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15 ans de prison pour le viol de sa sœur


Tahiti, le 17 juin 2023 – Au terme de deux jours de procès devant la cour d'assises, l'homme de 29 ans jugé pour le viol de sa sœur mineure a été condamné vendredi à 15 ans de réclusion criminelle. Une peine plus sévère que les 12 ans de prison demandés par l'avocat général. 
 
L'homme de 29 ans jugé depuis jeudi par la cour d'assises pour un viol aggravé commis sous la menace d'un couteau sur sa sœur mineure a été condamné vendredi soir à quinze ans de réclusion criminelle. Une peine assortie d'un suivi sociojudiciaire de cinq ans avec injonction de soins, obligation de travailler et interdiction d'entrer en contact avec la victime. 
 
Au deuxième et dernier jour de son procès, l'accusé a continué de nier avoir violé sa sœur après être entré dans sa chambre et l'avoir menacée avec un couteau de cuisine. Alors qu'il avait reconnu un rapport sexuel consenti à plusieurs reprises durant la procédure, le jeune homme a affirmé qu'il s'était "mal exprimé" en se lamentant sur son sort et notamment sur les trois années passées en détention provisoire. Appelée à témoigner à la barre, l'experte psychiatre qui l'avait examiné a dressé un tableau navrant de l'accusé, un homme "égocentrique" sans "empathie" qui ne présente "aucun élément de personnalité favorable" et à propos duquel une injonction de soins serait "illusoire". Affirmant qu'il ne supportait "aucune contrainte" et qu'il n'avait "aucune aptitude à faire des projets", le médecin a conclu que l'on ne pouvait "rien faire pour lui" hormis l'emprisonner. Face à cette analyse quelque peu étrange pour un psychiatre, la perplexité était palpable au sein de la cour. 
 
Loi du silence
 
Autre expert invité à s'exprimer : le psychologue qui avait rencontré la victime. Tel que cela avait déjà été fait au premier jour du procès, le praticien a rappelé que la jeune femme, qui avait 15 ans au moment des faits, avait eu une vie cabossée. "Elle a été placée dans neuf familles d'accueil différentes et a subi de nombreuses agressions sexuelles. Elle ne parlait pas de ses abus car elle pensait qu'elle ne serait pas crue et elle a finalement compris qu'il fallait parler pour mettre fin à ce cycle infernal". Après avoir souligné la grande capacité de "résilience" de la victime, l'expert a toutefois affirmé qu'elle tentait de "banaliser" ce qu'elle avait subi alors que cela "reviendrait" forcément un jour. 
 
Cette "résilience" apparente chez la jeune femme a également été soulignée par son conseil, Me Smaïn Bennouar, pour lequel "le crime le plus douloureux est celui qui se déroule dans l'intimité puisque c'est parole contre parole". Se référant aux dénégations de l'accusé à la barre et à son absence totale d'empathie à l'encontre de sa sœur qu'il traite comme un "animal", l'avocat a demandé à la cour de replacer sa cliente à sa place de victime et non de menteuse tel que cela avait été avancé par l'accusé. 
 
Discours alambiqués
 
Au cours d'implacables réquisitions, l'avocat général a ensuite opposé les "dénégations", les "voltefaces", la "confusion" et les discours "alambiqués" de l'accusé aux éléments objectifs du dossier, à la constance des déclarations de la victime dont la vie se résume à une "quête affective éperdue". Avant de requérir 12 ans de prison ferme, le représentant du ministère public a exprimé son désaccord face à l'expertise rendue par la psychiatre sur l'accusé en assurant qu'elle ne ferait pas ce métier si elle pensait que les gens étaient "irrécupérables". Elle a également évoqué la vie de l'accusé, un individu qui "fait avec ses armes qui sont faibles", qui n'est pas "né avec les bonnes cartes en main" même si cela "n'enlève rien à sa dangerosité". 
 
Constitué pour la défense d'un accusé fragile sur le plan psychologique, Me Sylvain Fromaigeat a plaidé la relaxe en rappelant lui aussi que dans ce dossier, c'était "parole contre parole" alors que son client avait tout de suite été traité comme un "coupable et un violeur". Lors de sa plaidoirie, l'avocat a porté une lourde charge contre la psychiatre qui "fait payer un travail à des gens alors qu'elle pense ne rien pouvoir changer pour eux". "Ce sont des propos inacceptables. Bien sûr que la rédemption et les remords existent. C'est la première fois que j'entends de telles choses de la bouche d'un psychiatre. Si on l'écoute, on se dit qu'il est heureux que la peine de mort n'existe plus. On ne joue pas à la marchande, nous parlons ici d'un être humain qui a eu une vie catastrophique."
 
Chantage au suicide
 
Invité à s'exprimer avant que les jurés ne se retirent pour délibérer comme il en est d'usage, l'accusé a affirmé dans un certain état d'excitation qu'il avait dit la vérité et qu'il était victime d'un complot. L'homme a assuré à la présidente qu'il se pendrait si jamais il était condamné à 12 ans de prison. "C'est toi qui vois", a-t-il conclu en s'adressant à elle. Après en avoir délibéré, les jurés ont donc outrepassé les réquisitions du parquet général en condamnant le jeune homme à quinze ans de réclusion criminelle.
 

Rédigé par Garance Colbert le Samedi 17 Juin 2023 à 17:09 | Lu 2286 fois