meilleur choix ?
On ne pouvait pas faire meilleur choix que cet avion. On n'aurait pas eu cet avion, cela aurait été catastrophique pour nous. C'est vraiment l'avion qu'il fallait. Sur la ligne Los Angeles-Paris, on économise 30 tonnes de carburant. C'est un avion extrêmement économe et qui pollue beaucoup moins que les autres.
A quelle date arriveront les trois prochains avions ?
La date exacte est toujours connue un mois avant. L'avion Tupaia arrive le 17 janvier à Papeete. Il sera mis en service le 1er février. Il sera sur la ligne du Japon et sera mis aussi sur Paris à partir du 26 mars. Le troisième avion, le Bora Bora, arrivera fin mai. Le quatrième est prévu pour août.
Air Tahiti Nui gère désormais les activités de ventes et de marketing de Latam, ainsi que la commercialisation et les relations clients dans la région. Quels sont vos liens avec Latam aujourd'hui ?
On est GSA, agent général de vente de Latam à Tahiti. Latam est un des piliers de l'alliance Oneworld. On est assez proche de cette alliance. Il y a des discussions depuis longtemps avec Latam. Latam souffre sur la route vers l'île de Pâques car les remplissages ne sont pas très bons. Ils ont cherché des économies pour maintenir la ligne.
Il n'y aura pas de partenariat plus poussé ?
Peut-être un jour. Ce type de discussions prend du temps. Latam a beaucoup grossi. Ils sont passés de Lan Chile, à Lan puis Latam.
L'arrivée de la concurrence sur la ligne Paris-Papeete et Los Angeles-Papeete a eu aussi des effets indirects. Comment se porte la ligne Papeete-Narita ?
Très mal. Le problème n'est pas de faire venir les touristes. Le problème c'est de leur trouver un lit pour dormir. La pire des lignes à cause de l'arrivée de la concurrence c'est la ligne vers Narita. C'est là qu'on souffre le plus.
Vous la maintenez quand même ?
Si on la ferme, on va susciter le mécontentement des hôteliers. On la maintient mais elle est sur la table. On en discute. On a rencontré les hôteliers et le gouvernement. C'est une préoccupation. Mais pour l'instant bien sûr qu'on la maintient. C'est quand même une ligne vers le quatrième marché, le marché asiatique.
Les tour-opérateurs japonais ont dit clairement les deux problèmes majeurs : aucun hôtel de Polynésie ne leur donne d'allotement (l'allotement est la quantité de nuitées attribuées par un hôtel à un voyagiste, NDLR). Les Japonais réservent trois mois à l'avance tandis que les Américains le font six mois à l'avance donc ils n'ont plus de place. Il y a aussi un problème de tarif. On est 35 % plus cher que Hawaii et les Maldives.
Air Tahiti Nui ne peut pas à elle seule financer cette route à perte tous les ans. D'autant qu'on ne peut plus faire de péréquation. On faisait comme Air Tahiti. La route de Los Angeles, la plus rentable pour nous nous, servait à financer le Japon.
Le premier Dreamliner est en service depuis novembre dernier. Quel bilan faites-vous de ces premières semaines d'exploitation ?
Les retours sont extrêmement bons. On est passé d'un avion conçu il y a 30 ans à un avion dernière génération. Les retours de toutes les classes sont excellents. Nous avons ajouté une classe avec la premium. On a pris le parti de monter en gamme et d'avoir moins de sièges. Cette cabine est configurée en sept de front (2-3-2) au lieu de neuf de front (3-3-3) en classe Economy. Dans la classe Premium, il y a plus d'espace et le fauteuil est différent.
Il y a un marché concernant la classe premium. Comme on fait un ultra long courrier, il y a des gens qui cherchent du confort sans pouvoir se payer la classe affaires. Cela marche plutôt bien. L'idée était d'inciter les passagers éco à passer en classe premium. En fonction des routes, elle est 20 à 30 % plus chère que le class Economy. L'écart de prix n'est pas énorme.
C'est grâce à ce confort que vous voulez vous différencier des autres compagnies ?
Cela nous permet d'augmenter la recette unitaire. Le problème de la surcapacité en sièges c'est que cela dégrade la recette unitaire. On vend tous moins cher donc le prix au siège se dégrade. L'intérêt d'avoir des classe premium ou business est de se rattraper sur le prix moyen.
Des changements sur les lignes sont-ils prévus en 2019 ?
2019 est une année, on le savait même avant que la concurrence arrive, qui sera très difficile car c'est l'année de la transition. On change complètement d'avions. On passe d'une philosophie Airbus à une philosophie Boeing. C'est un gros travail pour tout le monde. On se concentre là-dessus. Il n'est pas question pour le moment d'ouverture de routes. Aujourd'hui, la priorité c'est la transition. 2019 est consacrée à cette transition.
Pendant un an, on aura deux secteurs : Airbus et Boeing. C'est compliqué. Un pilote ne peut pas passer de l'un à l'autre. Chaque fois qu'on qualifie un pilote sur des vols Boeing, il ne peut pas revenir sur Airbus ensuite.
Et, en 2020, des changements seront-ils au programme ? Vous travaillez déjà dessus…
Oui bien sûr. On fera les annonces le moment venu.
Vous avez déposé une demande d’agrément à la Direction générale des finances publiques (DGFIP) pour une aide en défiscalisation Lodeom sur l’acquisition de deux Boeing 787-900 Dreamliner. Cet agrément est "de droit (…) dès lors que les conditions sont remplies", indiquait en novembre le ministre de l’Action et des Comptes publics.
Nous avons transmis le dossier final le 24 décembre au bureau des agréments. Je pense qu'ils doivent être dessus. On attend la réponse pour le mois de janvier.
Êtes-vous confiant ?
Si on ne l'a pas, il faudra nous dire pourquoi. On pouvait se poser des questions mais il y a eu deux messages rassurants qui ont été envoyés. Le premier c'est qu'Air Calin l'a eue (Air Calin a choisi de renouveler sa flotte avec des A330-900 néo, NDLR). Le deuxième message vient du ministre du Budget, M. Gérald Darmanin. Il a été clair. Il a dit : "s'ils y ont droit, ils y ont droit". C'était en réponse à une question d'une députée réunionnaise.
Le contexte politique aujourd'hui n'est plus le même qu'en 2015. Pensez-vous qu'avoir privilégié un constructeur aéronautique américain et non-européen est toujours le meilleur choix ?
On ne pouvait pas faire meilleur choix que cet avion. On n'aurait pas eu cet avion, cela aurait été catastrophique pour nous. C'est vraiment l'avion qu'il fallait. Sur la ligne Los Angeles-Paris, on économise 30 tonnes de carburant. C'est un avion extrêmement économe et qui pollue beaucoup moins que les autres.
A quelle date arriveront les trois prochains avions ?
La date exacte est toujours connue un mois avant. L'avion Tupaia arrive le 17 janvier à Papeete. Il sera mis en service le 1er février. Il sera sur la ligne du Japon et sera mis aussi sur Paris à partir du 26 mars. Le troisième avion, le Bora Bora, arrivera fin mai. Le quatrième est prévu pour août.
Air Tahiti Nui gère désormais les activités de ventes et de marketing de Latam, ainsi que la commercialisation et les relations clients dans la région. Quels sont vos liens avec Latam aujourd'hui ?
On est GSA, agent général de vente de Latam à Tahiti. Latam est un des piliers de l'alliance Oneworld. On est assez proche de cette alliance. Il y a des discussions depuis longtemps avec Latam. Latam souffre sur la route vers l'île de Pâques car les remplissages ne sont pas très bons. Ils ont cherché des économies pour maintenir la ligne.
Il n'y aura pas de partenariat plus poussé ?
Peut-être un jour. Ce type de discussions prend du temps. Latam a beaucoup grossi. Ils sont passés de Lan Chile, à Lan puis Latam.
L'arrivée de la concurrence sur la ligne Paris-Papeete et Los Angeles-Papeete a eu aussi des effets indirects. Comment se porte la ligne Papeete-Narita ?
Très mal. Le problème n'est pas de faire venir les touristes. Le problème c'est de leur trouver un lit pour dormir. La pire des lignes à cause de l'arrivée de la concurrence c'est la ligne vers Narita. C'est là qu'on souffre le plus.
Vous la maintenez quand même ?
Si on la ferme, on va susciter le mécontentement des hôteliers. On la maintient mais elle est sur la table. On en discute. On a rencontré les hôteliers et le gouvernement. C'est une préoccupation. Mais pour l'instant bien sûr qu'on la maintient. C'est quand même une ligne vers le quatrième marché, le marché asiatique.
Les tour-opérateurs japonais ont dit clairement les deux problèmes majeurs : aucun hôtel de Polynésie ne leur donne d'allotement (l'allotement est la quantité de nuitées attribuées par un hôtel à un voyagiste, NDLR). Les Japonais réservent trois mois à l'avance tandis que les Américains le font six mois à l'avance donc ils n'ont plus de place. Il y a aussi un problème de tarif. On est 35 % plus cher que Hawaii et les Maldives.
Air Tahiti Nui ne peut pas à elle seule financer cette route à perte tous les ans. D'autant qu'on ne peut plus faire de péréquation. On faisait comme Air Tahiti. La route de Los Angeles, la plus rentable pour nous nous, servait à financer le Japon.
"Heureusement qu'on a fait ce changement d'avions"
Depuis plus d'un an, avec l'arrivée de French Bee, les voyageurs assistent à une guerre des prix. Est-elle tenable pour les quatre compagnies (Air Tahiti Nui, Air France, French Bee et United Airlines) ?
L'avenir nous le dira. Mais il y a une surcapacité. S'il y avait une croissance possible, cela ne serait pas un problème. Mais on n'a pas les capacités d'accueil. C'est bien de mettre des sièges mais si en face il n'y a pas de réceptif… Il y a plein de choses qui rentrent en compte. L'aéroport par exemple. Ce n'est pas glorieux en ce moment. On fait descendre les passagers sous la pluie avec des parapluies les pieds dans l'eau.
En mars 2016, Aéroport de Tahiti avait présenté son projet de travaux dans le hall et sur le parking. Les travaux devaient commencer en 2017 et se finir en 2019 et permettre à l'aéroport de répondre aux standards internationaux de qualité. Mais début 2017, la cour administrative d'appel de Paris a annulé la concession de 2010 qui attribuait l'exploitation de l'aéroport de Faa'a à la société Aéroport de Tahiti (ADT). En attendant que le nouveau concessionnaire soit désigné, les grands travaux ont été suspendus. Cela vous pose-t-il problème?
Evidemment. Il n'y a aucun investissement fait sur la plateforme. Je vous invite à aller le samedi soir à l'aéroport. A la haute saison, il y aura quatre avions avec United.
Que vont devenir vos quatre Airbus ? Allez-vous pouvoir les vendre ?
Ah y est, on a signé un contrat. Ils seront vendus à un broker. C'est un acheteur pour les quatre. Je suppose qu'ils seront démontés et vendus en pièces détachées.
Ce type d'avion est très difficile à vendre. Ce sont de bons avions mais ils consomment tellement de carburant.
L'avenir nous le dira. Mais il y a une surcapacité. S'il y avait une croissance possible, cela ne serait pas un problème. Mais on n'a pas les capacités d'accueil. C'est bien de mettre des sièges mais si en face il n'y a pas de réceptif… Il y a plein de choses qui rentrent en compte. L'aéroport par exemple. Ce n'est pas glorieux en ce moment. On fait descendre les passagers sous la pluie avec des parapluies les pieds dans l'eau.
En mars 2016, Aéroport de Tahiti avait présenté son projet de travaux dans le hall et sur le parking. Les travaux devaient commencer en 2017 et se finir en 2019 et permettre à l'aéroport de répondre aux standards internationaux de qualité. Mais début 2017, la cour administrative d'appel de Paris a annulé la concession de 2010 qui attribuait l'exploitation de l'aéroport de Faa'a à la société Aéroport de Tahiti (ADT). En attendant que le nouveau concessionnaire soit désigné, les grands travaux ont été suspendus. Cela vous pose-t-il problème?
Evidemment. Il n'y a aucun investissement fait sur la plateforme. Je vous invite à aller le samedi soir à l'aéroport. A la haute saison, il y aura quatre avions avec United.
Que vont devenir vos quatre Airbus ? Allez-vous pouvoir les vendre ?
Ah y est, on a signé un contrat. Ils seront vendus à un broker. C'est un acheteur pour les quatre. Je suppose qu'ils seront démontés et vendus en pièces détachées.
Ce type d'avion est très difficile à vendre. Ce sont de bons avions mais ils consomment tellement de carburant.
En 2015, quand vous avez choisi de renouveler la flotte avec Boeing, vous ne connaissiez pas les bouleversements prévus avec l'arrivé des nouvelles compagnies. Que se serait-il passé si cette commande avait eu lieu quelques mois plus tard ?
Heureusement qu'on a ces avions. On aurait aimé que la concurrence arrive encore plus tard car on sera complétement opérationnel seulement en 2020. Dans un an, on n'aura plus le poids des Airbus dans la flotte. 2020 sera plus confortable. Heureusement qu'on a fait ce changement d'avions. Si on était resté avec les A 340, un quadri réacteur, avec des avions qui ont 20 ans d'âge et qui consomment énormément, on aurait été dans une situation de handicap majeur.
Comment vont se répartir les économies en carburant?
Elles vont déjà nous aider à tenir face à la concurrence. La guerre des prix est là. Les économies en carburant cela nous aide. D'ailleurs plus le carburant augmente, plus on a l'avantage face aux concurrents puisque eux ont des avions qui consomment plus que les nôtres. Le carburant représente entre 30 et 40% des charges pour une compagnie.
Notre deuxième avantage c'est le produit. Je pense honnêtement qu'on a le meilleur produit aujourd'hui.
Heureusement qu'on a ces avions. On aurait aimé que la concurrence arrive encore plus tard car on sera complétement opérationnel seulement en 2020. Dans un an, on n'aura plus le poids des Airbus dans la flotte. 2020 sera plus confortable. Heureusement qu'on a fait ce changement d'avions. Si on était resté avec les A 340, un quadri réacteur, avec des avions qui ont 20 ans d'âge et qui consomment énormément, on aurait été dans une situation de handicap majeur.
Comment vont se répartir les économies en carburant?
Elles vont déjà nous aider à tenir face à la concurrence. La guerre des prix est là. Les économies en carburant cela nous aide. D'ailleurs plus le carburant augmente, plus on a l'avantage face aux concurrents puisque eux ont des avions qui consomment plus que les nôtres. Le carburant représente entre 30 et 40% des charges pour une compagnie.
Notre deuxième avantage c'est le produit. Je pense honnêtement qu'on a le meilleur produit aujourd'hui.