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12 sans-abris cuisinent leur formation


Tahiti, le 8 juillet 2024 - C'était le top départ, ce lundi au centre Te Vai-ete du père Christophe, du lancement officiel de la formation aux métiers de la restauration destinée à 12 sans-abris. Pendant un an, ils vont pouvoir allier théorie en revoyant leurs fondamentaux et pratique en passant aux fourneaux. Le père Christophe espère “faire mieux que Jésus” et emmener ces 12 “oiseaux” jusqu'au bout de ce projet visant à les sortir de l'exclusion.

 
Malgré un week-end plombé par des résultats électoraux insatisfaisants pour le Tavini, le président Brotherson et plusieurs de ses ministres avaient le sourire jusqu'aux oreilles ce lundi matin au centre Te Vai-ete du père Christophe à Mama’o. Il faut dire qu'un an après l'ouverture de ce centre qui a déjà servi 41 000 repas, le projet pilote de formation aux métiers de la restauration se concrétise lui aussi après un an de travail.
 
“Un travail de longue haleine et ça a été compliqué administrativement parce que nos textes n'étaient pas adaptés à ce genre d'initiatives”, a expliqué Moetai Brotherson qui précise que les douze SDF qui prennent part à la formation bénéficient là des “derniers CAE” avant qu'ils ne soient réformés. L'idée ensuite est de les orienter vers un dispositif de SISAE (schéma d'insertion sociale par l'activité économique).
 
Former plutôt qu'assister
 
Ce projet est porté par plusieurs ministères comme celui de l'Emploi qui octroie donc là les derniers CAE, des Solidarités pour la prise en charge du coût des formations, ou encore de l'Éducation qui chapeaute le Campus des métiers et des qualifications (CMQ) dont la devise pourrait être “donner la canne à pêche plutôt que le poisson”. Mais le père Christophe, qui a toujours de la suite dans les idées, n'a pas manqué de solliciter d'emblée le président du Pays concernant le “petit terrain” qui est juste à côté de son centre. “Les autres ministres, ça tombe bien que vous soyez là aussi, j'ai d'autres choses à vous demander”, a-t-il lancé face à un auditoire hilare. Mais ce sont aussi différents partenaires privés et des associations qui sont à la manœuvre depuis un an pour arriver à mettre tout ça en musique.
 
Une “chance” pour ces 12 sans-abris très motivés
 
“On ne peut avancer que si on travaille ensemble”, s'est réjoui le père Christophe qui espère “faire mieux que Jésus” en parvenant à mener jusqu'au terme de la formation ses 12 “oiseaux” comme il aime à les appeler, “sans Judas”, autrement dit sans en perdre un seul en chemin. Comme lui a répondu Moetai Brotherson, “si ce sont tes oiseaux, c'est qu'ici c'est un nid accueillant et réconfortant dont il va falloir qu'ils s'envolent, et c'est justement l'objectif de cette formation”. Pour Pierre, 38 ans, “c'est une expérience de découvrir la cuisine” et il entend bien “tenir jusqu'au bout”, nous a-t-il confié, son but étant “d'avoir un métier et de sortir de la misère”.
 
Teata, quant à lui, a 49 ans et pour lui, c'est “une chance” qui lui est donnée aujourd'hui qu'il ne faut surtout pas gâcher. “On est tous émus. C'est grâce au père Christophe qui nous a amenés sur cette voie, sinon on serait encore tous à la rue”, a-t-il expliqué. Jusqu'à présent, ses talents culinaires se résumaient aux “lentilles punu pua'atoro” et il est ravi de pouvoir s'essayer à “la gastronomie française”.
 
De la théorie à la pratique
 
Et même l'aspect théorique, qui sera dispensé sur les six premiers mois de la formation, ne leur fait pas peur. “On va y aller, on va s'accrocher”, disent-ils. Réapprendre les fondamentaux comme les maths ou le français peut paraître rébarbatif, mais ces matières seront adaptées au secteur de la restauration.
 
Le côté pratique ensuite se fera avec un “snack d'application” implanté dans le centre à Mama’o et qui sera le terrain de jeu de nos 12 stagiaires cuistots en herbe. Une partie du prix des repas sera reversée aux familles dans le besoin. Un projet pilote qui “réjouit” Moetai Brotherson dont le gouvernement “est déjà en train d'anticiper les formations suivantes”.


Rédigé par Stéphanie Delorme le Lundi 8 Juillet 2024 à 16:01 | Lu 1747 fois